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L'art. 95 n'est relatif qu'aux prêts sur gage fails à des marchands par des marchands du même lieu, sur des marchandises sorties des magasins des premiers. Le commissionnaire qui a fait à son commellant, sur des marchandises à lui expédiées d'une autre place, des avances destinées au paiement du commissionnaire expéditeur, est subrogé aux droits de ce premier commissionnaire. C. civ., art. 1251.

NUNES C. RABA.

Le sieur Despeaux (de Bayonne) expédie de cette place des marchandises au sieur Raba, résidant à Bordeaux, pour le compte du sieur Nunès, résidant aussi en cette ville.

Le sieur Raba avance sur ces marchandises une somme de 7,998 fr., pour le paiement des frais de transport et des avances faites par le sieur Despeaux (de Bayonne); il vend ensuite les marchandises pour le compte du sieur Nunės.

En cet état de choses, le sieur Nunès tombe en faillite. Les syndics réclament l'intégralité de la vente faite par le sieur Raba. Celui-ci prétend qu'il a le droit de prélever par privilége le montant de ses avances, d'après l'art. 93, C. comm., qui porte Tout commissionnaire qui a fait » des avances sur des marchandises à lui expédiées d'une autre place, pour être vendues pour le compte du commettant, a privilége pour le remboursement de ses avances... »

D

Les syndics répondent que le sieur Nunès, commettant, résidant à Bordeaux ainsi que le sieur Raba, commissionnaire, l'art. 93 cesse d'être applicable; que le privilége ne pourrait être réclamé par le sieur Raba qu'autant qu'il se serait conformé aux dispositions de l'art. 95, C. comm., ainsi conçu: « Tous prêts, avances » ou paiemens qui pourraient être faits sur des » marchandises déposées ou consignées par un » individu résidant dans le lieu du domicile du » commissionnaire, ne donnent privilége au » commissionnaire ou dépositaire qu'autant qu'il » s'est conformé aux dispositions prescrites par » le Code civ., liv. 3, tit. 17, pour les prêts sur »gage ou nantissemens. »

Le 15 mars 1824, jugement du tribunal de commerce de Bordeaux qui refuse le privilége. Appel du sieur Raba.- Le 24 déc. 1824, arrêt infirmatif de la cour royale de Bordeaux, ainsi conçu Attendu, en droit, qu'aux termes de l'art. 93, C. comm., tout commissionnaire qui a fait des avances sur des marchandises à lui expédiées d'une autre place pour être vendues pour le compte d'un commettant a privilége pour le remboursement de ses avances, intérêts et frais, sur la valeur des marchandises, si elles sont à sa disposition dans ses magasins, ou si, avant l'arrivée, il peut constater par un connaissement l'expédition qui lui en est faite;

terminée d'un commettant, il laisse induire qu'il n'a nullement considéré la résidence de ce commettant ;

Qu'il suffit donc, d'après cet article, pour que le privilége soit acquis, qu'il soit constant que les avances ont été faites par le commissionnaire, et que les marchandises ont été expédiées d'une autre place à ce dernier et mises en son pouvoir;

» Que cette dérogation au droit général a été introduite en faveur du commerce; que ce serait aller contre le texte et l'esprit de la loi, de vouloir restreindre ce privilége au cas uniquement où le propriétaire de la marchandise résidait dans un autre lieu que le commissionnaire ;

» Attendu que l'art. 95, même Code, ne déroge point aux dispositions de l'art. 93; qu'il est évident qu'il statue dans un cas tout different, savoir, celui où les contractans sont ainsi que les marchandises dans un même lieu;

» Que c'est ce qui résulte des termes de cet article, dans lesquels rien ne peut faire induire que le législateur a eu en vue les marchandises expédiées d'un autre lieu; que, si telle avait été son intention, il eût dû, cependant, le déclarer d'une manière expresse, puisque le contraire résultait des dispositions de l'article qui précède presque immédiatement; qu'on peut même dire que les expressions dont il s'est servi repoussent cette interprétation, puisqu'en effet l'article parle de marchandises déposées ou consignées; que le dépôt ne peut être fait que de marchandises qui sont dans le lieu mème, et que l'art. 93 ayant déjà statué sur les marchandises consignées d'un autre lieu, le dépôt et la consignation des marchandises dont il est parlé dans celui-ci doivent s'entendre des marchandises qui sont dans le même cas, c'est-àdire qui se trouvent dans le même lieu;

» Que, dans ce dernier cas, la loi a voulu que les contractans fussent obligés de s'astreindre aux règles fixées pour le gage, d'une part, parce que nul obstacle ne pouvait exister à ce qu'on se conformât aux dispositions des art. 2074 et 2075, C. civ.; que, d'autre part, le motif qui a déterminé les dispositions de l'art. 93 ne se trouvait plus dans cette hypothèse, car il est évident que ce motif est pris du désir de faciliter et de favoriser les expéditions de com

merce;

» Attendu, en fait, qu'il est convenu entre les parties que Raba a avancé une somme de 7,998 fr. sur les marchandises qui lui ont été consignées et expédiées de Bayonne; que ces marchandises ont été mises à sa disposition par le connaissement et sont demeurées dans ses magasins jusqu'à la vente qu'il en a faite, pour compte de Nunès, son commettant; que, dèslors, il a privilége sur le prix desdites marchan. dises;

» Attendu, au surplus, qu'il est reconnu que Raba était créancier de Nunės, propriétaire des sucres qui se trouvaient à Bayonne, et que ce

» Que cet article dispose en termes généraux et ne limite pas le privilége au cas où le pro-lui-ci désirait que l'on expédiát à Bordeaux; priétaire de la marchandise et le commissionnaire auraient une résidence différente; qu'il n'a eu nul égard à cette circonstance, qu'il accorde indistinctement le privilége, et qu'en outre, en employant l'expression vague et indé

comm., t. 1er, p. 145, et Bousquet, Dict. des contrais et oblig., vo Commissionnaire, t. 1o, p. 576 et 579.

que Despeaux, consignataire de Bayonne, avait avancé sur ces sucres la somme de 7,998 fr. dont il se remboursa par des traites sur Raba, qui ont été acceptées et payées à leurs échéances; qu'on ne conteste pas que Despeaux ne fût privilégié sur lesdits sucres; qu'ainsi, aux termes du 1er de l'art. 1251, C. civ., Raba a été subrogé de droit au privilége de Despeaux, et, sous ce nouveau rapport, doit être considéré lui-même comme privilégié ;

La cour, faisant droit de l'appel principal Interjeté par Raba du jugement du 15 mars dernier, émendant, déclare que Raba a privilége sur les quatorze barriques de sucre dont il s'agit

au procès. »

Pourvoi en cassation de la part des créanciers Nunės, pour fausse application de l'art. 93, C. comm., et violation des art. 95, même Code, et 2074, C. civ., qui porte que « le gage ne confère un privilége au créancier qu'autant qu'il y a un acte public bu sous seing-privé, dùment enregistré, contenant la déclaration de la somme due, ainsi que l'espèce et la nature des choses remises en gage. »

Les demandeurs soutiennent que, lorsque le commettant et le commissionnaire résident dans le même lieu, le motif qui a dicté l'art. 95, et qui n'est autre que de favoriser les expéditions commerciales, n'existant plus, cet article cesse d'être applicable. En vain, disent-ils, l'arrêt attaqué oppose que l'art. 95 ne peut être invoqué que dans le cas où les contractans et les marchandises sont dans le même lieu. En admettant que l'art. 95 ne soit pas applicable à l'espèce, il sera toujours vrai de dire que la cour de Bordeaux ne pouvait accorder un privilége dans des circonstances qui ne sont pas celles qu'a prévues l'art. 93; que, le privilége créé par cet article n'existant pas, les parties se retrouvaient sous l'empire du droit commun et de l'art. 2074, C. civ.; que la cour royale, en accordant le privilége, quoique le créancier ne se fût pas conformé aux formalités prescrites par cet article, a violé ses dispositions. C'est du reste en ce sens que la question est traitée et résolue par tous les commentateurs. Il ne suf'firait pas, dit M. Pardessus, pour que le consignataire eût un privilége sur les marchandises, qu'elles vinssent d'une ville autre que celle où il a sa résidence, si le commettant à qui le prêt est fait demeurait dans la même ville que jui, parce qu'alors les parties peuvent sans inconvénient se conformer aux règles ordinaires, et qu'aucun motif d'intérêt commercial ne peut les en dispenser (Cours de droit commercial, 1. 4, p. 358, 2 édit.). »

tempe, rapp.; de Vatimesnil, av. gén.; Gui1009 bout, av.

juste application des art. 93 et 94, C. comm.,

« LA COUR, — Attendu que l'arrêt a fait une

en accueillant la prétention de Raba, commissionnaire à Bordeaux, d'être payé par privilége et préférence (pour ses frais et avances du transport et du remboursement des avances des consignataires de sucres consignés à la maison Despeaux (de Bayonne), expédiés par ceux-ci au compte du Numa Nunès, négociant à Bordeaux, dans les magasins de Raba) sur le prix provenant de la vente de ces sucres faite par celui-ci;

-

Attendu que l'art. 95, même Code, étranger à la thèse qu'il s'agissait de juger, n'est relatif qu'aux prêts sur nantissement que feraient à des marchands d'autres marchands du même licu, sur des marchandises sorties des magasins des premiers, pour être portées dans les magasins des autres, à l'effet de servir de gage à ceux-ci ; Attendu qu'indépendamment du moyen retracé dans le motif qu'on vient d'énoncer, Raba, créancier de Nunès, ayant remboursé soit les frais du transport, soit les avances dues à la maison Despeaux, créancière privilégiée de celui-là, avait, par subrogation, un privilége sur le prix des sucres, qui ne pouvait pas lui être contesté; · privilége de la maison Despeaux résultait de Attendu que l'existence du faits non contestés dans la cause, et était avérée dans l'un des motifs du jugement de première instance dont Nunès demandait la confrmation, et qu'a réformé l'arrêt attaqué; — Attendu que c'est précisément sur ce fait qu'est motivé l'arrêt d'où il faut conclure que, sous l'un et l'autre rapports, les reproches qui lui sont faits sont tout-à-fait dénués de fondement, REJETTE, etc. »

COUR DE CASSATION. (7 décembre.)

Il n'y a pas nullilé d'un rapport d'un expert, (nommé par le tribunal, de l'aveu des parties, conformément à l'art. 303, C.procéd.), en ce qu'il n'a pas été rédigé sur les lieux el hors la présence des parties qu'il n'a pas même invitées à se trouver présentes à la rédaction (1). D'ailleurs, une partie, par le fait de laquelle celle invitation ne lui aurait pas été faile, ne pourrait s'en prévaloir pour faire annuler le rapport. C. procéd., art. 317.

BRIANT C. SA FEMME.

Telle est aussi l'opinion de M. Delvincourt. «Le privilége accordé au commissionnaire, dit ce jurisconsulte, est un droit exorbitant, qui déroge formellement aux dispositions de l'art. 2074, C. civ. On a bien voulu cependant l'établir en faveur des entreprises de commission, qui sont d'une grande utilité dans le commerce. Mais il est évident que le motif d'utilité n'existe qu'à l'égard des négocians éloignés, qui ont besoin d'avoir des personnes de confiance dans les lieux où ils expédient des marchandises, et qu'il cesse lorsque le propriétaire des marchandises et le commissionnaire demeurent dans le même endroit. Pourquoi le premier ne garderait-il pas ses marchandises chez lui? et si l'on accordait dans ce cas le privilége, ne serait-ce pas faciliter à ceux qui voudraient prèter sur nantissement les moyens d'échapper aux dispositions du Code civ., dispositions qui n'ont d'autre but que d'empêcher, en cas de faillite, le concert frauduleux qui pourrait exister entre un débiteur de mauvaise foi, et quelques-uns 'de ces créanciers, vrais ou simulés? (Inst. de droit comm., 1re note, p. 54). Enfin les deman-daction, et sur ce qu'il n'indiquait pas le lieu. deurs invoquaient l'opinion de M. Locré (Esprit du Code de comm., art. 95, t. 1er, p. 510).

DU 7 DEC. 1826, arr. cour cass., ch. req.; MM. Henrion de Pensey, prés.; Voysin de Gar

XX.

Briant, séparés de corps, nommé un seul exUn jugement avait, de l'aveu des époux pert pour faire une estimation nécessaire pour la liquidation de leurs intérêts. Le mari se fait représenter par un mandataire. L'expert se rend sur les lieux, et se borne à y prendre le dépose, le tout sans appeler les parties et sans des notes, fait et rédige son rapport chez lui, et les sommer d'être présentes à la rédaction. Le mandataire demande la nullité de la totalité du rédigé en présence de toutes les parties, sur ce rapport, en se fondant sur ce qu'il n'a pas été qu'elles n'ont pas été invitées à assister à la ré

le jour et l'heure où il serait rédigé.

-

Le 29

(1) V., sur ce point, Toulouse, 10 oct. 1823, et la note, et Reunes, 11 août 1824.

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Le sieur Loir-Piot, de Paris, avait été actionné par les sieurs Gros frères, de Marseille, en paiement de diverses sommes.-Il avait décliné la compétence de ce tribunal, prétendant devoir être jugé par celui de Paris.-Jugement qui rejette le déclinatoire, et arrêt qui confirme. Mais, dans l'intervalle de ces deux décisions, le tribunal de commerce juge le fond. Le sieur Loir - Piot, devant lui, demande un sursis jusqu'à ce que le litige sur la compétence

soit vidé devant la cour.

Le 23 mai 1826, jugement du tribunal qui, statuant au fond, refuse le sursis par les motifs suivans : - Attendu que l'art. 457, C. procéd., que le sieur Loir-Piot a invoqué à l'appui du sursis qu'il a demandé, est sans application dans les matières commerciales, lesquelles sont régies par le tit. 25, intitulé: de la Procedure pardevant les tribunaux de commerce;

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Que, d'après l'interprétation que la dernière jurisprudence du tribunal, conforme sur ce point à celle de la cour royale du ressort, a donnée à l'art. 425, l'appel du jugement de compétence, bien qu'il n'ordonne pas l'exécution provisoire, ne saurait arrêter l'exécution du jugement au fond. >>

Appel. Le sieur Loir-Piot soutient la nullité du jugement par le même motif.

rer valables les offres de paiement faites dans la huilaine (1). C. civ., art. 1912. HÉRITIERS RAVAULT C. TERREUX ET AUTRES.

DU 7 DÉC. 1826, arr. cour royale Bourges, ch. temp.; MM. Trottier, prés.; Pascaud, av. gén.; Maillet-Génetry, Mater et Fravaton, av. « LA COUR, Considérant que le commandement tendait à obtenir le paiement de deux années d'arrérages de la rente, sans mention du capital; que les débiteurs ont offert le paiement de ces deux années; que, sous ce rapport, les offres sont suffisantes; que pour décider elles devaient embrasser l'offre du capital, il faut examiner si les débiteurs peuvent être considérés comme ayant cessé pendant deux années de remplir leurs obligations; que la rente étant quérable, les débiteurs ont dû attendre que les créanciers se présentassent; qu'il y aurait une rigueur extrême à décider que, dans ce cas, le paiement des arrérages doit se faire au moment même du commandement, å peine par le débiteur de se voir, comme coupable de négligence, contraint au remboursement du capital; que les circonstances peuvent nécessiter un délai raisonnable, qui dépend de l'arbitrage des juges; que, dans la cause, elles se réunissent toutes en faveur du débiteur la correspondance établit que c'est chez le sieur Ravault, à Corbigny, que le créancier faisait ordinairement percevoir sa rente; c'est aux héritiers Blondeau, dans une autre commune, que le commandement est fait; le sieur Terreux, créancier de la rente, prévient le sieur Ravault qu'il a donné cette rente à sa fille, en la mariant au sieur Frebault; que celui-ci doit l'aller voir et lui être présenté par le sieur Cornu, celui qui recevait ordinairement la rente pour le sieur Terreux; le sieur Ravault dut donc croire que le sieur Frebault continuerait de s'adresser à lui pour le paiement. Le sieur Ravault écrit à Me Frebault, notaire à Nevers, qu'il savait être le conseil du créancier; celui-ci lui répond qu'il a eu les titres de la rente, mais qu'il ne les a plus. Il laisse, à la vérité, percer l'idée de la prétention du remboursement; mais toujours est-il que le sieur Ravault devait s'attendre que la demande lui serait adressée. Sur le commandement fait aux héritiers Blondeau, des offres sont faites le 7 janv., huit jours après, avant toute demande en remboursement: Dans ces circonstances, vu l'éloignement des parties, on ne peut voir de négligence 'dans la conduite des débiteurs qui puisse les soumettre aux dispositions de

DU 7 DEC. 1826, arr. cour royale Aix; l'art. 1912, C. civ.; il serait en effet contre la MM. Perrin et Gas, av.

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justice que les créanciers profitassent de l'erreur en laquelle ils auraient eux-mêmes induit leurs débiteurs, - A MIS le jugement dont est appel au néant; Emendant, - Déclare les offres satisfactoires, etc. »

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COUR ROYALE DE LYON. (7 décembre.) Lorsque deux propriétaires indivis ont vendu solidairement un héritage avec clause de

(1) V. ci-dessus Riom, 4 août 1826, et la note.Mais dès qu'il y a demande en justice du remboursement, le débiteur ne peut plus s'y soustraire par l'offre du paiement des arrérages. V. Bordeaux, 30 août 1814.

rachat, celui qui a exercé le réméré pour le tout ne peut se prétendre propriétaire exclusif de l'immeuble, au préjudice de son co-vendeur, comme subrogé légalement aux droits de l'acquéreur (1). C. civ., art. 1251 et 1668.

Il n'a qu'une action contre son co-vendeur, en remboursement de la moitié du prix de réméré qu'il a payé intégralement (2).

PILLAZ C. JORDON, CHABERT ET AUTRES.

Par un acte notarié du 1er avr. 1819, Marie

Pillaz et Anthelme Jordan vendent à un sieur Roux, sous faculté de rachat, pendant trois ans, une pièce de terre dont ils étaient propriétaires en commun. Avant l'expiration du délai fixé pour le rachat, Jordan se présente seul à l'acquéreur, et lui paie la totalité du prix du réméré. Toutefois la quittance du sieur Roux est pure et simple; elle ne contient aucune subrogation au profit du rétrayant.

Dans cette situation, Anthelme Jordan, se considérant comme propriétaire exclusif de l'héritage, le vend tout entier à un sieur Chabert, qui le revend lui-même à Balthazard Pannet. Au moment de prendre possession, celui-ci éprouve des difficultés de la part de Marie Pillaz, qui se prétend toujours propriétaire pour moitié de l'héritage vendu en totalité par Jordan.

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Celui-ci prend le fait et cause de ses acquéreurs, et l'instance s'engage entre lui et la fille Pillaz devant le tribunal du Beley, qui, par jugement du 2 mai 1825, valide les reventes faites par Jordan, Attendu que celui-ci a remboursé seul le prix de la vente; qu'il a été, par ce moyen, et par la seule force de la loi, subrogé et mis à la place de l'acquéreur; que dèslors il a dû se considérer comme propriétaire exclusif, et qu'il a pu vendre à Chabert la totalité de l'héritage, etc. »

Appel de la demoiselle Pillaz. — L'art. 1251, disait-on, est à tort invoqué. Qu'est-ce en effet que la subrogation ? C'est un moyen légal qui substitue un nouveau créancier à un précédent; c'est ce que la loi romaine appelle transfusio unius creditoris in alium. Or, il ne s'agit point ici de créancier ni de créance; il s'agit de vente, d'acquisition: c'est donc dénaturer la subrogation que de vouloir s'en servir pour substituer un acquéreur à un autre acquéreur, un propriétaire à un autre propriétaire. On ne peut pas abuser à ce point de la subrogation. On le peut d'autant moins, que, comme le fait observer Renusson, la subrogation qui va à faire passer les droits d'une personne à une autre, et dans laquelle des tiers se trouvent intéressés, est de droit étroit; que par conséquent elle ne doit avoir lieu que dans les cas formellement exprimés par la loi ou par la convention.

Ce n'est pas tout, disait-on encore: le système de subrogation légale est, dans le cas particu

(1-2) V. conf. Duvergier, Vente, t. 1er (contin. de Toullier, t. 173), no 37 qui cite les lois 2 et 16, ff., de Duobus reis; Catellan, liv. 5, chap. 58, et Pocquet de Livonière, tit. des Retraits, no 8, et Troplong, Vente, t. 2, no 753. Duvergier et Troplong enseignent aussi que si, en principe, l'action de réméré est divisible et si chaque vendeur ne peut l'exercer que pour sa part et portion, les effets de la divisibilité cessent si la vente a été faite solidairement avec stipulation solidaire de la faculté de rachat. V. aussi Dumoulin, de Divid. et individ., part. 3o, nos 577 et 582,

lier, en opposition manifeste avec l'art. 1668 du Code, qui veut que chacun des co-vendeurs avec clause de rachat ne puisse rémérer que sa portion de l'héritage vendu : car si l'un des covendeurs, en payant seul le prix du réméré, pouvait obtenir, par la seule force de la loi, lá propriété entière de l'héritage, il est évident qu'en réalité il rachèterait le tout, et que, dèsfors, il faudrait rayer du Code l'art. 1668, comme inutile.

On répondait en invoquant l'art. 1251 du Code, qui porte que « la subrogation a lieu de plein droit au profit de celui qui, étant tenu avec d'autres ou pour d'autres au paiement de la dette, avait intérêt de l'acquitter. » Or, j'avais, disait le sieur Jordan, j'avais grand intérêt à ne pas laisser écouler le délai du réméré; mais pour l'exercer, il fallait rembourser à l'acquéreur le prix de la vente. Cette obligation m'était commune avec mon co-propriétaire; mais celui-ci ne s'étant pas présenté, j'ai été forcé d'acquitter seul la dette entière: j'ai donc été subrogé de plein droit à l'acquéreur, et comme celui-ci aurait été fondé à opposer à mon covendeur l'expiration du délai fatal, et à soutenir que la propriété lui était irrévocablement acquise, j'ai nécessairement le même droit. " Appel.

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DU 7 DEC. 1826, arr. cour royale Lyon, 2o ch.; MM. de Montviol, prés.; Guillibert, av. gén. ; Durrieu et Balleydier, av.

« LA COUR, — Attendu que, par acte du fer avr. 1819, Anthelme Jordan et Marie Pillaz oat vendu solidairement à Roux, sous la condition de réméré pendant trois ans, une pièce de terre à eux appartenant par indivis, moyennant la somme de 400 fr., qui fut stipulée payée comptant aux vendeurs; Attendu que, le 4 mars

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1822, par acte reçu par Cerdon, notaire, Anthelme Jordan seul a remboursé à Roux la somme de 400 fr., prix de la vente à réméré, noncé à tous droits relatifs à ladite vente; au moyen duquel remboursement Roux a reAttendu que la quittance passée par Roux à Jordan est pure et simple, et ne contient, au progation; fit de ce dernier, la stipulation d'aucune subro- Attendu qu'il n'en pourrait résulter au profit de Jordan qu'une subrogation légale civ.;dont les effets seraient réglés par l'art. 1251, C. Attendu que cet article, $3, porte : « La subrogation a lieu de plein droit au profit de » celui qui, étant tenu avec d'autres ou pour » d'autres au paiement de la dette, avait intérêt » de l'acquitter » ; Attendu que la subroga tion admise par cet article n'a pour objet que de substituer un nouveau créancier au créandu débiteur le remboursement de la somme cier précédent, en lui donnant le droit d'obtenir celui de faire revivre une vente à réméré résoqu'il a payée pour lui, mais qu'elle n'a pas eu lue par le remboursement du prix; qu'ainsi

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Jordan est devenu créancier de Marie Pillaz de la moitié de la somme par lui payée à Roux, mais n'est pas devenu seul propriétaire du fonds vendu à réméré, à l'exclusion de Marie Pilla;

Attendu que, s'il pouvait exister quelques doutes à cet égard, ils seraient levés par les art. 1668 et 1669, C. civ., qui veulent que, lorsque, comme dans l'espèce, l'immeuble vendu à réméré appartient à plusieurs, le réméré ne puisse être exercé par chacun des co-propriétaires que pour sa part d'où il résulte que, si, nonobstant cette prohibition, le réméré est exercé pour la totalité par un seul, celui-ci doit être réputé

avoir agi au nom de tous les propriétaires et dans leur intérêt, puisqu'il a fait une chose que la loi ne lui permettait pas de faire en son nom seul; d'où il résulte encore que, comme un simple mandataire, il n'a de droit qu'au remboursement des sommes par lui avancées pour ceux qu'il a représentés; Attendu que, par l'acte de vente du 4 mars 1822, passé par Jordan à Pierre Chabert, de la pièce de terre dont il s'agit, Jordan n'a pu transmettre à Chabert que les droits qu'il avait lui-même dans l'objet vendu, et qu'il en est de même de la revente faite par Chabert et Baltazard Pennet, - INFIRME, etc. »

COUR ROYALE DE TOULOUSE. (7 décembre.) C'est par appel el non par opposition qu'on doil allaquer l'ordonnance du juge commissaire, qui déclare qu'il n'y a point lieu de continuer une procédure d'ordre. Lorsque, dans un ordre régulièrement ouvert, aucune des parties ne requiert la discontinuation des procédures, le juge commissaire n'a pas le droit, après la production des titres, de déclarer qu'il n'y a pas lieu de continuer la procédure d'ordre, parce qu'il n'y a pas plus de trois créanciers produisans (1). C. procéd., art. 775.

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GLEYSES C. BARIC.

Un ordre est ouvert pour la distribution du prix d'une maison vendue par Dauriac ȧ Gleyses; après la production des créanciers sommés de le faire, le juge commissaire, sans en être requis par aucune des parties, décide ce qui suit : - Vu l'état des inscriptions et l'art. 775, C. procéd.; Attendu qu'il n'y a pas dans l'espèce plus de trois créanciers inscrits, parce que la dame Gleyses, qui a produit dans l'ordre, n'est point portée dans l'état délivré par le conservateur, et n'a pas dû y être portée, puisque l'ordre est ouvert entre les créanciers de feu Dauriac, tandis qu'elle est créancière de son mari ; Déclarons n'y avoir lieu de procéder plus avant sur le présent ordre, puisqu'il ne peut en être fait un dans l'espèce. Appel par la dame Gleyses.

DU 7 DEC. 1826, arr. cour royale Toulouse, 2 ch.; MM. de Faydel, prés.; Moynier, conseiller auditeur, faisant fonctions av. gén.; Amilhau et Decamps, av.

« LA COUR, - Attendu que tout juge commissaire préposé à la confection d'un ordre est délégué par le président du tribunal et non par le tribunal même, conformément à l'art. 751; que dès-lors il n'est pas le délégué du tribunal; que s'il rend une ordonnance de son chef, il doit être permis aux parties intéressées de l'attaquer par la voie ordinaire de l'appel, ouverte, en règle générale et aux termes du droit commun, contre toute décision émanée d'un juge inférieur, à moins d'exception littérale et contraire, introduite par la loi; que la voie de l'opposition devant le tribunal ne serait point praticable, puisqu'elle n'est introduite que contre les jugemens par défaut émanés du tribunal au

(1) Mais un créancier pourrait se rendre appelant à l'ordre irrégulièrement ouvert et faire renvoyer les parties à l'audience pour y régler la distribution du prix. V. Thomines, t. 2. no 892.-V. en outre Besançon, 16 juill. 1808.

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quel l'opposition est déférée ou d'un tribunal égal ou inférieur à celui-là; qu'il impliquerait que trois degrés de juridiction existassent dans un ordre, ce qui arriverait dans le cas d'une opposition de ce genre: Attendu, au fond, que le juge commissaire n'est chargé que de procéder provisoirement à l'ordre lorsqu'il est ouvert, lequel devient définitif, s'il ne s'élève aucun contredit; que si ce juge commissaire rend une décision quelconque qui s'écarte de la ligne qui lui a été tracée, il dépasse évidemment les pouvoirs qui lui sont confiés ; que le système contraire aboutirait à ce résultat, qu'un juge commissaire serait libre d'arrêter et d'anéantir la confection d'un ordre au moment même où il serait près d'être consommé ; qu'il doit attendre que les parties élèvent quelque réclamation contre l'ouverture ou la continuation de l'ordre, et en référer au tribunal; · Attendu que, dans l'espèce, le juge commissaire avait procédé à l'ouverture d'ordre ; que les actes de produit étaient faits; qu'au lieu de procéder comme le titre du Code l'indiquait, le juge commissaire a rendu son ordonnance, portant qu'il n'y avait pas lieu à procéder plus avant; qu'il l'a même rendue de son propre mouvement, et sans en être requis par aucune des parties; que, dès-lors, il a commis un excès de pouvoir qui doit provoquer l'annulation de son ordonnance: - Par ces motifs, disant droit sur l'appel de la dame Gleyses, — ANNULLE l'ordonnance du 29 juin 1826 et tout l'ensuivi; - Ce faisant, - Délaisse les parties à sc pourvoir où et par devant qui de droit, etc. »

COUR DE CASSATION. (8 décembre.)

Les violences rentrent comme les coups dans l'application de l'art. 228, C. pen., portant des peines contre l'individu qui a frappé un magistral dans l'exercice de ses fonctions(1). Ainsi, les violences exercées envers un huissier, dans l'exercice de ses fonctions, sont passibles des peines de l'art.230 qui se réfère à l'art. 228, C. pėn. (2).

INTÉRÊT DE la Loi. · AFF. DUPRÉ. Requisitoire. -« Le procureur général expose, etc. Les époux Dupré, accusés d'avoir, ensemble et de concert, frappé l'huissier Deshayes, jusqu'à effusion de sang, et d'avoir exercé ces violences contre lui lorsqu'il était dans l'exercice de ses fonctions, furent traduits devant la cour d'assises du département de l'Eure.

» La déclaration du jury, sur l'unique question qui lui fut soumise, fut: - « Oui, Etienne» Michel Dupré est coupable d'avoir exercé des » violences contre le sieur Deshayes, huissier, » dans l'exercice de ses fonctions, mais sans » effusion de sang. Non, Marie-Marguerite » Louvel, son épouse, n'est point coupable. »

» Par suite de cette déclaration, la cour d'assises prononça non seulement l'absolution de la femme Dupré, mais encore celle de son mari :

Attendu, porte l'arrêt, que le fait dont Dupré » est reconnu coupable consiste en violences, » sans aucune autre détermination; que ce cas » n'est point prévu par l'art. 230, C. pén., qui » se rapporte à celui prévu par l'art. 228, c'est» à-dire, à celui où l'accusé aurait frappé, et

(1) V. conf. Cass., 29 juill. 1826, aff. Chevalier. (2) V. Cass., 19 déc. 1806, aff. Leclerc.

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