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JEAN GUÉRIN C. MINISTÈRE PUBLIC. DU 10 MARS 1826, arr. cour cass., ch. crim.; MM. Portalis, prés.; Gaillard, rapp.; LaplagneBarris, av. gén.

« LA COUR, Attendu que le demandeur a été déclaré coupable de vol à l'aide d'effraction, sans qu'il ait été demandé au jury si ce vol avait été commis dans une maison habitée, ou dans un édifice, parc ou enclos non servant à l'habitation et non dépendant d'une maison habitée, et sans que le jury ait rien déclaré sur cette circonstance; que néanmoins l'accusé a été condamné à la peine portée par la loi contre les auteurs de vols commis avec circonstances prévues par le n° 4, art. 381, et par l'art. 384, C. pén. ; qu'il y a donc eu fausse application de la loi pénale; Mais attendu qu'il résulte des faits consignés dans l'arrêt de renvoi que le demandeur aurait commis le vol dans une maison habitée; d'où il suit que l'arrêt de renvoi n'a pas été purgé par les questions soumises au jury, ni par sa déclaration,CASSE et annulle les questions soumises au jury et sa réponse; Casse l'arrêt de la cour d'assises de la Charente du 11 fév. dernier, etc.>>

COUR DE CASSATION. (10 mars.) Lorsqu'un accusé de meurtre a demandé d'une manière générale la position d'une question d'excuse fondée sur la provocation, la cour d'assises ne peut rejeter sa demande, sur le motif qu'il ne résulle point de l'instruction ni du débat qu'il y ait eu provocation dans telle rue ni dans tel moment. En limitant ainsi sa déclaration, elle ne statue que sur une partie de la demande et son arrêt doit être cassé (1). C. inst. crim., art. 408, ALPHONSE CHEVALIER C. MINISTÈRE PUBLIC.

DU 10 MARS 1826, arr. cour cass., ch. crim.; MM. Portalis, prés.; Brière, rapp.; LaplagneBarris, av. gén.; Godard de Saponay, av.

« LA COUR, Vu l'art. 408, C. inst. crim., d'après lequel la cour de cassation doit annuler les arrêts des cours d'assises, lorsqu'il a été omis ou refusé de prononcer sur une demande de l'accusé tendant à user d'un droit ou d'une faculté accordé par la loi, bien que la peine de nullité ne fût pas textuellement attachée à l'absence de la formalité dont l'exécution aura été demandée ou requise; - Et attendu qu'il est constaté, par le procès-verbal de la séance de la cour d'assises, que le défenseur de l'accusé Alphonse Chevalier ayant demandé que, dans la position des questions, fût admise la question subsidiaire de meurtre ou blessures graves excusables par la provocation, la cour d'assises a

loi pour qu'elle doive être soumise au jury. C'est le seul moyen de prévenir toute erreur. La cour d'assises ne peut pas se permettre de commenter la déclaration du jury ni d'y ajouter. Il y aurait réellement incertitude sur le caractère légal de la circonstance aggravante, si la déclaration portait seulement que le vol a été commis avec effraction, sans aucune mention de la clôture fracturée ni du lieu où elle aurait été faite. V. toutefois Cass., 28 mai 1818, aff. Paquiou.

(1) La nullité serait aujourd'hui prononcée en vertu du texte formel de l'art. 339, C. inst. crim., revisé en 1832. Néanmoins le principe consacré par cet arrêt conserve tout son intérêt.

rejeté cette demande par le motif, en point de droit, que le principal caractère de la provocation nécessaire pour constituer l'excuse légale était que les violences graves eussent été immédiatement exercées ; et en fait, qu'il ne résultait point de l'instruction ni dù débat, que, dans la rue Saint-Lazare, lorsque Millard a été blessé, ancunes violences graves pussent être imputées à celui-ci envers l'accusé Chevalier; d'où il suit, que la cour d'assises a limité, par sa décision, l'excuse tirée de la provocation proposée par l'accusé aux faits qui se seraient passés dans la rue Saint-Lazare seulement, tandis que, par le rapprochement des rues contigues, les coups ou violences graves auraient pu, s'ils avaient eu lieu dans une rue voisine, être encore flagrans et dans un instant assez rapproché pour exclure la possibilité de la réflexion entre les faits de provocation et ceux commis dans la rue Saint-Lazare, qui faisaient l'objet de l'accusation; que dès-lors la cour d'assises, par cette déclaration de fait ainsi restreinte et limitée, n'a statué que sur une partie de la demande de l'accusé, qui requérait que les jurés fussent consultés, non pas sur la question de savoir s'il y avait eu provocation dans tel ou tel moment donné, mais provocation suffisante pour caractériser l'excuse dans le sens de la loi; et qu'elle a violé à son préjudice et en contravention à l'art. 408, C. inst. crim., un droit qui était accordé à l'accusé par la loi : - En conséquence, et sans qu'il soit besoin de s'occuper des autres moyens de nullité proposés, CASSE, etc. »

COUR DE CASSATION. (10 mars.) L'apprenti marin porté sur les contrôles, recevant la solde et soumis à la discipline des corps, est par le seul fait de son service effectif justiciable des tribunaux maritimes, à raison des délits par lui commis en activilé de service contre l'élat ou contre ses camarades, malgré la nullilé de l'engagement qu'il a contracté avant l'âge requis. Les tribunaux ne pourraient s'occuper de la nullité de son engagement, qu'autant qu'il serait poursuivi pour fait de désertion. Il ne deviendrait justiciable des tribunaux ordinaires qu'à raison des crimes ou délits qu'il commettrait étant en congé ou contre les habitans, et dont la répression est réservée par l'art. 76, déer. 22 juill. 1806, aux juges du lieu, ou en cas de complicité avec des citoyens non militaires. Lorsque, sur un réquisiloire présenté d'après l'ordre du ministre de la justice, en vertu de l'art. 441, C. inst. crim., la cour de cassation annulle le jugement par lequel un conseil de guerre maritime s'est mal à propos déclaré incompétent, elle renvoie la cause devant un autre conseil de guerre maritime, pour être statué au fond (1). MINISTÈRE PUBLIC. AFF. RASSE ET FERA. Il s'agissait, dans cette affaire, de ventes ou distractions d'effets d'habillement fournis par l'état.

DU 10 MARS 1826, arr. cour cass., ch. crim.; (V. cass., 7 janv. 1826, aff. Gros. Le texte est identique).

(1) V. conf. Cass., 7 janv. 1826.

COUR ROYALE DE PARIS. (10 mars.) La défense faite par l'arrêté du 27 prair. an IX, à toute personne étrangère à l'administration des postes, de s'immiscer dans le transport des lettres, ne s'applique point au transport d'un simple billet ouvert qui n'est pas une lettre missive proprement dite (1).

MINISTÈRE PUBLIC C. TILLETTE.

Le sieur Tillette, entrepreneur des voitures publiques d'Argenteuil à Paris, traduit devant le tribunal correctionnel de Versailles pour s'être chargé d'une lettre de la demoiselle Berthomée à sa mère, fut acquitté par les motifs suivans : — «Attendu qu'il résulte des circonstances de la cause et des explications qui ont eu lieu à l'audience, que le papier dont Tillette a été trouvé saisi par les gendarmes, suivant leur rapport du 1er déc. dernier, n'était point une lettre missive proprement dite, mais un simple billet ouvert, par lequel la demoiselle Berthomée voulant tirer sa mère d'inquiétude, l'avertissait que, n'ayant point de place à la voiture pour le retour, elle ne pouvait revenir le soir même, et que, dans cet état de choses, les lois et réglemens sur le fait des postes sont sans application.

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Le procureur du roi, près le tribunal de Versailles, a appelé de ce jugement, sur ce que l'exception introduite en faveur des voituriers est restreinte aux lettres relatives à leur service personnel, et qu'aucune disposition législative ou réglementaire ne l'a étendue aux simples billets concernant des personnes tierces.

Devant la cour, l'organe du ministère public a fait valoir, pour la confirmation du jugement, les circonstances particulières de la

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(1) V. contr. Cass., 18 fév. 1820, aff. Guingamp; 22 avr. 1830, aff. Pelisson; 17 fev. 1832, aff. Morin, et 23 nov. 1837 (t. 2 1837, p. 620). Quelque favorable que soit l'espèce actuelle, la jurisprudence de la cour de Paris ne saurait être préférée à celle de la cour de cassation. Les simples billets ne sont exceptés de la prohibition, qui est générale, par aucune loi. Il est impossible de considérer ceux qui sont adressés à des personnes tierces comme constituant des lettres de voiture des marchandises conduites par le voiturier (V. Cass., 13 mai 1820, aff. Guingamp). On comprendra enfin combien il serait facile d'éluder la loi si l'on admettait une distinction entre les billets et les lettres.

(2) V. conf. Dageville, t. 4, p. 192.-Jugé toutefois (V. Cass., 26 mars 1823) que l'assuré qui a succombe dans son action tant en délaissement qu'en

ANRES C. DIVERS ASSureurs,

Le 29 mai 1820, le sieur Delaune fait assurer une somme de 22,627 fr., sur diverses marchandises chargées au Havre à bord du navire la Louise, destiné pour la Martinique.

Le 22 juin suivant, le navire la Louise est submergé.

Le 17 juill., le sieur Delaune notifie aux assureurs l'événement du sinistre. Il cède ensuite sa police d'assurance au sieur Anrès.

Le 30 mai 1821, celui-ci signifie aux assureurs le délaissement et entier abandon des marchandises assurées et leur fait sommation de payer le montant des assurances. Il leur notifie, en même temps, les pièces justificatives du chargement et de la perte.

Sur le refus des assureurs de payer les sommes assurées, la contestation est portée devant arbitres.

Le 28 mai 1825, jugement arbitral qui déclare les assureurs non-recevables et mal fondés, rejette la preuve par eux demandée, et les coudamne, en faveur du sieur Anrès, au paiement de la perte éprouvée par les marchandises assurées.

Les assureurs appellent de ce jugement devant la cour royale de Rouen.

Ils soutiennent 1° que le délaissement signifié par le sieur Anrès est non-recevable, parce qu'il n'a été fait qu'après l'expiration des délais accordés par la loi; 2° que ce délaissement ne peut tenir lieu à l'assuré d'une demande en paiement d'avaries, puisque, dans aucun acte du procès, il n'a formé, par un chef de conclusions distinct, une demande en indemnité pour cause d'avaries et s'en est toujours tenu aux termes généraux de son acte de délaissement.

Le sieur Anrès répond qu'aux termes de l'art. 350, C. comm., l'assureur est toujours tenu d'indemniser l'assuré de toutes les pertes qui arrivent par risques et événemens de mer quelconques; que le délaissement autorisé par l'art. 369 est une faculté introduite, en faveur de l'assuré, dans certains cas, pour qu'il puisse, en abandonnant la propriété des objets assurés, en exiger l'entière valeur de ses assureurs ; mais que l'art. 350 comprenant, dans les cas qu'il énonce, tous ceux pour lesquels l'art. 369 autorise le délaissement, il suit de là que si l'assuré n'exerce pas le délaissement, il conserve l'action en réparation des pertes et dommages, dans tous les cas spécifiés par l'art. 360.

A l'appui de cette conclusion, le sieur Anrès invoque l'autorité de Valin (sur l'art. 46, ord. 1681, tit. des Assurances), celle d'Emerigon (t. 1er, chap. 17, 2 sect.) et celle de Locré (sur l'art. 369, C. comm.)

Ensuite il soutint que les assureurs, dans le cours du procès, n'ayant point opposé la pres

paiement de l'assurance n'est pas recevable à former l'action d'avaries si, dans la première demande, il a prétendu que la chose assurée avait péri en totalité et sans espoir d'en rien recouvrer, les deux actions ayant, dans ce sens, la même cause et le même objet. Mais les circonstances particulières de cet arrét (combattu du reste par Dageville, p. 194 et suiv.) ne détruisent pas le principe posé par celui que nous recueillons.-Sous l'empire de l'ord. de 1681, l'action en paiement d'avaries était soumise à la même prescription que l'action en délaissement. V. Cass., 26 juin 1810;-Pothier, Traité des assur., n° 167.

cription, ils avaient renoncé tacitement à s'en prévaloir.

DU 10 MARS 1826, arr. cour royale Rouen, 2 ch.; MM. Carel, prés.; Thil et Fercoq, av. « LA COUR, Considérant que l'action du sieur Anrés présentait deux chefs distincts et séparés, l'un ayant rapport au délaissement des marchandises par lui chargées sur le navire la Louise, et l'autre relatif au paiement de l'indemnité ou des dommages et intérêts résultant de la perte du navire; Considérant que le délaissement n'a pas été fait dans le délai des six mois qui ont suivi l'annonce du sinistre consignée le 15 juill. 1820, dans la feuille maritime et commerciale du Havre, la déclaration d'abandon ou délaissement n'ayant eu lieu que le 30 mai 1821; et que, par conséquent, elle est tardive et ne peut produire effet; Que de la

défense des assureurs il ne sort aucune circonstance pour faire présumer qu'ils aient renoncé au moyen de prescription qu'ils ont invoqué sur l'appel; Considérant, d'une autre part, que le sieur Anrès était dans le délai voulu par la loi pour former, aux termes de la police d'assurance, sa demande en indemnité ou en réparation du tort qu'il aurait éprouvé sur la perte du navire la Louise, et ce conformément à l'art. 350, C. comm., REJETTE l'exception proposée par les assureurs et leur enjoint de plaider au fond, etc. »

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COUR DE CASSATION. (11 mars.) Lorsque le prévenu a seul relevé appel du jugement de police correctionnelle qui a considéré le fait à lui impulé comme un simple delil, le ministère public ne peut, par des conclusions tardives, aggraver son sort en demandant le renvoi pour être procédé par la voie criminelle (1). C. inst. crim., art. 203 et 205.

L'usage fait sciemment d'un certificat délivré par un maire, et qui a été falsifié par l'ad'dition d'une attestation de bonne vie et mœurs, et d'autres énonciations propres à attirer la bienveillance du gouvernement, constitue le délit prévu par l'art. 161, C. pėn. (2).

MINISTÈRE PUBLIC C. GOILLON.

DU 11 MARS 1826, arr. cour cass., ch. crim.; MM. Portalis, prés.; de Cardonnel, rapp.; Laplagne-Barris, av. gén.

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soit préjudice envers le trésor royal, sont punissables, selon qu'il y a lieu, d'après la disposition des § 3 et 4, 1re sect., chap. 3, tit. 1er, liv. 3, C. pén. ; - Qu'aux termes des dispositions pénales de divers articles de ces deux paragraphes, des peines afflictives et infamantes, telles que la réclusion et les travaux forcés, peuvent être infligées à ceux qui se rendent coupables des faux qui y sont spécifiés ;- Que, dans l'espèce, Goillon a seul relevé appel du jugement du tribunal de Rambouillet, qui, considérant les faits à lui imputés comme un simple délit, lui a appliqué des peines correctionnelles; mais que le ministère public n'a point relevé appel de son chef, de ce jugement, et ne s'est point plaint de l'incompétence du tribunal correctionnel de Rambouillet; - Que le ministère public a pris seulement, sur l'appel relevé par Goillon, des conclusions tendant à l'application de l'art. 162; que, d'après ces conclusions tardives, le sort du condamné ne pouvait point être aggravé, et que Goillon ne pouvait point être exposé à subir, devant une cour d'assises, des peines afflictives et infamantes, après avoir été poursuivi seulement pour délit en police correctionnelle; - Que le tribunal de Versailles, en écartant, même par une fin de non-recevoir, les conclusions prises par le ministère public, et dont l'objet était de faire considérer comme crime les faits que le tribunal de Rambouillet n'avait considérés que comme délit, n'a violé aucune loi, et qu'il n'a fait que consacrer, au contraire, sur ce point, les vrais principes, REJETTE ce premier moyen de cassation;-Sur le second moyen, pris de la violation de l'art. 181, C. pén., Attendu qu'il a été reconnu, en fait, par les juges des tribunaux de Rambouillet et de Versailles, que le certificat délivré personnellement à Goillon, par le maire de Rambouillet, a été falsifié par la substitution de sept lignes et de huit mots qui ne faisaient pas originairement partie du corps dudit certificat, el que Goillon a fait sciemment usage de ce certificat ainsi falsifié; qu'il est également constant que le certificat présenté par Goillon aux autorités contenait, sous le nom du maire de Rambouillet, attestation de la bonne conduite dudit Goillon et d'autres circonstances propres à attirer l'intérêt et la bienveillance du gouvernement sur la personne dudit Goillon; Qu'il est aussi établi que le certificat dont s'agit, faisifié par la substitution d'un autre corps d'écriture, à été produit par Goillon, qui s'en est servi sciemment et en a fait usage; que, d'après ces faits, il y avait lieu de la part du tribunal de Versailles d'appliquer à Goillon, ainsi que l'a fait le tribunal de Rambouillet les dispositions de l'art. 161, et que son jugement doit être cassé sous ce rapport: ces motifs, CASSE et annulle, etc. »

- Par

COUR ROYALE DE PARIS. (11 mars.) Le fait de l'établissement d'une maison de jeu dans un bâtiment occupé en partie par un locataire autorise celui-ci à demander la résiliation du bail (1). C. civ., art. 1721 et 1741.

(1) V. conf. Duvergier, Louage, t. 1er (contin. de Toullier, t. 18), no 310. Jugé de même que l'introduction par le preneur de filles publiques dans la maison est pour le bailleur une cause de résiliation du bail. V. Lyon, G fév. 1833. - Et cela encore bien

RÉGIE DES JEUX C. HONNET ET AUTRES.

Le sieur Honnet avait loué le rez-de-chaussée de sa maison au sieur Goujon et à la demoiselle Formentin, qui y avaient établi une lithographie. Plus tard, il loue les premier et second étages de sa maison au sicur Bénazet, administrateur de la régie des jeux de Paris.

Le sieur Goujon et la demoiselle Formentin assignèrent les sieurs Honnet, propriétaire, et Thomine, principal locataire, à fin d'expulsion de la régie des jeux, ou de résiliation de bail, avec 20,000 fr. de dommages-intérêts.

Jugement du tribunal civil de Paris, en date du 7 juill. 1825, qui ordonne que Thomine et Honnet seront tenus d'expulser l'établissement de jeux, sinon déclare la location faite par Honnet à Thomine, et la sous-location faite par ce dernier à Goujon et à la demoiselle Formentin, résiliées pour le 1er oct. suivant; condamne Thomine envers Goujon et la demoiselle Formentin en 500 fr. de dommages-intérêts en cas d'expulsion de la maison de jeux, et en 6,000 fr. en cas de non expulsion; condamne en outre Honnet à garantir Thomine, et enfin Bénazet à garantir Honnet de l'effet de toutes ces condamnations, avec dépens. Voici les motifs de ce jugement : « Attendu, en droit, que le bailleur, par la nature du contrat de louage, sans qu'il soit besoin d'aucune stipulation particulière à cet égard, est obligé d'entretenir la chose louée en état de servir à l'usage pour lequel elle a été louée, et d'en faire jouir paisiblement le preneur pendant la durée du hail, à peine de dommages-intérêts, et même de résiliation du bail (art. 1741, C. civ.);

» Altendu, en fait, que Thomine, en souslouant à Goujon et à la demoiselle Formentin les lieux qu'ils occupent dans la maison dont il s'agit, pour y exploiter une entreprise de lithographie, ne leur a point imposé l'obligation de souffrir ultérieurement, dans le même corps de bâtiment, l'existence d'une maison de jeux qui n'y était pas, et qui, quoique tolérée par la police, n'en est pas moins assez immorale, assez incommode, assez dangereuse sous tous les rapports, pour préjudicier aux autres locations, et spécialement à l'entreprise de Goujon et de la demoiselle Formentin, et nécessiter la résiliation de leur bail, avec indemnité, si l'expulsion de cet inconvenant voisin n'est pas effectuée;

» Attendu que les mêmes considérations et les mêmes motifs s'appliquent à la demande en garantie de Thomine contre Honnet;

» En ce qui touche la demande récursoire de ce dernier contre Bénazet (motif tiré de l'interprétation de la clause du bail).

» Ordonne que, dans la quinzaine à compter de ce jour, Thomine et Honnet seront tenus d'expulser l'établissement des jeux exploité par Bénazet, etc. »- Appel par Bénazet, administrateur des jeux.

DU 11 MARS 1826, arr. cour royale Paris,

qu'antérieurement son locataire lui ayant demandé des indemnités pour défaut de jouissance de partie des lieux loués, il ait obtenu que l'indemnité fut réduite précisément en raison de l'introduction de femmes publiques dans la maison (ce qui semblerait impliquer consentement de sa part). V. Paris, 19 avr. 1834, sous l'arrêt de cassation, 19 mars 1835. V. aussi Duvergier, Louage, no 402; Bousquet, Dict. des contrats et obligations, t. fer, vo Bail, p. 250.Paris, 30 nov. 1839 (t. 1er 1840, p. 41).

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COUR ROYALE DE PARIS. (11 mars.) La disposition d'après laquelle nul ne peut réclamer un état contraire à celui que lui don nent son titre de naissance et la possession conforme à ce titre s'appliquail, dans l'ancienne jurisprudence, aux bȧlards el aux adullerins qui avaient une possession conforme à leur litre de naissance.

La présomption de paternité dans le mariage fondée sur la maxime Pater is est quem nuptiæ demonstrant, n'était pas, sous celle jurisprudence, tellement forte qu'elle ne pul être détruite que par des impossibilités physiques de cohabitation, et qu'elle repoussál par conséquent les impossibilités morales (1).

BUCHERON C. BUGNOT ET SORET.

En 1790, le sieur Jean-Baptiste-Pierre Bugnot épouse à Paris Marie-Jeanne Soret. De ce mariage naissent deux filles, dont l'une est décédée en bas âge et l'autre existe encore.

Pierre Bugnot, obligé de s'absenter, quitte son domicile au commencement de l'an VI. De retour au mois de janv. 1798, il découvrit des liaisons coupables formées par sa femme avec un nommé Toussaint Bucheron, perruquier.- La plus violente mésintelligence éclata entre les époux.-La dame Bugnot quitta bientôt le domicile conjugal, et se détermina à former une demande en divorce pour cause d'incompatibilité d'humeur. Le fait de sa fuite du domicile du mari résulte d'une procuration qu'elle donna le 25 niv. an VI (14 janv. 1798) a un sieur Bellart, pour suivre så demande en divorce. Elle y déclare demeurer rue Cérutti tandis que le domicile de son mari était indiqué rue Saint-Lazare.

Le 1er mars suivant, les scellés sont apposés, à la requête dudit Bellart, comme mandataire de la dame Bugnot, dans le domicile du mari, et le 6 du même mois, la demande en divorce est formée contre lui.

Cependant, pour éviter le scandale d'une pareille procédure, les époux conviennent de prendre la voie du divorce par consentement mutuel. Le 19 messid. an VI (7 juill. 1798), le divorce est prononcé.-La veille de ce même jour, le divorce de Toussaint Bucheron, qui était aussi marié, avait été prononcé. Libres désormais l'un et l'autre, la dame Soret, bravant toute retenue, va se réunir à Bucheron dans sa demeure, rue Pinon, n° 16. C'est là que, le 26 brum, an VII (16 'nov. 1798), elle accouche d'un fils dont la conception se trouve ainsi remonter au 17 fév. 1798, c'est-à-dire à une époque postérieure d'environ un mois à la procuration donnée par elle au sieur Bellart pour former sa demande en divorce, et qui attesté aussi son absence du domicile marital.

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L'enfant est présenté, le lendemain 17 nov., à P'officier de l'état civil; il est inscrit sur le registre des actes de naissance sous le nom de Jacques, fils de Toussaint Bucheron, qui signe au registre, et de Marie-Jeanne Soret, non mariés.

Peu de temps après, Toussaint Bucheron meurt à l'hôpital. La dame Soret elle-même est plongée dans une telle détresse qu'elle est forcée de laisser son enfant à l'hôpital, où il est élevé pendant plusieurs années. Pressée par tous les besoins, elle forme contre le sieur Bugnot une demande pour obtenir une pension alimentaire. Sur cette demande, transaction entre les parties, qui règle cette pension à 600 f. On y rappelle la fille issue du mariage des sieur et dame Bugnot; il n'est fait aucune mention de Jacques Bucheron.

Celui-ci se marie en 1822. — Il prend, dans l'acte de mariage, les noms qu'on lui avait donnés dans son acte de naissance. Lui-même déclare se nommer Jacques Bucheron, fils de Toussaint Bucheron et de Marie-Jeanne Soret, non mariés. Il ne demande que le consentement de Marie-Jeanne Soret pour son mariage, le sieur Toussaint Bucheron son père, est-il dit dans l'acte de mariage, étant prédécédé.-Deux enfans naissent de ce mariage. Le père les fait inscrire sur le registre de l'état civil sous le nom de Bucheron.

En 1822, Bucheron se présente chez le sieur Bugnot, pour lui demander quelques services. -II sollicite en même temps l'augmentation de la pension de sa mère. Une correspondance s'établit entre eux. - Toutes ses lettres sont signées du nom de Bucheron. Les réponses de Bugnot sont adressées au même nom.

Enfin, ce n'est qu'en 1824 qué, la demoiselle Bugnot, aujourd'hui mariée, ayant refusé de contribuer à la pension alimentaire de la dame Soret sa mère, Bucheron forme contre le sieur Bugnot une demande tendant à la rectification de son acte de naissance. Il conclut à ce qu'en place des énonciations relatives à ses noms et à ceux de ses père et mère, on y substitue celles-ci Fils de Jean-Baptiste-Pierre Bugnot el de dame Marie-Jeanne Soret, époux actuellement divorces.

Le sieur Bugnot, de son côté, forme contre Jacques Bucheron une demande reconventionnelle en désaveu, et assigne la dame Soret en déclaration de jugement commun.

Les deux demandes sont jointes ; la dame Soret fait défaut; et sur le tout, jugement du tribunal de première instance de la Seine, en date du 29 juin 1825, ainsi conçu :- « Attendu que l'acte de naissance de Jacques est antérieur à la promulgation du Code civ., et que sa demande ne peut être jugée d'après les dispositions de ce Code;

» Attendu que le divorce entre Bugnot et Marie-Jeanne Soret a été prononcé le 7 juill. 1798; que la naissance de Jacques a été portée sur le registre de l'état civil le 17 nov. suivant, et qu'il y est présenté commé né de Toussaint Bucheron et de Marie-Jeanne Soret; que tout prouve que Bugnot n'a pas eu connaissance de la grossesse et de l'accouchement de MarieJeanne Soret; qu'il résulte d'une procuration donnée par la femme Soret à Bellart, le 14 janv. 1798, pour poursuivre son divorce, et d'une apposition de scellés, faite à la requête dudit Bellart, au domicile de Bugnot, le 1er mars suivant, qu'à l'époque de la conception de Jaeques, les époux Bugnot étaient séparés de fait,

et se trouvaient dans un état d'hostilité qui ne permet pas de supposer qu'il y ait eu rapprochement; que, dans la transaction intervenue, en 1805, entre Bugnot et la femme Soret, il est fait mention de la demoiselle Bugnot, fille commune des deux parties, et que Jacques n'y est aucunement nommé ;

>> Attendu que Jacques, qui a été présenté à l'état civil comme fils de Bucheron et de MarieJeanne Soret, a toujours eu une possession conforme à son titre; qu'il a été élevé sous ce nom; qu'il s'est marié comme fils de Bucheron; qu'il n'a demandé que le consentement de Marie-Jeanne Soret, Bucheron étant décédé à cette époque; qu'il a présenté lui-même ses enfans à l'état civil sous le nom de Bucheron; que, quoiqu'il sùt que Bugnot avait été le mari de sa mère, toutes ses relations avec ledit Bugnot n'ont eu lieu que sous son nom de Bucheron, totalement étranger audit Bugnot;

» Attendu que la femme Soret n'a jamais imputé à Bugnot la paternité de Jacques; que même elle ne se présente pas pour appuyer la prétention de son fils; que toutes ces circonstances réunies dans la cause rendent Jacques non-recevable à invoquer la présomption établie par la loi en faveur de l'enfant conçu pendant le mariage,

» Le tribunal déclare Jacques non-recevable en sa demande, et le condamne aux dépens; sur le surplus des demandes, fins et conclusions des parties, les met hors de cause.»

Appel de la part de Jacques Bucheron. - Ce jugement lui refuse la qualité de fils légitime des sieur et dame Bugnot.

Appel incident de la part de Bugnot. — La dernière partie du jugement, mettant les parties hors de cause, écarte par là sa demande subsidiaire en désaveu.

Dénonciation des deux appels à la dame Soret pour faire déclarer commun avec elle l'arrêt à intervenir. C'est dans cet état que la cause est portée à l'audience solennelle de la cour. La dame Soret fait défaut.

On a méconnu, disait l'appelant, la règle Pater is est quem nuptia demonstrant. Cette maxime, admise dans l'ancienne jurisprudence, comme l'une des principales bases de l'état civil des hommes, n'est pas, comme on l'a dit, placée transitoirement dans le titre du Dig. de in jus vocando; elle est l'expression pure et vraie des principes du droit romain sur la paternité et la filiation légitimes. - La loi 6, fT., de His qui sui vel alien. jur. sunt., viendrait au besoin à l'appui de cette vérité, car elle a pour objet spécial les exceptions dont la règle citée était susceptible. « Mais si le mari, porte » cette loi, a été absent, par exemple, pendant » dix ans, et qu'à son retour il trouve chez lui » un enfant âgé d'un an, nous pensons avec Ju» lien que cet enfant n'appartient pas au mari.» a Sed si fingamus abfuisse maritum, verbi gratia » per decennium, reversus anniculum invenisse in » domo su, placet nobis, Juliani sententiâ, hunc » non esse mariti filium. » — Plus bas, la même loi ajoutait « Mais je pense, et c'est aussi l'a» vis de Scévola, que, s'il est prouvé que le mari » a été quelque temps sans partager le lit de sa » femme, soit par quelque infirmité qui lui est » survenue, soit par une autre cause, ou s'il est >> organisé de manière à ne pouvoir engendrer, » on ne doit pas regarder comme son fils l'enfant dont sa femme accouche, même dans sa » maison et à la connaissance des voisins. Sed » mihi videtur, quod et Scevola probat, si conslet

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