Dès lors que le rappel de cette famille présente des chances contre la sûreté et la tranquillité du pays, M. Hervé croit que l'on ne doit pas hésiter à s'y refuser. M. Limperani a demandé où étoient la Vendée et le Faubourg-Saint-Germain de cette famille; mais ils seront partout où se trouveront des ennemis du gouvernement actuel. M. le général Bertrand ne conçoit pas que l'on traite comme la famille des Capets, qui a été trois fois expulsée de la France, celle d'un héros qui ne fut renversé que par l'étranger. Il demande le renvoi des pétitions au conseil des ministres, et termine par son acclamation accoutumée : Liberté illimitée de la presse. Le premier et le troisième objets de ces pétititions sont repoussés par l'ordre du jour à une grande majorité. La chambre ordonne, à une foible majorité, le renvoi au conseil des ministres de la demande relative au dépôt des cendres de Buonaparte et de son fils sous la colonne de la place Vendôme. M. le garde des sceaux présente le projet de loi sur la juridiction consulaire, adopté par la chambre des pairs. M. Salverte développe sa proposition, tendant à abolir complètement les majorats et à autoriser la vente des biens qui en proviennent. La chambre n'est pas en uombre pour commencer la délibération à ce sujet. Le 24, un messager de la chambre des pairs apporte la proposition de loi sur les effets de la séparation de corps. Cette proposition est renvoyée dans les burcaux pour la nomination d'une commission. M. le président tire au sort le renouvellement mensuel des bureaux. On reprend la discussion de la proposition de M. Salverte, relative à la vente des biens provenant de majorats. M. Jaubert soutient que la proposition de M. Parant que l'on a adoptée est suffisante et que la nouvelle porteroit préjudice au trésor. M. Salverte prétend le contraire. M. le ministre des finances explique comment la mesure seroit désavantageuse à l'Etat. La prise en considération est mise aux voix et rejetée. M. de Las - Cazes propose et la chambre prononce l'admission de M. le général Durrieux, élu député des Landes. On passe à la discussion de la proposition de loi de M. Bavoux, tendant à rétablir les dispositions du Code civil sur le divorce en abrogeant la loi du 8 mai 1816. M. Merlin soutient que le rétablissement du divorce seroit un véritable désastre pour la France, qu'il auroit pour résultat de relâcher les liens de famille; qu'il ouvriroit la lice aux passions et aux déréglemens. L'orateur rappelle les effets scandaleux de l'établissement du divorce dans l'ancienne Rome et à la suite de notre révolution. Il fait observer que l'état de nos mœurs et de nos croyances reli gieuses s'opposent à la mesure que l'on propose, et que l'esprit d'immuabilité doit généralement présider au mariage. M. Voisin de Cartempe est d'avis d'ajourner la proposition. C'est une question extrêmement grave qui touche à l'état de la société et à la morale. Il est présumable que la chambre des pairs la repoussera uue troisième fois, et ce n'est pas le cas, à la fin des pouvoirs de la chambre des députés, d'élever encore un conflit à ce sujet. Il convient mieux de laisser cet objet à la nouvelle chambre, qui connoîtra mieux les vœux du pays. D'ailleurs, la proposition sur les effets de la séparation de corps est suffisante, et elle répond au plus puissant argument des partisans du di vorce. M. Coulmann, rapporteur, réplique en peu de mots, et persiste dans l'opinion émise par la commission. On procède au scrutin sur la proposition. Elle est adoptée à la majorité de 191 contre 100. Cette minorité est beaucoup plus forte qu'aux deux votes qui ont eu lieu ces années dernières sur le même objet. Quoi qu'il en soit, la proposition sera envovée à la chambre des pairs. M. Augustin Giraud demande à faire une interpellation aux ministres sur l'état actuel du pays ( vif mouvement de curiosité). La chambre consultée décide qu'il sera entendu. L'orateur dit que la tranquillité a été troublée sur des points du territoire de manière à répandre des inquiétudes dans tous les esprits. Il demande au ministère s'il est en mesure d'opposer une digue aux passions populaires qui veulent le dépasser, autrement il l'adjure de réclamer un appui que la chambre s'empressera sans doute de luí accorder ( mouvemens divers). M. le garde-des-sceaux se lève aussitôt, et déclare que les tentatives d'insurrection récentes ont fixé l'attention serieuse du gouvernement; qu'une délibération du conseil a eu lieu à cet égard, et que dès demain il sera présenté à la chambre un projet de loi contre les associations. Une longue agitation se manifeste; les centres applaudissent, les extrémités murmurent; on entend une voix dire que la comédie est bien jouée. La discussion s'ouvre sur la loi relative aux crédits supplémentaires. M. Mercier se plaint de ce que le ministère a dépassé les sommes qui lui étoient allouées. Il appuie le reproche que la commission a fait aux ministres de n'avoir pas compris dans le budget une foule de dépenses qu'il étoit facile de prévoir. M. Roger dit qu'il faut mettre un terme à l'habitude que prennent les ministres de dépasser les budgets, et il engage la chambre à consacrer de suite ce principe par le rejet de différentes dépenses blâmables. Il s'élève surtout contre les prodigalités du ministre de la guerre. M. Pelet, rapporteur, défend en peu de mots les chapitres des crédits, et croit que la chambre se trouve dans la nécessité de sanctionner les dépenses faites. La chambre n'étant plus en nombre, la séance est levée. AVIS. MM. les Souscripteurs dont l'abonnement expire au 1er mars prochain sont priés de le renouveler promptement, pour ne pas éprouver de retard. Ils voudront bien joindre à leur demande une de leurs adresses imprimées. Prix actuel de l'abonnement : Pour un an, 42 fr.; pour six mois, 21 fr.; pour trois mois, 11 fr. On ne reçoit que les lettres affranchies. Le Gérant, Adrien Le Clere, COURS DES EFFETS PUBLICS. - Bourse du 24 février 1834. Trois pour 100, jouissance du 22 juin, ouvert à 76 fr. 10c., et fermé à 76 fr. 05 c. Cinq pour 100,jouiss du 22 sent, overt à 105 fr. 90 c., et fermé à 105 fr. 65 c. Actions de la Banqu 1775 fr. 000. IMPRIMERIE D'AD. LE CLERI ET COMP JEUDI 27 FÉVRIER 1834. (N° 2226.) Du Système suivi en Prusse contre la Religion catholique. Il est assez curieux de voir comment le gouvernement prussien procède à l'exécution du projet qu'il a formé de renverser la religion catholique en Prusse. Voici quelques fafts recen qui y sont relatifs; il suffira de les exposer, en laissant à chacun à y joindre ses propres réflexions. D'abord, il favorise le plus qu'il lui est possible les mariages mixtes, c'est-à-dire, il fait en sorte que le protestant épouse une catholique, et le catholique une protestante. De ces deux cas quel que soit celui qui a lieu, il en tire avantage pour l'effet qu'il se propose. Dans le premier cas, la loi ordonne que les enfans soient élevés dans la religion du père, par conséquent dans la protestante. Ici le résultat est toujours certain. Si c'est le second cas, il y a liberté d'éducation religieuse, et les enfans seront catholiques ou protestans, selon que le père ou la mère tiendront plus ou moins chacun à sa religion, et très-souvent ils y tiendront plus ou moins, selon que les avantages temporels seront plus ou moins grands dans l'une que dans l'autre. Or, en Prusse on peut avoir de grands talens sans pouvoir obtenir une charge, comme MM. Jarke et Phillips, dont l'un a été appelé à la cour d'Autriche, et l'autre à l'université de Munich. On peut, quoiqu'on s'acquitte avec honneur de ses fonctions, être destitué comme M. Beckedorf (1), et cela seulement pour avoir été franc catholique. Vous pouvez juger par-là en faveur de quelle religion l'on se détermine. Ainsi, qu'un protestant épouse une catholique, ou un catholique une protestante, le résultat de la première union sera toujours du protestantisme, et le résultat de la seconde encore du protestantisme, à peu d'exceptions près. Ceci doit s'entendre des pays où l'un et l'autre cultes sont suivis. Pour les provinces catholiques, on les protestantise aussi, il faut l'avouer, avec beaucoup d'adresse. Le gouvernement y envoie ses employés protestans, officiers civils et militaires, pour y exercer leurs fonctions, et aussi pour y recruter des femmes. (1) M. de Beckedorf a été destitué par suite de sa conversion au catholicisme: : ceux qui embrassent le protestantisme peuvent être, au contraire, sûrs d'obtenir de l'avancement. Tome LXXIX. L' Ami de la Religion. Ces gens du haut étage s'en vont dans les provinces qui leur sont assignées, et, missionnaires du pouvoir, ils se font simples avec le simple, mais riche bourgeois. Ils ne dédaignent pas sa table; ils s'y asseoient au contraire à ses côtés, passent en revue avec lui la cour et la province, louent l'administration, le roi, le ministère : c'est ainsi qu'ils montrent le bras qui les soutient. Le bon bourgeois se laisse éblouir: on seroit heureux de faire alliance avec lui, il en est flatté. On se hasarde de lui demander sa fille en mariage'; il l'accorde quelquefois, à condition que les enfans soient catholiques. Condition en l'air pour l'annuler, les quêteurs de femmes s'en reposent sur la loi, et, faisant souvent place à d'autres, ils s'en retournent avec leur proie, emmenant une jeune épouse dans un pays où elle ne trouve ni pasteur ni autel catholiques, et ses parens apprendront peutêtre par voie indirecte qu'elle a quitté la vie ou sa foi. On en a vu des exemples. Il arrive presque toujours que les prêtres catholiques refusent leur bénédiction nuptiale aux époux qui diffèrent de croyance, à moins qu'ils ne promettent d'élever leurs enfans dans la foi catholique. Mais le ministre protestant les en dédommage autant qu'il peut en leur donnant la sienne, et il est porté de si bonne volonté qu'il agit sans démissoire. Le gouvernement s'est fabriqué une loi contre les récalcitrans, et on lit dans le code, paragraphes 56 et 86, qu'aucun prêtre ne peut refuser les sacremens à qui que ce soit. Il trouve que les évêques n'y ont pas assez égard, et une ordonnance a été faite en vertu de laquelle les évêques devoient donner aux curés pouvoir de bénir les mariages mixtes, sous peine d'être privés de leur traitement : elle étoit déjà à Munster, pour être sans doute de là envoyée à tous les évéchés, quand on apprit qu'un courrier avoit fait en peu d'heures le chemin de Berlin à Munster, et retiré l'ordonnance en cachette. C'est que la révolution française avoit éclaté, et les provinces rhénanes donnoient un peu d'inquiétude : voilà tout le secret de cette révocation. Le souverain Pontife Grégoire XVI, frappé du triste résultat des mariages mixtes, a bien adressé un bref aux évêques prussiens, dans lequel sa Sainteté leur enjoint de défendre à leurs curés et desservans de les bénir sans avoir des époux la promesse que leurs enfans seront catholiques; mais ce bref est resté caché dans les cartons du ministère, par où doit passer tout ce qui vient de Rome pour les évêques, comme tout ce que les évêques envoient à Rome. Le gouvernement croit être dispensé d'en agir autrement, parce qu'il a écrit sur des morceaux de papier qu'il appelle code, qu'il est défendu d'obéir à un chef ecclésiastique étranger, et qu'aucune loi ecclésiastique ne peut être faite sans la permission du gouvernement. (Parag. 117.) Au reste, le roi prêche la doctrine des mariages mixtes comme on doit prêcher toute bonne doctrine: il la prêche d'exemple. Lui-même a épousé la princesse de Leignitz, qui étoit catholique alors : vous m'entendez, elle ne l'est plus ; elle est ce que son mari a voulu. Le prince royal a aussi obtenu une catholique pour épouse, la sœur du roi de Bavière; mais il fallut, pour le bon ordre, qu'on la convertit au protestantisme : ce qui coûta beaucoup, car la princesse avoit de l'attachement pour sa religion. On lui avoit promis un chapelain à la capitale : elle ne le vit qu'une fois l'an. L'exercice de sa religion lui avoit été garanti, et l'heure où elle devoit se rendre au service divin dans la salle étroite et chétive qu'on lui accordoit à cet usage, n'avoit pas plutôt sonné, que les visites, les députations, les affaires de cour, tout affluoit chez elle; on poussa même l'intolérance si loin, qu'elle ne pouvoit se confesser qu'une fois l'an, et en présence d'une dame de cour protestante, qui, à ce qu'on assure, étoit chargée d'exprimer son mécontentement officiel si la princesse se confessoit trop long-temps. Sa piété, laissée ainsi sans alimens, ne pouvoit que s'affoiblir et s'éteindre. Cependant on la trouva encore trop constante, et on lui fit sentir qu'elle avoit le choix de deux infortunes. Elle crut que c'étoit au trépas à briser les liens du mariage: elle abjura. Le roi de Bavière, tout poète qu'il est, ne lui adressa point une épitre de reproches, bien différent en cela du roi de Prusse, qui écrivit à sa sœur une lettre violente, quand, avec son épouse, le duc d'Anhalt Koethen, elle rentra dans le sein de l'Eglise catholique. Le roi protestant interrompit même toute relation avec son beau-frère, et fit savoir, dit-on, à l'Autriche que si elle tenoit à conserver son alliance avec la Prusse, elle étoit invitée à rappeler son chargé d'affaires de la cour du duc. Il est bon de se souvenir ici que la fille du roi a embrassé le schisme grec, du consentement de son père. Voilà comment on entend le mariage en Prusse; on en a fait un moyen puissant de prosélytisme. Nous verrons dans un |