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Mouscron, le 15 juill. 1886, Henri Lepoutre, particulier à Mouscron, a disposé comme il suit Je donne et légue aux hospices civils de Mouscron, eu égard aux bons traitements dont j'y suis l'objet, la moitié de la part nette, revenant dans la succession, non liquidée, de M. Charles-François Nollet, décédé à Ixelles-lès-Bruxelles le 10 mars 1885;

Attendu qu'Henri Lepoutre est décédé à Mouscron le 27 oct. 1886, laissant divers légataires universels, etc.; Attendu que, suivant procès-verbal, dressé par ledit notaire Busschaert, le 19 déc. 1889, il a été dressé un projet de liquidation et partage; mais que les parties n'ayant pu s'entendre, il y a lieu de statuer sur les contestations soulevées;

1. En ce qui concerne Auvrey: Attendu que le sieur Auvrey, généalogiste à Rouen, entend prélever à son profit un quart ou 25 p. 100 des sommes ou valeurs revenant à la succession Lepoutre, et ce, en vertu d'une convention sous seing privé, avenue entre lui et le de cujus le 17 mai 1885, enregistrée à Bruxelles, etc.;

--

Attendu que,

dans cette convention, Auvrey révélait à Lepoutre l'ouverture à son profit de la succession testamentaire Nollet; que Lepoutre déclarait ignorer l'existence et l'ouverture de cette succession et n'avoir pas connaissance de sa parenté aux Nollet; que, pour rému nérer Auvrey de son travail et pour prix de cette révélation, Lepoutre cédait à Auvrey le quart ou 25 p. 100 des sommes nettes qu'il recueillerait dans cette succession; qu'il était encore convenu qu'Auvrey s'obli geait de donner son concours à Lepoutre pour le faire mettre en possession de ses droits dans l'hérédité de Nollet; qu'enfin, si Lepoutre ne recueillait rien, Auvrey supporterait personnellement tous les frais faits et à faire; Attendu que les légataires universels de Lepoutre prétendent que cette convention constitue un mandat de faire valoir les droits de Lepoutre à la succession Nollet, et qu'en conséquence, le salaire stipulé peut être réduit par le tribunal à la somme de 1,000 fr., qui constituerait une rémunération équitable; Attendu que cette interprétation méconnaît les termes et la nature du contrat litigieux; qu'en effet, la cession du quart n'a pas été stipulée comme salaire des démarches et dépenses à faire pour réaliser la part de Lepoutre dans la succession Nollet, mais qu'elle a eu pour objet principal la révélation d'un secret dont elle était le prix, ainsi que les démarches et dépenses faites par Auvrey antérieurement à toute convention; qu'on ne saurait reconnaître les éléments d'un mandat dans l'obligation assumée par Auvrey, non pas de représenter Lepoutre dans les actes juridiques relatifs à la succession, mais seulement de Jui prêter son concours pour la réalisation de ses droits; que cette obligation ne forme d'ailleurs qu'un accessoire du contrat dont l'objet principal vient être déterminé; qu'en outre, la clause par laquelle Auvrey prenait à sa charge tous les frais faits et à faire au cas où Lepoutre serait exclu de ladite succession, donne au traité dont s'agit un caractère aléatoire incompatible avec la nature du mandat;

Attendu que ce traité constitue un contrat synallagmatique sui generis, dont la cause

est licite, et qui fait la loi des parties; qu'il doit donc recevoir son entière exécution, pourvu que le consentement n'ait pas été entaché d'un vice, et pourvu que l'obligation ait une vraie cause, consistant dans la réalité du service rendu par le révélateur et dans l'impossibilité pour l'héritier de connaître autrement ses droits et d'en faire constater l'existence; Attendu que les vices de consentement ne se présument pas, et qu'il n'y a pas lieu de s'arrêter à des allégations vagues de dol et de fraude, lesquelles ne sont accompagnées d'aucune articulation de faits ni d'aucune preuve ou offre de preuve;

-

- Attendu que Lepoutre ignorait l'existence et l'ouverture de la succession Nollet, et n'avait pas connaissance de sa parenté avec le de cujus, ainsi qu'il résulte de la teneur du traité; Attendu qu'il résulte encore des documents produits: 1° que Lepoutre n'a été ui appelé ni représenté à l'inventaire fait à la mortuaire Nollet au mois d'avril 1885; 2° que l'exécuteur testamentaire ignorait la parenté de Lepoutre avec Nollet, puisque, dans ses appels d'héritiers faits dans l'Etoile belge dès 1, 10 et 17 mai 1885, il ne remontait que jusqu'aux aïeux du de cujus, alors qu'il eût fallu remonter jusqu'au bisaïeul pour trouver leur auteur commun; 3° que, quelques jours après la dernière insertion, Auvrey a fait parvenir au notaire liquidateur les renseignements généalogiques établissant la parenté de Lepoutre; 4 qu'il est au moins douteux que les trois appels d'héritiers faits sous forme d'annonces dans le journal l'Etoile belge paraissant à Bruxelles, et annonçant l'ouverture de la succession d'un homme qui portait un nom différent, aient pu parvenir à la connaissance d'un vieillard de 84 ans, recueilli dans l'hospice de Mouscron; 5° que le lien de parenté unissant Lepoutre à Nollet était d'autant plus difficile à découvrir que la mère de Lepoutre était le seul enfant d'un second mariage contracté par l'auteur commun, bisaïeul du de cujus, dont la date n'a pu être retrouvée ; Attendu qu'en présence de ces faits et circonstances, il est impossible d'affirmer que, sans l'intervention d'Auvrey, Lepoutre aurait appris l'ouverture à son profit de la succession Nollet; qu'il faut donc tenir pour constant qu'en lui apprenant l'ouverture de cette succession, Auvrey lui a procuré un avantage appréciable en argent, que cette révélation et cet avantage constituent une cause à la convention;

II. En ce qui concerne les hospices civils de Mouscron...;-Par ces motifs;-Dit pour droit que la convention avenue entre Auvrey et Lepoutre le 17 mai 1885 sortira tous ses effets, qu'en conséquence, sur la somme de 26,610 fr. 14, part en pleine propriété de Lepoutre dans la succession Nollet, il revient à Auvrey celle de 6,652 fr. 53, etc. Du 22 juill. 1892. Trib. civ. de Courtrai.

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dévolue pour partie auxdits époux Sels; Attendu qu'il se base sur une convention intervenue entre ces derniers et lui sous la date du 27 mars 1891, et dûment enregistrée; que ces actions sont connexes et qu'il échet d'en ordonner la jonction; - Attenda que, dans la convention précitée, le demandeur expose qu'il croit savoir qu'un droit héréditaire s'est ouvert au profit de l'épouse Sels, par le décès, ignoré d'elle, d'une personne de sa famille, et s'engage à lui révéler ultérieurement, après signature par les autres héritiers, l'origine du droit dont il s'agit, comme aussi à faire toutes les démarches nécessaires pour assurer la reconnaissance de sa qualité d'héritière; que les défendeurs s'obligent, de leur côté, à faire abandon au profit de Bodin du tiers de leur émolument net dans la succession qu'ils recueilleront; Attendu que, le 8 mai 1891, un second écrit, aussi enregistré, a été dressé entre parties pour constater que cette succession est celle de Joseph-Alexis Malpas, décédé à Liège le 18 mars précédent; Attendu que les défendeurs prétendent que les conventions qui servent de base à l'action n'ont pas d'objet et sont sans cause obligatoire; Attendu que, dans les contrats à titre onéreux, l'objet et la cause se confondent en ce sens que l'objet de l'engagement de l'une des parties constitue la cause des obligations de l'autre; Attendu que la révélation d'un droit héréditaire peut être l'objet et la cause d'une convention, lorsqu'elle porte sur un secret véritable, c'està-dire sur une succession qui, suivant toute vraisemblance, n'aurait pas été portée à la conuaissance de l'intéressé par une autre voie; que, dans ce cas, le révélateur, par les investigations auxquelles il se livre et par les dépenses qu'il assume, procure à l'héritier un avantage incontestable; - Attendu que, dans l'espèce actuelle, le demandeur a mis une précipitation excessive à s'adresser aux défendeurs et à leur faire signer les engagements contestés; que la première convention a été souscrite neuf jours à peine après le décès de Malpas, au moment même où l'on procédait à la levee des scellés et où l'on commençait la confes tion de l'inventaire; - Attendu que, les mai, date de la révélation définitive, cinquante jours s'étaient écoulés depuis la mort de Malpas, mais que c'est encore là un de bien restreint, et que, s'il est vrai que les défendeurs ignoraient toujours leur parert avec le défunt et leurs droits à la successia. on ne saurait cependant déduire de là que cette ignorance aurait persisté dans la su te et pendant longtemps;- Attendu, en el t qu'ils habitaient non seulement la mêre ville, mais, pour ainsi dire, le même quartier de la ville que le sieur Malpas; qu'ils étaient parents avec lui au degré de cousins issus de germains, donc à un degré encore assez proche; qu'il suffisait de remonter à l'aïeule du de cujus pour trouver une identité de noms, cette aieule s'appelant MarieAnne Corbusier; que l'on recherchait les he ritiers du défunt, et que des avis avaient para à ce sujet dans les journaux; — Attenu que le 20 août 1838, le père et les frres consanguins de la défenderesse avaient fa partie d'un conseil de famille réuni pou délibérer sur la tutelle de Malpas, Alès

Joseph, qui, à cette époque, était âgé de vingt ans; que celui-ci a donc conuu ses parents Carbusier, et qu'il est possible qu'il en ait parlé à certaines personnes de son entourage; Attendu, en tout cas, qu'une expédition de la délibération du conseil de famille a été trouvée en la mortuaire; que l'on peut et que l'on doit supposer que l'avocat, qui avait fait un premier appel aux héritiers par la voie de la presse, aurait pris soin, voyant que cet appel restait infructueux, de consulter attentivement les titres et papiers dépendant de la succession; que, ne l'eût-il pas fait, il est malaisé d'admettre que le notaire qui aurait été chargé ultérieurement de la liquidation, y eût procédé sans examiner les documents provenant de la mortuaire; Attendu que l'attention de ces hommes d'affaires se serait nécessairement et particulièrement portée sur la composition du conseil de famille tenu en 1838, puisque cette réunion doit, au vou de la loi, se former à l'aide des parents les plus proches dans les deux lignes; Attendu que la délibération mentionne expressément que les Corbusier, dont elle cite noms et prénoms, étaient cousius paternels de Malpas; qu'il suffisait donc de quelques recherches complémentaires, soit à l'état civil, soit ailleurs, ou même d'une insertion dans les journaux, plus détaillée que la première, signalant notamment la parenté des Corbusier avec Malpas, pour amener inévitablement la découverte des liens existant entre la défenderesse et le de cujus; — Attendu qu'il existait en outre, au domicile du défunt, certaines autres pièces dont les défendeurs argumentent avec raison pour établir que la personne qui en avait été constituée dépositaire, pouvait, sans grandes difficultés, retrouver la trace des héritiers paternels; qu'il résulte d'ailleurs du propre aveu du demandeur, confirmé par les pièces du dossier, qu'il n'est arrivé à Liège que le 20 mars pour commencer ses recherches; que, dès le 25, il avait découvert la parenté du défunt avec Paul-Michel Corbusier, père de la défenderesse; que, le surlendemain, il se présentait chez cette dernière, et obtenait des époux Sels la cession du tiers d'une succession qu'il évaluait à 100,000 fr.;

Attendu que, dans ces conditions, il doit être décidé qu'il n'y a pas eu révélation d'un véritable secret; que les conventions litigieuses manquent d'objet réel et de cause valable; que, par suite, c'est sans titre ni droit que le demandeur a pratiqué des saisies-arrêts, et qu'il a exigé le dépôt à la Banque générale de la part attribuée aux défendeurs par l'acte de liquidation du notaire Paes, en date du 20 févr. 1892; — Par ces motifs; - Dit pour droit que les conventions intervenues entre Bodin et les époux Sels-Corbusier le 27 mars et le 8 mai 1891 sont nulles et non avenues, etc.

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TRIB. DE LUXEMBOURG 23 mars 1892.

PREUVE TESTIMONIALE, ADMISSIBILITÉ, Ordre PUBLIC, ACCORD DES PARTIES.

La disposition de l'art. 1341, C. civ., est d'ordre public; le juge ne peut donc admettre la preuve par témoins, quand il s'agit d'une somme supérieure à 150 fr,, alors même que les parties seraient d'accord pour l'admission de cette preuve (1) (C. civ., 6, 1341).

(Meyer C. Cuvel).

M. Cuvel a prétendu qu'avant le 20 juill. 1891, il avait vendu et livré à M. Meyer une vache pour le prix de 180 fr., somme que M. Meyer lui avait payée; que, le 2 juillet de la même année, il avait donné à l'essai au défendeur une autre vache que celui-ci se refusait de rendre ou d'acheter; il a assigné M. Meyer devant le juge de paix, et a conclu à ce qu'il plût au tribunal de paix condamner le défendeur à lui rendre dans le délai de 24 heures la vache donnée à l'épreuve, et à lui payer 5 fr. pour chaque jour de retard; le condamner en outre à lui payer 50 fr. de dommages-intérêts pour jouissance de ladite. vache depuis le 2 juill. Le défendeur a contesté avoir acheté une vache du demandeur, et a soutenu qu'il avait donné à celui-ci, à titre de prêt, une somme de 180 fr., qu'il était vrai que le demandeur lui avait donné à l'essai deux vaches, mais qu'il n'en pouvait garder aucune, à cause de leurs mauvaises qualités; que ces vaches étaient à la disposition du demandeur contre remboursement des 180 fr. à lui prêtés.

A l'audience du 2 sept. 1891, le demandeur a offert de prouver par témoins que le défendeur avait acheté réellement l'une des vaches pour le prix de 180 fr. Sur l'observation du juge que la preuve par témoins, d'après l'art. 1341, C. civ., n'était pas admissible, si le défendeur s'y opposait, celui-ci, loin de s'opposer à l'offre de cette preuve, y a formellement donné son consentement. Le tribunal de paix a immédiatement prononcé, le 2 sept. 1891, le jugement suivant :- - «Le Tribunal;

Attendu que le demandeur a offert de prouver par témoins qu'avant le 20 juill. 1891, il a vendu et livré au défendeur une vache pour le prix de 180 fr., que le défendeur lui a payés; Attendu que celui-ci conteste formellement cette vente, et consent à ce que le demandeur soit admis à en rapporter la preuve par témoins; Attendu que, dans ces circonstances, les parties étant d'accord pour voir admettre la preuve testimoniale, quoique la valeur du litige soit supérieure à la somme de 150 fr., cette preuve peut être admise par le juge; Par ces motifs; Avant faire droit et statuant par le jugement interlocutoire, admet le demandeur, à prouver par témoins... Défère le serment suppléatoire, etc. »

Appel par M. Meyer.

refuser l'entrée de ses salons à toute personne qu'il lui convient d'exclure. V. Trib. de Pontl'Évêque, 25 juill. 1878 (S. 1879.2.188. — P. 1879. 861); Trib. de Saint-Gaudens, 24 août 1881 (S. 1881.2.220. P. 1881.1.1021); V. cep. Trib. de Nice, 2 janv. 1893 (Supra, 2o part., p. 193).

JUGEMENT.

LE TRIBUNAL; Attendu que c'est à tort que l'intimé soutient que l'appelant serait mal fondé à demander la nullité du jugement a quo, les enquêtes ayant eu lieu du consentement formel des parties; qu'une doctrine presque unanime, aínsi qu'une jurisprudence imposante, admettent que la prohibition de l'art. 1341, C. civ., est d'ordre public; que l'accord invoqué des parties n'est d'aucune relevance, celle-ci ne pouvant, aux termes de l'art. 6 du même code, déroger par leur convention aux lois qui intéressent l'ordre public et les bonnes mœurs; tendu que le caractère public était déjà reconnu à cette disposition sous l'empire de l'ordonnance de Moulins, de laquelle elle a passé dans nos codes; qu'à cette époque, on s'accordait à dire que le but de la loi était de réduire le nombre des procès, et d'empêcher la subornation des témoins; que cette dernière considération a certainement un caractère de haute moralité et d'intérêt général;

- At

Attendu qu'il s'ensuit que c'est à tort que le premier juge a admis les parties, même de leur consentement, à prouver une convention Attendu d'une valeur supérieure à 150 fr. que, par voie de conséquence, le premier juge ne pouvait déférer le serment suppléatoire, les présomptions résultant de l'enquête n'étant pas admissibles; — Attendu que la demande reconventionnelle doit être admise, les 180 fr. n'ayant pas été versés au demandeur primitif comme payement, mais bien à titre de prêt; Par ces motifs; - Rejetant toutes conclusions contraires comme non fondées; Reçoit l'appel en la forme, au fond le déclare bien fondé; en conséquence, annule le jugement a quo, et décharge l'appelant des condamnations prononcées contre lui par celuici, etc.

Du 23 mars 1892. Trib. civ. de Luxembourg. MM. Lefort, prés.; Schlesser, proc. d'Etat; Brincour et A. Feyden, av.

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deur la somme de 10 fr., payée comme droit d'entrée au susdit concert, entendre dire pour droit que le demandeur sera autorisé à publier le jugement à intervenir dans trois journaux belges à son choix, et aux frais du défendeur, et ce à concurrence de la somme de 300 fr.;... En ce qui concerne le cinquième chef de la demande : Attendu qu'il 'est établi au procès et reconnu par le défendeur que, le 29 juill. 1891, il a refusé au demandeur, porteur de deux cartes d'entrée, à 5 fr. chacune, l'entrée au concert-gala donné au casino à Blankenberghe; Attendu que ce refus est évidemment illégal et vexatoire, et qu'ayant eu lieu publiquement et sans motifs légitimes, le demandeur est en droit d'en demander réparation; que cette réparation doit être rendue publique comme le refus de recevoir le demandeur au concert du 29 juill. 1891 a été public, surtout quand on envisage la position sociale du déman'deur; Attendu que le défendeur soutient, à tort, que, les cartes d'entrée n'ayant pas été livrées personnellement au demandeur, aucun contrat ne lie les parties; qu'il n'a commis aucun quasi-délit, ayant le droit de ne point traiter avec qui ne lui convient pas, sans devoir s'inquiéter des commentaires de ceux qui viendraient à l'apprendre; qu'en effet, annonçant un concert-gala, abonnement suspendu, à 5 fr. d'entrée, toute personne nantie d'une carte d'entrée, délivrée au contrôle, avait évidemment le droit incontestable d'entrer au casino et d'y entendre le concert; qu'il est impossible d'admettre qu'après le payement de la carte, l'entrepreneur du concert peut refuser l'accès de la salle, ce qui conduirait à l'arbitraire le plus absolu; que la carte est si peu personnelle qu'elle ne mentionne aucun nom; que ce qui est vrai, c'est qu'elle ne donne le droit d'entrée qu'à une seule personne; Attendu que le défendeur soutient encore en vain que, comme préposé de la ville, il a le droit de police à exercer dont il ue doit rendre compte qu'à l'administration communale, et que, conséquemment, il pouvait s'opposer à l'admission du demandeur au concert du 29 juill. dernier; qu'en effet, ce droit de police ne pourrait s'exercer qu'en cas de troubles ou inconduite pendant le concert, ou bien au cas où une personne se présenterait dans des conditions inconvenantes; qu'il suit même de là que les torts du défendeur sont des plus graves et des plus humiliants; Attendu que le demandeur a donc droit à la restitution de la somme de 10 fr.;- Attendu que le dommage moral sera suffisamment réparé par la publication du jugement en ce qui concerne le cinquième chef de la demande dans deux journaux belges, au choix du demandeur;-Parces motifs, — Statuant en dernier ressort; Dit pour droit que c'est illégalement et vexatoirement que le défendeur a refusé au demandeur l'accès au concert-gala du 29 juill. 1891;- Condamne le défendeur à restituer au demandeur la somme de 10 fr., payée comme droit d'entrée au susdit concert-gala; - Autorise le

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(1) On admet assez généralement que la distance prescrite pour l'établissement des vues droites et obliques, n'est pas obligatoire entre propriétés séparées par une voie publique. V.

demandeurà publier le présent jugement, en ce qui concerne le cinquième chef de la demande, dans deux journaux belges, à son choix, ce à concurrence de 200 fr., récupérables sur le défendeur par simple quittance des imprimeurs, etc.

Du 25 déc. 1891. - Trib. comm. de Bruges. MM. Willems, prés.; Stevens et Wauwermans (du barreau de Bruxelles), av.

COUR D'APPEL DE FRIBOURG 19 octobre 1892. SERVITUDE, VUE, DISTANCE, TERRAIN PUBLIC. RUE, PASSAGE, ECOULEMENT DES EAUX.

La distance prescrite pour l'établissement de vues directes et obliques sur l'heritage voisin n'est pas obligatoire entre propriétés séparées par un terrain affecté à l'usage et aux besoins généraux d'une commune, alors même que ce terrain ne présenterait pas le caractère d'une rue ou d'un passage public, et que, par exemple, il ne servirait qu'à l'écoulement des eaux pluviales ou des immondices de la commune. (1) (C. civ., 675 et s.).

(Heidelberger C. Mottet).

M. Heidelberger, menuisier à Morat, a entrepris, en 1887, de transformer sa maison d'habitation et d'exhausser une grande écurie par lui acquise dans la rue du Temple, à Morat. Après avoir transformé et exhaussé la façade donnant sur la rue, il a commencé des travaux analogues au côté opposé de son bâtiment faisant face à la maison et cour de Mlle Mottet. En exhaussant le mur en face de ladite propriété Mottet, M. Heidelberger a établi des vues, soit deux petites fenêtres dans le mur se trouvant sur l'alignement des limites de sa propriété, au premier étage de sa maison, et quatre fenêtres dans un mur élevé en retraite sur le prédit mur. Il résulte du plan cadastral que la propriété Heidelberger est limitée du côté de la propriété Mottet par un canal-égout à ciel ouvert, et que ce canal, séparant les fonds des parties, est la propriété de la ville de Morat. M. Wattelet, agissant comme curateur de Mlle Adèle Mottet, a sommé M. Heidelberger de murer les fenêtres établies dans son mur et de réparer le dommage qu'il aurait causé au toit de la maison Mottet. Sur le refus de Heidelberger, le tribunal civil du Lac a été saisi de la contestation. Pour la demanderesse Adèle Mottet, il a été conclu à ce que M. Heidelberger soit condamné à boucher, soit murer, les trois fenêtres de l'étage supérieur de sa maison, en face de la propriété de l'instante, ainsi que les deux plus petites fenêtres, soit ouvertures, au premier étage, et à réparer le dommage causé au toit de la maison Mottet, ce éventuellement, à dire d'expert. De son côté, le défendeur Heidelberger a opposé la demande, cumulativement avec des conclusions au fond, tendant au rejet de cette demande, une exception d'irrecevabilité, tirée du fait que l'espace compris entre les fonds des parties était du domaine public.

Ala demande des parties, il a été pro

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cédé à deux expertises à l'effet d'établir l distance des vues, pratiquées par le défendeur, en face de la propriété de Mile Mottet. Puis, le tribunal du Lac, après avoir visité les lieux litigieux, a rendu, le 20 mai 1892, un jugement déboutant Heidelberger de ses exceptions, et reconnaissant Mile Mottet bien fondée dans sa demande, mais seulement en ce qui concerne la suppression des vues établies par Heidelberger, et non en ce qui concerne la réclamation d'une indemnité.“ Appel par Heidelberger.

ARRÊT.

LA COUR; 1o Les exceptions formulées par le défendeur ne sont que des moyens au fond; 2° Il y a donc lieu d'aborder l'examen du fond de la question, et de décider, en première ligne, si les moyens, présentés par le défendeur comme des exceptions, sont de nature à mettre en sérieux échec les fins de la demande. LTribunal du Lac a tout d'abord écarté le moyen de libération tiré de la circonstance que les deux héritages Mottet et Heidel berger sont séparés par un fonds du doma ne public. I a considéré que la règle de l'art. 493, C. civ., applicable même au cas oi les deux fonds n'étaient pas immedia tements adjacents, souffrait une exception lorsque le fonds intermédiaire est une voic publique, et, s'appuyant sur l'opinion de Demolombe, Mourlon, Pardessus, il a refuse d'étendre cette exception au cas où le fonds intermédiaire, bien que du domaine public, n'a pas les caractères d'un passage public, et ne constitue, comme dans l'espèce, qu'un canal-égout. Or, cette opinion ne reflète point le dernier état de la jurisprudence. Dans un arrêt du 18 janv. 1859 (S. 1859.1. 216. P. 1859.603), la Cour de cassation française a posé le principe que la distance prescrite pour l'établissement de vues droites et obliques sur l'héritage voisin n'est pas obligatoire entre propriétés séparées par un terrain affecté à l'usage et aux besoins géné raux d'une commune, alors même que ce terrain ne présenterait pas les caracteres d'une rue ou d'un passage public, et que, pi exemple, il ne servirait qu'à l'écoulem des eaux pluviales ou des immondices de la commune; -3° On ne saurait se refuser a sanctionner une semblable solution en drit civil fribourgeois. Les égouts publics sa au même titre que les rues, partie intégrat du domaine public, et ne sauraient être c fondus avec le domaine patrimonial de FF: ou des communes, puisqu'ils sont affecte l'usage et aux besoins généraux des hot tants. I importe peu, dès lors, que le feu `intermédiaire ne soit pas consacré au pa sage des individus. L'usage que les habitants peuvent faire du domaine public n'était pas limité, il en résulte qu'ils peuvent s'en serve pour y ouvrir des vues (Laurent, Principes de dr. civ., t. 8, n. 50, p. 73); — Esc qui concerne la réparation du dommage zu toit de la maison Mottet, etc.

Du 19 oct. 1892. — C. d'appel de Fribourg.

cable, lorsque ce terrain intermédiure est : terrain communal affecté à l'usage et aux besin généraux des habitants.

CASS. BELGIQUE 9 décembre 1892. HYPOTHÈQUE, VENTE, PURGE, INSCRIPTION, INTERETS, ORDRE, COLLOCATION, PAYEMENT.

En cas de vente volontaire suivie des formalités de la purge, le droit des créanciers hypothécaires sur l'immeuble vendu se transforme en un droit sur le prix aussitôt que ce prix est définitivement fixé (1) (Loi hyp. belge, 16 déc. 1851, art. 87; C. civ., 2151, 2184 et s.).

Mais cette transformation n'enlève au

(1-2-3) La détermination précise des intérêts auxquels un créancier hypothécaire a droit au rang de son hypothèque, dans l'ordre ouvert sur le prix de l'immeuble affecté à sa créance, donne lieu à quelques difficultés, qui ne sont, ni dans la doctrine, ni dans la pratique judiciaire, très nettement éclaircies; il n'est pas sans intérêt de rappeler, à l'occasion de l'arrêt que nous rapportons, quelles questions se posent, et d'indiquer l'état actuel de la jurisprudence en ce qui concerne leur solution.

Sans parler des intérêts qui étaient échus au jour de l'inscription, et qui ont été énoncés dans le bordereau remis au conservateur, ni des intérêts qui ont pu ensuite faire l'objet d'inscriptions particulières au fur et à mesure de leurs échéances, un créancier hypothécaire peut avoir droit: 1° aux intérêts conservés de plein droit par l'inscription au rang de l'hypothèque, à savoir trois années d'après l'art. 87 de la loi hypothécaire belge, ainsi que d'après notre art. 2151, C. civ., tel que l'a modifié la loi récente du 17 juin 1893 (S. Lois annotées de 1893, p. 568.

P. Lois, décr., etc. de 1893, p. 568); 2° aux intérêts courus après la fin de cette première période jusqu'à la clôture de l'ordre ouvert pour la distribution du prix; 3° aux intérêts courus après la clôture de l'ordre jusqu'au jour du payement effectif par l'acquéreur des sommes fixées dans les bordereaux délivrés aux créanciers colloqués.

Ces trois périodes doivent être soigneusement distinguées: elles sont soumises à des règles différentes.

I

La disposition qui détermine et qui limite le temps pendant lequel l'inscription hypothécaire conserve les intérêts et en garantit le payement au rang de l'hypothèque, donne lieu, en France comme en Belgique, à une difficulté très ancienne sur le point de savoir à quel moment précis cette période prend fin, en cas de vente de l'immeuble hypothéqué, suivie de distribution du prix. Il s'agit de fixer le moment à partir duquel il ne sera plus question de limitation légale des intérêts garantis par l'hypothèque, à partir duquel, en d'autres termes, le créancier ne sera plus soumis à la règle qui ne lui donne droit, au même rang que le capital, qu'à un certain nombre d'années d'intérêts. Dans notre législation, avant la loi du 17 juin 1893, il s'agissait en outre et du même coup de déterminer ce qu'il fallait entendre par l'« année courante », dont parlait l'art. 2151, C. civ. En négligeant les opinions émisesautrefois etdepuis longtemps abandonnées, on constate que la controverse subsiste entre deux interprétations.

La première, qui a reçu l'adhésion de la majorité des auteurs, se place au moment de la demande en collocation formée par le créancier; jusque-là, il faut s'en tenir aux intérêts ANNÉE 1893. 11 cah.

créancier hypothécaire aucun des droits
qu'il avait acquis par l'inscription; celle-
ci n'en doit pas moins produire tous ses
effets, et, en vertu du principe que les in-
térêts, comme accessoires, participent à
toutes les prérogatives du capital, tous les
intérêts échus depuis que le droit de pré-
férence frappe le prix doivent être collo-
qués au même rang que le capital (2) (Loi
hyp. belge, 16 déc. 1851, art. 110 et s.;
C.civ., 2151; C. proc., 765 et 768).
L'art. 87 de la loi hypothécaire belge, qui

conservés par l'art. 2151; il peut y avoir utilité à ce que ceux qui recevraient des droits sur l'immeuble du chef de l'acquéreur ne soient pas surpris par la collocation inattendue des créanciers antérieurs pour un grand nombre d'années d'intérêts échus entre la vente et la distribution de prix. V. en ce sens, Lyon, 9 juin 1865 (S. 1865.2.304. P. 1865.1138); Alger,

-

6 janv. 1879, sous Cass. 3 août 1881 (S. 1882.1.
21. - P. 1882.1.31) et les autoritées citées en
note sous Lyon, précité, et sous Bordeaux.
26 août 1868 (S. 1869.2.101.
aussi, Cass. 28 avril 1875 (S. 1875.1.304.
· P. 1869.461). V.
1875.731). Adde en
P.
ce sens, Zachariæ, éd.
Massé et Vergé, t. 5, p. 232, 3 823; Pont, Priv.
et hyp., t. 2, n. 1019; Colmet de Santerre,
Cours anal. de C. civ. (contin. de A.-M. De-
mante), t. 9, n. 131 bis, IV, V; Baudry-Lacan-
tinerie, Précis de dr. civ., t. 3, n. 1396.

Une autre opinion a triomphé en jurispru-
dence. Il faut se placer au moment où l'inscrip-
tion a produit son effet légal, c'est-à-dire au
moment où le droit des créanciers sur l'immeuble
s'est transformé en un droit sur le prix; la situa-
tion de chacun a alors été définitivement fixée;
les créanciers doivent être colloqués comme si
la distribution avait eu lieu dès ce moment; ils
n'ont plus, à partir de cette circonstance, à
s'occuper de sauvegarder leur droit hypothécaire,
qui est réalisé; le procès-verbal de clôture des
opérations de l'ordre ne fera plus tard, sans
créer des droits nouveaux, que déclarer et
constater ceux qui existaient au moment où le
droit du créancier a été transporté sur le prix.
V. en ce sens, Bordeaux, 26 août 1868 (S. 1869.
2.101. P. 1869.461); Alger, 9 mars 1870 (S.
1871.2.15. P. 1871.88); Cass. 30 juill. 1873
(S. 1878.2.79.
P. 1878.349, ad notam); Paris,
27 avril 1877 (S. 1878.2.79.
Cass. 6 mai 1878 (S. 1879.1.160.
P. 1878.349);
Caen, 16 mars 1880 (S. 1880.2.209.
P. 1879.394);
816); 7 avril 1880 (S. 1880.1.220.
510), les notes et les renvois. Adde, Massé et
Vergé sur Zachariæ, 5, p. 233, 823, note 4;
Aubry et Rau, t. 3, p. 423, ? 285; Thézard, Du
nantiss., des priv. et hyp., n. 148; Garsonnet,
Tr. théor. et prat. de proc., t. 4, p. 286, 713,
texte et note 16.

-

P. 1880.

P. 1880.

Ce système est celui qui paraît aussi triompher en Belgique. Lors du vote de la loi hypothécaire, il a été expliqué, dans le rapport fait au nom de la commission, que « c'est au moment où l'inscription produit son effet et confère au créancier un droit sur le prix que s'arrête le terme de trois années d'intérêts placés au même rang que le capital ». La jurisprudence et la doctrine paraissent se prononcer en ce sens. V. outre l'arrêt de la Cour de cassation de Belgique que nous rapportons, un arrêt de la Cour de Gand du 19 mars 1875 (Belg. jud., t. 34, p. 312). Sic, Laurent, Princ. de dr. civ., t. 31,

23

limite le droit du créancier à trois années d'intérêts, cesse, en effet, d'être applicable quand le droit de preference a été transporte sur le prix, la loi ne voulant pas que le créancier hypothécaire souffre du retard apporté au payement du prix (3)(Id.). (Vande Kerchove de Hallebast C. Curateur à la faillite Roman).

26 juin 1891, jugement du tribunal de première instance d'Audenarde, ainsi conçu : « Le Tribunal; - Attendu que, par ex

n. 70; Martou, Priv. et hyp., t. 3, n. 1165.
Cette règle étant admise, on est nécessaire-
ment conduit à distinguer le cas de l'aliénation
volontaire de l'immeuble hypothéqué, et celui
de l'aliénation de cet immeuble à la suite d'une
saisie.

Dans l'hypothèse d'une vente volontaire, on
peut hésiter, pour déterminer le moment où
l'inscription a produit son effet légal, entre la
notification à fin de purge signifiée par l'acqué-
reur, ou, en se plaçant à une époque postérieure,
le jour où le prix à distribuer a été définitive-
ment déterminé par suite de l'expiration du
délai de quarante jours, ou, par suite, de l'adjudi-
cation sur surenchère.

La jurisprudence et les auteurs belges admettent
cette seconde solution. Dans notre espèce, le ju-
gement, qui n'était pas critiqué sur ce point, avait
fixé l'effet de l'inscription à l'expiration des qua-
rante jours qui avaient suivi la notification aux
créanciers inscrits. C'est l'opinion qui a été émise
lors du vote de la loi hypothécaire; c'est celle de
Laurent, op. cit., t. 31, n. 140, et de Martou, loc.
cit. Elle se base sur cette considération que ce
n'est qu'après le délai de quarante jours, ou, s'il
y a surenchère, après la nouvelle adjudication,
que le montant du prix à distribuer se trouve
fixé, et que par suite, à l'une de ces époques seu-
lement, on peut dire que le droit des créanciers
est transformé en un droit sur le prix.

La première solution est au contraire appliquée
en France; on admet que la notification crée pour
les créanciers un droit irrévocable, indépendant
des événements ultérieurs. V. Caen, 16 mars 1880,
précité. V. aussi, Cass. 21 mars 1848 (S. 1848.1.
27. P. 1848.2.72); Bourges, 20 nov. 1852 (P.
1852.2.651); Colmar, 27 avril 1853 (S. 1853.2.
572. P. 1854.2.30), et Massé et Vergé, sur
Zachariæ; Aubry et Rau et Thézard, ubi supra.
La question a été tranchée en ce sens par la
Cour de cassation pour l'application de l'art. 2154,
sur la nécessité du renouvellement décennal de
l'inscription hypothécaire; après controverse,
l'opinion qui l'a emporté est que l'inscription a
produit son effet et n'a plus besoin d'être renou-
velée dès le jour de la notification, sans qu'il soit
besoin d'attendre l'expiration du délai de qua-
rante jours, et sans qu'il y ait à se préoccuper de
l'éventualité d'une surenchère. V. Cass. 15 mars
1876 (S. 1876.1.216. P. 1876.519); la note et
les renvois sous cet arrêt et sous Cass. 14 nov.
1882 (S. 1883.1.177. P. 1883.1.407); Aubry et
Rau, t. 3, p. 379, 280, texte et note 23; Colmet
de Santerre, op. cit., t. 9, n. 134 bis, XIV et XV.

Au cas d'adjudication forcée, à la suite d'une
saisie, on décide en général que c'est au jour
même de l'adjudication que l'effet légal a été
produit. V. Cass. 30 juill. 1873; Bordeaux,
26 août 1868; Alger, 9 mars 1870; Paris, 27 avril
1877; Cass. 6 mai 1878 et 7 avril 1880; Caen,
16 mars 1880, précités. Adde, Martou, op. cit.,
IV PART. 4

1.

ploit du 13 avril 1891, enregistré, les demandeurs, de Bleeckere et consorts, ont assigné les défendeurs pour voir régler par le tribunal la distribution du produit des immeubles vendus le 14 oct. 1887 par le ministère du notaire Raepsaet, et dont le prix n'est pas réglé ; Attendu que les parties s'accordent pour reconnaître que la créance Vande Kerchove, inscrite pour 5,000 fr., est la première en rang; qu'elle est immédiatement suivie de la créance du défendeur Merchie, de 5,200 fr.; qu'enfin, la dernière inscrite est celle du demandeur Mertens; qu'elles sont en désaccord sur le mode de règlement des intérêts afférents à ces créances, et sur l'emploi de ceux à provenir du prix de vente; Attendu que les défendeurs, Vande Kerchove et Merchie, soutiennent que, lors du procès-verbal de vérification des créances, en date du 20 janv. 1888,

285,

t. 3, n. 1125; Aubry et Rau, t. 3, p. 423, texte et note 22; Laurent, op. cit., t. 31, n. 70; Garsonnet, loc. cit. Mais il est tout à fait intéressant de faire remarquer que la Cour de cassation, appelée à trancher la même question au point de vue du renouvellement décennal, donne une solution un peu différente; c'est seulement le jour de la transcription de l'adjudication, et non celui de l'adjudication elle-même, qui serait celui de la transformation du droit des créanciers hypothécaires on se base pour décider ainsi sur les termes de l'art. 717, C. proc., d'après lequel « le jugement d'adjudication dùment transcrit purge toutes les hypothèques, et les créanciers n'ont plus d'action que sur le prix ». V. en ce sens, Cass. 22 janv. 1877 (S. 1877.1.115. P. 1877. 272); et 4 mai 1891 (S. 1891.1.373. - · P. 1891. 1.936). En sens contraire, Bordeaux, 19 nov. 1868 (S. 1869.2.117.-P. 1869.578), les autorités citées en note; et Colmet de Santerre, op. cit., t. 9, n. 134 bis, XVII. Il est clair que nous trouvons là une contradiction dans la jurisprudence de la Cour de cassation; le moment où l'effet légal de l'inscription se produit doit être uniformément fixé, quelle que soit l'hypothèse qui nécessite cette fixation. Il est vraisemblable que la solution nouvelle, admise pour l'application de l'art. 2154, relatif au renouvellement d'inscription, sera étendue au cas qui nous intéresse ici. V. d'ailleurs à cet égard les motifs d'un arrêt de la Cour de cassation du 8 juill. 1879 (S. 1881.1.61. - P. 1881.1.133).

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Entre le jour où l'inscription a produit son effet légal, où le droit du créancier a été transporté de la chose sur le prix, et le jour de la clôture de l'ordre, il peut s'écouler un long espace de temps. Le créancier hypothécaire sera colloqué au rang de son hypothèque pour les intérêts courus pendant toute cette période, sans aucune limitation. Cette solution s'impose; les intérêts sont les accessoires du capital garanti par l'hypothèque; le créancier ne peut souffrir des lenteurs de la procédure; les effets du règlement de l'ordre doivent être ceux qu'aurait produits une distribution immédiate.

On avait décidé ainsi dès avant la loi du 21 mai 1858. V. Cass. 22 nov. 1809 (S. chr.); 5 juill. 1827; 11 nov. 1827; 2 avril 1833 (S. 1833.1.378). La nouvelle rédaction de l'art. 765, C. proc., avec les explications fournies lors de la discussion de la loi, ne peut laisser prise au doute; les in

ils ont été admis au passif de la faillite Roman, avec droit d'hypothèque pour le principal de leurs créances et les intérêts, conformément à la loi ; qu'ils en concluent qu'ils ont, dès lors, le droit d'être colloqués sur le prix des biens vendus et hypothéqués à leur profit, même aussi sur les intérêts à provenir de ce prix, pour la totalité des intérêts de leurs créances; Attendu que cette conclusion n'est pas fondée; qu'en effet, la déclaration de faillite est sans influence sur les droits des créanciers hypothécaires; que ceux-ci peuvent produire à la faillite et se faire admettre au passif, voire même toucher des dividendes en cas de distribution, sauf à les déduire du montant de leur créance; mais que rien ne les oblige à faire cette production; que leurs droits sont réglés par les dispositions légales du 16 déc. 1851, en ce qui concerne leurs inscriptions sur les

térêts cessent à l'égard de la partie saisie le jour de la clôture de l'ordre; c'est évidemment qu'ils ont couru jusque-là, et l'ensemble des textes dit clairement que, jusque-là, ils doivent être colloqués au même rang que le capital. Sic, Nancy, 12 août 1874 (S. 1876.2.22. P. 1876. 195); Cass. 12 juin 1876 (S. 1876.1.376. P. 1876.899); Martou, op. cit., t. 3, n. 1125; Aubry et Rau, t. 3, p. 423, 285; Colmet de Santerre, op. cit., t. 9, n. 131, bis, VI; Laurent, op. cit., t. 31, n. 73; Garsonnet, op. cit., t. 4, p. 285, 286, 713; Dutruc, Suppl. aux Lois de la proc., de Carré et Chauveau, v° Ordre, n. 538 et s.; Albert Wahl, note sous Pau, 2 déc. 1890 (S. 1892. 2.177. P. 1892.2.177). L'arrêt de la Cour de cassation de Belgique affirme à son tour cette règle, que le jugement attaqué avait méconnue : les juges de première instance avaient décidé qu'à partir du jour où l'inscription avait produit son effet légal, les intérêts n'étaient plus garantis par l'hypothèque. Ils avaient en même temps fait tomber dans la masse affectée aux créanciers chirographaires les intérêts dus par l'acquéreur; c'était une double erreur; les intérêts des créanciers continuent à être conservés par l'hypothèque; les intérêts du prix de vente sont d'un autre côté; comme le prix lui-même, réservés aux créanciers hypothécaires.

Notre arrêt fait très justement remarquer que les intérêts qui courent jusqu'à la clôture de l'ordre sont toujours ceux fixés par le titre de la créance; ce ne sont pas ceux dus par l'acquéreur, qui peuvent être déterminés suivant des règles différentes. Il n'y a pas à se préoccuper à cet égard des clauses du cahier des charges, ni du taux des intérêts que rapporte le prix de vente, notamment au cas où il aurait été consigné. Certains arrêts paraissent méconnaître cette idée. V. Cass. 22 nov. 1809; Bordeaux, 26 août 1868, précité. Elle n'est cependant pas douteuse : jusqu'à la clôture de l'ordre, les créanciers ont droit aux intérêts que produit leur capital, sans qu'on ait à se préoccuper de ceux que rapporte le prix à distribuer. V. en ce sens, Grenoble, 28 mai 1878 (S. 1878.2.285.-P. 1878.1135), et la note; MM. Garsonnet et Dutruc, loc. cit.; la note sous Bordeaux, 26 août 1868, précité, et la note de M. Albert Wahl sous Pau, 2 déc. 1890, précité.

III

Après la clôture de l'ordre, les bordereaux de collocation une fois délivrés d'après les règles que nous avons rappelées, les intérêts ne courent

biens, et par celles du 18 avril de la même année, pour le surplus de leurs créances;

Attendu qu'aux termes de l'art. 87 de la loi hypothécaire, le créancier inscrit pour un capital produisant intérêts a droit d'ètre colloqué pour trois années seulement au même rang que pour son capital; — Attendu que la doctrine et la jurisprudence décident que, en cas de vente volontaire suivie des formalités de la purge, comme c'est le cas dans l'espèce, le droit des créanciers hypothécaires sur l'immeuble venda se transforme en un droit sur le prix, aussitôt que ce prix est définitivement fixé, et que les trois années d'intérêts conservées par l'inscription hypothécaire sont celles qui précèdent le moment où s'opère cette transformation; qu'il suit de là que les intérêts ont continué à courir au protit des défendeurs, Vande Kerchove et Merchie, avec

plus contre le débiteur, mais contre l'acquéreur; celui-ci les doit aux créanciers pendant l'intervalle qui s'écoule entre le règlement définitif et le payement du montant des collocations. V. Cass. 12 juin 1876; Nancy, 12 août 1874; Pao, 2 déc. 1890, précités; Garsonnet, op. cit., 1. 4, p. 699, 841; Dutrue, loc. cit. V. aussi la mote précitée de M. Albert Wahl, et les autorites auxquelles il renvoie.

Mais les intérêts, qui courent pendant celle période au profit des créanciers hypothécaires, sont ceux du prix d'acquisition, d'après le cabier des charges qui fixe les conditions de la vente, ou, s'il y a eu consignation, ceux dus suivant les règlements de la Caisse des dépôts et consignations: il peut y avoir une différence entre les intérêts auxquels le créancier hypothécaire a en droit jusque-là et ceux qu'il va toucher à partir du jour du règlement définitif de l'ordre. Cette distinction n'est pas faite dans l'arrêt que nous rapportons ni dans d'autres arrêts déjà cités. V. Cass. 22 nov. 1809; 14 nov. 1827; 2 avril 1833; Nancy, 12 août 1874, précités. Souvent elle ne présente pas d'intérêt pratique; elle peut cepesdant en avoir, s'il y a une différence entre le taux des intérêts dus aux créanciers hypothe caires et celui des intérêts du prix à distribuer. Les créanciers ont d'ailleurs, s'il y a lieu, un recours contre le débiteur pour la difference d'intérêts qu'ils n'ont pas reçus de l'acqué: mar V. MM. Garsonnet, Dutrue, loc. cit.; et la pole sous Grenoble, 28 mai 1878, précité.

Les intérêts du prix d'adjudication continuent ainsi à être affectés au payement des créanc«n hypothécaires. Ce sont bien en effet les creat ciers colloqués qui, seuls, ont droit, au prorata du montant de leur collocation, aux inters courus jusqu'au payement effectif du prix; lear droit d'hypothèque n'est pas éteint, il ne le sera que par le payement. Sic, M. Garsounet, op. cit. t. 4, p. 720, 848, et p. 736, § 851. Sans doute, pour des raisons qu'il serait facile de rappeler, ils ne peuvent réclamer que leur part proportionnelle des intérêts du prix de vente, cette pet fût-elle inférieure aux intérêts qui ont con à leur profit contre le débiteur; mais sauf cette règle, qui ne peut leur causer un bien grand préjudice, la garantie de leur hypothèque eontlass à sauvegarder, au même rang que le capual, le* intérêts courus après le règlement de fordre jusqu'au payement effectif par l'acquéreur. ALBERT TISSIER,

Agrégé à la faculté de droit de $112.

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