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celle-ci par le créancier; et il paraît inadmissible que les créanciers du débiteur puissent, contre son gré, faire revivre, à sa charge, une dette, dont il se trouve libéré.

D'où ils concluent que si, de fait, les créanciers avaient frappé d'oppositions les deniers déposés, ces oppositions ne deviendraient efficaces qu'autant que le débiteur donnerait son consentement au retrait (comp. Zachariæ, Aubry et Rau, t. IV, p. 199; Larombière, t. III, art. 1261, no 2).

Nous ne croyons pas toutefois que cette doctrine soit

exacte :

1° Aux termes de l'article 557 du Code de Procédure :

<< Tout créancier peut, en vertu de titres authenti<«<ques ou privés, saisir-arrêter, entre les mains d'un << tiers, les meubles et effets appartenant à son débiteur, << ou s'opposer à leur remise; »

Or, nous venons de reconnaître que les deniers déposés à la Caisse des consignations par le débiteur, lui appartiennent toujours, ou du moins que c'est à lui qu'appartient la créance qui résulte de ce dépôt, tant que le créancier ne l'a pas acceptée;

Donc, ses autres créanciers ont le droit de pratiquer une saisie-arrêt sur ces deniers, en vertu de l'article 557, qui n'est lui-même, ainsi que nous l'avons dit, qu'une application de l'article 1166 du Code Napoléon (comp. le Tome II de ce Traité, no 53).

2o Les dissidents objectent que nous oublions l'article 1257, d'après lequel la consignation libère le débiteur, indépendamment de l'acceptation de celle-ci par le

créancier.

A quoi nous répondons qu'ils oublient, eux! l'article 1261, d'après lequel le débiteur peut retirer, à sa seule volonté, la consignation, tant que le créancier ne l'a pas acceptée.

Il ne faut pas séparer ces articles l'un de l'autre.

Ce qui résulte, en effet, de leur combinaison, c'est que la consignation non acceptée n'est pas encore un payement, et qu'elle n'est, au contraire, qu'un projet, une simple pollicitation, par laquelle le débiteur lui-même ne se trouve nullement engagé !

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Or, s'il n'y a pas encore payement, c'est que la dette existe toujours.

Si la dette existe toujours, c'est que les deniers appartiennent au débiteur.

Et si les deniers appartiennent au débiteur, ils peuvent être l'objet d'une saisie-arrêt par ses autres créanciers.

Nous n'apercevons pas ce qu'il y a, dans tout ceci, d'exclusivement attaché à sa personne.

3o Mais vraiment si! s'écrie le débiteur :

Vous allez me faire contracter une dette, malgré moi! or, contracter une dette, cela est une faculté exclusivement personnelle!

La réponse nous paraît facile.

Comment! le débiteur lui-même, en retirant la consignation, peut ainsi, par son propre fait, empêcher que ses codébiteurs et ses cautions soient libérés.

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Et c'est lui qui vient prétendre, contre ses propres créanciers, qu'ils ne peuvent pas, dit-il, faire revivre, à sa charge, une dette, dont il se trouve libéré.

Mais vous pouvez bien, vous! faire revivre cette dette, à la charge de vos codébiteurs ou de vos cautions!

Et lorsque, en effet, vous retirez la consignation, vos codébiteurs ou vos cautions, ces tiers, qui pourtant ne s'étaient obligés dans votre intérêt que par esprit de bienfaisance, ne sont pas fondés à soutenir qu'ils étaient libérés et qu'ils ne peuvent pas être replacés, par votre fait, dans les liens de la solidarité ou du cautionnement! C'est donc, en effet, qu'il n'y avait pas eu payemeni, et que la dette n'était pas éteinte.

Évidemment !

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Or, ce que vous pouvez faire contre vos cautions, vous, le débiteur! à plus forte raison, vos créanciers doivent-ils pouvoir le faire contre vous!

Car ils ne vous feront pas plus contracter ainsi une nouvelle dette, contre votre gré, que vous ne faites contracter à vos cautions un nouveau cautionnement contre leur gré! (Comp. Paris, 18 juin 1872, Mittaine, le Droit du 19 septembre 1872; Durauton, t. XII, no 237-239; Colmet de Santerre, t. V, n° 266 bis, 1.)

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450.

Supposons maintenant que la consignation

a été acceptée par le créancier.

C'est le second cas. (Supra, n° 146.)

Il est réglé par l'article 1262, en ces termes :

Lorsque le débiteur a lui-même obtenu un jugement a passé en force de chose jugée, qui a déclaré ses of«fres et sa consignation bonnes et valables, il ne peut plus, même du consentement du créancier, retirer sa « consignation au préjudice de ses codébiteurs ou de ses << cautions. »

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que

C'est l'offre du débiteur ayant été acceptée par le créancier, la convention est formée ! (Comp. supra, no147.) Et comme cette convention avait pour objet l'extinction de la dette, la dette est, en effet, éteinte!

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Elle est éteinte, disons-nous, de même que par le payement; car c'est bien alors un vrai payement, qui résulte de cette procédure.

Et, par conséquent, avec la dette principale s'éteignent, du même coup, tous ses accessoires.

Les codébiteurs et les cautions sont donc libérés (art. 1262).

Pareillement, les priviléges et les hypothèques s'éteignent, soit au profit des créanciers hypothécaires postérieurs, soit au profit des tiers-détenteurs (art. 1263).

151. Pour cela, d'ailleurs, il faut, bien entendu, que la convention soit irrévocablement formée entre le débiteur et le créancier, et qu'il n'y ait plus à s'en départir.

C'est ce qui arrive, d'après l'article 1262, lorsque le débiteur a lui-même obtenu un jugement passé en force de chose jugée, qui a déclaré ses offres et sa consignation valables.

On ne doit pas évidemment conclure de ces termes qu'il est nécessaire que le jugement ait été rendu sur la demande en validité introduite par le débiteur.

C'est le créancier, qui a introduit une demande en nullité !

Qu'importe, si, sur cette demande, les offres et la consignation du débiteur sont déclarées valables.

Le contrat judiciaire est tout aussi bien formé (comp. Duranton, t. XII, no 234; Zachariæ, Aubry et Rau, t. IV, p. 200).

152. — Il n'y a pas davantage à considérer si le jugement, qui a déclaré les offres et la consignation valables, n'a jamais été attaquable par la voie de l'opposition ou de l'appel; ou si, ayant été attaquable d'abord par l'une ou par l'autre de ces voies, il ne peut plus l'être, parce que les délais, dans lesquels l'attaque devait être introduite, sont expirés.

Cette distinction, qui peut n'être pas sans importance dans d'autres matières, est tout à fait étrangère à celle-ci; et nous n'avons pas à nous préoccuper de cette formule des articles 1262 et 1263 ...passé en force de chose jugée... qui a acquis force de chose jugée.

Au point de vue qui nous occupe, le jugement est passé en force de chose jugée, dès qu'il n'est pas susceptible d'être reformé par la voie de l'opposition, ni par la voie de l'appel.

Le contrat judiciaire est-il irrévocablement formé ?
Telle est, en effet, notre seule question.

153. Le jugement, qui a déclaré les offres et la consignation valables, peut être attaqué par la voie de l'opposition ou de l'appel.

Et les délais, dans lesquels l'une ou l'autre attaque peut être introduite, ne sont pas expirés.

Le débiteur peut-il, en cet état, retirer sa consignation, sans le consentement du créancier, de manière à ce qu'elle soit considérée comme non avenue, et que la dette et ses accessoires n'aient pas été éteints?

Non, dirons-nous, si le créancier, contre lequel le jugement a été rendu, ne l'attaque pas, et ne forme ni opposition ni appel; car lui seul peut l'attaquer; et lorsqu'il garde le silence, le jugement a, provisoirement, l'autorité de la chose jugée;

Oui, si le créancier l'attaque; car alors tout est remis en question, ou même, sans qu'il l'attaque, s'il consent au retrait, que le débiteur veut faire de sa consignation (comp. Mourlon, Répét. écrit., t. II, p. 728; Colmet de Santerre, t. V, no 207 bis, V.).

154. Est-il besoin de dire que l'acceptation volontaire que le créancier ferait de la consignation, la rend irrévocable?

Évidemment! (comp. art. 1263).

Ce n'est même qu'à l'instar du contrat volontaire, que le contrat judiciaire produit cet effet.

Il tient lieu d'une convention entre les parties; c'est le sens de la maxime : judiciis quasi contrahimus.

155. Les créanciers de celui, pour le compte duquel la consignation a été faite, peuvent d'ailleurs l'accepter aussi en son nom, jusqu'à concurrence du montant de leurs créances.

Et ils sont, en conséquence, fondés à saisir-arrêter les deniers déposés à la Caisse des consignations.

Cette application de l'article 1166, en ce qui concerne les créanciers du créancier, n'a pas d'ailleurs soulevé les mêmes controverses, que nous avons vu s'agiter, en ce qui concerne les créanciers du débiteur (supra, no 149).

C'est que celle-ci est, en effet, incontestable ! (comp.

TRAITÉ DES OBLIGATIONS.

V-8

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