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chez avait perdu désormais, d'une manière absolue, le droit de disposer, directement ou indirectement, des titres ainsi transférés, est exclusif d'une donation à cause de mort, prohibée par la loi, lorsqu'elle n'est pas faite par contrat de mariage. Si le transfert des valeurs litigieuses au profit des sieurs Juron est une preuve écrite et complète de leur droit de propriété, il n'était pas permis aux juges de l'anéantir en invoquant de prétendues circonstances de fait plus ou moins vraisemblables, car, aux termes de l'art. 1341, C. Nap., aucune preuve par témoins ne saurait être admise contre outre le contenu aux actes. Cette règle devait d'autant plus être appliquée dans l'espèce que, s'agissant d'un transfert, c'està-dire d'un contrat ayant la forme et les apparences d'un contrat à titre onéreux, les sieurs Juron auraient pu soutenir qu'ils en avaient réellement payé le prix, et, à défaut d'une preuve écrite, les juges n'auraient pu décider que ce prix n'avait pas été payé. La condition des sieurs Juron ne pouvait pas être plus mauvaise, parce qu'ils avouaient franchement n'avoir pas payé le prix, et parce qu'ils reconnaissaient que, par le transfert, le sieur Fuchez avait entendu leur faire une donation pure et simple. Il n'était pas permis aux juges de s'emparer de cet aveu pour le diviser et pour décider que la donation n'était pas pure et simple, mais était seulement à cause de mort. En statuant ainsi, les juges ont violé l'art. 1356, C. Nap. A la vérité, l'art. 1353 autorise 'les juges à admettre les présomptions graves, précises et concordantes, mais seulement dans les cas où la loi admet la preuve testimoniale, à moins que l'acte ne soit attaqué pour cause de fraude ou de dol. Cet article ne pouvait recevoir son application dans l'affaire actuelle. D'une part, la preuve testimoniale n'était pas admissible contre un acte écrit et régulier, faisant foi de son contenu, et contre lequel on n'invoquait pas même un commencement de preuve par écrit. D'autre part, l'acte n'était pas attaqué pour cause de fraude ou de dol; l'arrêt attaqué n'indique l'allégation d'aucun fait de ce genre. C'est le sieur Fuchez qui seul a eu la pensée de la donation, et qui seul a mis cette pensée à exécution, ainsi qu'il l'a voulu; les donataires n'ont rempli dans cette affaire qu'un rôle entièrement passif. En agissant ainsi qu'il l'a fait, le sieur Fuchez ne portait atteinte à aucun droit acquis, puisqu'il n'avait aucun héritier à réserve. Ses légataires particuliers, dont les droits ne se sont ouverts qu'au décès, ne peuvent obtenir le paiement de leurs legs que sur les biens qu'il a laissés, et ils sont non recevables dans leur action en recherche des biens qu'il avait, volontairement et sans fraude à leur égard, fait sortir de son patrimoine à un titre quelconque.-On invoquait, en termiminant, l'arrêt de la Cour de cassation du 24 juill. 1844 (V. suprà, ad notam).

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Pour les défendeurs, on a répondu : Le transfert est un titre sans doute; mais d'après sa nature, on ne saurait lui appliquer d'une manière absolue la règle de l'art. 1341, C. Nap. Que prouve le transfert? Une seule chose, la transmission de la propriété. Mais à quelles conditions cette transmission a-t-elle eu lieu? Le titre est muct sur ce point. Ce n'est pas comme un contrat de vente, qui parle du prix et de son paiement; ici, le titre ne nous fournit aucun élément de décision. Le juge se trouve entre les dires de deux parties, dont l'une soutient que le titre lui a été donné, dont l'autre prétend au contraire qu'il n'a été livré qu'à titre de dépôt, et à la condition d'en payer le prix à la succession du cédant. Le titre ne tranche pas la difficulté. Où le juge pourrat-il chercher la solution entre ces allégations contraires? Dans l'étude des actes et des faits de la cause. Il est vrai que, par l'arrêt du 24 juill. 1844, invoqué par le pourvoi, la Cour de cassation a décidé que le transfert était la preuve écrite de la cession; rien de plus juste, et tout le monde admettra ce point. Mais cet arrêt n'a-t-il pas été trop loin quand il a ajouté que le transfert était aussi la preuve écrite du paiement? En somme, l'arrêt attaqué n'a pas admis une preuve contre et outre le contenu à l'acte. L'acte constatait seulement la transmission des valcurs; il ne disait rien sur les conditions de cette transmission. Dans l'incertitude où se trouvait le juge sur ce point du litige, il a dû chercher la vérité en dehors de l'acte qui ne s'expliquait pas à cet égard, et quand on pèse avec soin toutes les présomptions relevées par l'arrêt, il est impossible de se refuser à cette conviction que le juge a en effet découvert la vérité et empêché ainsi l'abus que les frères Juron voulaient faire de la confiance que leur grand-oncle avait euc

en eux.

ARRET (après délib. en ch. du cons.).

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LA COUR; Vu les art. 1341, 1347 et 1353, C. Nap.; Attendu que par transferts réguliers en date du 3 janv. 1863, Cambon, agissant comme mandataire de Hugues Fuchez, a transmis à Joseph-Marie Juron douze actions, et à Jean-Baptiste Juron quatre obligations de la société du gaz de Lyon, appartenant à son mandant Fuchez; Que les frères Juron reconnaissent qu'ils n'ont payé aucun prix pour ce transfert, et qu'ils tiennent les valeurs industrielles cédées de la libéralité de leur grand-oncle; - Attendu que le transfert des valeurs industrielles, qu'il ait lieu à titre gratuit ou à titre onéreux, prouve, par la seule substitution sur les registres de la société du nom du cessionnaire à celui du cédant, le droit de propriété de celui au profit duquel a été faite l'inscription; Que ce transfert est également la preuve écrite et complète du dessaisissement du cédant, qui, du moment que la mutation

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a été opérée, a perdu toute espèce de droit sur les valeurs cédées ; — Attendu que, par application de ces principes, la conséquence légale des transferts passés le 3 janv. 1863 par le mandataire de Fuchez au profit des frères Juron, a été d'investir ceux-ci, à dater de ce jour, de la propriété entière et complète des douze actions et des quatre obligations du gaz de Lyon, et d'en dessaisir au contraire le cédant Fuchez, de telle façon que ces valeurs n'ont plus pu se trouver dans la succession ouverte le 3 mars 1863;

Attendu cependant que l'arrêt attaqué a cru pouvoir annuler les transferts et dénier les conséquences légales qu'ils devaient entraîner, en se basant sur une série de présomptions qui établiraient, suivant l'arrêt, que Fuchez n'a pas eu l'intention de transmettre à ses petits-neveux la propriété des valeurs, objet des transferts; Mais, attendu que l'art. 1341, C. Nap., défend d'admettre la preuve testimoniale contre et outre le contenu aux actes, et que, suivant les art. 1347 et 1353, même Code, cette règle ne souffre exception que dans le cas de commencement de preuve par écrit ou lorsque les actes sont attaqués pour cause de fraude ou de dol; Attendu que pour détruire l'effet des transferts du 3 janv. 1863, les défendeurs ni l'arrêt attaqué n'ont excipé d'aucun commencement de preuve par écrit, qu'ils n'ont pas non plus allégué qu'il y eût dol ou fraude, et que si l'arrêt a relevé une dissimulation tentée au détriment du fisc, ce

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(1-2) Il est maintenant admis en jurisprudence et incontestable que la taxe des honoraires d'un notaire peut être demandée même après règlement amiable et paiement de ces honoraires par les parties... Et cela malgré toute stipulation contraire, une pareille stipulation étant viciée d'une nullité d'ordre public. V. sur ce point, Paris, 17 mai 1866 (P. 1866.1234.-S.1866.2. 326), et le renvoi. On n'a pas voulu que les notaires pussent abuser de l'influence naturelle que leur caractère et la considération qui entoure leur profession exercent sur leurs clients, pour se faire remettre des honoraires excédant ceux qui leur seraient dus légitimement.-Pour les notaires donc, comme pour tous autres officiers ministériels, la taxe est de rigueur, d'ordre public, et tant qu'elle n'a pas été faite par le juge compétent, la partiei ntéressée est recevable à en revendiquer le bénéfice. Mais si le droit de demander la taxe se rattache à l'ordre public et résiste dès lors à tout règlement amiable, en est-il de même du droit de former opposition à une taxe émanée du magistrat compétent? En d'autres termes, lorsque le président ou le juge qui le remplace a taxé le mémoire présenté par un notaire, et que, sans recourir à la faculté qui lui appartient de former opposition à la taxe, la partie a payé la somme allouée par le magistrat, peutelle revenir sur le paiement ainsi consenti, et réclamer devant le tribunal, par voie de demande en répétition, contre la prétendue exagération du

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CASS.-CIV. 28 août 1867. NOTAIRES, HONORAIRES, TAXE, PAIEMENT, RÉPÉTITION.

Le paiement des honoraires d'un notaire, fait par une partie sur le vu de la taxe de ces honoraires, constitue un acquiescement qui s'oppose à ce que cette partic, alors d'ailleurs qu'elles'est librement libérée sans protestation niréserve, et qu'elle n'impute aucune fraude au notaire, puisse critiquer plus tard la taxe à laquelle il a été procédé, et demander la restitution d'une partie des honoraires par elle payés (1). (C. Nap., 1350, 1377.)

Un tel paiement ne saurait, d'ailleurs, être considéré comme n'ayant eu lieu, de la part du client, que comme contraint et force, par cela seul qu'il aurait été opéré à la suite d'une assignation signifiée par le notaire à fin de condamnation au paiement des honoraires taxés (2).

règlement fait par le président? L'arrêt que nous recueillons juge avec raison la négative. Il est évident, en effet, que les considérations d'ordre public qui protégent contre tous consentements contraires le droit de requérir la taxe, manquent d'application lorsqu'il s'agit simplement de la faculté de se pourvoir contre une taxe légalement opérée. Dans ce dernier cas, le notaire n'a pas soustrait le règlement de ses honoraires au contrôle de la justice; le paiement fait après taxe n'a pas été surpris à la confiance des clients; effectué volontairement, et sur le vu de la taxe, ce paiement est donc désormais à l'abri de toute critique. Sans doute, le client eût pu ne pas s'en rapporter à la taxe et y former opposition devant le tribunal; mais il en est de ce droit d'opposition comme du droit d'appel auquel la partie condamnée en première instance peut toujours renoncer en exécutant le jugement de condamnation. En réalité, la taxe acquiescée par le paiement produit, aussi bien que le jugement exécuté, tous les effets de la chose jugée. Le système contraire aurait pour résultat d'assimiler, en laissant indéfiniment leur validité en suspens, des paiements dont la justice elle-même a déterminé les bases, à ceux pour la réclamation desquels l'officier public a cru devoir écarter le contrôle de la justice. Or, une telle assimilation est inacceptable autant en droit qu'en équité. C'est d'après le même principe qu'il a été jugé que la partie qui, après que des honoraires dus par elle à un notaire ont été

(Colmant C. Grosse.)

En 1864, M° Colmant, notaire, a reçu un acle contenant donation et partage des biens des sieur et dame Marchal entre leurs enfants, au nombre desquels figure le sieur Grosse. Ce dernier, n'ayant voulu payer sa part dans les frais de l'acte qu'après la taxe, le sieur Colmant dressa un état qu'il soumit à l'un des juges du tribunal de Sarrebourg, remplaçant le président empêché. Le magistrat taxateur estima que l'état fourni n'était pas exagéré, et alloua, dès lors, la somme demandée. Par suite, et suivant exploit du 7 sept. 1864, Me Colmant assigna le sieur Grosse devant le tribunal en paiement du montant de la taxe. Sur le vu de cette assignation, qui contenait copie du mémoire taxé, le sieur Grosse paya la somme réclamée, ainsi que le coût de l'exploit. -Cependant, plus tard, il crut devoir soumettre au président du tribunal le mémoire taxé, en son absence, par le juge qui le remplaçait. Le président demanda à Me Colmant, au sujet du détail dudit mémoire, certains renseignements que, par déférence, ce dernier s'empressa de lui donner. Examen fait des pièces et documents, le président écrivit à M. Colmant qu'en réalité le mémoire lui paraissait exagéré, et qu'il désirerait voir les honoraires réduits et ramenés à un chiffre qu'il indiquait. Le notaire, après avoir pris l'avis du président de sa chambre, refusa d'adhérer au désir qui lui était exprimé. Alors, et sur la connaissance que lui donna le président du tribunal de l'avis par lui exprimé au sujet de l'exagération du mémoire de Me Colmant, le sieur Grosse assigna ce dernier en resti

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taxés par le président sans qu'elle ait été appelée à cette taxe, a néanmoins approuvé un compte rendu par le notaire et dans lequel ses honoraires taxés avaient été compris, est réputée avoir librement acquiescé à la taxe, et est non recevable à demander ultérieurement la réduction de ces honoraires Cass. 13 mars 1866 (P.1866.385.-S. 1866.1.147), et la note. Il est bien entendu que, si le paiement n'avait eu lieu qu'à la suite de manœuvres tendant à induire le client en erreur sur son droit d'opposition, ce droit pourrait être exercé malgré l'acquiescement, car, en ce cas, on rencontrerait la fraude, et, comme on le sait, la fraude fait exception à toutes les règles; mais la simple ignorance dans laquelle le client aurait pu être, en dehors de toute manoeuvre ou influence de la part de l'officier public, quant à l'étendue de son droit, ne vicierait pas le paiement, et ne saurait le faire considérer comme entaché d'erreur, puisqu'il ne s'agirait là que d'une de ces erreurs de droit, dont les conséquences sont irréparables et dont nul ne peut se faire une arme par cela même que nul n'est censé ignorer la loi. -Il est bien entendu encore que le droit d'opposition survivrait au paiement, si le client n'avait payé que comme contraint et forcé. Mais est-il

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tution d'une partie des honoraires par lui perçus. Le défendeur, tout en soutenant que les honoraires dont il avait reçu lemontant lui étaient dus légitimement, opposa à la demande une fin de non-recevoir tirée du paiement qui avait suivi la taxe.

22 juin 1865, jugement du tribunal de Sarrebourg qui écarte cette exception dans les termes suivants : « Sur la fin de nonrecevoir tirée de ce que les honoraires perçus par le notaire Colmant, à l'occasion du partage Marchal, lui auraient été payés librement par Grosse et que, dès lors, toute réclamation serait interdite à ce dernier: Attendu qu'il est de principe, en effet, qu'un règlement de cette nature équivaut à la chose jugée; qu'il en a la force, parce qu'il ne pourrait être admis qu'une convention librement consentie fût perpétuellement sujette à critique de la part de ceux qui l'ont faite que ce principe a été consacré par des arrêts assez nombreux, notamment par ceux des 4 déc. 1822, émané de la Cour de Paris, et 17 déc. 1829, émané de la Cour de cassation; Mais attendu que le principe de la chose jugée ne s'applique qu'au règlement fait en payant librement, d'une manière intelligente et éclairée; que, particulièrement, la partie pourrait toujours revenir sur un paiement amiable d'honoraires si elle s'apercevait plus tard qu'il y a eu erreur, de la fraude, dans le paiement de ces honoraires; que cela a été décidé notamment dans l'arrêt d'Amiens du 9 mai 1823, qui fixe même à trente ans le délai accordé pour intenter l'action en répétition; Attendu que Grosse, s'il s'en tient à ce dernier principe, aurait incontestablement le droit de réclamer, en dé

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vrai, comme le disait le jugement ici attaqué, que le client qui paie, sur l'assignation à lui signifiée par le notaire, les honoraires réclamés suivant la taxe, ne le fasse que comme contraint et forcé? Evidemment non; une partie ne peut être réputée avoir payé comme contrainte et forcée qu'autant qu'elle l'a fait en vue d'un titre à l'exécution duquel il lai était impossible de se soustraire; or, l'ordonnance de taxe n'est pas un titre de cette nature, puisqu'il suffit d'y former opposition pour en paralyser les effets. La taxe n'est pas exécutoire par elle-même; l'officier public à qui elle a été délivré est obligée, pour obtenir un titre, de se pourvoir devant le tribunal, en cas de refus de paiement; le client qui se libère, sur cette poursuite, ne paie pas plus comme contraint et forcé, que tout autre plaideur qui, actionné en justice, s'exécute soit parce qu'il reconnaît le bienfondé de la demande, soit pour éviter les ennuis d'un procès. Dans l'un comme dans l'autre cas, le paiement ainsi effectué constitue entre les parties une sorte de contrat judiciaire qui ne saurait laisser ouverte la voie de la demande en répétition. -C'est donc très-justement que, dans ses diverses parties, la décision attaquée a été censurée par l'arrêt que nous recueillons.

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montrant qu'il a payé d'une manière abusive (qu'il eût payé ou non volontairement); qu'il aurait bien mieux ce droit s'il était établi que le paiement n'a été rien moins que spontané et volontaire ; Attendu qu'il résulte des documents de la cause que Grosse, à la réclamation qui lui était faite par Colmant de ses honoraires, a demandé à cet officier ministériel un détail des frais; que celui-ci, après avoir fait taxer ces mêmes frais, a tout d'abord fait assigner son client pour obtenir le montant de la taxe ; que ce n'est donc pas d'une manière spontanée, libre et amiablement, que Grosse a payé; qu'il ne l'a fait que sous le coup d'une assignation, et pour éviter les conséquences d'une contestation au sujet de laquelle il a dû se réserver le temps de réfléchir, et sans doute aussi par déférence à l'acte du magistrat; qu'à son égard, il peut donc revenir sur ce paiement et être admis à démontrer l'erreur qui le vicie; que Colmant a mauvaise grâce à contester ce droit ; que, cût-il été fondé à repousser les prétentions de Grosse, il devait, en sa qualité d'officier ministériel, se prêter à la recherche et à la rectification des erreurs dont pouvait être entaché son compte d'honoraires, au lieu de se retrancher derrière un fait consommé et les diverses exceptions qu'il soulève; Attendu que la taxe faite par le président du siége, lors même qu'elle aurait été établie contradictoirement entre les parties, ce qui n'a pas eu lieu au cas particulier, n'est pas un jugement; que, dès lors, en cas de contestation, le tribunal se trouve légalement saisi pour statuer sur cette contestation, ainsi que cela a été décidé par l'arrêt de cassation du 15 mars 1847, et conformément à l'art. 51 de la loi du 25 vent. an 11; - Par ces motifs, etc. >>

POURVOI en cassation par Me Colmant, pour violation des art. 1350 et 1377 C. Nap., en ce que le jugement attaqué l'a condamné à restituer au sieur Grosse une partie des honoraires qui lui avaient été payés, ainsi que le coût de l'assignation donnée afin d'obtenir le paiement de ces honoraires, et cela, bien que ledit sieur Grosse eût acquiescé à la taxe faite par le magistrat compétent en On soutenait que le en payant le montant. paiement ainsi fait avait constitué entre les parties un quasi-contrat, équivalant à la chose jugée, et rendant dès lors toute action en répétition impossible.

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fraude n'est articulée à l'encontre de Colmant; que le jugement ne retient aucun fait qui suppose l'erreur prévue par la loi; et qu'on ne peut considérer un paiement comme n'ayant pas eu lieu librement, à raison de ce seul fait qu'il a été opéré à la suite d'une assignation en justice; - Attendu que le règlement des honoraires fait par un magistrat compétent offre contre toute prétention abusive les garanties voulues par la loi; Attendu qu'en payant les honoraires réclamés en conformité de ce règlement, Grosse y a par cela même acquiescé et s'est rendu par conséquent non recevable à demander une réduction; Qu'en décidant le contraire, le jugement attaqué a violé les dispositions invoquées à l'appui du pourvoi; Casse, etc.

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Du 28 août 1867.- Ch. civ.-MM. Pascalis, prés.; De Vaulx, rapp. Blanche, av. gén. (concl. conf.); - Lefèvre et de St-Malo,

av.

CASS.-REQ. 27 novembre 1867.
CHEMIN DE FER, TRAITÉ PARTICULIER,
TRANSPORT MARITIME.

L'interdiction faite à une compagnie de chemin de fer par son cahier des charges de stipuler avec des entreprises de transport par terre et par eau des arrangements qui ne seraient pas consentis en faveur de toutes les entreprises desservant les mêmes voies de communication, s'applique aux entreprises de transport maritime, comme à toutes autres. El cette interdiction, ayant surtout pour objet de protéger l'intérêt général du commerce, et non pas seulement l'intérêt privé des entrepreneurs de transport, doit recevoir son application dans tous les cas, sans qu'il y ait lieu de se préoccuper des lieux d'expédition ou de destination des marchandises transportées, non plus que du mode de transport.

Ainsi, il importe peu que les lieux d'expédition ou de destination soient enpays étranger, et que les transports aient lieu par des navires étrangers.

(Chem. de fer du Midi C. Robinson et consorts).

Nous avons déjà rapporté plusieurs arrêts rendus dans cette affaire: 1 un arrêt de la Cour de Bordeaux du 28 juill. 1863 (P.1864. 410.-S.1864.2.17); 2o un arrêt de la Cour de cassation du 3 juill. 1865 (P.1865.1166.S.1865.1.441), lequel casse l'arrêt précité de Bordeaux, et renvoie l'affaire devant la Cour de Limoges; 3° enfin, un arrêt de cette dernière Cour en date du 28 févr. 1866 (P.1866. 591.-S.1866.2.143). Le lecteur est prié de se reporter aux endroits indiqués pour l'intelligence des faits de la cause. · La question qui se présentait d'abord à juger était celle de savoir si les étrangers peuvent, aussi bien que les Français,

se

prévaloir, même en l'absence de conventions internationales établissant la réciprocité, et sans avoir été autorisés à établir leur domicile en France, des dispositions des cahiers des charges des compagnies de chemins de fer français interdisant tous avantages particuliers au profit de certaines entreprises de transport. Cette question ayant été, en dernier lieu, jugée dans le sens de l'affirmative, l'arrêt précité de Limoges a décidé, en outre, que la demande en dommages-intérêts formée, dans l'espèce, par les sieurs Robinson et autres, armateurs anglais, était fondée; mais ne trouvant pas dans les documents dé la cause des éléments suffisants pour fixer le chiffre de l'indemnité, la Cour a ordonné que les dommages-intérêts réclamés seraient mis par état et déclaration, conformément aux art. 128 et 523, C. proc. En exécution de cet arrêt, les sieurs Kobinson ont fait signifier trois états comprenant les dommages qu'ils avaient éprouvés, soit à raison de l'abaissement du fret sur les marchandises qu'ils avaient transportées, soit à raison des transports de marchandises dont ils avaient été privés par suite de la concurrence de la compagnie Lindsay et Basse. Il est à remarquer que les sieurs Robinson n'avaient employé, dans les expéditions par eux établies, que des navires anglais ou espagnols commandés par des capitaines de ces nationalités. La compagnie du Midi a soutenu que la concurrence qui se réalise en pays étranger, et qui se pratique au moyen de navires étrangers, ne pouvait, dans tous les cas, motiver une demande en dommagesintérêts devant les tribunaux français.

22 août 1866, second arrêt de la Cour de Limoges qui statue en ces termes : << Attendu que, par arrêt du 28 févr. 1866, la Cour avait déclaré recevable et fondée l'action en dommages-intérêts formée par Robinson et comp. et Albrecht et fils contre la compagnie du Midi, et avait ordonné que les demandeurs mettraient par état et déclaration les dommages-intérêts réclamés; Attendu que les sieurs Robinson et Albrecht ont donné leur état le 31 mars 1866, et qu'ils demandent par leurs conclusions définitives que la compagnie du Midi soit condamnée à leur payer la somme de 676,352 fr. 86 cent., avec les intérêts de droit; - Attendu que la compagnie du Midi s'efforce de repousser ces conclusions par divers motifs, notamment en soutenant que les sieurs Robinson et comp., ayant établi à Londres le siége de leur société, et n'exerçant pas en France, ne peuvent pas invoquer les termes de l'art. 53 du cahier des charges de la compagnie du Midi, annexé au décret-loi du 1er août 1857; Áttendu que ce moyen avait été présenté avant l'arrêt du 28 février dernier, et qu'il avait été implicitement écarté, puisque la Cour avait reconnu la recevabilité et le fondement de la demande des sieurs Robinson et comp., et Albrecht et fils; Mais attendu, sans qu'il soit besoin ANNÉE 1867.-11° LIVR.

d'opposer à ce chef des conclusions de la compagnie du Midi l'autorité de la chose jugée, que la lettre et l'esprit de l'art. 53 du cahier des charges précité repoussent le moyen proposé par le sieur Pereire, ès qualité; que cet article a pour but de protéger et protége, en effet, toutes les industries françaises ou étrangères et le commerce français et étranger, en prohibant des traités assurant des avantages particuliers, sans autorisation ministérielle, à des entreprises de transport sur terre ou sur mer, en tant que ces entreprises aboutissent au réseau des chemins de fer; Attendu, en fait, que la compagnie Lindsay et Basse, à laquelle la compagnie du Midi avait assuré des avantages particuliers, sans autorisation, recevait les marchandises remises au chemin de fer de Cette à Bordeaux, et apportait à Londres celles de ces marchandises qui devaient avoir cette destination; que cette même compagnie de transports maritimes portait de Londres à Bordeaux les marchandises dirigées vers Cette et le bassin de la Méditerranée, et les remettait à la compagnie du Midi, qui lui avait garanti un minimum de frêt, même en cas de concurrence, en échange des profits qu'elle comptait retirer de cette correspondance; Attendu que les sieurs Robinson et compagnie avaient organisé, depuis plusieurs années, un service régulier de transports maritimes de Londres à Bordeaux et retour; qu'ils étaient représentés à Bordeaux par la maison Albrecht et fils, qui était à leur égard une sorte d'agence ; qu'ils faisaient donc en réalité une concurrence sur la place de Bordeaux, qui leur fournissait une grande partie des marchandises devant alimenter leur industrie; mais qu'il suffit que le traité fait par la compagnie du Midi avec la maison Lindsay et Basse ait eu pour objet et pour résultat de nuire, au détriment même du commerce français entre Cette et Bordeaux et réciproquement, à la libre concurrence commerciale au préjudice des sieurs Robinson et compagnie, pour que ces derniers soient recevables et fondés à demander la réparation du préjudice qu'ils ont éprouvé; qu'en conséquence, des dommages-intérêts doivent leur être accordés, soit à raison des transports de Bordeaux à Londres, soit à raison de ceux effectués de Londres à Bordeaux; - Au fond.... (suivent des appréciations à cet égard). · Par ces motifs, etc. >>

POURVOI en cassation par la compagnie du Midi, tant contre l'arrêt du 28 fév. 1866, que contre celui du 22 août suivant, pour violation des art. 1382, C. Nap., 1 et 3, même Code, 14 de la loi du 15 juill. 1845, et 53 du cahier de charges de la compagnie annexé au décret du 1er août 1857; et violation enfin du décret du 21 sept. 1793, contenant l'acte de navigation. Ce moyen de cassation était divisé en trois branches.

1re branche. Violation des textes précités, 73

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