RÉVOLUTIONS DE PARIS, DÉDIÉES A LA NATION ET AU DISTRICT DES PETITS-AUGUSTINS. Avec gravures et cartes des départemens de France. TROISIEME ANNEE Sur la garde du roi (1). Il faut, dit-on, qu'un roi soit gardé; en conséquence l'assemblée nationale vient de décrét r une garde royale à Louis XVI: M. Destourmel vouloit que l'assemblée nationale euyoyât une dé (1) Vayez kts 48, paze 421; n°. 70. page 217 N°. cxj. A putation au roi, pour le supplier de dire s'il vouloit 50 ou 60 mille hommes pour sa garde, et par qui sa majesté désiroit que cette armée fùt payée. L'assemblée nationale paroit si peu fam:linrisée avec les grands principes de liberté, que, dans sou extrême sugeste, elle n'a pas cru devair mettre en question si le roi auroit une garde, cui ou non. Qu'inférer de tout cela? qu'un jour peutêtre le bandeau tombera de nos yeux; alors nous nous demanderons: qu'est-ce qu'ua roi ? la France doit elle avoir un roi? un roi comme il en faut un à la France doit il avoir une garde particulière? En attendant qu'une autre législature constituante procède avec cet ordre à la régénération de la France régénérée, examinons quel est l'esprit qui a dioté le décret sur la garde de Louis XVI. Le premier article porte que « ceux qui compo» seront la garde du roi rouleront dans tous les grades exclusivement sur eux-mêmes, sens pou>> voir en être tirés pour occuper des grades dans » l'armée de ligne ». Or, uae teile garde n'est point, ne sera jamais une maison militaire; le corps des gardes du roi ne sera point corps ruilitaire. Car qu'est-ce qu'un corps militaire? un corps soldé par la nation pour combattre les ennemis de la nation: or, la garde du roi sera payée par la liste civile; elle n'est faite que pour défendre le roi; conséquemment elle n'a rien de ce qui constitue ce que nous appelons un corps militaire. Malgré qu'on n'ait besoin de ne garder que ses ennemis, si l'on vouloit absolument donner une garde à votre roi, on devoit au moins l'organiser de manière à ce qu'il ne pût jamais la corrompre; et le moyen d'y parvenir étoit de la renouveler souvent. Beaucoup de boas esprits eussent désiré que la garde habituelle du roi fut composée d'un bataillon d'iofanterie et d'un escadron de cavalerie pris dans l'armée, délégués et renou. velés tous les deux ou trois mois au moyen de cette mesure on eût évité la corruption, on eût évité l'esprit de corps, le roi eût été effectivemont gardé par des militaires, sa garde cût été une garde militaire. C'est en vain qu'on a objecté à l'assemblée nationale que le roi corromproit toutes les sections de l'armée qui viendroient lə garder dans les lieux da sa résidence; on ne corrompt pas des corps en trois mois : en deux mois a-t-il pa corrompre l'armée qu'il avoit appelée à Paris en 1789 ? On craint la gangrène pour des hommes qui ne respireraient que deux mois les vapeurs empostées de la cour, et l'on croit conserver sain et intact un corps de dix-huit cents personnes qui y sera continuellement exposé! Non, les dix huit ceats gardes du roi ne seront jamais qu'un corps de jaissaires, un escadron de sbires et d'alguasils; ils n'auront de la forme militaire que le nom, et s'ils sont armés, ce sera un corps armé dans la nation, qui ne le sera ni pour la nation, ni par la nation. Ce corps aura son général : l'article porte, que ceux qui le composent ne pourront occuper des grades dans l'armée de ligne. M. Roederer proposoit de décréter cathégoriquement que l'officier général d'une maison domestique ne pourroit être général d'armée; mais M. Alexandre Lameth a fait un beaa discours pour prouver que le chef des sbires royaux pourra commander les armées nationeles; il a démontré si bien toute l'évidence de cette vérité politique que l'assemblée nationale crut n'avoir pas besoin d'un décret particulier pour consacrer la maxime, elle passa tout uniment à l'ordre du jour sur la proposition de monsieur Roederer. Voilà l'esprit de tous ces décrets: on jette une phrase en avant, les bonnes gens de l'assemblée s'en contentent, et messieurs des comités se réservent la porte de derrière. Le nombre des gardes du roi ne pourra excéder douze cents hommes à pied et six cents à cheval. Il est vrai qu'avec dix huit cents hommes Louis XVI ne peut raisonnablement espérer de faire la con quête de la France; mais une garde de dix-huit cents homme est un centre, un noyau d'armée: si les mécontens eu sent eu ce point de réunion depuis dux ens, il y a long-temps que leur armée seroit portée peut-être à deux cest mille hommes; et si deux cent mille bommes ne faisoient pas la contre-révolution, is fercient au moins couler des flots de sang. Quoique le séjour le plus habituel du roi pa roisse naturellement devoir être fixé à Paris, qui nous répond qu'il n'habitera pas plus ordinairement quelque autre petite ville? Or, dans une petite ville, entouré de dix huit cents licteurs, re sera-t il pas souverainement maitre et despote? Quelle est la force qui résistera à celle-là ? D'ailleurs ne lui reste t-il pas le régiment des Suisses et le corps des cent-Suisses? Pauvre peuple libre! si jamais tu deviens gras, on te conduira le lender main à la boucherie. Il est cependant une partie du peuple français qui doit applaudir au décret sur la garde de Louis XVI, et cette partie est la garde nationale, spécialement celle de Paris: la voilà délivrée d'un service aussi dégoûtant qu'incominode. Depuis longtemps il répugaoit à l'homme de bien de voir ainsi prostituer un service qu'on ne devroit faire que pour la patrie; combien d'excellens citoyens ne s'étoient pas enrolés dans la garde nationale, précisément par cette raison qu'il falloit monter la garde chez le roi! Brutus, Cassius et Cimber valoient bien trois Français; la république entière eût elle pu les décider à garder César? Mais les comités ont dit qu'indépendamment de cette garde de dixhuit cents hommes, il seroit encore donné au roi une garde d'honneur, composée de gardes nation les, dans tous les lieux où il se trouveroit : s'il est ainsi, le décret fera couler tous les jours le sang des patriotes. Qui ne voit déjà nos gardes nationaux à côté de ces spadassins? qui ne les voit insultés, bafoues par cette insolente valctaille ? Et. croit on qu'un citoyen, qu'un homme de cœur sera disposé à souffrir impunément les outrages d'une bande de valets? « La garde du roi sera prise dans l'armée de ligne ou dans les gardes nationales, en activité de service depuis un an». Voyez vous l'astuce? On vient de supprimer la garde soldée de Paris; on replacera dans les gardes du roi tous les officiers de ce corps; ils sont, pour la plupart, dignes d'un tel métier. Quant aux anciens gardes du corps, ou bien on les considérera comme faisant partie de Tarinée de ligne, ou bien on leur délivrera sur le champ des brevets d'officiers; et nous ne tarderons pas à voir reparoît e les soupers, les bals, les orgies qui ont précédé les belles journées des 5 et 6 octubre. Le roi nommera des capitaines de quartier comme il faisoit sous l'ancien régime, on plutôt l'ancien régime est rétabli dans tout son entier. Cette garde ne pourra jamais être commandée pour aucun service public ». Voilà qui justifie ce que nous disions plus haut, que le corps des gardes du roi n'est point un corps militaire, mais un batai lon de jennissaires uniquement aux ordres du sultan. Le comité militaire est chargé de présenter des dispositions ultérieures; nous avons tous lieu de croire qu'il r. nehérira encore sur le comité de constitution. M. Alexandre Limeth ne laissera poiat échapper cette occasion de prouver à son maitre combien il est attaché à sa gloire et à ses intérêts. Richard n'eut qu'un Blondel parmi ses sujets, Louis XVI en compte par centaines dans son assemblée nationale. De la procédure relative aux événemens du Un grand procès s'instruit à Paris pardevant le tribunal du sixième arrondissement; ies patriotes les plus chauds de la capitale sont dans les fers. ou dans les lieus d'un décret de prise de corps; |