Images de page
PDF
ePub

dits assignats, lorsqu'ils seront en état d'être mis en circula tion.

Le danger de la contrefaction est un grand inconvénient dans la création du papier-monnoie. Dès le moment qu'une pièce de métal devient suspecte, l'épreuve en est facile, parce que l'infidélité ne peut être que dans le poids ou dans la matière. Dans le papier-monnoie où la matière n'a pas de valeur, il suffit d'imiter les signes, pour opérer la falsification; et la fraude se cache sous une imitation artistement faite. Il s'agit donc d'abord, soit de trouver un pa pier qui ne puisse point être contrefait, soit de lui imprimer des signes qu'on puisse regarder comme inimitables; ou, s'il se peut, de combiner divers moyens, pour que l'imitation présente de telles difficultés qu'on puisse la regarder comme impossible.

Mais tout le problême, sur la fabrication du papier-monnoie, ne seroit pas encore résolu par-là. Il faut que les signes qui le caractérisent soient assez sensibles pour que le public se familiarise avec eux, et puisse distinguer aisément par leur moyen un faux billet d'avec un vrai, Il faut, par conséquent, que ces signes aient un caractère de simplicité, ou du moins ne présentent pas une telle complication, que l'œil puisse s'égarer dans la comparaison qu'il fau droit faire, et qu'on ait besoin, pour s'assurer de la contrefaction, d'une observation très-attentive. Ainsi, d'un côté, des signes inimitables, ou du moins si prodigieusement difficiles à imiter, que la contrefaction puisse être regar dée comme impossible; de l'autre, un caractère assez frappant pour que personne, avec un dé gré médiocre d'attention, ne puisse être embarrassé à le reconnoître : tel est le point auquel il importe de parvenir, pour rassurer le public contre la fraude, toujours plus industrieuse que la probité. On doit certainement ranger parmi les moyens propres à écarter l'industrie fraudu leuse, la perfection de l'art dans les principaux signes qui constitueronr les assignats; parce qu'alors il faudroit trouver, pour l'imitation, un concours d'artistes assez pervers pour l'entreprendre, et assez habiles pour y réussir : ce qui n'est nullement à craindre o

La question des jurés a été reprise. M. Duport, qui a été le premier à proposer cette institution, s'est encore présenté pour la défendre. Il a récapitulé la plupart des objections, en présentant les réponses sous un nouveau jour; il a sim plifié sur-tout la fonction de juré, de manière à rassurer tout esprit raisonnable sur les diffi

cultés qu'on se plaît à trouver dans l'exercice de cette fonction; et il est parti de ce principe, c'est que la nation doit se réserver les pouvoirs qu'elle peut exercer, sur-tout quand cet exercice est plus sûr dans ses mains, que dans celles de quelques délégués qu'elle peut choisir : or tel est le jugement des faits dans les matières quel conques de judicature.

Nous ne rappellerons point tout ce qui s'est dit et répété dans la suite de cette discussion, où M. Barrere de Vieuzac, Garat l'aîné, Freteau, le Chapelier et Démeunier ont appuyé et défendu chacun l'opinion qu'ils avoient ma nifestée auparavant. Ce dernier a invité l'assemblée à partager la question de cette manière : Y aura-t-il des jurés en matière criminelle ? Y en aura-t-il en matière civile ? L'assemblée a décidé affirmativement la première de ces questions, et négativement la seconde.

Ainsi s'est terminée cette discussion très-longue et très-importante, qui n'a abouti, selon nous, qu'à la moitié de ce que la nation devoit en attendre. Les faits civils et les faits criminels étant d'une nature tout-à-fait semblable? quant à la manière de les certifier, on ne voit pas pourquoi la distinction métaphysique des deux procédures peut établir entre ces faits une telle

telle disparité, que les uns doivent être constatés par les jurés, et non par les autres.

Les comités de constitution et de jurisprudence criminelle sont chargés de la rédaction d'une loi pour mettre les jurés en activité; et en attendant, les procédures criminelles seront instruites et jugées selon les formes actuelles.

La séance a été terminée par la lecture qu'a faite M. le Marquis de Montesquiou de l'instruction sur les assignats, demandée par l'assemblée nationale au comité des finances, et destinée à être répandue dans le royaume. Cette pièce, dont quelques endroits sont peut-être trop profondément raisonnés pour être à la portée du commun des lecteurs, présente un ensemble de principes, de faits et de réflexions, d'où résulte, comme une conséquence irrésistible, la chose à prouver, savoir la nécessité des assignats-monnoie, la sagesse et la solidité de cette mesure. Les travaux de l'assemblée nationale et les vues patriotiques qui l'animent, y sont liés avec l'opération dont ce récit est l'apo'logie, de manière à faire sentir combien elle est digne de confiance, et à ramener à ce sentiment ceux que l'erreur ou les préjugés pouvoient égarer. Nous nous faisons un devoir de consigner cette excellente pièce dans notre jour

(

nal, en nous permettant quelques légers retranchemens dans les parties moins essentielles, afin de la proportionner à l'étendue de cette feuille.

L'assemblée nationale vient de faire un grand pas vers la régénération des finances. Elle s'est déterminée à de grands sacrifices; elle n'a été arrêtée par aucun obstacle, par aucun préjugé: le salut de l'état lui en imposoit le devoir. Espérant tout de l'esprit public, qui chaque jour semble acquérir de nouve les forces, l'assemblée nationale eût pu ne craindre aucune fausse interprétation de ses motifs, et se reposer sur leur pureté; mais cette conscience ne lui suffit pas. Elle veut que la nation entière puisse la juger; et jamais de plus grands intérêts n'ont été soumis à un tribunal plus imposant.

*Donner une constitution à l'empire, assurer par elle le destin de la fortune publique, et par la fortune publique le maintien de la constitution: telle fut la mission de l'assemblée nationale.

François, les bases de la constitution sont posées; le roi que vous chérissez les a acceptées. Vos suffrages ont accueilli ce premier fruit de nos travaux; et dès ce moment, c'est avec la certitude que nous allions travailler pour un peuple libre, que nous avons entrepris de rétablir l'ordre dans les finances. Un abyme étoit ouvert devant nous; des impôts à la fois excessifs et oppresseurs dévoroient en vain la substance du peuple; ils étoient insuffisans à l'immensité des charges publiques: 60 millions de nouveaux subsides les eussent à peine acquittées; et tandis que les dépenses les plus nécessaires étoient arriérées, tandis que les créanciers les plus légitimes étoient soumis à d'injustes délais, les ressources mêmes de l'avenir n'avoient pas été respectées.....

« PrécédentContinuer »