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y avait, de plus, un vaisseau de la compagnie d'Hudson, portant vingt-cinq canons de neuf, mouillé à son embouchure. Il se décida à pénétrer par la rivière Nelson, quoique ses troupes eussent à faire de ce côté une marche d'environ quatre lieues; mais il y gagnait l'avantage de rendre inutiles les batteries placées sur la rivière des Hayes.

On arriva, le 21 au soir, à l'embouchure de la rivière Nelson, avec deux cent cinquante hommes de troupes, les mortiers, les canons, et des vivres pour huit jours, afin de ne pas avoir besoin de recourir aux vaisseaux, avec lesquels il était très-difficile de communiquer. La Pérouse donna ordre aux chaloupes de mouiller par trois brasses à l'entrée de la rivière, et il s'avança dans son canot avec son second de Langle, le commandant des troupes de débarquement Rostaing, et le capitaine du génie Monneron, pour sonder la rivière et en visiter les bords, où il craignait que les ennemis n'eussent préparé quelques moyens

de défense.

Cette opération prouva que la rive était inabordable; les plus petits canots ne pouvaient approcher qu'à environ cent toises, et le fond qui restait à parcourir était de vase molle. Il jugea donc à propos d'attendre le jour et de rester à l'ancre: mais la marée perdant beaucoup plus qu'on ne l'avait présumé, les chaloupes restèrent à sec à trois heures du matin.

Irritées par cet obstacle, bien loin d'en être découragées, toutes les troupes débarquèrent; et après avoir fait un quart de lieue dans la boue jusqu'à mi-jambe, elles arrivèrent enfin sur un pré, où elles se rangèrent en bataille : de là elles marchèrent vers un bois, où l'on comptait trouver un sentier sec qui conduirait au fort. On n'en découvrit aucun, et toute la journée fut employée à la recherche de chemins qui n'existaient point.

La Pérouse ordonna au capitaine du génie Monneron d'en tracer un à la boussole au milieu du bois. Ce travail extrêmement pénible exécuté, servit à faire connaître qu'il y avait deux lieues de marais à traverser, pendant lesquelles on enfoncerait souvent dans la vase jusqu'aux genoux. Un coup de vent qui survint dans la nuit, força la Pérouse inquiet à rejoindre ses bâtimens. Il se rendit sur le rivage; mais, la tempête continuant, il ne put s'embarquer. Il profita d'un intervalle, et parvint le lendemain à son bord, une heure avant un second coup de vent. Un officier parti en même temps que lui fit naufrage : il eut, ainsi que les gens de son équipage, le bonheur de gagner la terre; mais ils ne purent revenir à bord qu'au bout de trois jours, nus et mourant de faim. L'Engageante et l'Astrée perdirent deux ancres chacune, dans ce second coup de vent. 1

Cependant les troupes arrivèrent devant le fort le 24 au matin, après une marche des plus pénibles, et il fut rendu à la première sommation. La Pérouse fit détruire le fort, et donna l'ordre aux troupes de se rembarquer sur-le-champ.

Cet ordre fut contrarié par un nouveau coup de vent, qui fit courir les plus grands dangers à l'Engageante; sa troisième ancre cassa, ainsi que la barre du gouvernail, et sa chaloupe fut emportée. Le Sceptre perdit aussi la sienne, son canot et une ancre.

Enfin le beau temps revint, et les troupes se rembarquèrent. La Pérouse, ayant à bord les gouverneurs des forts du Prince de Wales et d'York, mit à la voile pour s'éloigner de

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ces parages, livrés aux glaces et aux tempêtes, où des succès militaires obtenus sans éprouver la moindre résistance avaient été précédés de tant de peines, de périls et de fatigues.

Si la Pérouse, comme militaire, fut obligé, pour se conformer à des ordres rigoureux, de détruire les possessions de nos ennemis, il n'oublia pas en même temps les égards qu'on doit au malheur. Ayant su qu'à son approche, des Anglais avaient fui dans les bois, et que son départ, vu la destruction des établissemens, les exposait à mourir de faim, et à tomber sans défense entre les mains des sauvages, il eut l'humanité de leur laisser des vivres et des armes.

Est-il à ce sujet un éloge plus flatteur que cet ayeu sincère d'un marin anglais, dans sa relation d'un voyage à Botany-Bay? <<< On doit << se rappeler avec reconnaissance, en An<<< gleterre sur-tout, cet homme humain et << généreux, pour la conduite qu'il a tenue <<< lorsque l'ordre fut donné de détruire notre << établissement de la baie d'Hudson, dans le << cours de la dernière guerre. »

Après un témoignage aussi juste et aussi

vrai, et lorsque l'Angleterre a si bien mérité des amis des sciences et des arts par son empressement à publier les résultats des voyages de découvertes qu'elle a ordonnés, aurons-nous à reprocher à un autre militaire anglais d'avoir manqué à ses engagemens envers la Pérouse?

Le gouverneur Hearn avait fait, en 1772, un voyage par terre, vers le nord, en partant du fort Churchill dans la baie d'Hudson, voyage dont on attend les détails avec impatience; le journal manuscrit en fut trouvé par la Pérouse dans les papiers de ce gouverneur, qui insista pour qu'il lui fût laissé comme sa propriété particulière. Ce voyageayant été fait néanmoins par ordre de la compagnie d'Hudson dans la vue d'acquérir des connaissances sur la partie du nord de l'Amérique, le journal pouvait bien être censé appartenir à cette compagnie, et par conséquent être dévolu au vainqueur : cependant la Pérouse céda par bonté aux instances du gouverneur Hearn; il lui rendit le manuscrit, mais à la condition expresse de le faire imprimer et publier dès qu'il serait de retour en Angleterre. Cette condition ne paraît point

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