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Collard, Ravez, Barthe la Bastide, Moyzen, Courvoisier, le comte Dupont et Becquey.

Nous avons cité dernièrement un passage du discours de M. le premier président de la cour royale de Paris, lors de la rentrée de cette cour, le 4 novembre dernier. Mais ce passage recueilli à un débit rapide étoit nécessairement incomplet, et nous nous trouvons heureux de pouvoir le rectifier, et donner toute la fin de ce discours où M. Séguier a montré les sentimens d'un digne magistrat et d'un véritable chrétien. Après avoir exposé les vertus propres au magistrat, l'orateur concluoit ainsi :

« Nous sommes les prêtres de cette justice, Messieurs; notre foi doit être entière, et notre espérance ne sera pas vaine. Levons les yeux, non par orgueil, mais par confiance, et fixons nos regards sur l'image placée au-dessus de nos têtes. De combien d'agitations politiques elle a été témoin! Que d'opinions, de débats, de contradictions humaines elle a recueillis ! Les rivalités des princes, les factions des grands, les mouvemens des peuples, les discussions religieuses, les troubles du schisme, les fureurs de la réforme, la trame des conspirations, la ligue, la fronde, la révolution; voilà ce qu'elle a vu. Trois fois, dans le cours de quatre siècles, le pouvoir illégitime a osé siéger en sa présence, et trois fois le pouvoir illégitime a disparu. Enlevée du sanctuaire de la justice, aux jours du renversement de toute autorité civile et religieuse, elle n'y a reparu que sur notre réclamation. Dieu puis-, sant, vous connoissiez toute notre pensée. L'homme qui nous a rendu ce symbole sacré, instrument aveugle de la Providence, ne songeoit pas à l'autre image, que l'image de la Divinite devoit incessamment rappeler, et qui seule pouvoit lui faire face. Ceux qui retenoient dans un lieu profane ce monument de la piété de nos pères, ont raillé et blasphémé en nous restituant un gage de réparation qu'ils méconnoissoient. Où sont-ils ces inconsidérés blasphémateurs? Ils se cachent dans l'ombre, et le Christ est debout. Tout a passé devant lui, et tout passera, hors ce qui est juste, droit et honnête. Baissons maintenant la tête, et oublions, aux pieds du Sauveur des hommes, les systêmes destructeurs, les opinions tumultueuses et les dissentions déplorables. Oublions-y les vanités et l'ambition. Déposons-y le désir de la renommée, et tous les intérêts qui ne seroient pas ceux de l'exacte justice. Laissons sans regret au monde le soin de la gloire du monde; et en attendant le jour de la vérité, forts des bénédictions d'un vénérable Pontife, que revendique la seconde cité du royaume, contentons-nous de l'approbation d'une conscience pure et éclairée; sentiment consolateur que la méchanceté ne sauroit enlever à la vertu, qui doit lui suffire pour le temps, et lui préparer le seul bonheur qui soit sans mélange et sans bornes ».

(Mercredi 19 novembre 1817.)

(No. 342).

Le Génie de la Révolution considéré dans l'éducation, ou Mémoires pour servir à l'Histoire de l'instruction publique, depuis 1789 jusqu'à nos jours, où l'on voit les efforts réunis de législation et de la philosophie du 18. siècle pour anéantir le christianisme; par l'auteur de la Régence à Blois, de l'Itinéraire de Buonaparte de Fontainebleau à l'ile d'Elbe, et de l'Itinéraire de Buonaparte de l'ile d'Elbe à l'ile Sainte-Hélène (1).

Parmi les réformes que les philosophes du dernier siècle ambitionnoient de faire, il n'en est point qu'ils eussent plus à cœur, avant la révolution, que celle de l'éducation. Ils souffroient impatiemment de voir que le soin d'élever la jeunesse étoit presque partout confié aux prêtres, et même à des congrégations ecclésiastiques, et ils présentoient le plan d'instruction suivi alors comme rétrécissant l'esprit, favorisant la superstition, et comme un reste des ténèbres et de la barbarie des premiers âges. Ce fut cela qu'ils provoquèrent la suppression des Jésuites, celui de tous les corps qui avoit le plus de colléges, et dont l'influence religieuse sur leurs disciples étoit la plus forte; et d'Alembert, dans sa brochure de la Destruction des Jésuites, par un auteur désintéressé, annonce aussi la fin de l'Oratoire et de toutes les communau

pour

(1) 2 vol. in-8°.; prix, 12 fr. et 15 fr. franc de port. A Paris, chez Rey et Gravier; et au bureau du Journal.

Tome XIV. L'Ami de la Religion et du Ror.

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tés, vu les progrès de l'esprit philosophique. Lui et ses amis disoient qu'il falloit des hommes accoutumés au monde pour élever des jeunes gens destinés à vivre dans le monde; que des religieux n'inspiroient que des mœurs claustrales et des habitudes étroites; que des prêtres, ennemis nés des lumières et de la liberté, ne pouvoient que perfetuer le règne de la superstition et du despotisme, et qu'il étoit temps de débarrasser l'enfance des langes du fanatisme comme de ceux de la tyranuie. Telles étoient les plaintes et les voeux des réformateurs, qui se prétendoient appelés à régénérer le genre humain. La révolution ne fut que l'application de leurs principes, et le résultat de leurs efforts.

On commença par détruire, ce qui n'exige pas beaucoup de talens et d'efforts. Les décrets rendus contre le clergé, frappèrent tous les corps enseignans. On leur demanda un serment, qu'on savoit bien qu'ils ne prêteroient pas. Personne ne pouvoit remplir une place de professeur qu'il n'eût fait ce serment, et alors les colléges tombèrent, ou perdirent les maîtres qui inspiroient le plus de confiance. Le 11 septembre 1791, un des membres les plus accrédités de l'assemblée constituante prononça un rapport sur l'instruction publique, et proposa une échelle d'écoles sur un plan plus libéral, et où on inspireroit surtout l'amour de la révolution et de la liberté. Le rapport se bornoit pourtant à la fin par provoquer l'établissement d'une commission de l'instruction publique. Du reste, l'assemblée ne décida rien. Elle étoit à la fin de ses séances et pressée de les conclure; et se retira contente d'avoir posé tout autour d'elle des principes de destruction.

L'assemblée législative qui suivit, montra le même zèle pour anéantir, et la mêine indifférence pour créer. Cependant il ne tint pas à un de ses membres, qui étoit aussi un philosophe très-décidé, qu'elle n'éta¬ bhît un plan d'éducation où l'irréligion seroit formellement consacrée. Condorcet prononçà, le 21 et le 22 avril 1792, un rapport fort long, où il établissoit nettement la nécessité de séparer la religion de la mo¬ rale, et les inconvéniens de toute religion, et même de la religion naturelle, sur laquelle les philosophes, dit-il, n'étoient pas plus d'accord que les théologiens. Il ne vouloit pas qu'on enseignât la mythologie d'aucune religion, parce qu'il ne peut être utile de tromper les hommes; mais il demandoit qu'on travaillât à détruire les préjugés; et qu'on répétát les miraclés d'Elie ou de saint Janvier, afin de nieux extirper ka superstition. A ce prix, il promettoit des progrès. infiuis à la perfectibilité. Quelque philosophique que fut ce plan, quoiqu'il eût l'avantage d'établir l'athéisme en théorie et en pratique, l'assemblée n'en décréta point l'exécution, et ce rapport resta seulement comine un monument de la profondeur des vues de: Condorcet, et de sa haine pour la religion. Cette assemblée ne se sépara pourtant pas sans montrer sa sollicitude pour l'instruction publique comme pour Fhumanité. Elle supprima, le 18 août, toutes les congrégations ecclésiastiques, l'Oratoire, les Doctrinaires, les Lazaristes, les Eudistes, la Sorbonne, les Frères des Ecoles, etc., et toutes les congrégations de filles, méme celles uniquement vouées au service des hôpitaux et au soulagement des malades, attendu, disoit le décret, qu'un Etat vraiment libre ne doit souffrir dans son sein aucune corporation; et il faut convenir qu'une

telle suppression étoit de droit à une époque telle que celle qui suivit le 10 août 1792, époque de vertige, de licence et de cruauté, où rien de ce qui étoit bon et utile ne devoit être épargné.

Enfin, la convention nationale parut. « A ce mot, dit l'auteur des Mémoires, il est sans doute peu de lecteurs qui ne songent à autre chose qu'à des plans d'éducation. Comment en effet se transporter par la pensée au milieu d'une pareille assemblée, et croire qu'elle a eu du temps à donner à l'éducation de la jeunesse ? Qui peut songer à ses tables de proscription, à ses décrets de sang, à ses tribunaux, à ses comités, à ses prisons, à ses échafauds, à Lyon, à Toulon, à Nantes, à Rochefort," et croire qu'au milieu de tant de scènes d'horreur et de carnage, ceux même qui en étoient les ordonnateurs aient pu s'occuper de plans d'instruction publique. Cependant nous voyons cette assemblée mener de front le procès de Louis XVI et des projets d'éducation. On la voit, le même jour, traduire la Reine au tribunal révolutionnaire, et entendre un rapport du comité d'instruction publiqne. On la voit rendre la loi des suspects, sur le rapport de Merlin, et dresser, sur celui de Fourcroy, la liste des savans qui doivent juger les livres élémentaires; décréter la levée en masse, sur le rapport de Barrère, et trois degrés d'enseignement, sur le rapport de Lakanal; enfin, partager son attention entre les mille mesures du comité de salut public, et les mille plans du comité d'iustruction publique ». Ce zèle à s'appliquer en même temps à des travaux qui paroissent si divers, s'explique pourtant. Ils avoient tous à peu près le même objet, et tendoient presque également à révolutionner la nation. Une éducation ir

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