ARTICLE 192. COUR DE CASSATION. AUTORISATION.-FEMME.-REVOCATION. Lorsqu'une femme autorisée par son mari a interjeté appel, la révocation d'autorisation signifiée par le mari a pour effet, non d'anéantir l'instance, mais de rendre nécessaire une autorisation supplétive de la part de la Cour. (Art. 215, 218, C.C., et 861, C.P.C.) (1). (Beautias C. Laget.)-ARRÊT. LA COUR; Attendu qu'il est justifié et non contesté que la dame Beautias avait été autorisée par son mari aux fins de l'instance par elle engagée devant le tribunal d'Orange contre le défendeur, son fermier, en résiliation de bail; que si le sieur Beautias son mari a révoqué cette autorisation après l'appel qu'elle avait relevé du jugement par lequel le tribunal d'Orange avait rejeté son action, l'autorisation ainsi révoquée, lorsque la contestation était déjà contradictoirement liée sur l'appel, a été remplacée par l'autorisation de la Cour royale comme le constate le dispositif de l'arrêt attaqué : - D'où il suit, que la dame Beautias, demanderesse, a procédé régulièrement en cause d'appel comme elle l'avait fait en première instance, et qu'il était inutile d'assigner, à l'effet d'autoriser sa femme, le mari qui avait pris soin de manifester son refus par l'acte de révocation signifié, tant à la demanderesse qu'au défendeur; Qu'ainsi, l'arrêt n'a point violé les art. 215 et 218, C.C.-Rejette. -- Du 3 fév. 1847. - Ch. civ. MM. Teste, prés. — Delangle, av. gén. (concl. conf.)-Bechard et Millet, av. ARTICLE 193. COUR ROYALE DE RIOM. SAISIE-ARRÊT.-LIQUIDATION.- CRÉANCE. Pour qu'une saisie-arrét, faite en vertu d'une créance non liquide, soit valable, il faut que le juge ait fait une liquidation provisoire. (Art. 559, C.P.C.) (2). (1) Quoique cette proposition soit aussi évidente que le jour, elle s'est déjà produite plusieurs fois devant les tribunaux, et on soutenait que la femme devait accomplir les formalités de l'art. 861, C.P.C. Ce qui m'étonne, c'est que la chambre des requêtes ait admis le pourvoi. Il est probable que rien n'indiquait à la Cour qu'une autorisation spéciale eût été accordée par le mari pour interjeter appel, et qu'alors avait été présentée la question que j'ai examinée dans les Lois de la Procédure civile, CARRÉ, 3o édit., t. 6, p. 399, question 2913. (2) Cet arrêt ne fait qu'appliquer le texte de la loi prescrite à peine de nullité. Il n'est utile à consulter que pour l'espèce dont on peut rapprocher ce que j'ai dit dans les Lois de la Procédure civile, CARRÉ, 3e édit., t.4, p.551 et 555, questions 1926 et 1927. (Lyonnet C. Paulot.) Le tribunal civil d'Yssingeaux a annulé une saisie-arrêt par jugement du 25 juill. 1845, ainsi conçu : LE TRIBUNAL; Considérant qu'aux termes des art. 557, 558 et 559, C. P. C., il faut qu'un créancier ait titre certain et liquide pour pouvoir saisir-arrêter sans permission donnée ou sans évaluation provisoire faite par le juge; que tel est l'esprit et le sens des articles précités; que c'est ainsi qu'ils sont expliqués par les auteurs les plus recommandables, tels que Pigeau, Carré et autres; qu'ils sont interprétés par la jurisprudence ;-Considérant que le titre primitif de Jean Lyonnet, en sa qualité de cessionnaire de Claude Paulot, résultant d'un acte de cession, a été éteint et anéanti par la quittance qu'en a donnée Claude Paulot, le 9 janv. 1826, énoncé dans l'acte sous-seing privé du même jour, souscrit par Jean-Baptiste-Thomas Paulot à Claude Paulot, enregistré et déposé dans les minutes de Me Pagès, notaire, le 13 déc. 1841; Considérant que ce dernier acte par lequel le sieur JeanBaptiste-Thomas Paulot reconnaît devoir à Claude Paulot une partie de la somme contenue dans la cession qui est rappelée, et qui sera réglée à réquisition, sur les quittances des sommes payées, est le seul titre de Jean Lyonnet; qu'il l'a reconnu lui-même, puisque ce n'est qu'en vertu de cet acte qu'il a procédé par saisie-arrêt contre son débiteur; Considérant qu'il y a bien dans cet acte certitude, mais non liquidité de la créance; qu'il devrait y avoir un règlement d'après les quittances, et que ce règlement n'a pas eu lieu; qu'il suit de là que la créance par laquelle la saisie a été faite n'étant pas liquide, aurait dû être évaluée provisoirement par le juge, et que ce défaut d'évaluation entraîne la nullité de cette saisie d'après les dispositions de l'art. 559, C.P.C.; Considérant qu'il n'est justifié d'aucun préjudice, qu'ainsi il n'y a pas lieu d'accorder des dommages-intérêts; Par ces motifs, déclare que la déclaration du 9 janv. 1826, souscrite à Claude Paulot par Jean-Baptiste-Thomas Paulot, et déposée dans les minutes de Me Pages, ne constitue pas une créance liquide, et faute par Lyonnet de l'avoir fait évaluer provisoirement par le juge, annulle la saisie-arrêt faite à sa requête au préjudice de son débiteur, entre les mains des héritiers Courbon.-Appel. ARRÊT. LA COUR; Adoptant les motifs des premiers juges, confirme. ARTICLE 194. COUR DE CASSATION ET COURS ROYALES DE COLMAR ET DE RENNES. 1o ENQUÊTE.-REPROCHE.-POUVOIR DU JUGE. 2o ENQUÊTE.-TÉMOINS.-DISTANCE.-FRACTION. 1° Lorsqu'un des témoins est reproché pour l'une des causes énumérées dans l'art. 283, C.P.C., les juges sont-ils forcés, si les reproches sont justifiés, d'écarter la déposition de ce témoin? (1) 20 Il n'y a pas lieu à nouvelle augmentation de délai en matière d'enquête à l'égard de la notification du nom des témoins, lorsqu'outre la distance de trois myriamètres, il existe un ou deux myriamètres.-Cette fraction est considérée comme n'existant pas. (Art. 261 et 1033, C.P.C.-Solution de l'arrêt, 2o espèce.) (2). 1re ESPÈCE. (Lapoiyade C. Amoroux.)-Cour de cassation. Plusieurs témoins avaient été reprochés comme parents collatéraux au degré prohibé. Jugement qui rejette les reproches, attendu que par leur probité, leur fortune, leur position sociale, les témoins reprochés jouissent d'une considération méritée (3).-Pourvoi. ARRÊT. LA COUR;-Attendu que la disposition de l'art. 283, C, P. C., est démonstrative et non limitative; la preuve en résulte des termes de cet article et de sa combinaison avec les art. 268, 284 et 291; ainsi le lé- gislateur a voulu que les parents en ligne directe ne fussent point entendus comme témoins, et il a dit, art. 268, nul ne pourra être assigné, etc., etc.; et au contraire pour les parents en ligne collatérale, il a dit, pourront être reprochés, etc., etc.; d'où suit une faculté pour le juge d'admettre ou de rejeter le témoignage suivant qu'il le croit (1) J'ai donné à cette question, en reconnaissant qu'elle est une des plus controversées qu'ait fait naître l'application du Code de 1807, tous les développements dont elle n'a paru susceptible, Lois de la Procédure civile, CARRÉ, 3o édit., t.3, p.18 et 46, questions 1102 et 1127 ter. La jurisprudence ne s'est pas encoré fixée. On peut consulter les arrêts, pour la négative, Paris, 2 mars 1846 (J.Av., t.70, p.580). -Pour l'affirmative, Nancy, 17 fév. 1844 et Douai, 12 juill. 1845 (J. Av., t. 68, p.124 et 616.) Les Cours qui font une loi nouvelle donnent à l'appui de leur opinion des raisons qui me paraîtraient décisives dans un exposé de motifs, mais qui ne peuvent me convaincre pour surmonter les difficultés qui résultent d'un texte fornel. Il serait à désirer que la jurisprudence devint uniforme, sur une question aussi pratique, d'une façon quelconque, pour tarir une source incessante de difficultés et d'incidents coûteux. M. BONCENNE, t. 4, p. 597, enseigne mon opinion.Toutes les raisons ayant été données dans les deux systèmes, je me contenterai désormais d'enregistrer au bulletin mensuel les décisions que voudront bien me transmettre mes correspondants. (2) J'ai adopté l'opinion contraire dans les Lois de la Procédure civile, t. 1, p. 23, question 21; 1.4, p. 589, question 1985 ter, et t.6, p. 862, question 5414.Les nombreux arrêts que j'ai cités témoignent de la cavillation de la jurisprudence; on peut ajouter à ces arrêts une décision de la Cour de Poitiers du 21 août 1839 (DUFOUR C. GELIN) dont je juge inutile de donner le texte, parce qu'il ne contient aucune raison nouvelle. It refuse l'augmentation à raison d'une fraction. (5) Je concevrais ce motif si la loi n'avait pas supposé que les hommes riches, honnêtes et placés dans une belle position sociale, pourraient inspirer de l'inquiétude à un plaideur, lorsqu'ils sont parents de la partie adverse. Qui connaît le cœur humain, ne sait que trop que l'homme le plus honnête ne peut être accepté comme juge ou comme témoin dans une cause qui concerne un membre de sa famille ! convenable, d'après les circonstances et les nécessités de la cause; Qu'en usant de ce pouvoir discrétionnaire les juges n'ont pu violer la loi;-Rejette. Du 2 janv. 1843.-Ch. req.-MM. Zangiacomi, prés.-Chevrier, av. 2o ESPÈCE. (Wendeling C. Comm. de Landser.) Colmar.-ARRÊT. LA COUR; Sur les reproches formés contre les cinquième et dixième témoin de l'enquête directe : - Attendu en droit, que l'art. 283, C.P.C., n'est pas impératif, en ce sens, qu'il suffise qu'un témoin se trouve dans une des conditions énoncées dans cet article, pour que le juge soit tenu d'accueillir le reproche proposé contre ce témoin; qu'à la différence de l'art. 268, qui prohibe la citation et l'audition des parents ou alliés en ligne directe de l'une des parties, l'art. 283 donne la faculté de reprocher les parents ou alliés en ligne collatérale et ceux des témoins qui seraient placés dans l'une des circonstances prévues par la loi ou dans toute autre de nature à faire suspecter leurs témoignages, d'où il faut conclure que l'article précité donne aux magistratsle droit de juger du mérite des reproches, et de les admettre ou de les rejeter selon les circonstances;-Attendu en fait, que le cinquième tėmoin reproché est l'oncle du défendeur en enquête; que cette parenté ne le rend pas inhabile à déposer, et qu'elle doit de prime abord au moins éloigner de son témoignage le soupçon de partialité; que le dixième témoin a pris part, il est vrai, comme adjoint au maire de Landser aux délibérations prises par cette commune au sujet du litige actuel, mais qu'il n'a aucun intérêt personnel et assez direct au proces pour que son témoignage doive être rejeté sans examen; qu'il y a des fors lieu d'ordonner que les dépositions des deux témoins reprochés seront lues, sauf à la Cour à y avoir tel égard que de raison;-Sur le moyen de nullité proposé par la commune demanderesse, en enquête contre l'audition du sixième et septième témoins de la contre-enquête, -Attendu que l'art. 1033, C.P.C., en augmentant le délai des ajournements, citations, sommations et actes faits àpersonne ou à domicile, d'un jour à raison de 3 myriamètres de distance, donne suffisamment à connaître qu'il n'ajoute au délai ordinaire, celui d'un jour que lorsqu'il existe 3 myriamètres au moins entre le domicile de l'ajourné et le lieu où siége le juge devant lequel il est appelé, et qu'il n'accorde qu'autant de jours que la distance de 3 myriamètres se trouve répétée dans celle à parcourir; que si les termes de l'article précité laissaient quelque doute à cet égard, ce doute serait levé par le texte des nombreuses dispositions du Code de procédure qui indiquent que c'est réellement pour et par 3 myriamètres de distances que la loi augmente d'un jour le délai ordinaire des ajournements, d'où il suit qu'elle n'accorde aucune augmentation de délai pour toute distance moindre que celle de 3 myriamètres ; Attendu qu'aux termes de l'art. 261, C.P.C., les noms, profession, et demeure des témoins, doivent être notifiés à la partie au domicile de son avoué, trois jours au moins avant leur audition; que c'est par exploit du 15 juillet dernier, que cette notification a eu lieu pour les sixième et septième témoins de la contre-enquête, au domicile de l'avoué de la commune de Landser, et que c'est le 20 du même mois de juillet que ces témoins ont dû être 27 I.-2 s. - entendus, et qu'ils l'ont été en effet; qu'ainsi la notification a été faite Attendu que en quatre jours francs avant l'audition des témoins; d'après le tableau des distances il existe 48 kilomètres ou 4 myriamètres et 8 kilomètres de Colmar, lieu du domicile de l'avoué de la commune de Landser, au lieu de la situation de cette même commune, où les enquêtes ordonnées par l'arrêt du 29 février dernier ont dû se faire; qu'en admettant que l'art. 1033 doive être combiné avec la disposition spéciale de l'art. 261 précité, ce qu'il devient inutile d'examiner, l'augmentation du délai pour la notification, n'aurait été que d'un jour, d'où il suit que celle qui est critiquée se trouve régulièrement faite dans les délais prescrits par ces deux articles;-Statuant sur le reproche proposé contre les cinquième et dixième témoins de l'enquête directe; le déclare non pertinent, et comme tel, rejete;Ordonne que les dépositions desdits témoins seront lues, sauf à y avoir tel égard que de raison; prononçant sur l'incident élevé à l'occasion des dépositions des sixième et septième témoins de la contre-enquête; sans s'arrêter au moyen de nullité proposé contre ladite contreenquête, en ce qui concerne les dépositions des sixième et septième témoins, lequel est rejeté, déclare la commune défenderesse malfondée dans ses reproches formés contre lesdits témoins; ordonne que leurs dépositions seront lues. Du 22 nov. 1844.-1'e Ch.-MM. Rossée, p. p. Chauffour et Saudherr, av. 3e ESPÈCE -Brandt C. Bührel. - Cour de Colmar.-ARRÊT. LA COUR; Considérant que l'art. 283, C.P.C., a soulevé la question de savoir si ses dispositions étaient démonstratives ou limitatives; que la jurisprudence les a considérées comme démonstratives; qu'il en devait être ainsi, puisqu'il est impossible de prévoir et de préciser tous les reproches; qu'il peut s'en rencontrer d'une gravité égale ou supérieure à ceux qui ont été indiqués, et que l'art. 283 n'en a pas expressément limité le nombre; Qu'il suit de là que, le juge pouvant accueillir un reproche non prévu, il peut, à plus forte raison, peser la valeur du reproche proposé, et l'écarter si les circonstances des faits lui ôtent toute importanee, et détruisent tout soupçon de partialité;Considérant, d'un autre côté, que l'art. 268 du même Code prohibe d'une manière absolue l'audition du parent en ligne directe, et de l'époux même divorcé ou séparé; qu'il crée une présomption de partiafité à laquelle la partie et le juge sont tenus d'obéir; que l'art. 283 est conçu dans un tout autre ordre d'idées et d'expressions; qu'il permet seulement de réprocher le parent en ligne collatérale jusqu'au sixième degré inclusivement; que la faculté accordée au plaideur conduit naturellement au droit pour le juge d'examiner le reproche proposé; que la volonté éclairée de l'un ne peut être enchaînée lorsque celle de l'autre est mise dans une entière liberté; que pour distinguer, en ce qui touche la parenté, l'art. 268 de l'art. 283, il faut reconnaître que, si le premier établit une présomption légale résistant à toute discussion, le deuxième élève une simple présomption ordinaire qui doit s'évanouir devant une démonstration contraire; qu'on ne peut sans injustice priver une partie de la déclaration du témoin reproché, lorsque les faits attestent la moralité du témoin et éloignent toute crainte légitime de partialité; qu'enfin la loi a déposé, dans diverses dispositions, |