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§ 3. L'organe délibérant du département. - Conseil général et commission départementale (1).

Article 1. Le conseil général (2).

No 1. Règles d'organisation.

A. Règles générales de composition. Il y a un conseil général par département. Le conseil général est une assemblée délibérante composée de représentants élus au suffrage universel direct, à raison de un par canton, quelle que soit la population du canton. Les conseils généraux sont renouvelables par moitié de trois ans en trois ans, ce qui porte à six ans la durée du mandat de chaque conseiller. Le roulement régulier des séries est établi a l'heure actuelle (juill. 1913, 1916, 1919, etc.), mais il peut se faire qu'un conseil soit dissous; à la suite de la dissolution, le roulement sera interrompu car il y aura eu élection intégrale; alors, pour rétablir le roulement, à la session qui suivra cette élection, le conseil général divisera les cantons en deux séries en répartissant, autant que possible, dans une proportion égale les cantons de chaque arrondissement dans chacune des séries et il procédera à un tirage au sort entre les deux séries pour régler l'ordre du renouvellement (art. 21); la première série sortante ne fera que le temps restant à courir des trois ans. Le conseil général doit toujours être au complet, lorsqu'un membre disparaît il y a lieu à élection complémentaire. Toutefois, si le renouvellement légal de la série à laquelle appartient le siège vacant doit avoir lieu avant la prochaine session ordinaire du conseil général, l'élection partielle se fera à la même époque (art. 22).

B. Les élections au conseil général. - Électeurs. Ce sont les électeurs ordinaires (V. p. 156 et s.).

Eligibles. - Sont éligibles tous les citoyens âgés de vingt-cinq ans accomplis qui réunissent les conditions suivantes : 1° inscription sur une liste électorale quelconque, ou justification du droit à être inscrit avant le jour de l'élection; 2o attache légale avec le département établie par l'un ou l'autre des faits suivants : a) domicile; b) inscription au rôle d'une des contributions directes au 1er janvier de l'année dans laquelle se fait l'élection, ou justification du droit à y être inscrit; c) héritage d'une propriété foncière fait depuis le 1er janvier dans le département. Toutefois,

(1) L. 10 août 1871; L. 15 février 1872; L. 7 juin 1873; L. 21 juillet 1875; L. 12 août 1876; L. 19 septembre 1876; L. 16 septembre 1879; L. 31 mars 1886; L. 23 juillet 1891; L. 16 juillet 1892; L. 8 juillet 1901; L. 9 juillet 1907.

(2) Bibliographie: Les conseils généraux, Recueil de décisions, Berger-Levrault, 2 vol.; de Crisenoy et Rabany, Annales des assemblées départementales depuis 1886. V. p. 258 la bibliographie sur l'organisation départementale et infrà celle de la commission départementale.

le nombre des conseillers généraux non domiciliés ne pourra pas dépasser le quart du nombre total dont le conseil doit être composé, sinon il y aura élimination par voie de tirage au sort (L. 10 août 1871, art. 6 et 17): a) il y a des ineligibilités. - I. Les unes résultent de la privation de la jouissance du droit par suite de certaines condamnations (V. p. 170). A signaler seulement certaines inéligibilités temporaires: est inéligible pendant trois ans le conseiller général condamné pour avoir pris part à une réunion illégale du conseil, ou à une conférence interdépartementale dissoute (L. 1871, art. 34 et 91); est inéligible pendant un an, le conseiller déclaré démissionnaire pour refus d'accomplir une fonction légale (L. 7 juin 1873). II. D'autres inéligibilités résultent de la privation de l'exercice du droit. Sont inéligibles: a) les interdits (D. 1852); b) les demi-interdits (L. 1871, art. 7); c) les fonctionnaires énumérés dans l'art. 8 de la loi de 1871: il est à remarquer que toutes ces inéligibilités de l'art. 8 sont relatives, à l'exception de celle qui frappe les militaires en activité de service qui a été rendue absolue par une loi du 23 juillet 1891 (V. p. 171); b) il y a des incompatibilités. - Il y a des incompatibilités résultant du cumul du mandat avec une fonction publique : 1o d'une façon absolue dans le cas de fonction de préfet, sous-préfet, secrétaire général, conseiller de préfecture, commissaire et agent de police; 2° d'une façon relative dans le cas d'agents salariés sur les fonds départementaux (L. 1871, art. 9 et 10) (1). Il y a encore incompatibilité dans le cas de cumul de deux mandats de conseiller général (art. 11) et dans celui du cumul du mandat de conseiller général avec le mandat de conseiller d'arrondissement (L. 22 juin 1833, art. 14, sauf l'exception de Belfort).

Convocation des électeurs. Les collèges électoraux sont convoqués par décret (art. 12). Toutefois le décret est lancé pour le département tout entier, les cantons où doit avoir lieu l'élection sont ensuite désignés par arrêté du préfet. S'il s'agit de fixer la date pour laquelle la convocation doit être faite, il faut distinguer trois hypothèses: 1o en cas de renouvellement normal des séries, la seule règle est celle qui résulte de la durée du mandat de chaque série. Le mandat ne peut pas durer plus de six ans, par conséquent les électeurs doivent être convoqués

(1) « Ne sont pas considérés comme salariés et compris dans les cas spécifiés au paragraphe précédent, les médecins chargés dans leur canton ou les cantons voisins, des services de protection de l'enfance et des enfants assistés, non plus que des services des épidémies, de la vaccination ou tous autres services analogues ayant un caractère de philanthropie. La même exception s'applique aux vétérinaires chargés dans les mêmes conditions du service des épizooties » (L. 8 juill. 1901, complétant l'art. 10, L. 10 août 1871). A signaler aussi l'art. 31 de la loi du 15 juillet 1893 : « Les médecins du service de l'assistance médicale gratuite ne pourront être considérés comme inéligibles au conseil général ou au conseil d'arrondissement à raison de leur rétribution sur le budget départemental ». On a oublié dans cette loi qu'il ne s'agissait que d'une incompatibilité.

avant l'expiration des six ans. Ils ne doivent pas non plus être convoqués trop tôt, le pouvoir exécutif ne doit pas pouvoir abréger le mandat; cependant, à cet égard, il n'y a pas de règle et le chef de l'État jouit d'une certaine latitude (art. 12) (1); 2° en cas d'élection générale après dissolution, l'élection doit avoir lieu le quatrième dimanche qui suit le décret de dissolution, à moins qu'une loi ne soit intervenue pour fixer une autre date, ce qui a lieu toutes les fois que les Chambres sont en session au moment de la dissolution (art. 35-36); 3° en cas d'élection complémentaire par suite de décès, option, démission, vacance d'un siège ou pour tout autre cause, l'élection doit avoir lieu dans le délai de trois mois (art. 22). - Période électorale. La durée de la période électorale est de quinze jours francs, entre la date du décret de convocation et le jour de l'élection. Pour les faits de presse et les réunions électorales, règles ordinaires, v. p. 184. Scrutin. Il peut y avoir deux tours de scrutin. Le premier doit toujours avoir lieu un dimanche, le second, s'il est nécessaire, a lieu le dimanche suivant (art. 12). Le scrutin est ouvert à sept heures du matin et clos le même jour à six heures du soir. - Cependant, par application du décret du 1er mai 1869, le préfet peut, après avis du maire, prendre un arrêté pour que le scrutin soit ouvert plus tôt; dans aucun cas il ne pourra être ouvert avant cinq heures du matin et l'heure de la clôture ne pourra être modifiée; l'arrêté doit être publié et affiché dans la commune cing jours au moins avant le jour du scrutin (L. 5 févr. 1909, complétant l'art. 12, L. 10 août 1871). Pour toute la procédure du scrutin, règles ordinaires (V. p. 185 et s.). Le recensement général des voix est fait par le bureau du chef-lieu de canton, auquel les procès-verbaux de chaque commune sont portés immédiatement (art. 13).

Contentieux électoral. - Le contentieux des élections appartient au Conseil d'État (L. 31 juill. 1875). Peuvent former des réclamations : 1o les électeurs du canton, les candidats, les conseillers généraux pour toute espèce de motifs; 2o le préfet pour inobservation des conditions et formalités prescrites, mais ces expressions sont interprétées largement. Les réclamations des particuliers doivent être formées dans les dix jours qui suivent l'élection. Pour le préfet, le délai est de vingt jours, à partir du jour de la réception des procès-verbaux des opérations électorales (Pour le surplus, voir p. 188 et s.) (2).

C. Le fonctionnement des conseils généraux. Les conseils généraux ont des sessions, pendant lesquelles ils tiennent des séances consacrées à la préparation et au vote de délibérations.

Les conseils généraux ont deux sessions ordinaires par

Sessions.

(1) En réalité, il a, comme latitude, de la session d'avril à la session d'août; il suffit

que chaque série des conseillers ait pu siéger à douze sessions ordinaires en six ans. (2) Laferrière, Juridict. adm., t. II, p. 349.

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an, l'une qui commence le second lundi après le jour de Pâques et qui ne peut excéder quinze jours, l'autre qui normalement commence le premier lundi qui suit le 15 août (1). Une loi du 9 juillet 1907 a donné aux conseils généraux le pouvoir de modifier eux-mêmes la date de la session d'août. L'article 1er de cette loi est ainsi conçu :

<< Dans leur première session annuelle, les conseils généraux pourront fixer l'ouverture de la deuxième session à une date postérieure à celle prévue par l'art. 23 de la loi du 10 août 1871, sans dépasser cependant le 1er octobre. La session ajournée pourra avoir la durée fixée par la loi du 10 août 1871 pour la session d'août. Elle devra toutefois être terminée le 8 octobre au plus tard ».

La session ainsi déplacée produit tous les effets de la session d'août et permet les mêmes opérations (art. 2).

Les conseils généraux peuvent avoir des sessions extraordinaires : 1o sur convocation du chef de l'État; 2o sur convocation du préfet lorsque les deux tiers des membres ont adressé une demande écrite au président. La durée des sessions extraordinaires ne doit pas excéder huit jours (L. 1871, art. 23-24; L. 12 août 1876). — Toute réunion tenue par le conseil en dehors des sessions, ou dans une session prolongée au delà de son terme, est illégale, la délibération est nulle, les membres du conseil sont passibles des peines de l'art. 258 du Code pénal (art. 34). Séances.

Pour tout ce qui concerne les séances, le quorum nécessaire pour délibérer, le bureau, la publicité des séances, la commission d'étude, etc., voir la théorie générale des assemblées délibérantes (p. 201 et s.). Il faut ajouter seulement que le préfet a entrée au conseil, qu'il assiste aux délibérations, qu'il est entendu quand il le demande; il se retire lorsqu'il s'agit de l'apurement de ses comptes (art. 2).

Préparation et vote des délibérations. (V. également p. 206).

Conférences interdépartementales et institutions communes. Les conseils généraux peuvent correspondre entre eux et même débattre des intérêts communs dans des conférences interdépartementales. A ces conférences, chaque conseil général est représenté, soit par sa commission départementale, soit par une commission spéciale. Les préfets peuvent toujours assister à ces conférences, et ils devraient les dissoudre si des questions étrangères au but étaient mises en discussion. Les décisions prises ne sont exécutoires qu'après avoir été ratifiées par les conseils intéressés (art. 89-91).

Ces ententes entre départements peuvent aboutir à la gestion d'institutions d'utilité commune et, par suite, à une véritable association permanente entre départements. - Exemple, les écoles professionnelles de pupilles de l'assistance publique imposées par l'art. 3 de la loi du

(1) Pour le conseil général de la Corse, cette session commence le deuxième lundi de septembre (L. 31 juill. 1875).

28 juin 1904. Il est à remarquer que ces associations ne sont point des syndicats de départements et, par conséquent, ne constituent pas des établissements publics doués de personnalité, à la différence des syndicats de communes dont il sera question plus loin.

Dissolution des conseils généraux. - Il est nécessaire que le chef de l'Etat ait le droit de dissoudre les conseils généraux, mais il faut prendre garde qu'il n'en abuse. Ce droit est soigneusement réglementé dans les art. 35 et 36. La première règle qui ressort de ces textes est que les conseils généraux ne peuvent pas être dissous tous à la fois par mesure générale; on a voulu éviter le retour d'une mesure aussi regrettable que le fut le décret du 26 décembre 1870. Un conseil général peut être dissous par mesure spéciale. Si les Chambres sont en session, le chef de l'État leur rend compte immédiatement, une loi spéciale fixe la date de l'élection et décide en même temps si la commission départementale reste en fonctions, ou si une commission administrative est nommée; si elles ne sont pas en session, le décret doit être motivé et contenir en même temps convocation des électeurs pour le quatrième dimanche.

D. Les événements qui mettent fin à la fonction de conseiller général sont: 1o l'expiration des pouvoirs ou la dissolution de l'assemblée; 2o le décès; 3o la démission volontaire, elle doit être adressée au président du conseil général ou de la commission départementale, qui avertit le préfet (art. 20), elle est acceptée par le conseil général; 4o la démission forcée, qui est tantôt un moyen de sanction des règles sur l'inéligibilité et sur les incompatibilités, alors elle est prononcée par le conseil général lui-même (art. 18); tantôt une sanction de l'obligation d'assister aux séances du conseil ou de la commission départementale, alors elle est prononcée par le conseil ou la commission (art. 19 et 74); tantôt enfin une sanction de l'obligation d'accomplir une fonction dévolue par la loi, alors elle est prononcée par le Conseil d'État (L. 7 juin 1873).

E. Les caractères généraux de la fonction. Sur la rémunération du mandat, sur la protection du représentant, sur la protection des tiers contre les propos diffamatoires du représentant, voir p. 214 et 205. Sur les fonctions individuelles auxquelles il peut être appelé, voir p. 213.

N° 2. Les attributions du conseil général.

Les conseils généraux n'ont ni attributions législatives, ni attributions juridictionnelles (1), ils n'ont que des attributions d'ordre administratif (2). Elles sont au nombre de deux: 1o le conseil général prend

(1) A moins qu'il ne s'agisse d'un contentieux de l'interprétation d'actes dont ils seraient les auteurs, en vertu de la règle ejus est interpretari cujus est condere (Cons. d'Ét., 27 juill. 1877; Bréant, 2 avr. 1897, Commune de Mosset).

(2) 11 importe de signaler cependant une attribution exceptionnelle d'ordre constitutionnel. Aux termes de la loi du 15 février 1872 (loi Tréveneuc), si l'Assemblée était illégalement dissoute ou empêchée de se réunir, les conseils généraux se réuniraient de

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