chap. 2. 2021-2022 placée par une autre, puisque le cautionnement était la condition expresse de l'obligation, et que le créancier, qui n'avait pas voulu traiter avec le débiteur seul, se trouverait cependant réduit à l'avoir seul pour débiteur. Il n'est qu'un seul cas où il ne doit pas avoir le droit d'exiger une autre caution; c'est lorsqu'il a lui-même indiqué et nominativement exigé, par une convention expresse, la caution qui est devenue insolvable. Alors il est seul responsable du choix qu'il a fait, et le débiteur qu'il n'avait obligé qu'à lui donner cette caution ne peut être tenu de lui en fournir une autre. Dans ce cas, la caution étant déterminée, la garantie du débiteur est déterminée elle-même; au lieu qu'en stipulant une caution indéterminée, on entend stipuler une garantie qui soit suffisante pendant toute la durée de l'obligation. Après avoir établi la nature et l'étendue du cautionnement, le projet de loi en règle les effets, soit entre le créancier et la caution, soit entre la caution et le débiteur, soit entre les cofidejusseurs. Voyons d'abord comment ils sont réglés entre le créancier et la caution. Dans la rigueur du droit, la caution pourrait être poursuivie par le créancier dès l'instant où le débiteur serait en retard de payer, puisqu'elle s'est engagée à exécuter l'obligation principale, dans le cas où le débiteur ne l'exécuterait pas lui-même. Mais pourquoi le créancier serait-il dispensé de toute poursuite contre un débiteur qui présenterait des moyens de solvabilité, et qu'il lui serait facile de contraindre à l'exécution? Le principal obligé n'est pas libéré par le cautionnement: c'est avec lui d'abord que le créancier a traité. Pourquoi ne serait-il pas discuté le pr. mier? N'est-il pas présumable d'ailleurs, à moins qu'il n'y ait stipulation contraire, que la caution n'a eu l'intention de s'obliger à payer que dans le cas seulement où le débiteur ne serait pas en état de payer lui-même; et cette obligation ne suffit-elle pas pour la sûreté du créancier? Ne faut-il pas enfin traiter avec quelque faveur le cautionnement qui est un acte de bienfaisance, pourvu qu'en definitive le créancier trouve sûreté entière? Tels sont les motifs qui ont fait accorder à la caution conventionnelle, lorsqu'elle est poursuivie, le droit de requérir que le débiteur soit préalablement discuté dans ses biens par le créancier. C'est ce qu'on appelle le bénéfice de discussion. Il n'était pas connu dans l'ancienne législation romaine, et ne fut établi que par Justinien; mais on l'avait admis dans toute la France, et il était équitable de le maintenir. Le créancier ne peut s'en plaindre dans aucun cas, puisqu'il a été le maître de n'accepter la caution qu'à la condition qu'elle renoncerait au bénéfice de discussion, ou qu'elle s'obligerait solidairement avec le débiteur, et qu'alors il a le droit de la poursuivre immédiatement comme un débiteur solidaire : mais s'il a accepté la caution d'une manière pure et simple, il a volontairement consenti à discuter le principal débiteur: Volenti non fit injuria. Cependant, quelque favorable que soit le bénéfice de discussion, il est restreint, pour les intérêts du créancier, dans de justes limites. Et d'abord le créancier n'est tenu de discuter le débiteur principal que lorsque la caution le requiert expressément, et il faut même qu'elle le requière sur les premières poursuites exercées contre elle : elle y serait non recevable si elle avait défendu au fond : c'est une exception dilatoire qui doit être proposée a limine litis. Il serait trop pénible pour le créancier que la caution qui l'aurait fatigué par de longues chicanes pût encore éloigner le paiement de la dette en demandant la discussion du débiteur. Le projet de loi veut en outre que la discussion réclamée 2023 2024 soit de nature à être courte et facile, qu'elle n'expose pas le créancier à des retards considérables ou à des contestations pénibles, et qu'enfin le créancier ne soit pas tenu d'en avan-` cer les frais. Il oblige en conséquence la caution à indiquer les biens du débiteur qui peuvent être discutés, et à remettre des deniers suffisans pour les frais de la discussion, et il exige encore que la caution n'indique, Ni des biens situés hors l'arrondissement du tribunal d'appel du lieu où le paiement doit être fait, parce que l'éloignement en rendrait la discussion trop difficile; Ni des biens litigieux, le créancier ne pouvant être obligé à soutenir des procès qui peuvent être longs et incertains, lorsqu'il a dû compter sur l'exécution que lui avait promise la caution; Ni des biens hypothéqués à la dette, qui ne seraient plus en la possession du débiteur, parce qu'il pourrait encore y avoir lieu à une longue discussion avec les détenteurs de ces biens et avec les créanciers. Quelques personnes ont trouvé ces conditions trop dures pour la caution; nais la faculté de demander la discussion est déjà un bénéfice assez considérable accordé au fidejusseur, et il ne faut pas aussi qu'il soit trop onéreux pour le créancier: ce serait rendre presque illusoire le cautionnement. Puisqu'on force le créancier à une discussion qui retarde l'exécution du contrat, puisqu'on ne lui permet pas de suivre immédiatement cette exécution contre le fidejusseur qui l'a cependant expressément garantie, il est juste au moins que le fidejusseur à qui cette discussion profite, en faveur de qui elle est faite, en avance les frais, et en supporte les risques, et qu'il n'indique que des biens dont la discussion puisse être facile et prompte. Mais aussi, lorsque la caution à fait les indications prescrites, et qu'elle a remis les fonds nécessaires, si le créancier néglige la discussion, il est seul responsable de l'insolvabilité du débiteur, survenue à défaut de poursuites. Le bénéfice de discussion n'est pas accordé aux cautions 1041 légales et judiciaires, parce qu'elles ne peuvent faire aucune restriction aux cautionnemens qui sont exigés par la loi, et que d'ailleurs tout est de rigueur dans cette matière, soit à cause de la nature de la dette, soit à cause de l'autorité de la justice. Par les mêmes motifs, celui qui a cautionné la caution ju- 2043 diciaire ne peut demander la discussion ni du principal débiteur ni de la caution. Les cautions conventionnelles jouissent encore d'une autre faveur. Lorsqu'il y a plusieurs personnes qui ont cautionné le 2016-2017 même débiteur pour la même dette, quoiqu'elles soient réellement obligées chacune à toute la dette, puisque chacune d'elles a cautionné la dette entière, elles peuvent cependant exiger que le créancier divise son action, et la réduise contre chacune d'elles à sa part et portion seulement. C'est ce qu'on appelle le bénéfice de division, qui fut introduit dans le droit romain par l'empereur Adrien, et qui était, comme le bénéfice de discussion, admis dans toute la France. Mais la division ne peut être demandée qu'après que l'action a été formée par le créancier; et, jusqu'à ce qu'elle soit demandée, toutes les cautious restent responsables des insolvabilités de chacune d'elles. Quel préjudice peut donc éprouver le créancier lorsqu'on le force à diviser son action contre les cautions qui sont solvables, et qui répondent de l'insolvabilité des autres? Il est évident qu'il n'a rien à perdre. Il a pu d'ailleurs, dans l'acte de cautionnement, faire renoncer les cautions à ce bénéfice de division, comme à celui de la discussion. Je passe aux effets du cautionnement entre la caution et le debiteur. 2018-20232031 2032 Ce contrat est de la part de la caution envers le débiteur un acte de bienfaisance. Le débiteur doit donc indemnité entière à la caution, lors même que le cautionnement a été donné à son insu. Cette indemnité a lieu de la part du débiteur, soit en acquittant lui-même sa dette, soit en faisant donner décharge à la caution par le créancier, soit en restituant à la caution tout ce quelle a légitimement payé en son acquit. Ainsi, lorsque la caution a payé, même volontairement et sans poursuite, elle a de droit un recours contre le créancier; elle est subrogée entièrement aux droits du créancier. Mais elle ne peut nuire à ceux du débiteur. Si elle payait avant que l'obligation fût échue, elle ne pourrait exercer son recours qu'à l'échéance. Si elle payait au-delà de ce qui était dû, elle ne pourrait répéter l'excédant de la dette. et que Si elle payait sans en avoir averti le débiteur, celuici payât une seconde fois, elle n'aurait d'action en restitution que contre le créancier. Enfin, si elle avait payé sans avoir été poursuivie et sans avoir averti le débiteur, elle n'aurait pas de recours contre lui, s'il avait, au moment du paiement, des moyens de faire déclarer la dette éteinte. Lors inême que la caution n'a pas payé la dette, elle peut agir contre le débiteur pour être indemnisée, 1°. Si elle est poursuivie en justice pour le paiement, parce qu'elle ne s'est pas obligée envers le débiteur à payer pour lui, ni à supporter des frais, ni à fournir les fonds nécessaires pour la discussion; 2o. Si le débiteur est en faillite, ou se trouve dans l'état de ruine qu'en terme de droit on appelle déconfiture, parce qu'alors la dette est devenue exigible; 3°. Si le débiteur s'est obligé de rapporter dans un certain temps la décharge du cautionnement, et que ce temps |