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228.a. D'après l'anticle 1269:

<< La cession judiciaire ne confère point la propriété aux «< créanciers; elle leur donne seulement le droit de faire << vendre les biens à leur profit et d'en percevoir les reve<< nus jusqu'à la vente. » (Comp. art. 904, Code de Procéd.).

L'article 1270 ajoute :

«<Les créanciers ne peuvent refuser la cession judi«ciaire, si ce n'est dans les cas exceptés par la loi..

« Elle opère la décharge de la contrainte par corps. <«< Au surplus, elle ne libère le débiteur que jusqu'à «< concurrence de la valeur des biens abandonnés; et << dans le cas où ils auraient été insuffisants, s'il lui en << survient d'autres, il est obligé de les abandonner « jusqu'au parfait payement. »>

Ces deux textes résument clairement, l'effet de la cession judiciaire entre le débiteur et les créanciers, le même effet, qu'elle a toujours eu, depuis son origine:

D'une par, dépossession civile, et, comme nous l'avons dit, démission du débiteur, qui ne transmet pas, il est vrai, à ses créanciers la propriété des biens abandonnés, mais qui leur en transmet la possession et la jouissance, avec mandat de les vendre et de s'en distribuer le prix, en s'interdisant tout acte d'aliénation, d'hypothèque ou autre, qui serait contraire au mandat irrévocable, qu'il leur confère;

Notons que la cession judiciaire, à la différence de la cession volontaire comprend non-seulement les biens présents, mais aussi les biens à venir, et que le débiteur doit abandonner ceux-ci, au fur et à mesure qu'il les acquiert;

Et d'autre part, acceptation forcée, par les créanciers, de ce mandat, qui les constitue liquidateurs (comp. L. I, 2, Cod. Qui bonis ced. poss. ; Pothier, loc. supra cit..),

229.b. En ce qui concerne les effets. de la cession judiciaire dans les rapports des créanciers les uns envers

les autres, nous croyons qu'ils sont les mêmes que ceux, qui résultent de la cession volontaire.

Il suffit donc de nous reférer au principe, que nous avons posé plus haut, et d'appliquer également à la cest sion judiciaire les conséquences, que nous en avons déduites (comp. supra nos 205, 206.)

Les deux situations sont, en effet, sous ce rapport, absolument semblables.

Et même, la cession forcée se rapproche plus encore de la faillite que la cession volontaire, par cela même précisément qu'elle est forcée !

C'est un motif de plus pour appliquer à la cessionjudiciaire les effets, que nous avons empruntés à la faillite pour les appliquer à la cession volontaire.

Ajoutons que la cession judiciaire reçoit une certaine publicité, qui n'est pas donnée à l'autre. (Comp. art. 905, Cod. de Procéd.)

230. Nous devons reconnaître, toutefois, que cette doctrine est combattue par des jurisconsultes d'une grande

autorité.

<< Comme cet état, dit M. Larombière, ne saurait être assimilé à la faillite, tout créancier, ayant un titre hypothécaire antérieur, peut encore prendre inscription, après son admission par jugement au bénéfice de cession.... » (T. III, art. 1270, no 5; comp. Troplong, Des hypoth., no 662.)

Nous ne prétendons pas sans doute, que la cession judiciaire doive être, de tous points, assimilée à la faillite.

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Ce que nous croyons, c'est qu'il existe, à certains égards, une analogie entre l'une et l'autre.

Notamment, elles se ressemblent par ce trait essentiel, que, dans l'une comme dans l'autre, le débiteur est dessaisi de l'administration de ses biens, (art. 443, du Cod. de commerce); et que ses biens, en effet, sont désormais affectés au payement de ses créanciers, pour

que chacun d'eux soit payé sur le prix, suivant l'état actuel de son titre.

M. Larombière lui-même enseigne que « le débiteur ne peut plus, à partir de son admission par jugement au bénéfice de cession, hypothéquer les biens abandonnés, au préjudice de ses créanciers.» (loc. supra cit.)

La logique juridique n'exige-t-elle pas aussi, en conséquence, que l'un des créanciers ne puisse plus, à partir de ce jugement, acquérir une cause de préférence, au préjudice des autres créanciers?

Nous le pensons ainsi. (Comp. supra n° 210; Merlin, Répert, vo inscript. hypoth. § IV, no 6.)

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231.- La novation vient, au second rang, après le payement, dans la nomenclature des modes d'extinction des obligations, que l'article 1234 énumère.

Et c'est bien là, en effet, sa place; car elle n'est ellemême qu'une manière de payement:

« Cum eam stipulationem similem esse solutioni existimemus » disait Venuleius. (L. 31, § I, ff. De Novat. et Delegat.)

De même que le débiteur peut, du consentement du créancier, payer une autre chose que celle qui lui est due... rem pro re (L. 25, ff. De jure dotium; art. 1243; comp. le t. IV, n° 228);

Il peut évidemment aussi, du consentement au créancier, payer, avec une autre obligation, l'obligation dont il est tenu... debitum pro debito.

Telle est la novation: la substitution à une obligation ancienne, qui s'éteint, d'une obligation nouvelle, qui la remplace.

232. Voilà, disons-nous, la novation, telle qu'elle était devenue, dans le dernier état du Droit romain, sous la Législation Justinienne.

Très-différente était l'ancienne novation romaine, à l'époque classique !

C'est une démonstration, qui vient d'être faite par M. Gide, dans la remarquable étude, qu'il a consacrée : au caractère de la novation en Droit romain; et aux conditions de la novation, d'après les Institutes de Gaïus. (Comp. Revue de Législation française et étrangère, 1870-1871).

« Les lignes, qui vont suivre, n'auront rien prouvé, dit-il, au début de son travail, si elles n'établissent pas que le mot de novation correspond, dans la loi romaine et dans la loi moderne, à deux idées profondément différentes » (p. 6.)

Notre savant collègue a fourni sa preuve ; il a démontré que la novation n'était, dans l'ancien Droit romain, qu'une transformation, dans le sens littéral de ce mot, c'est-à-dire un simple changement de forme; et qu'elle n'était qu'une des pièces du système symétrique des formules, ayant seulement pour but de communiquer aux obligations contractées par des modes naturels les qualités de l'obligation verbale; de sorte que, dans ce temps, toute la théorie de la novation se résumait en deux mots: stipulatio debiti... deductio debiti in stipulationem.

Aussi, l'ancienne novation romaine, étroitement liée qu'elle était à la jurisprudence formaliste, eut-elle le même destin, s'affaiblissant avec elle successivement, jusqu'à ce qu'elle s'écroulât, avec elle aussi, tout à fait,

sous le coup de la Constitution de Justinien, ce grand destructeur des vieilles formules, comme M. Gide l'appelle (p.47).

Nous lui devons, à lui, la justice de dire qu'il en est scientifiquement l'un des plus judicieux reconstructeurs. (Comp. sa nouvelle Etude sur le contrat litteris, même Revue, 1873).

233.

Ce n'est qu'avec le secours des commentaires de Gaïus, que cette reconstruction a pu être faite.

Voilà comment nos anciens auteurs, auxquels il n'a pas été donné de les connaître, ont déduit des textes romains certaines interprétations, dont l'inexactitude est aujourd'hui démontrée.

C'est aussi ce qui explique pourquoi leurs arguments, en matière de novation, pour résoudre nos questions françaises, manquent souvent.de portée.

La différence était si grande entre les deux législations !

Faut-il ajouter que quelques auteurs modernes n'ont pas évité peut-être l'écueil, où nos anciens avaient échoué.?

234.« La novation, dit M. Larombière, est la transformation, la translation d'une obligation en une autre qui lui est substituée. (T. III, art 1278, no 1). Et il cite la définition romaine :

«Novatio est prioris debiti in aliam obligationem, vėl civilem, vel naturalem, transfusio atque translatio...» (L. I, ff. De novat).

Or, cette définition, qui était exacte, en Droit romain, même encore au temps d'Ulpien, n'est plus aujourd'hui, en Droit français, historiquement, aussi juridique. (Comp. toutefois infra n° 351).

Ces deux termes : transfusio et translatio correspondaient, en effet, de la manière la plus topique, aux deux termes, dans lesquels se résumait la novation romaine : stipulatio debiti.

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