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- Il a été annoncé naguère que le gouvernement de Bourbon avoit fait prendre possession, au nom de la France, de deux îles des mers de l'Inde, complètement inhabitées et situées à une assez grande distance au sud-est de Bourbon et de Maurice. Ces îles, connues sous les noms de Saint-Paul et d'Amsterdam, abondent en poissons, dont la pêche peut présenter de bons résultats. Informé du parti qu'il seroit facile de tirer de leur occupation, sachant, d'ailleurs, que le gouvernement de Maurice songeoit à prendre l'initiative, le gouverneur de notre colonie prit sur lui de faire arborer dans ces fles le pavillon français.

Mais cette mesure, pacifiquement hardie, a été désavouée par le ministère de la marine. Seulement les négocians qui s'étoient présentés les premiers sur ces côtes ont été autorisés à surmonter leur établissement d'un pavillon national en-touré d'une bande bleue, destinée à faire connoître que le gouvernement français ne se charge nullement de défendre la nationalité de l'occupation.

Cette espèce de désaveu sera encore une bonne fortune pour l'Angleterre. -Une lettre de Cayenne annonce que, sur l'appel, l'agent anglais chargé de suivre et d'éterniser l'affaire du Marabout, a soulevé un nouvel incident de procédure il a récusé tous les membres de la cour royale de Cayenne qui avoient fait partie de la chambre des mises en accusation et concouru, par suite, à l'arrêt de renvoi prononcé en 1841 en faveur du Marabout, de sorte qu'il ne s'est plus trouvé que deux conseillers contre lesquels la récusation n'ait pas porté, et que, par suite, l'affaire n'a pu être jugée, puisque la cour n'étoit plus en nombre, soit pour statuer au fond, soit même pour prononcer sur les récusations.

-Ene lettre reçue de Venise annonce que M. le comte de Chambord se trouve dans cette ville, et qu'il continue à jouir de la meilleure santé.

-M. le général Gourgaud vient de faire distribuer aux membres des deux chambres un écrit sur une question qui a été récemment soulevée, relativement au droit de commandement pour les généraux des armes spéciales.

-On assure que M. le ministre des travaux publics doit présenter la semaine prochaine à la chambre des députés un projet de loi relatif à la concession de la ligne du Nord.

-Une ordonnance royale en date du 25 janvier 1845), rend définitive la concession du chemin de fer de Montereau à Troyes, aux conditions proposées dans la soumission de MM. Vauthier, Gallice-Dalbane, Paul Séguin et Ce, concessionnaires.

-M. Azais, l'auteur si connu des Compensations, vient de mourir à Paris à l'âge de 79 ans. Il étoit né à Sorrèze, et avoit été successivement, dans sa jeunesse, professeur au collège de Tarbes, et secrétaire de l'évêque d'Oloron, qui fit de vains efforts pour l'engager à entrer dans les ordres. La révolution le surprit organiste d'un couvent de Bénédictins dans les Cévennes. Peu de temps après, il fut obligé de se cacher dans l'hôpital de Tarbes, et c'est dans ce lieu que, témoin des infirmités humaines et des soins pieux de ceux qui les allégeoient, il conçut et ecrivit son grand ouvrage, publié quelques années après.

EXTÉRIEUR.

ESPAGNE. On écrit de Madrid qu'une amnistie générale va être décrétée par le gouvernement, en même temps que la constitution réformée sera promulquée. Sauf quelques exceptions nominatives, l'amnistie s'étendra à presque tous les proscrits politiques des divers partis que la guerre civile a emprisonnés ou

exilés.

-La Gazelle du 25 porte le décret de dégradation de M. Dionisio Capaz, chef de marine, pour ne pas s'être rendu en Espagne à l'époque qu'on lui avoit marquée.

Ce décret est d'autant plus inconcevable que, d'après la correspondance de Bordeaux, ce général, et riche propriétaire, se trouve malade dans cette ville, et avec des passeports en règle.

BELGIQUE. Après neuf jours de débats sur la question ministérielle, la chambre des députés belges a repoussé, à la majorité de 65 voix contre 22, la proposition d'une adresse au roi pour exprimer le défaut de confiance de la chambre. ANGLETERRE. - On écrit de Londres, le 29 janvier :

« Hier matin, un grave accident est arrivé sur le chemin de fer de Manchester à Leeds, à la station de Manchester. Quelques instans avant le départ du premier convoi pour Leeds, la locomotive qui devoit le traîner a fait explosion. Trois hommes, le mécanicien et le chauffeur, qui étoient occupés à mettre en ordre la locomotive, et un inspecteur, ont été tués sur le coup; quatre ouvriers ont été gravement blessés.

>>> La machine, en sautant, a traversé le toit du hangar sous lequel elle étoit placée, et qui est d'une hauteur de 60 pieds; elle a enlevé plus de 20 toises de ce toit; des débris ont été jetés jusqu'à plus de 100 toises de distance. Jusqu'à présent, on ignore la cause de ce déplorable accident. La locomotive étoit construite depuis 1840, et, depuis cette époque, elle avoit parfaitement fait son service : c'étoit une machine de premier ordre. »

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SUISSE. Dans une circulaire datée du 21 janvier, le vorort annonce aux Etats que la diète est convoquée extraordinairement pour le 24 février, et fait connoître les propositions qui seront soumises aux délibérations de l'assemblée fédérale. Ces propositions, les voici :

« A. Relativement aux corps francs.

>> 1° La mise sur pied d'un corps armé sans le concours officiel d'un gouvernement cantonal est interdite dans toute l'étendue de la confédération. Tous les Etats confédérés sont invités à admettre ce principe dans leur législation respective et à prendre des mesures pour empêcher que de semblables corps ne se forment et ne violent le territoire d'un autre canton.

» 2° Si, malgré ce qui précède, de semblables corps et même des individus isolés et en armes venoient à faire irruption sur le territoire d'un canton pour y troubler la tranquillité et l'ordre légal; les cantons d'où seront sortis ces corps ou individus, seront tenus de faire punir à leur retour ceux qui auront pris part à une pareille entreprise. La fixation des peines appartient à la législation cantonale.

>>3o Le canton d'où seront partis les corps francs qui auront violé le territoire d'un autre canton, sera tenu d'indemniser ce dernier. Faute d'une entente amiable sur le montant de l'indemnité, le droit fédéral en connoîtra, à teneur de l'article 5 du pacte.

» B. Relativement aux Jésuites.

» 1o La diète reconnoît que les décisions relatives à l'admission et au renvoi d'ordres religieux reconnus par l'Eglise nationale sont du ressort de la souveraineté cantonale, sauf ce qui résulte de l'article 12 du pacte. Par là toutefois n'est pas exclu le droit de la confédération d'intervenir elle-même contre de semblables ordres, aussi bien que contre toutes autres associations et corporations, lorsqu'il seroit constant qu'ils ont pris part à des entreprises contre l'indépendance de la Suisse ou à une violation effective de la paix du pays.

>>2o La diète reconnoît qu'il n'y a présentement aucun motif de prendre de sa part, à l'égard de l'ordre des Jésuites, des décisions impératives.

>>3° Elle adresse en revanche à l'Etat de Lucerne l'invitation amicale et pres

sante de renoncer à l'appel des Jésuites, eu égard à la position qu'il occupe dans la confédération. >>>

RUSSIE. - Le 28 janvier est morte, à la suite d'une couche pénible, la duchesse de Nassau, fille du grand-duc Michel de Russie. Cette princesse n'étoit pas encore âgée de 20 ans.

- La santé de l'impératrice de Russie a éprouvé une nouvelle altération qui donne des inquiétudes.

TURQUIE.—On a appris à Constantinople, le 7 janvier, qu'une révolte venoit encore d'éclater dans l'Albanie, par suite du recrutement.

RÉPUBLIQUE ARGENTINE.—Nous avons annoncé la capture de la flotte argentine par le capitaine Woorhees de la marine des Etats-Unis. D'après une correspondance du Morning-Herald, le commodore Daniel Turner auroit désapprouvé ce coup de main. L'affaire est en train d'être discutée officiellement entre le gouvernement oriental et le consul des Etats-Unis à Montévideo, et ce dernier devra la soumettre pour plus amples renseignemens au chargé d'affaires de Buenos-Ayres. On pense généralement que le capitaine Woorhees sera renf voyé le plus tôt possible aux Etats-Unis pour y être dépouillé de ses insignes.

CHAMBRE DES DÉPUTÉS.

La chambre a adopté dans sa séance d'aujourd'hui. à la majorité de 190 voix contre 56, le projet de loi sur la police des chemins de fer, qui l'occupoit depuis plusieurs jours.

Elle a également adopté le projet de loi sur l'appropriation au service de la chambre des bâtimens acquis en vertu de la loi du 30 juin 1845, et voté les articles du projet de loi sur l'achèvement de divers édifices publics.

A l'occasion de la fixation de l'ordre du jour, M. Lherbette a demandé que la chambre avancât la discussion de la loi sur les fonctionnaires, loi qui acquiert, selon l'orateur, de l'opportunité par un fait inséré au Moniteur. Ce fait, c'est la destitution d'un député fonctionnaire immédiatement après un vote émis dans cette chambre, député dont les fonctions n'avoient rien de politique.

La discussion sur ce projet de loi est effectivement avancée et fixée à. mercredi.

NÉCROLOGIE.

Nous apprenons la mort de M. Madrolle, de Chanceaux (Côte-d'Or), un des hommes honorables de la Bourgogne, et dont la santé, florissante jusque-là, faisoit encore espérer de longs jours à sa famille et aux amis nombreux que lui avoient acquis, à toutes les époques, ses lumières, son esprit de justice et son impartialité.

Aussi la population entière du pays assistoit-elle à son enterrement, en donnant des marques d'une sincère affliction.

La probité de M. Madrolle étoit proverbiale dans la contrée. C'est peut-être de tous les maires celui qui mérita le mieux de l'être, qui le fut le plus souvent, le plus longtemps, et aux époques les plus difficiles. Il étoit aussi le juge de paix d'une commune, qu'il ne voulut jamais quitter, quoiqu'on lui eût proposé à plusieurs reprises la place la plus lucrative de l'arrondissement. C'étoit là que venoient le voir les plus dignes préfets de la Côte-d'Or. C'étoit là que venoit passer des mois, encore cette année, un fils dont le nom et les travaux indépendans et hors de ligne sont chers à la France et même à l'Eglise, et qui se plaisoit à lui rendre et à lui faire rendre honneur.

M. Madrolle père avoit à un haut degré ce bon sens qu'on a défini le ministre

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des affaires; il n'étoit même pas étranger à cette intelligence acquise qui procure tant d'avantages au bon sens. Les journaux de 1816 ont mentionné honorablement son Projet de Réglement municipal, où se trouvoient, selon un rapport écrit de M. Decazes, alors ministre de l'intérieur, tous les élémens de la meilleure loi sur ce fondamental sujet.

Aux élections de Semur, de Dijon, ou de Châtillon, il disoit toujours: Préférant le plus grand nombre d'amis, jc vote avec le plus grand nombre. Aussi, à cela près sans doute, l'on sait que M. Madrolle, de Paris, se plaît toujours à nommer son père son premier et son meilleur maître en administration, en droit et surtout en loyauté. Ce sont là des titres de noblesse qui ne sont pas communs, et qui obligent bien aussi un peu.

M. Madrolle est mort le 16 janvier dans sa maison de Chanceaux.

CHANTAL.

Nous avons déjà recommandé à nos lecteurs une publication dont le succès est justifié par l'importance qu'elle s'est acquise dans la presse, pendant trois années de dévouement et de luttes courageuses soutenues au nom des saines doctrines: nous voulons parler de la Lecture et la Censure, sur laquelle nous croyons devoir appeler de nouveau l'attention du public religieux et éclairé. Deux mots caracté riseront cette revue : ses rédacteurs assurent qu'elle a pour but de fonder avec le produit de ses abonnemens des bibliothèques gratuites populaires dans les paroisses où ces abonnemens sont souscrits.

Chaque réunion de six abonnemens donne droit à une bibliothèque de 40 volumes. Ce but justifie à lui seul les sympathies qui ont partout accueilli cette intéressante publication.

M. GAUTHIER, chef d'orchestre, maître de chapelle, professeur de composition et d'orgue à l'institution royale des Aveugles, organiste de Saint-Etienne-duMont, membre de la société académique des enfans d'Apollon, vient de faire paroître un ouvrage intitulé: Le Mécanisme de la composition musicale, ou Analyse de toutes les productions de musique intrumentale, dédié à M. Michel Caraffa, membre de l'Institut et professeur de composition à l'Ecole royale de nusique, directeur du Gymnase musical, etc.

Cet ouvrage, dont l'auteur de Mazaniello a bien voulu accepter la dédicace. renferme dans le plus grand développement des notions de toute espèce sur toutes les productions de musique instrumentale, depuis la simple sonate jusqu'à l'ouverture et la symphonie à grand orchestre inclusivement. Cet ouvrage se vend 2 fr., et se trouve à l'Institution royale des Aveugles, boulevart des Invalides, 32, ainsi que chez Pourcau, libraire, rue de la Harpe, 85, et Galerie de l'Odéon, 3.

Le Gérant, Adrien Le Clere.

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JEUDY 6 FÉVRIER 1845.

(N° 4021.)

JACQUELINE PASCAL, par M. V. COUSIN. -1 vol. in-12.

(Premier article.)

M. Cousin a fait trève aux grandes spéculations philosophiques. Il s'est fait depuis quelque temps critique et éditeur. Il a publié, en 1843, des observations sur les Pensées de Pascal, dont nous avons rendu compte dans ce Journal (1). Aujourd'hui ce sont des écrits de la sœur qu'il met en lumière.

Jacqueline étoit la seconde sœur du célèbre auteur des Pensées. Elle se fit religieuse à Port-Royal, où elle devint maîtresse des novices et sous-prieure. Elle étoit tante de Marguerite Perrier, pensionnaire dans cette même maison de Port-Royal, et sur laquelle se seroit opéré le miracle de la sainte épine, que Jacqueline célébra dans une pièce de vers insérée dans le présent recueil. Jacqueline avoit reçu du ciel un très-heureux naturel. M. Cousin va jusqu'à dire qu'elle n'étoit inférieure à son frère Pascal, ni par l'esprit, ni par le caractère; et on ne sait, ajoute-t-il, où elle ne seroit point parvenue, si elle eût fait cas de la gloire, si elle eût pris soin des facultés qui lui avoient été départies. Elle avoit en particulier de merveilleuses dispositions pour la poésie. M. Cousin a donc entrepris de communiquer au public ce qui nous restoit de Jacqueline Pascal; et il faut avouer que l'on ne voit pas sans quelque intérêt un philosophe célèbre, un grand écrivain recueillir, annoter avec soin les écrits, - je ne dirai pas d'une humble, et l'on verra bientôt pourquoi, — mais d'une obscure religieuse.

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Ces écrits, précédés d'une notice sur Jacqueline, par madame Perrier, sa sœur, se composent de quelques morceaux de poésie, de lettres, de réflexions pieuses et d'un règlement à l'usage des pensionnaires de Port-Royal. On peut lire avec fruit les Pensées édifiantes sur le mystère de la Mort de notre Seigneur Jésus-Christ, lesquelles furent alors trouvées si belles qu'on eut l'idée de les joindre aux Pensées de Pascal. Les lettres de Jacqueline montrent de l'instruction, du naturel, de la facilité; mais elles n'ont pas la grâce et la légèreté du style épistolaire. Une de ces lettres contient le récit d'une visite de Descartes à Pascal; une autre offre des détails intéressans sur la conversion de l'auteur des Pensées.

M. Cousin a joint ses propres réflexions à celles de Jacqueline; il a placé à la tête du volume une espèce d'introduction où il passe pour ainsi dire en revue les femmes célèbres du XVIIe siècle. Ce morceau,

(1) Voyez les Numéros 3737 et 3743.

L'Ami de la Religion. Tome CXXIV.

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