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chez laquelle ils se manifestaient tellement, qu'on voyait souvent son ventre être aussi fortement agité en différens endroits que s'il eût contenu deux ou trois enfans; outre cela, le ventre était volumineux, et le sein aussi gros que si elle eût été près d'accoucher; ce qui dura l'espace de près de huit ans (1). Cet état ne doit-il pas se rapporter à la fausse grossesse nerveuse dont nous avons déjà parlé ?

L'impulsion donnée à la matrice par le coït suffit, disent MM. Girard et Baudelocque, pour faire naître des signes de grossesse, quoiqu'il n'y ait pas eu absorption de sperme par cet organe. Voici à cet égard le résultat des observations recueillies tant sur la femme que sur différens animaux :

1° Une petite chienne, qui avait deja mis bas plusieurs portées, fut couverte. Son ventre grossit, ses mamelles devinrent plus volumineuses, et on voyait dans l'abdomen des mouvemens prononcés; au bout de quelques mois elle fit des efforts comme pour accoucher. Le ventre s'affaissa, ses mamelles se remplirent de lait; cette chienne poussait des cris comme pour appeler ses petits; cet état dura quatre Jours.

2 Une chatte, déjà plusieurs fois mère éprouva absolument les mêmes symptômes de gestation, et ne mit bas aucun petit,

3° Une vache saillie par un taureau à Ecully, près Lyon, en imposa par l'accroissement de son ventre, jusqu'au huitième mois de la ges

(1) Euvres de Mauriceau, tom. 1, p. 114.

tation. Cette prétendue gestation disparut du soir au lendemain ; la vache semblait demander son veau; on en trouva un dans le voisinage qu'on lui donna à nourrir.

4° Une femme, quelque temps après une première couche, se soupçonna enceinte. Ses seins s'engorgèrent, fournirent une matière laiteuse; elle sentait dans le ventre des mouvemens semblables à ceux d'un enfant; mais tous les mois elle avait ses règles. Elle éprouva au dixième ou onzième mois de sa prétendue grossesse quelques douleurs que des bains dissipèrent en même temps que la grosseur du ventre et les autres signes de grossesse. Un an après, elle fit un second enfant.

3 Une jeune demoiselle se croyant enceinte déclara son état à sa famille qui fit poursuivre le jeune homme à qui elle avait prodigué ses faveurs. Un procès fut intenté d'après l'avis confirmatif de grossesse donné par un chirurgien. Six bains pris à l'époque du neuvième mois firent disparaître tous les symptômes qu'on avait attribués à la grossesse.

6 Mêmes symptômes, mêmes succès par des bains, chez une dame de trente ans.

M. Baudelocque assure avoir observé également au moins une vingtaine de faits semblables, avec tous les phénomènes d'une grossesse ordinaire; et il résulte des recherches de ces praticiens les signes suivans auxquels on peut reconnaître cette fausse grossesse :

1o La matrice, chez quelques femmes, est au-dessous de son volume naturel; chez d'autres, elle est un peu plus considérable ;

mais on a peine à la sentir en pressant au-dessus

du pubis.

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2o Le museau de tanche a la forme, l'étendue et la position qu'il a hors le temps de la conception.

3o Les règles manquent entièrement chez les unes, et sont médiocres chez les autres.

4° Chez toutes, le ventre se développe graduellement, mais chez les unes il est tendu comme dans le météorisme intestinal; chez les autres, il est mou, flexible, et la femme n'éprouve au toucher aucune impression douloureuse.

5o Chez toutes, les seins deviennent plus volumineux, et il en découle le plus souvent une humeur laiteuse.

6o Cet état subsiste chez les unes pendant plusieurs années, chez d'autres il ne se soutient pas au-delà du neuvième mois (1). .

Fausses gros

S. 295. Les fausses grossesses produites par un amas d'eau, d'air, d'hydatides, de sang ou de sesses maladiglaires, ne sont pas moins suceptibles d'induire ves. en erreur que celles dont nous venons de parler; nous avons déjà eu occasion d'en citer quelques exemples; mais Mauriceau, qui dit avoir vu plus de deux cents femmes qui l'ont consulté à ce sujet, nous a conservé particulièrement l'histoire de la présidente de Nesmond, qui fut jugée grosse pendant plus d'un an par plusieurs médecins, chirurgiens et

(1) Journ.'de méd. de M. Corvisart, premier volume, pag. 471.

sages-femmes, et qui se trouva délivrée par l'écoulement de quelques eaux; celui d'une marchande de bois, tellement persuadée de sa grossesse, qu'elle avait fait de grands préparatifs pour ses couches, et sans aucun résultat. Il n'est aucun homme de l'art un peu versé dans la pratique qui n'ait eu occasion d'observer de pareils phénomènes.

Comme nous l'avons déjà insinué, la matrice suit ici le même développement que dans la vraie grossesse ; mais l'on ne découvre point par le toucher de mouvement d'enfant, quoique souvent lafemme assure avoir senti bouger.

Si c'est un amas d'eau, la matrice poussée sur le bout du doigt se trouve pesante, et l'on distingue à travers son tissu une fluctuation plus ou moins profonde, bien différente de la sensation que fait éprouver le ballottement du

fœtus.

Si c'est de l'air, loin de sentir au bout du doigt une pesanteur, on trouve au contraire que la matrice a toute la légèreté d'un ballon sans aucun mouvement intérieur. D'ailleurs la femme est très-souvent sujette à une émission involontaire de vents par les parties sexuelles. Il faut surtout joindre à ces signes, qui seuls ne suffiraient pas, tout l'ensemble des indices rationnels : le ventre est déjà si volumineux au troisième ou au quatrième mois, qu'on croirait que la grossesse est de sept mois; puis il n'est pas aussi rond que dans la vraie grossesse, il est mou presque également partout, et le nombril est presque toujours retiré en dedans; 2° ces fausses grossesses arrivent ordinairement aux filles ou femmes

ou pour

qui ne sont pas bien réglées, soit pour la
quantité, soit pour la qualité du flux menstruel,
le temps auquel il doit avoir lieu;
on les observe très-souvent dans les femmes
de trente-cinq à quarante ans, à cause que
c'est là l'époque où cette évacuation pério-
dique commence à devenir moins régulière
3° ces fausses grossesses maladives sont accom-
pagnées d'un grand nombre d'incommodités
qui vont en augmentant, au lieu que celles de
la vraie grossesse diminuent à mesure que la
femme s'approche du terme. Le visage est jaune,
pâle, plombé ; le corps s'amaigrit, et il
y a
divers autres symptômes de cachexie qui ne
s'observent pas ordinairement dans la grossesse.

Suites trompeuses de la

sesse.

§. 296. La fausse grossesse, en se terminant, faisse, à peu de chose près, les mêmes traces fausse que celles produites par un véritable accouchement; et de cette similitude trompeuse peuvent quelquefois naître des méprises funestes dans la recherche des délits; nouveau motif pour engager les gens de l'art à s'appesantir sur le perfectionnement des signes caractéristiques de l'une et de l'autre grossesse.

Les deux genres de fausses grossesses que nous avons désignées, dépendant, l'un, de l'union des sexes, qui peut être souvent illégitime et vicieuse, l'autre, des désordres involontaires de l'économie animale, doivent être bien observés: on ne saurait trop s'attacher à les distinguer, soit pour faire triompher l'innocence injustement accusée, soit pour aider les Ibis protectrices des mœurs dans la juste ré

gros

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