ses, le tribunat proposoit d'avoir égard non-seulement aux papiers domestiques, mais encore à toutes écritures publiques et privées ; « cette latitude lui paroissoit sans danger dans une matière sur laquelle on peut offrir la simple preuve testimoniale » (1). Ces observations ont fait rétablir la partie de l'article qui avoit été retranchée dans la séance du 2 frimaire (2); mais on n'a pas cru devoir adopter l'extension proposée par le tribunat. Une autre question, non moins importante, est celle de savoir si, lorsque l'article 46 dit qu'à défaut des registres, les mariages, naissances et décès seront prouvés tant par les registres et papiers des pères et mères que par témoins, si, dis-je, l'article en s'exprimant ainsi, a voulu autoriser la preuve testimoniale, non-seulement pour appuyer les indices que donneroient les papiers domestiques, mais en soi, et même quand il n'y auroit pas de papiers domestiques. Voici les explications que l'orateur du conseil d'état a données sur ce point: « Il n'y a que l'au torité des titres publics et de la possession, a-t-il dit, qui rende l'état civil inébranlable. La loi na (2) Rédac (1) Observations manuscrites du Tribunat. tion définitive (article 13), Procès-verbal du 22 fructidor an 10, tome II, page 3. Tome II. 5 la turelle a établi la preuve qui naît de la possession; la loi civile a établi la preuve qui naît des registres; preuve testimoniale seule n'est pas d'un poids ni d'un caractère qui puissent suppléer ces espèces de preuves, ni leur être opposés. Toutes les ordonnances, animées de cet esprit, ont donc voulu que la preuve de la naissance fût faite par les registres publics; et en cas de perte des registres publics, que l'on ait recours aux registres et papiers domestiques des pères et mères décédés, pour ne pas faire dépendre uniquement l'état, la filiation, l'ordre et l'harmonie des familles, de preuves équivoques et dangereuses, telles que la preuve testimoniale seule, dont l'incertitude a toujours effrayé les législateurs. L'ordonnance de 1767 avoit, par une disposition formelle, consacré ces principes; la jurisprudence y a toujours été conforme, et l'article les rappelle » (1). Il est cependant nécessaire d'observer que lorsque ces registres ont été perdus ou n'ont pas existé, les parties se trouvent placées dans des circonstances plus favorables que lorsque les registres existent et qu'elles n'y sont pas inscrites; qu'ainsi elles peuvent du moins s'appliquer les règles faites pour le cas où l'acte a été omis par négligence : (1) M. Thibaudeau, Exposé des motifs, Procès-verbal du 12 ventôse an 11, tome II, p. 457 et 458. ces règles vont être exposées dans la division sui vante. II. DIVISION. Du cas où l'état civil n'a pas été consigné sur les registres. ARTICLE 47. Tour acte de l'état civil des François et des étranfait en pays étranger, fera foi, s'il a été rédigé dans les formes usitées dans ledit pays. gers, ARTICLE 48. Tour acte de l'état civil des François en pays ays étránger sera valable, s'il a été reçu, conformément aux lois françoises, par les agens diplomatiques, ou par des commissaires des relations commerciales de la République. Il ne faut pas confondre le cas où l'acte n'a pas été inscrit, avec celui où il a été mal inscrit, c'està-dire, où il n'est pas dans la forme prescrite. Les règles qu'on doit suivre dans cette dernière hypo thèse sont établies au chapitre VI De la rectifi cation des actes de l'état civil. Il ne s'agit ici que de la première. Les actes n'ont pas été inscrits ou par malveil lance, ou par négligence, ou par l'impossibilité où les parties se sont trouvées. La malveillance, soit de l'officier public, soit des particuliers, seroit l'objet d'une procédure criminelle, et le jugement qui condamneroit les coupables rendroit en même temps l'état à ceux à qui ils auroient voulu l'enlever, car on ne peut les frapper sans prononcer qu'il y a suppression d'état, et il ne peut être reconnu qu'il y a suppression d'état, sans que l'état se trouve prouvé. La négligence n'est pas à craindre de la part de l'officier public, elle l'exposeroit aux peines établies par l'article 50; elle ne devoit pas être prévue de la part des parties. « Il seroit trèsdangereux, a-t-on dit dans la discussion, que la loi prévît le cas de l'omission » (1); on sent en effet que les dispositions qui eussent permis de réparer facilement les omissions, n'auroeint fait que les multiplier. Cependant, s'il en existe, quel moyen restet-il aux parties? Pourront-elles s'appliquer les dispositions de l'article 46, sur le cas où les registres ont été perdus, ou n'ont pas existé? La Cour d'appel de Lyon l'avoit demandé (2) : (1) M. Thibaudeau, Procès-verbal du 6 fructidor an 9, (2) Observations de la Cour d'appel son observation a été rappelée dans le cours de la discussion (1); ¶ mais il eût fallu prévoir les omissions, et cette considération l'a fait reje ter (2). << Mais les contestations auxquelles ces omis sions peuvent donner lieu, doivent être portées devant les tribunaux, qui statueront suivant les circonstances » (3). Ce recours cependant ne réussira pas toujours aux parties, car quelquefois l'acte peut être suppléé, quelquefois l'omission est irréparable. Ceci dépend de la nature des actes, et est réglé par le titre propre à chacun d'eux. Le titre du mariage détermine, dans le chapitre IV des demandes en nullité, les suites de la non-représentation, soit de l'acte de célébration, soit de ceux qui attestent que les formalités ont été remplies. Le titre du divorce, articles 258 et 294, suppose qu'il n'y aura pas de divorce, si un acte n'atteste qu'il a été prononcé. Le titre de la paternité et de la filiation contient un chapitre entier sur les preuves de la filiation des enfans légitimes, et admet, art. 320, (1) Le Consul Cambacérès, Procès-verbal du 6 fructidor an 9, tome Ier., p. 146. (2) M. Thibaudeau, ibid.. (3) Ibid. |