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justice; 2° Autorités qui prennent la décision. - Ce sont les autorités du pouvoir exécutif qui ont le droit de décision pour intenter l'action, en principe, ce sont les ministres; 3° Mandataires ad litem. Pour savoir quel est le représentant en justice, il faut des distinctions:

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a) Domaine de l'État. Toutes actions concernant le domaine de l'État sont intentées et soutenues au nom du préfet du département dans le ressort duquel se trouvent les objets contentieux (art. 69, § 1, C. proc. civ.). Toutefois, l'administration des domaines a le droit d'exercer les actions qui ont pour objet de simples recouvrements de revenus, d'arrérages, de rentes ou de créances, lorsque le fond du droit n'est pas contesté (L. 28 oct.-5 nov. 1790, tit. III, art. 14, et 19 août12 sept. 1791, art. 4 et 6). Le préfet représente le domaine de l'État même contre le département. Dans ce cas, le département est représenté par un membre de la commission départementale nommé par elle (art. 54, L. 10 août 1871). Le préfet représente le domaine de l'État, non seulement devant les tribunaux judiciaires, mais aussi devant les juridictions administratives, même devant le conseil de préfecture bien qu'il en soit président; il se borne à ne pas siéger comme juge. Cepen dant, devant le Conseil d'État, c'est le ministre des Finances qui représente le domaine de l'État;

b) Pour le domaine militaire, c'est le ministre de la Guerre qui intente et défend aux actions (L. 10 juill. 1791, tit. IV, art. 1 et 5);

c) Trésor public. -Le Trésor public procède en justice par le ministère d'un agent spécial, appelé agent judiciaire du Trésor (C. proc. civ., art. 69 et 70; Cf. Dumesnil et Pallain, Législation du Trésor public); d) Pour tous les autres droits pécuniaires, l'État, est représenté, soit par le préfet (Cons. d'Ét., 16 janv. 1903, Ministre des Travaux publics), soit par les ministres compétents, soit par les directeurs des grandes administrations qu'ils ont sous leurs ordres; ainsi les administrations de l'enregistrement, des contributions directes, des contributions indirectes, sont représentées par leurs directeurs.

B. Le département. -1° Capacité. Le département a conquis peu à peu la capacité d'ester en justice sans autorisation, en demandant comme en défendant, pour toutes actions. Sous l'empire de la loi de 1838, il fallait l'autorisation du Chef de l'État; sous l'empire des décrets de 1852, l'autorisation du préfet; depuis 1865, il y a capacité. C'est un des objets sur lesquels le conseil général statue définitivement (L. 10 août 1871, art. 46, § 15); 2° Autorité qui prend la décision. Il faut distinguer pour l'attaque, en principe, le conseil général; dans les cas d'urgence, la commission départementale, qui a enlevé ainsi en 1871 une attribution au préfet (L. 1871, art. 46, n. 15). Pour la défense, commission départementale (art. 54); 3° Mandataire ad litem. Ce mandataire est le préfet, sauf dans le cas où il y a conflit avec l'État, auquel cas la commission départementale délègue un de ses membres (L. 1871, art. 54)

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C. La commune. 1° Capacité. Les communes étaient en principe incapables de plaider sans une autorisation donnée par le conseil de préfecture (L. 5 avr. 1884, art. 121 et suiv.). Cette incapacité a été entièrement supprimée par la loi du 8 janvier 1905, sauf dans l'hypothèse où l'action est intentée par un contribuable (V. infrà) et c'est une grande simplification parce que c'était à celui qui intentait une action judiciaire contre une communé à faire les diligences pour qu'elle fût autorisée à défendre; 2° Autorité qui prend la décision. Le maire, sous le contrôle du conseil municipal (art. 90, § 8), c'est-à-dire qu'il doit être autorisé par une délibération (Jurisprudence antérieure à la loi de 1884); 3° Mandataire ad litem. Le maire, sauf dans le cas où il a lui-même dans l'affaire des intérêts opposés à ceux de la commune, auquel cas le conseil municipal désigne un autre de ses membres (art. 83).

Action exceptionnelle de l'art. 123. Les contribuables peuvent, en certains cas, exercer les actions de la commune. Cette disposition a été introduite par la loi de 1837. L'art. 123 est la reproduction exacte de l'art. 49 de la loi du 18 juillet 1837. Il y a quatre conditions: 1° l'action ne peut être exercée que par des contribuables inscrits au rôle; 2o elle est exercée aux frais et risques du contribuable; 3° l'autorisation du conseil de préfecture est nécessaire et maintenue par la loi du 8 janvier 1905; 4o le conseil municipal doit être préalablement appelé à délibérer. L'art. 123 s'applique sans difficulté lorsqu'il s'agit de défendre à une action, aussi bien que lorsqu'il s'agit de l'intenter. La commune est mise en cause et le jugement produit effet à son égard. Mais cette disposition ne permet pas à un contribuable d'exercer les actions d'un établissement communal distinct, de la commune, par exemple, d'un bureau de bienfaisance (Cons. d'Ét., 17 sept. 1898, Bezon).

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D. Les établissements publics. - Capacité de plaider. Les établissements publics sont, eux aussi, affranchis en principe de la nécessité de l'autorisation; toutefois, les établissements communaux de charité et de bienfaisance restent assujettis à l'obligation de demander l'avis des conseils municipaux sur les actions judiciaires autres que les possessoires qu'ils se proposent d'intenter ou de soutenir. En cas de désaccord entre le conseil municipal et l'établissement, il faut recourir à l'autorisation du conseil de préfecture (L. 8 janv. 1905).

Quant à la question de savoir qui décide et qui intente l'action, consulter l'organisation de chaque établissement.

E. Pour les corps administratifs, conseils généraux, conseils municipaux, commissions administratives, qui sont recevables à intenter des recours pour excès de pouvoir, V. suprà, p. 445.

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de la procédure contentieuse administrative.

A. Existence indépendante de cette procédure. - Il existe une procédure contentieuse administrative. A la vérité, il en existe plusieurs, en ce sens qu'il y a une procédure à suivre devant le Conseil d'État, une autre devant les conseils de préfecture, sans parler des tribunaux spéciaux; mais toutes ces procédures, malgré des différences de détail, présentent des caractères communs, de telle sorte qu'on peut en extraire un corps de règles générales.

Cette procédure est distincte de la procédure civile, elle a son génie propre et se développe d'une façon indépendante. Lorsque les textes qui la réglementent sont insuffisants, il appartient au juge administratif luimême d'en formuler les règles. C'est ainsi que le Conseil d'État avait créé, presque de toutes pièces, la procédure à suivre devant les conseils de préfecture qui, jusqu'à la loi du 22 juillet 1889, n'avait guère attiré l'attention du législateur. Et si, dans cette œuvre prétorienne, le juge doit s'inspirer des principes d'équité sur lesquels reposent quelques-unes des dispositions du Code de procédure civile, il n'est point tenu d'appliquer textuellement ces dispositions, même les plus générales, comme les art. 1029 et suivants.

B. Caractères généraux de la procédure contentieuse administrative. - Par ses caractères généraux, la procédure administrative se distingue

(1) Les proportions de cet ouvrage ne nous paraissant pas comporter une étude détaillée de la procédure administrative, nous nous bornons à des indications sommaires. On trouvera des renseignements très suffisants dans Laferrière, t. 1, p. 32 à 354 pour la procédure devant le Conseil d'État, p. 367-382, pour la procédure devant les conseils de préfecture. Enfin, pour ce qui est du commentaire de la loi du 22 juillet 1889, sur la procédure devant les conseils de préfecture, V. Teissier et Chapsal, Traité de la procédure devant les conseils de préfecture; Brémond, Examen critique de la loi du 22 juillet 1889. Pour l'histoire, V. R. Jacquelin, L'évolution de la procédure administrative, Revue du droit public, 1903.

profondément de la procédure civile; elle appartient, de même que notre procédure criminelle, au type de la procédure inquisitoriale où l'instruction de l'affaire est faite par le juge, tandis que la procédure civile se rattache au type de la procédure accusatoire, où l'instruction de l'affaire est faite par les parties elles-mêmes sans le concours du juge.

Le type de la procédure inquisitoriale est généralement considéré comme supérieur à celui de la procédure accusatoire; le concours d'un juge qui dirige l'instruction est, en effet, une garantie contre les surprises d'audience et la multiplication des incidents, par conséquent, contre les lenteurs et les frais. Il est permis de penser, dès lors, que la procédure administrative offre quelques avantages sur la procédure civile et que celle-ci gagnerait à s'en rapprocher. La procédure administrative présente les trois grands caractères suivants :

1o L'instruction est dirigée par le juge. Dès le début, ce caractère apparaît, car l'instance est introduite par une requête en demande adressée au juge et non point par un ajournement adressé directement au défendeur. Le défendeur est mis en cause par une ordonnance du juge et la requête en défense qu'il présente est également adressée au juge. De plus, tous les incidents donnent lieu à une décision du juge.

Cette initiative du juge n'empêche point que les parties n'aient un rôle à jouer, et qu'elles n'aient besoin, dans une certaine mesure, de conseils ou de représentants rompus aux affaires, comme les avoués. Les parties ou leurs représentants stimuleront le juge, le juge surveillera les parties. Les choses ont été comprises ainsi dès le début au Conseil d'État, puisqu'il a été créé, auprès de ce conseil, des avocats-avoués dont le ministère est obligatoire, sauf exception. Auprès des conseils de préfecture, la loi du 22 juillet 1889 a facilité l'accès des avoués, en leur reconnaissant formellement le droit de représenter leurs clients sans procuration et en permettant en leur faveur le déplacement des pièces.

2o La procédure est écrite. Cela veut dire : 1° que le juge, chargé de l'instruction, fait cette instruction sur des pièces écrites, qui doivent contenir, non seulement les conclusions des parties, mais tous leurs moyens; un moyen nouveau ne peut pas être produit pendant le débat oral, ou bien alors il faut recommencer l'instruction (Cons. d'Ét., 15 juin 1883, Société du matériel agricole); 2° que le juge, chargé du jugement, juge sur le rapport écrit qui est résulté de l'instruction; 3° que le commissaire du gouvernement dépose des conclusions écrites. En d'autres termes, en matière administrative, toutes les affaires sont jugées sur rapport, tandis que cette procédure est exceptionnelle en matière civile. Un débat oral peut venir se joindre au rapport écrit pour les affaires jugées en séance publique; c'est une garantie de publicité, mais il n'est jamais que le complément du rapport.

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30 La procedure est en partie secrète. Pendant longtemps, la procédure administrative a été complètement secrète, elle ne donnait lieu à

aucun débat public et le jugement n'était point rendu en public. Il a été introduit des séances publiques en 1830 au Conseil d'État devant l'assemblée publique statuant au contentieux et le décret du 31 mai 1910 vient de les introduire aussi devant la section ordinaire du contentieux, devant la section spéciale du contentieux et ses sous-sections. La publicité a été introduite en 1865, au conseil de préfecture, l'art. 44 de la loi du 22 juillet 1889 a même rendu obligatoire, en principe, la séance publique pour toutes les affaires portées devant le conseil de préfecture, mais on ne peut pas dire que la procédure soit complètement publique. D'abord, les jugements sont lus à l'audience publique, mais ils ne sont pas rendus en audience publique, ils sont tous rédigés dans la chambre du conseil. De plus, au Conseil d'État, il est des affaires qui ne donnent lieu à aucun débat public, ce sont toutes celles qui sont jugées par les sections et qui n'ont pas donné lieu à constitution d'avocats, car il n'y a pas débat public sans le ministère de l'avocat; devant les conseils de préfecture, les affaires de contributions directes, d'élections et de contraventions ne donnent lieu à débat public que si la partie le demande. C. Des privilèges de la puissance publique. L'État plaidant devant la juridiction administrative jouit d'un certain nombre de privilèges : 1° Devant le Conseil d'État, les ministres ne sont pas tenus d'employer le ministère d'un avocat pour l'instruction écrite, ils peuvent signer euxmêmes les pièces; pour le débat oral, il leur faut un avocat;

2o L'État ne peut être condamné aux dépens, sauf quand il s'agit : a) des contestations relatives au domaine; b) des contestations relatives à l'exécution des marchés passés pour un service public, marchés de fournitures, ou marchés de travaux publics et de la réparation des dommages occasionnés par les travaux publics (D. 2 nov. 1864, art. 2; L. 22 juill. 1889, art. 63); c) des litiges sur les indemnités pour fautes de service (jurisprudence constante); d) d'une façon générale, dans tout le contentieux de la pleine juridiction (Cons. d'Ét., 29 juill. 1910, Brusson, S. 1911.3.73 et la note) (1);

3o Nous savons déjà qu'il n'y a pas d'exécution forcée contre l'État; par conséquent, l'État exécute volontairement les condamnations résultant de jugements, comme il exécute toutes ses obligations. Pour les autres personnes administratives, il ne peut y avoir qu'une exécution par la voie administrative autorisée par l'État (V. p. 892).

D. Notification des pièces par la voie administrative. La procédure administrative présente encore ceci de particulier que les décisions et les pièces sont très rarement signifiées par huissier; les pièces sont communiquées sans déplacement au greffe; d'ailleurs, les parties font accompagner les requêtes et les pièces déposées au greffe de copies sur papier

(1) Il y a eu, sur cette question des dépens, des revirements de jurisprudence don on trouvera l'histoire dans Dufour, 3 édit., II, p. 394.

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