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On lit dans le Journal des Débats :

« Nous avons rendu compte, il y a quelques années, d'un savant ouvrage sur le Pouvoir des Papes au moyen âge, par M. l'abbé Gosselin, directeur au séminaire de Saint-Sulpice. Sans partager toutes les opinions de l'auteur, nous avons dû rendre justice à sa modération, à sa science, à son esprit de paix et de conciliation. Sur la grande question de savoir à quel titre les Papes se sont arrogé au moyen-âge le droit de déposer les princes, M. l'abbé Gosselin répondoit : Les Papes n'ont fait qu'appliquer le droit public en vigueur à cette époque, et universellement reconnu. Les souverains frappés, tout en réclamant contre la justice de l'application qu'on leur faisoit de ce droit, ne réclamoient pas contre ce droit lui-même. Voilà la thèse que M. l'abbé Gosselin a développée en l'appuyant sur une immense érudition. Aujourd'hui M. l'abbé Gosselin publie une nouvelle édition de cet ouvrage, ou plutôt un nouvel ouvrage, sur le même sujet, car ce qui n'étoit qu'un Mémoire est devenu' un vrai livre, un livre complet sur un des points les plus intéressans de l'histoire du moyen-âge. L'ouvrage est précédé d'une introduction sur les honneurs et les prérogatives temporelles accordés à la religion et à ses ministres chez les anciens peuples, et particulièrement sous les premiers empereurs chrétiens. Nous ne faisons qu'annoncer aujourd'hui cette publication vraiment digne d'attirer l'attention de tous les hommes sérieux. Plus tard nous rendrons un compte détaillé de l'ouvrage de M. l'abbé Gosselin.

» C'est encore au même auteur qu'il faut attribuer une histoire littéraire de Fénelon, histoire faite pour servir d'introduction aux œuvres de l'évêque de Cambrai. Le séminaire de Saint-Sulpice se fait honneur d'avoir donné aux lettres et à la religion la meilleure édition qui existe des ouvrages de Fénelon. M. l'abbé Gosselin, si nous ne nous trompons, a été l'ame et le principal coopérateur de cette grande entreprise. Personne n'étoit donc plus en état d'approfondir tontes les questions littéraires, bibliographiques, dogmatiques, qui se rattachent à la vie du grand évêque. Qui voudra connoitre complètement Fénelon devra lire l'ouvrage de M. l'abbé Gosselin. »

La propagande anti-religieuse annonce avec fracas une deuxième édition plus ou moins réelle du dernier ouvrage de M. Michelet. Plusieurs journaux annoncent d'autre part une réponse du Solitaire, que publieroit l'éditeur A. Sirou. C'est une heureuse pensée à laquelle applaudiront ceux qui connoissent la plume ingénieuse, incisive et piquante à laquelle nous devons LES JESUITES. Le Solitaire, en mettant sa verve et son talent connu, au service d'une cause honorable de tout point, servira la religion, et saura faire bonne justice de tant d'allégations délirantes et monstrueuses.

Le retour des protestans au catholicisme se continue dans le diocèse de La Rochelle. La céleste miséricorde, dans l'année 1844, a ramené 24 nouveaux convertis aux pieds du divin Pasteur. Ces retours sont d'autant plus remarquables, qu'il a été fait plus d'efforts que jamais. pour y mettre obstacle. Des colporteurs gagés, chargés de faire des prosélytes, d'ouvrir des controverses et de répandre des brochures, out parcouru les contrées du diocèse, où les prêtres sont plus rares, et la religion plus en souffrance, dans l'espoir d'un succès plus facile.

Des réunions, souvent présidées par des ministres venus de loin, ont eu lieu dans des auberges ou des appartemens loués à cet effet, mais les résultats ont trompé l'attente des zélateurs ; sî la curiosité leur a procuré des anditeurs et quelquefois l'impiété des partisans, il est du moins certain qu'ils n'ont pas fait d'apostats sérieux. On a cependant osé imprimer dans un journal protestant, que 30 communes avoient embrassé la réforme.

Dieu, qui tire sa gloire même du mal, a permis que l'éveil donné à certaines populations, d'abord assez indifférentes, tournât au profit du catholicisme. Une des communes qui se sont montrées les plus fidèles, en repoussant l'erreur, vient d'être érigée en succursale; c'est la récompense bien méritée de son attachement à la foi.

reur,

Quand l'exemple du retour aux principes catholiques est donné au monde par les hommes les plus éclairés de l'Angleterre, de l'Allemagne et de la Suisse, entreprendre de nouvelles conquêtes au profit de l'ern'est-ce pas un projet malheureux? Le moment en vérité nous paroît mal choisi. Il est vrai qu'afin de prévenir l'effet de ces puissans exemples, on avoit pris ici le parti de les nier. On a même vu certain personnage affectant les façons et l'accent anglais, parcourir en chaise de poste les grandes routes du département, répétant aux paysans des bourgs et des villages qu'il ne falloit rien croire des prétendues conversions des Anglais ou des autres; qu'au contraire le jour arrivoit où toute la France alloit devenir protestante.

Par malheur, les journaux à la main, il étoit aisé de confondre l'imposture, et force a été plus tard de rendre hommage à la vérité.

Qui oseroit nier en effet les conversions des RR. Bernard Smith, du college de Sainte-Madeleine; Georges Talbot, du collège de SainteMarie; Charles Seager, maître ès-arts; et Daniel Parsons, du collége d'Oreil?

Il n'est pas moins incontestable que MM. Grant, du collège de SaintJohn; Leigle, du collège de Brasenose; Renouf, Lockhart, Sling, Tickel et Douglas, tous bacheliers; Murray, bachelier et membre du parlement, ont embrassé la foi catholique.

N'a-t-on pas vu le R. Robert Sibthorp, si renommé par ses talens, renoncer aux plus brillantes espérances, et le R. William Penny abandonner généreusement des bénéfices considérables pour embrasser le catholicisme? Nous ne parlons pas des nombreuses abjurations que ces grands exemples déterminent chaque jour.

La Suisse n'a-t-elle pas vu récemment l'ex-antistès Hurter, vaincu par la vérité, abjurer ses erreurs à Rome, et triompher, dans sa patrie, des plus odieuses persécutions? La Prusse n'est point étrangère à ce mouvement: la conversion de M. Arthur Franke, théologien protestant, est avouée par la Gazette de Berlin qui appréhende de nouvelles défections.

Certes, on conçoit aisément l'intérêt qu'auroient certaines gens à

dissimuler de semblables faits, mais il faut reconnoître, bon gré mal gré, que le catholicisme, ainsi que l'avoit prévu M. de Maistre, commence à parler anglais, en Europe, en même temps qu'il y parle francais. Cet événement immense, Dieu le préparoit de loin, comme l'avoit si hautement proclamé Bossuet; Dieu le conduit, et nulle force humaine ne sauroit arrêter l'impulsion donnée aux esprits par celui qui triomphe, quand il lui plaît, des cœurs et des intelligences.

Pour notre part, nous sommes heureux de publier les abjurations qui ont eu lieu, dans le diocèse de la Rochelle, comme il suit : Dans l'arrondissement de la Rochelle, 1; de Saintes, 3; de Jonzac, 1; de Saint-Jean-d'Angély, 3; de Rochefort, 8; de Marennes, 18. En tout : 34 convertis, dont 24 hommes et 10 femmes.

S. E. le cardinal de Bonald, archevêque de Lyon, a cru devoir publier un nouveau Mandement digne de son zèle si connu pour la doctrine et l'enseignement ecclésiastique, et du dévoùment au SaintSiége dont l'illustre prince de l'Eglise est un des plus intrépides défenseurs. Cette solennelle manifestation de censure épiscopale porte ce titre significatif :

Mandement, etc. portant condamnation d'un livre intitulé: Manuel du DROIT PUBLIC ECCLÉSIASTIQUE FRANÇAIS, par M. Dupin, docteur en droit, procureur-général, et d'un écrit du même auteur, intitulé : Réfutation des assertions de M. le comte de MontaLEMBERT DANS SON MANIFESTE CATHOLIQUE.

Dans ce jugement solennel sur des questions trop débattues, et sur un livre dont nous avons signalé les tendances fâcheuses, le savant pontife emprunte sans cesse contre le Manuel, l'autorité de Bossuet et de Fleury, ces deux imposantes et illustres personnifications des véritables opinions gallicanes du clergé de France, en un temps où ces opinions signifioient quelque chose dans l'Eglise. Ne pouvant donner aujourd'hui des citations plus étendues de cette censure épiscopale, nous nous bornons, pour le moment, au passage suivant. On y verra sans doute que la pensée de l'illustre cardinal, en condamnant le livre de M. Dupin, a été de blåmer en même temps cette manie récente de certains écrivains, de s'ingérer à traiter des questions théologiques qui ne sont point de leur compétence, et dont le résultat ne tend qu'à jeter le trouble et la division dans le clergé, tout en faussant les idées d'un grand nombre de fidèles, sur la véritable puissance spirituelle du chef de l'Eglise :

« C'est surtout, dit S. Em., quand une tentative contre la religion est soutenue par le prestige d'un grand talent, par l'éclat du rang et des dignités, qu'elle doit nous inspirer plus d'alarmes, et tenir plus en éveil notre sollicitude.

» Nous venions de remplir le devoir de notre charge en publiant notre opinion sur le projet de loi sur l'enseignement secondaire, quand parut dans notre diocèse un livre, que son auteur destine, il est vrai, à l'instruction du clergé catholique, mais qui ne peut être de quelque usage que dans les Eglises constitutionnelles, civiles ou schismatiques, ou plutôt qui n'est propre qu'à former des Eglises acéphales, sans autorité, et portant en elles-mêmes, malgré quelques signes de vie,

des germes de dissolution et de mort. Nous voulons parler du Manuel du droit public ecclésiastique français, par M. Dupin, Député, Procureur-général près la Cour de Cassation. Cet ouvrage dut attirer notre attention. Il n'y avoit pas longtemps qu'un Manuel des Curés, plein de la même doctrine, avoit été publié à Murcie en Espagne. Le savoir de l'illustre avocat, les fonctions éminentes dont il est revêtu, même les paroles sévères qu'il nous a adressées dans un de ses derniers discours, ne sont pas des raisons qui puissent nous empêcher, N. T. C. F., de vous signaler ce qu'il y a d'opposé à la religion catholique dans son ouvrage. Puisqu'il l'a composé pour le clergé, il permettra à un évêque d'en examiner la doctrine et d'en relever les erreurs. « Le Pape, dit l'abbé Fleury, et même tout évêque est en droit de condamner tout écrit contraire à la bonne doctrine, de quelque manière qu'il vienne à sa connoissance.... Son devoir l'excite de luimême à prévenir les mauvaises impressions qu'un écrit pourroit faire dans le public.

« La profession de foi par laquelle l'auteur du Manuel termine l'introduction de cet ouvrage, étoit là pour nous rassurer sur son orthodoxie. « C'est l'ouvrage d'un catholique, dit M. Dupin, mais d'un catholique Gallican, d'un homme qui aine la religion, qui honore le clergé, et qui révère dans le souverain Pontife, le chef de l'Eglise universelle et le père commun des fidèles. » Ces belles paroles qui ne nous surprennent pas de sa part, devoient nous donner l'espérance de ne rien rencontrer dans son écrit qui pût affliger un catholique, et qui ne fùt conforme à l'enseignement de l'Eglise. Nous le dirons cependant avec douleur, le ton général du Manuel ne respire pas assez cet attachement et ce respect qu'un fils doit à son père, et dont la loi de Dieu lui fait une obligation, Aux pages XXII, 34, 35 et autres, l'expression est loin de rappeler le langage d'un catholique ancien. Jamais Bossuet, Arnauld, Nicole n'ont appliqué au Pape cette dénomination de prince étranger en parlant de ses droits les plus essentiels. Le Docteur dout nous sommes obligés d'écouter la parole, le Pasteur que nous devons suivre dans les voies chrétiennes, celui que nous appelons du nom de Père, ne sera jamais un étranger pour nous, quand il nous instruit, qu'il nous dirige et nous bénit. « Il » faut toujours, dit l'abbé Fleury, nous souvenir que nous sommes catholiques et » que nous reconnoissons le Pape pour notre père commun. Voyons comme agit >> un fils sage et chrétien, quand il a quelque différend avec son père pour des in» térêts opposés. Prenons garde que nos manières dures et fières ne semblent au» toriser les hérétiques dans leur mépris pour le Saint-Siége. » Puisque l'auteur du Manuel du droit public ecclésiastique français veut que son ouvrage soit classique dans nos écoles cléricales, il auroit dû mettre assez de réserve dans ses expressions, pour ne point contrister les cœurs si catholiques des jeunes élèves du sanctuaire. »

Malgré la perfide insinuation du Siècle, qui tend à faire croire que l'arrivée de M. de Salvandy au ministère a pu seule donner à un prélat aussi éminent le courage de condamner l'œuvre de M. Dupin. il restera démontré que si les légistes ont le droit de s'immiscer dans les questions de théologie et de droit ecclésiastique, les évêques ont bien l'autorité de censurer les erreurs de ces docteurs sans mission.

Le nouvel ouvrage de M. l'Archevêque de Paris sera mis en vente vers la fin de la semaine, à la librairie de MM. Ad. Le Clere et C. On lira

avec intérêt la dédicace que le savant prélat adresse à la jeunesse, principal objet de la vive sollicitude qui lui a inspiré cet ouvrage :

A LA JEUNESSE.

« An terme de vos études classiques, et au moment de vous engager dans l'une des diverses carrières qui vont s'ouvrir devant vous, il est une époque critique dont personne ne peut nier les nombreux périls : la jeunesse les trouve presque toujours dans l'inexpérience de l'âge, dans l'entraînement des sens, de l'imagination, et dans des maximes d'autant plus propres à égarer qu'elles sont plus confuses et plus en harmonie avec les mauvais penchans de l'ame. Un ensemble d'erreurs réduit en système n'est pas impossible, mais se rencontre rarement dans les jeunes intelligences. Les fausses vues de l'esprit viennent presque toujours après les erreurs de la conduite. Quand le cœur s'est égaré, et qu'il a subi la puissante influence des passions, la raison commence alors à chercher des principes pour justifier cet égarement. C'est donc le cœur qu'il faut préserver avant tout; c'est lui qu'il faut défendre, lorsque l'Esprit tentateur vient lui dire : Je te donnerai le plaisir, le pouvoir et la fortune, si tu consens à m'adorer. Mais il faut un aliment à ce cœur, il lui faut un 'amour; et il n'y en a que deux qui se disputent l'empire du monde : l'amour de soi qui peut être porté jusqu'au mépris de Dieu et des hommes, et l'amour de Dieu et de ses semblables assez généreux quelquefois pour conduire au mépris de soi-même. Tu aimeras, vous a dit une mère chrétienne, aussitôt que vous avez été capables d'aimer, tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur, de toute ton ame, de toutes les forces. Aimez donc, jeune homme dont les affections sont si ardentes, aimez ce Père de votre ame, aimez l'Eglise votre mère; elle vous enfanta à la foi, qui est votre lumière; à la grâce, qui est votre force; aimez à secourir vos frères par vos conseils et vos exemples; aimez surtout ceux que Dieu a le plus aimés, le pauvre privé de pain et de vêtement, l'enfant délaissé, la veuve sans appui, tous les êtres souffrans et oppressés. Lorsque vous aurez goûté ces pures jouissances, vous serez indifférens aux plaisirs qui détendent tous les ressorts de l'ame, et la corrompent après l'avoir énervée. Ainsi élevée, épurée et ennoblie, elle ne voudra plus descendre à d'abjectes affections, ou se concentrer dans un vil égoïsme; elle sera dans ́une admirable disposition pour comprendre toutes les vérités, mais surtout les vérités évangéliques, tous les titres de la révélation chrétienne et de l'Eglise catholique; elle n'aura aucun besoin de longues et subtiles discussions. L'œil de cette ame étant pur et simple, n'ayant jamais éprouvé les éblouissemens du sophisme, ne s'étant pas fatigué à discerner des objets enveloppés de ténèbres, recevra sans effort une lumière qui lui sera offerte sans nuages. Telle est la voie simple, la grande voie, la voie royale, la voie divine dans laquelle vous devez marcher. Avec la vertu, vous y trouverez la vérité. A défaut de raisonnement victorieux, vous défendrez cette vérité divine par vos pieux sentimens, surtout si vous avez eu le bonheur de les convertir en de saintes habitudes. Mais il peut arriver que ces sentimens soient ou peu enracinés dans votre ame, ou qu'après l'avoir profondément pénétrée, ils y aient été ébranlés par de violens orages, obscurcis par de nuageuses théories. Il peut se faire qu'après avoir marché avec sécurité à la lumière de l'Evangile, vous vous trouviez comme plongés subitement dans une désolante obscurité, comme perdus dans des voies nouvelles dont aucune ne vous offre un terme assuré. Parmi les divers moyens que Dieu vous ménage dans sa miséricorde pour retrouver la vérité et la vertu, il en est un qui convient surtout aux esprits cultivés, à ceux qui ont un goût plus prononcé pour les études philosophiques; il consiste à revenir sur vos pas, jusqu'à ce que vous ayez retrouvé le vrai point de départ, reconnu les signes trompeurs qui vous firent dévier,

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