quis sur tous les immeubles, sans qu'il pût y en avoir d'exceptés. Dans le système où l'hypothèque n'est point acquise par le contrat, mais seulement par une inscription sur chaque immeuble, le droit de priorité n'existe plus qu'altéré et dénaturé, lorsqu'un créancier qui voudrait avoir pour gage tous les biens de son débiteur ne les connaît pas, ou lorsqu'un créancier postérieur s'inscrit avant celui qui devait avoir le premier rang. Ces observations sont communes à toutes les hypothèques ; il en est de particulières aux hypothèques légales et judi ciaires. Ce n'est pas seulement pour l'intérêt privé des parties que les hypothèques légales ont été établies indépendamment de leurs conventions; c'est encore par des motifs d'ordre public. Ces motifs furent regardés, en 1673, comme assez puissans pour ne pas faire dépendre d'un enregistrement de semblables hypothèques, et pour en excepter plusieurs dans l'édit de 1771. Si, à cette dernière époque, les mineurs furent déclarés déchus de leur droit à la distribution du prix de l'immeuble vendu, lorsque le tuteur ne s'était pas opposé, c'est parce que celui qui a un droit à exercer contre un mineur peut le poursuivre dans la personne du tuteur; et que l'acquéreur ayant le droit de se libérer ne devait pas en être privé par la négligence du tuteur averti dans les formes légales. Mais la loi serait en contradiction avec elle-même si d'une part elle déclarait que l'ordre public exige que le droit d'hypothèque soit inhérent à telle créance, tandis que d'une autre part elle ferait dépendre cette hypothèque d'une inscription qui pourrait être involontairement ou même volontairement omise. Ce serait créer d'une main ce que l'on détruirait de l'autre. A l'égard des femmes, la réclamation est générale en leur faveur. L'expérience a appris que non seulement, à l'époque du changement de loi, en l'an VII, mais encore depuis que le système nouveau est en pleine activité, cette classe, formant une moitié de la société, et jusqu'alors protégée, a été en grande partie dépouillée sans retour de ses biens. Les femmes n'ont aucune part à la formation ni à l'exécution de la loi. On ne peut pas supposer qu'elles la connaîtront mieux à l'avenir. Elles sont, sous tous les rapports, dans la dépendance de leurs maris, intéressés à ce que les formalités ne soient pas remplies; et parmi ceux même qui ne voudraient pas faire tort à leurs femmes, combien n'en estil pas qui négligent ou qui regardent comme inutile la formalité de l'inscription? Et c'est en vain que des malheurs imprévus font ensuite regretter de ne l'avoir pas remplie. On a établi pour droit général la communauté de biens, qui donne au mari, dans son administration, une telle autorité, que les femmes sont dans l'impuissance même de payer les frais de l'inscription, sans laquelle leur patrimoine est perdu. Pourrait-on n'être pas indigné en voyant une femme ainsi dépouillée du patrimoine qu'elle aurait apporté, et qui serait livré aux créanciers envers lesquels il aurait plu au mari de s'obliger, et qui pourraient inême être de collusion avec lui! Voudrait-on rendre responsables du défaut d'inscription. les parens qui dotent? Mais déjà on a statue que les pères et mères eux-mêmes ne sont pas obligés de doter; à plus forte raison ne doivent-ils pas être responsables de la dot. Si les femmes qui se marient avant leur majorité ont perdu leurs pères et mères, le tuteur ne peut pas avant le mariage couvrir d'inscription les biens du futur époux; les devoirs et les droits de ce tuteur cessent aussitôt que le mariage est célébré; on ne peut plus alors faire concourir son autorité avec celle du mari. Les immeubles restent ordinairement dans les mains des pères et mères lorsqu'ils marient leurs enfans. Le mari 2135 n'aura point alors de biens sur lesquels la femme puisse prendre inscription. Il serait injuste que des créanciers pussent s'inscrire avant elle sur les biens qui écherraient au mari et dont souvent elle n'aurait même pas connaissance. Observez enfin qu'il s'est toujours fait un assez grand nombre de mariages sans que les conditions en aient été réglées par un contrat; aucune loi ne l'exige encore, le système des inscriptions en imposerait la nécessité. C'est, en oubliant la nature de l'hypothèque légale, mettre une gêne aux mariages, lorsque tout devrait tendre à les favoriser. Les mineurs ont le plus souvent pour tuteur le survivant des père et mère. Il faut toujours éviter de mettre en opposition d'intérêts les maris et les femmes, les enfans et leurs pères ou mères. La paix des familles constitue le bonheur public: cette idée morale et politique a été jusqu'à présent suivie dans la composition du Code, et elle a eu l'assentiment général; on s'en écartera si l'on fait dépendre d'une inscription la fortune des femmes et des mineurs ; c'est, au lieu de la paix, établir dans les familles l'injustice, la fraude et la discorde. Quant aux hypothèques judiciaires, elles ont été établies pour que l'autorité dela chose jugée ne fût pas compromise par les hypothèques que la partie condamnée, ou sur le point de l'être, accorderait à un tiers qui deviendrait ainsi préférable. Le système dans lequel une condamnation ne doit donner l'hypothèque que par l'inscription donne à la fraude plus de facilité qu'elle n'en eut jamais.. SECTION IV. - De l'Inscription considérée comme moyen de publicité des hypothèques. 10. Inutilité de l'inscription des hypothèques légales. Le motif pour lequel on veut exiger l'inscription est l'intérêt des créanciers postérieurs. C'est, à l'égard des hypothèques légales, une formalité inutile. L'état de femme mariée n'est-il pas rendu complétement notoire par les solennités qui l'accompagnent et par la cohabitation des époux? La qualité de tuteur, celle de comptable, ne sont-elles pas publiques? Il ne résulte donc, pour les autres créanciers, aucun avantage réel de cette inscription ; et c'est de cette vaine formalité que l'on veut faire dépendre le sort des femmes, des mineurs, et le recouvrement des deniers publics. Les réflexions qui viennent d'être faites sur la nature et sur l'objet des hypothèques légales avaient arrêté, en 1673, les premiers auteurs du système de la publicité des hypothèques. On dispensa de l'enregistrement les hypothèques des mineurs sur les biens des tuteurs pendant la minorité ; et les mineurs eurent une année, à compter de leur majorité, pour remplir cette formalité. 2o. De la nécessité d'un délai pour l'inscription. Les partisans du système de publicité se trouvent entre 2:34 deux écueils: ou ils donneront un certain délai pour s'inscrire, et alors celui qui contracte ignore quels sont les créanciers antérieurs qui peuvent lui être préférés par une inscription prise dans ce délai, ou bien ils ne donneront l'hypothèque que du moment de l'inscription, et dès lors le créancier, ayant une hypothèque légale ou judiciaire, est dans l'impossibilité de conserver son droit. En 1673, on crut qu'il était indispensable de donner un certain délai pour l'enregistrement des titres hypothécaires; ce délai fut fixé à quatre mois pour avoir hypothèque sur les biens présens, et à pareil délai pour étendre cette hypothèque aux biens qui survenaient au débiteur par acquisition, succession ou autrement. On avait ainsi, dans cette loi, maintenu le principe suivant lequel le débiteur peut donner et le créancier prendre pour gage tous les biens présens et futurs; mais, d'une autre part, le créancier, ainsi qu'on l'a observé, avait à craindre, lors qu'il contractait, que des créanciers antérieurs, à l'égard desquels le délai de quatre mois ne serait pas encore expiré, n'obtinssent la préférence par l'enregistrement fait dans ce délai. On a voulu, dans la loi de l'an VII, parer à cet inconvénient on ne donne aucun délai au créancier; son hypothèque n'a d'effet que du jour de l'inscription. S'agit-il d'une hypothèque légale ou judiciaire? c'est mettre le créancier dans l'impossibilité de conserver sa propriété. En effet, on ne peut pas supposer qu'il connaisse ainsi, sur-le-champ, tous les biens de son débiteur; que ces biens soient à sa portée : jamais on ne doit faire dépendre le droit de propriété d'une formalité, sans constituer en demeure, par un délai suffisant, celui qui, étant tenu de la remplir, la négligerait. Et dans quel cas écarte-t-on ce principe? c'est lorsqu'on prononce la peine la plus rigoureuse, celle de la perte de la propriété. 3o. De la possibilité de la fraude, lors même qu'il n'y a pas de délai pour l'inscription. S'agit-il d'une hypothèque pour prêt? le prêteur ne peut, dans le cas même où il n'y a pas de délai pour inscrire, être assuré qu'un autre créancier ne sera pas plus prompt que lui à prendre une inscription sur un immeuble éloigné du lieu où le contrat aura été fait; le prêteur, tourmenté par cette inquiétude, ne veut point délivrer la somme avant qu'il lui soit prouvé que son inscription sera utile. Mais la loi qui lui impose la nécessité de s'inscrire n'a aucun moyen de le mettre à l'abri de la mauvaise foi. Il ne peut même pas faire deux actes, dont l'un, qui ne serait qu'une promesse de prêter, serait inscrit, sauf ensuite à réaliser le prêt on ne peut prendre d'hypothèque sur une simple promesse de prêt. Les parties ne croient pouvoir sortir de cette perplexité qu'en faisant un acte faux. On y suppose que la somme a été |