est devenue le siège d'un mouvement intellectuel et religieux des plus importants, où se mêlèrent dans une remarquable proportion l'inspiration prophétique la plus haute et le souci d'une organisation cérémonielle, rituelle et civile, telle que celle dont le Deutéronome nous fournit le premier exemple. A côté du grand anonyme auquel revient la seconde partie du livre d'Esaïe, se place Ezéchiel, avec ses plans de restauration. Nous imaginons plus encore à savoir que, dans les circonstances favorables où se trouvèrent les exilés à partir de l'avènement de Cyrus, il se forma un groupe de légistes auquel revient la plus grande part dans la confection de la loi que les soins combinés d'Esdras et de Néhémie devaient introduire en Judée, dans le courant du cinquième siècle. On sait que la première restauration tentée par Josué et Zorobabel n'avait pas produit les résultats espérés; celle que vint favoriser Néhémie aboutit à une organisation stable. A partir de ce moment, le judaïsme comptait deux centres d'élaboration législative et religieuse, Jésusalem et Babylone, entre lesquels l'échange a dû être constant et fructueux. Nous croyons donc pouvoir attribuer aux sixième, cinquième et quatrième siècles une activité intellectuelle féconde, et c'est à cette époque, sur laquelle l'histoire a fait le silence, que nous attribuons la rédaction définitive du code mosaïque, la composition d'un grand nombre de morceaux prophétiques, l'institution de tous les organes qui assurent le fonctionnement normal et la durée d'une société. De la sorte, quand arriva la conquête d'Alexandre, quand la Judée, disputée pendant quelque temps entre les héritiers du héros macédonien, devint pour un demi-siècle une dépendance paisible de l'Egypte, la civilisation juive était admirablement préparée pour emprunter à la Grèce tous les éléments capables d'alimenter son génie ouvert, en même temps qu'elle commençait en Egypte et en différents lieux une propagande intellectuelle et religieuse des plus fécondes. Dans cette vue, chaque siècle aurait sa part de la grande œuvre qui devait assurer au judaïsme son indestructible vitalité. Dans le sixième siècle (époque de l'exil), la pensée prophétique aurait atteint son plus haut degré de précision et de fermeté; pendant le cinquième, l'organisation législative aurait été tracée par les légistes de Babylone et appliquée au groupe jérusalémite. Dans le quatrième, cette organisation serait passée dans les mœurs en même temps que son influence s'établissait sur tout l'ancien territoire israélite. Dans le troisième, l'esprit juif qu'on se représente à tort comme incapable de s'assimiler la pensée étrangère, aurait commencé cette œuvre étonnante de propagande sans laquelle les succès du christianisme resteraient une énigme. Ces heureux développements ne semblent pas avoir été contrariés par le vasselage où se trouvait la Judée. Le besoin de l'indépendance politique ne devait se faire sentir avec énergie que lorsqu'un pouvoir téméraire porterait atteinte aux principes mêmes de la religion traditionnelle. Toutefois, les compétitions de l'Egypte et de la Syrie jettent une ombre sur l'évolution jusque-là suffisamment paisible de la Judée. Elles n'étaient que le prélude des odieux attentats d'Antiochus Epiphane qui provoquèrent la révolte des Macchabées. - Une des plus intéressantes sources pour cette histoire est le livre de Daniel écrit précisément à la fin de cette période (voyez les articles Exil, Esdras, Ecoles juives, Daniel). IV. LES MACCHABÉES ET LA DOMINATION ROMAINE (Voyez surtout 1 Macchabées, Josèphe; voyez aussi notre article Asmonéens et Herodes (les) par Ed. Stapfer). Depuis la révolte des Macchabées jusqu'à la fondation d'Elia Capitolina sur les ruines de Jérusalem, il s'étend trois siècles singulièrement agités: d'abord l'établissement de l'indépendance nationale sous une dynastie indigène, puis, sous la haute tutelle de Rome, différentes administrations impatiemment supportées, enfin une terrible révolte écrasée dans le sang et une dernière agitation, dont la répression marque, sous Hadrien, la fin suprême de la nationalité juive. Cette époque est marquée par différents phénomènes intellectuels d'une part, l'établissement d'une tradition juridique dont le développement devait aboutir aux Talmuds; de l'autre, l'éclosion de la littérature apocalyptique et philosophique; enfin, et tout principalement, la naissance du christianisme. Nous donnons la liste des principaux événements: Les Macchabées. Révolte des Macchabées, 167; mort de Mattathias, 166; Victoires de Judas Macchabée, 166; Défaite de Lysias à Beth-Sour, 165; le temple reconquis et consacré le 25 kisleu, 164; Judas Macchabée assiège inutilement la citadelle de Jérusalem occupée par une garnison syrienne; il est vaincu à Beth-Zacharia, 163; Judas invoque l'alliance des Romains, 162; Judas succombe à BethZat en combattant contre Bacchidès, 161; Jonathan en lutte contre Bacchidès; la paix conclue, 159; Jonathan s'allie au prétendant Alexandre Balas et devient grand-prêtre, 152; il bat le fils de Démétrius, Démétrius II, à Ptolémaïs, 148; Jonathan s'allie à Démétrius II, 145; ne recevant pas le prix de ses promesses, il passe à Tryphon qui le retient traîtreusement à Ptolémaïs et l'assassine, 144-143; Simon se retourne du côté de Démétrius; il reçoit le titre de grand-prêtre et d'ami du roi, 143; Simon s'empare de Jérusalem, 142; il devient prince héréditaire par la voix populaire, 141; il obtient d'Antiochus Sidétès le droit de frapper monnaie, 140. Simon meurt assassiné par son beau-frère Ptolémée, 135; Jean Hyrcan, grand prêtre et prince des Juifs, 135-106; après de longues luttes, il rompt entièrement les liens de la domination syrienne, s'empare de la Pérée, de la Samarie et de l'Idumée; Aristobule, 106-105; Alexandre Jannée, il conquiert la Philistie jusqu'à Raphia, 105-78; Alexandra occupe le pouvoir avec l'appui du parti pharisien, 78-69; rivalités entre les deux frères Aristobule et Hyrcan. Hyrcan s'attache l'Iduméen Antipater, père d'Hérode. Scaurus tranche le conflit au profit d'Aristobule, 64; Pompée se prononce en faveur d'Hyrcan, 63; Hyrcan, grand-prêtre et prince (nasi); le pays, partagé par Gabinius en cinq districts (Jérusalem, Gadara, Amathus, Jéricho, Séphoris); Crassus pille le temple, 54; César, après la bataille de Pharsale, as 72 sure aux Juifs des privilèges, 48; après l'empoisonnement d'Aristobule, Hyrcan est reconnu par César, 47-40; Antipater (Antipas) empoisonné, 44; son fils Hérode épouse Mariamne, princesse asmonéenne, et devient tétrarque sous Hyrcan en même temps que Phasaël; les Parthes envahissent la Palestine, donnent la couronne à Antigone, fils d'Aristobule; Hyrcan est envoyé en captivité; Antigone se maintient, 40-37; Hérode est déclaré par le sénat roi de Judée, 40. -Les Iduméens. Hérode le Grand, 404 av. J.-C; il appuie Marc Antoine dans sa guerre contre les Parthes, 39; il assiège Jérusalem et s'en empare, 37; il est confirmé dans ses pouvoirs après la bataille d'Actium, 31; il rebâtit le temple, 20-18; il meurt à Kallirhoé, 4 av. J.-C.; son fils Archelaus obtient, avec le titre d'ethnarque, la Judée, la Samarie et l'Idumée; Hérode Antipas avec celui de tétrarque, la Galilée et la Pérée (4 av. J.-C. 39 ap. J.-C.); Philippe, tétrarque de la Batanée, de la Gaulonitide et de la Trachonitide; Salomé reçoit la Philistie et Jéricho; le proconsul Quirinus, 4 après J.-C.; Archélaüs déposé, 6; recensement de Quirinus; institution de procurateurs: révolte de Juda le Gaulonite; procuratorat de Coponius, de MarcusAmbisius et d'Annius Rufus, 7-14; sous le règne de Tibère, Valerius Gratus reste procurateur pendant onze ans ; Ismaël ben Phabi, grandprêtre; bientôt après, Éléazar ben Anan, un an plus tard Simon, fils de Camithos, puis Joseph et Caïphe, 14-36; Pontius - Pilatus, 25-36; Marcellus, 36; le territoire d'Hérode Antipas (Galilée et Pérée), revient à Hérode Agrippa Ier, déjà possesseur des territoires qu'avaient administrés Philippe et Lysanias, 39-40; Claude y ajoute la Judée et la Samarie, de façon qu'il domine sur toute la Palestine, 41-44; révolte de Theudas, étouffée par Cuspius Fadus Cumanus, procurateur, 48; Hérode Agrippa II reçoit avec la principauté de Chalcédoine la surveillance du temple de Jérusalem, 48; il obtient la tétrarchie de Philippe et de Lysanias ainsi que le titre de roi, 52; Félix, procurateur, 52; Néron lui donne une partie de la Galilée, 55; Festus, procurateur, 60; Albinus, procurateur, 63; Gessius Florus, 64; Agrippa II achève le temple, 64; commencement des troubles, 64; Vespasien envoyé par Néron, 66-69; Titus achève la guerre, en prenant et brûlant Jérusalem, 70; révolte de Barcochébas (voyez notre article), 132-135. SOURCES. Le nombre des ouvrages auxquels il conviendrait de renvoyer pour l'histoire du peuple d'Israël est illimité. Nous nous bornerons à citer ceux qui ont fait époque dans la science depuis le renouvellement de cette branche de l'histoire du monde antique par l'application des procédés critiques et dont on est obligé de tenir compte, ainsi que quelques œuvres récentes. Herzfeld, Geschichte des Volkes Israël, 1855-57; Grætz, Geschichte der Juden von den ællesten Zeiten bis auf die Gegenwart (III, 2o éd., 1863); Jost, Geschichte des Judenthums und seiner Secten (1857, 1re partie); Ewald, Geschichte des Volkes Israël (1re éd., Gættingue, 1843 ss., 3 vol.; 3e éd., 7 vol., 1864); Weber et Holtzmann, Geschichte des Volkes Israël und der Entstehung des Christenthums, 1867; Hitzig, Geschichte des Volkes Israël, 1869; Seinecke, Geschichte des Volkes Israël, 1876. L'histoire d'Israël (Geschichte Israëls) de Wellhausen, dont la première partie (1 vol.) a seule paru (Berlin, 1878), est tout particulièrement remarquable par sa critique approfondie des sources et la rigueur de son plan; cf. la partie consacrée aux livres historiques de la Bible dans la 4o éd. de l'Introduction à l'Ancien-Testament de Bleek, due au même savant (Berlin, 1878). Voyez aussi Die geschichtlichen Bücher des alten Testaments de C.-H. Graf, 1866. La Hollande a vu paraître une histoire complète de la religion d'Israël (De Godsdienst van Israël tot den Ondergang van der Joodschen staat), par Kuenen, de Leyde, 2 vol., 1869-1870; c'est un ouvrage capital. Citons encore en hollandais De laatste euwen van Israël's Volksbestaan (les derniers siècles de l'existence du peuple juif), 2 vol., La Haye, 1877-1878, par le D' H. Oort. Pour la France nous citerons en première ligne la Bible, par Ed. Reuss, particulièrement le volume consacré aux livres des Juges, de Samuel et des Rois, intitulé: Histoire des Israelites depuis la conquête de la Palestine jusqu'à l'exil, qui renferme un Résumé de l'histoire des Israelites jusqu'à la destruction de Jérusalem (p. 3-75). On consultera également avec profit la compilation si exacte et si soignée de S. Munk (La Palestine, 1845), bien que le point de vue critique en soit arriéré. L'ouvrage de M. Derenbourg (Essai sur l'histoire et la géographie de la Palestine, Paris, 1867) mérite une mention spéciale. L'historien Josèphe, dont les ouvrages complètent les renseignements fournis. par l'Ancien Testament, a été publié à Paris chez Didot: Fiamii Josephi opera, græce et latine, etc., 2 vol., 1865. M. de Saulcy en a tiré parti dans ses ouvrages intitulés : Les derniers jours de Jérusalem, 1866; Histoire d'Hérode, 1867, et Sept siècles de l'histoire judaïque, 1874. Voyez encore pour l'époque du second temple les chap. iv et VIII-XI du Judaïsme, par E. Havet, Paris, 1878. La partie ancienne de l'histoire d'Israël est traitée d'une façon remarquable dans l'Histoire ancienne des peuples de l'Orient, de Maspero (2e éd., Paris, 1876), et dans la Geschichte des Alterthums (Histoire de l'antiquité) de Max Duncker (4 éd., vol. I-IV, 1874-1877). Nommons enfin la publication toute récente, mais médiocre, de M. Ledrain: Histoire d'Israël (première partie), Paris, 1879. MAURICE VERNES. ISSACHAR [Iss å kà r; Iecxzáp], cinquième fils de Jacob et dont la mère fut Lia (Gen. XXX, 17 ss.; XLVI, 13); il est le chef de la tribu du même nom (Nombr. XXVI, 23; cf. I, 29), qui occupait le district en deçà du Jourdain, entre les tribus de Manassé, d'Ephraïm, d'Asser et de Zabulon (Jos. XIX, 17 ss.). Montagneux à l'Est et au Sud, ce territoire était fertile et très propice à l'agriculture (Gen. XLIX, 14; Deut. XXXIII, 18; cf. Josèphe, Antiq., 15, 1. 22). Il comprenait la riche plaine d'Esdrélon (voyez cet article). Les habitants avaient la réputation d'être des hommes prudents, avisés et pratiques (1 Chron. XII, 32). ITALA. Voyez Versions bibliques. ITALIE (La Réforme en). Observons avant tout que les nombreux documents qui devraient éclairer notre étude commencent à peine à être connus (Venise, Milan, Florence, Londres, Dublin dans le Bristish Museum et le Trinity Collège), que les archives de Rome sont inabordables et qu'à l'exception des récents travaux de MM. K. Benrath, De Leva, E. Comba, E. Böhmer, J. Bonnet, il règne dans les ouvrages protestants et catholiques sur la réforme italienne beaucoup de confusion, beaucoup d'arbitraire et de passion confessionnelle dont on a tous les droits de se défier. D'autre part les comptes rendus des procès du saint-office, qui nous sont connus et qui sont déjà nombreux, sont hérissés de contradictions, d'interrogations captieuses, de suppositions, de soupçons gratuits de la part des inquisiteurs; et de réticences, de réponses à double ou à demi-sens, de négations généreuses, de fausses révélations arrachées par les tortures, de la part des hérétiques sous procès (voyez procès de Carnesecchi, Miscell. di Storia Italiana, t. X, 1870; les procès de P. P. Vergerio, B. Lupetino, publiés par M. Comba, Rivista chritiana, 1873-75; le procès de Morone, Eretici d'Italia de C. Cantù, t. II). Les données sur la vie des réformateurs et des réformés italiens sont souvent enveloppées dans des ténèbres que les faits généraux et connus de l'histoire ne réussissent pas à dissiper. L'activité des principaux réformés. italiens est mieux et plus sûrement connue après leur exil ou aux approches de leur martyre, malgré les insipides déclamations de leurs détracteurs, de C. Cantù surtout, - Les causes qui auraient dû faire naître et favoriser la Réforme en Italie furent pour la plupart précisément celles qui l'anéantirent avec les violences du bras séculier. La corruption multiforme de la cour de Rome vers la fin du quinzième siècle et au commencement du seizième, l'opprobre du ministère catholique qui indignaient les chrétiens du Nord étaient un spectacle trop ordinaire en Italie, pour y produire un mouvement sérieux. Plusieurs hommes de cœur et de génie (Arnaldo de Brescia, Dante, Pétrarque, Valla, Bracciolini, F. Battista di Mantova, Savonarola, Egidius de Viterbe, Pic de la Mirandola) et les conciles de Pise et de Latran avaient demandé la réforme de l'Eglise, mais en vain, comme on le vit trop bien sous le court pontificat d'Adrien VI (1521-22). Accablé par les outrages et l'opposition des créatures de Léon X il renonça successivement à tous ses projets de réforme qu'il avait rêvés pour attirer les luthériens. La renaissance des lettres, plus vivace en Italie que partout ailleurs, qui aurait dù conduire à la renaissance du dogme évangélique l'exégèse sacrée, bien qu'elle ait produit cet effet chez plusieurs pieux érudits qui publièrent des traductions de la Bible et des commentaires (Malermi, Manetti, Giustiniami, Bruccioli, Sancte Pagnini, Sadolet, Clario, Marmocchini Teof. Massimo. Filippo Rustici, etc.) fut au contraire, dans les lettres et dans le clergé italien, la renaissance d'un paganisme incrédule et cynique, railleur et lâche, qui s'installait sans vergogne jusque sur le trône pontifical et qui adorait publiquement par crainte ce qu'il brûlait tous les jours dans ses orgies. La cour de Léon X, «< créé pape par les dieux immortels, » ses débauches, ses propos profanes dans lesquels le Christ est appelé Minerve, le Saint-Esprit |