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dont on vient de parler, quelle que soit l'étendue des droits d'usage et des besoins des usagers, ceux-ci ne peuvent exiger le produit de la forêt d'une manière tellement intégrale, qu'il n'en reste rien pour le maître du fonds, parce qu'il ne serait pas raisonnable de donner à une simple concession de droit d'usage, tous les effets vraiment utiles d'une aliénation de la propriété elle-même;

3205. 4.° Que quand il s'agit d'une concession d'usage faite à titre gratuit, quoiqu'il ne soit pas plus permis de reprendre ce que l'on a donné que ce que l'on a vendu, il est néanmoins naturel de traiter les usagers plus rigoureusement et de restreindre plutôt l'exercice de feurs usages, pour laisser au propriétaire tout ce que peut exiger la somme de ses propres besoins largement estimée; parce qu'il y aurait, dans les usagers qui voudraient aller plus loin, un fait d'ingratitude que la justice ne saurait approuver.

3206. 5. Enfin que si l'on doit dire que, quand' le produit de la forêt est insuffisant pour fournir simultanément à toutes les nécessités du propriétaire et des usagers, ceux-ci doivent souffrir le retranchement de ce qui est nécessaire aux besoins de l'autre, largement estimés, c'est seulement dans le cas où il est prouvé que les droits d'usages avaient été établis à titre gratuit : mais que quand il s'agit d'usages constitués à titre onéreux, il faut décider avec Dumoulin que le propriétaire, tenu de la garantie des droits par lui aliénés, ne peut en demander

un retranchement pour ses propres aisances, et qu'en conséquence il ne doit emporter, dans le produit de la forêt, que la portion distributive qui sera réglée pour lui comme pour toutes les autres parties prenantes, par contribution sur le tout.

CHAPITRE LXXXIV.

Comment le Droit d'usage dans les forêts doit-il être exercé?

5207. Les émolumens à percevoir, en vertu du

droit d'usage dans une forêt, sont quérables. Généralement parlant, ils doivent être perçus

en nature.

Ils ne sont dus que sur le produit de la forêt qui est affectée de la servitude.

Ils ne sont dus que pris égard à l'état et possibilité de la forêt.

Ils ne doivent point être transportés du lieu à raison duquel ils sont dus, pour être consommés dans un autre.

Le droit d'usage ne peut être transmué d'un fonds à un autre fonds.

Il n'en est dû aucun arrérage pour le passé, à moins que la demande n'en ait été for

mée.

Toutes ces propositions énoncent des vérités de principes qu'il est important de bien saisir, parce que nous en ferons ressortir des consé

quences remarquables dans la suite pour quoi nous allons les reprendre succinctement les unes après les autres.

3208. I. Les émolumens à percevoir par l'exercice du droit d'usage, sont nécessairement quérables, puisque celui auquel une servitude est due, doit faire tout ce qui est nécessaire pour en user (697), et que, de son côté, le propriétaire du fonds asservi n'est obligé à autre chose qu'à souffrir l'exercice de la servitude; servitutum non ea est natura ut aliquid faciat quis, sed ut aliquid patiatur aut non faciat (1), à moins qu'il n'y ait un titre au contraire (698), ce qui placerait la thèse hors des dispositions du droit commun.

3209. II. Généralement parlant, les émolumens du droit d'usage sont dus en nature, parce que c'est le fonds asservi qui est ici le débiteur immédiat et direct; qu'il les doit sur son produit, et qu'il n'est permis ni de payer, ni d'exiger forcément une chose pour une

autre.

Néanmoins nous disons généralement parlant, parce que, quand il s'agit des bois de l'Etat, s'il était jugé qu'ils dussent trop souffrir pour la délivrance de l'usage en nature, les usagers ponrraient être réduits à se contenter d'une indemnité en argent, parce que suivant le prescrit de l'article 5, titre 20 de l'ordonnance de 1669, telle est la condition qui doit être

(3) L. 15, §. 1, ff. de servit., lib. 8, tit. 1.

sous-entendue dans les concessions d'usage sur les forêts nationales.

3210. III. Les émolumens du droit d'usage ne sont dus que sur le produit de la forêt usagere, parce que ce n'est que sur cette forêt que porte l'affectation de la servitude, et qu'on ne pourrait vouloir renvoyer l'usager à la per-. ception d'un autre produit, sans vouloir qu'il se contentât de recevoir le paiement d'une chose pour une autre; ce qui ne serait ni juste ni admissible. 3211. IV. Les émolumens du droit d'asage ne sont dus que pris égard à l'état et à la possibilité de la forêt usagère; c'est-à-dire que le droit d'usage ne doit être exercé que salvá rei substantia, ou sans préjudicier aux aménagemens de conservation établis sur la forêt, comme nous l'avons déjà expliqué dans le chapitre qui précède (1).

5212. V. Les émolumens du droit d'usage ne peuvent être régulièrement transportés d'un lieu dans un autre, c'est-à-dire que l'usager qui quitte son domicile pour aller résider ailleurs que dans le lieu pour l'avantage duquel le droit d'usage avait été établi, se trouve, par ce fait même, privé de toute participation aux émolumens de ce droit, et qu'il ne peut plus les réclamer à l'avenir, pour les transporter et les consommer dans son nouveau domicile ; parce que l'exercice de la servitude ne doit point être séparé du fonds auquel elle est due. «Semblablement les maîtres, sur les peines » devant, ne pourront donner congé ou li(1) Voy. sous les n.o 3192 et suivans.

»cence à un homme usager ou coutumier de » ardoir (brûler) ne user de bois, ne pâturage » de son usage ou coutume, autre part qu'au >> lieu pour raison duquel il prend et prendrait >> ledit usage ou coutume, sans l'exprès com» mandement de nous passé en notre chambre » des comptes. >> Telles sont les expressions de l'article 31 d'une ordonnance de Charles V, du mois de juillet 1376, répétées dans l'article 30 d'une autre ordonnance de Charles VI du mois de septembre 1402, et encore dans une troisième de François I.er, portée en mars 1515 (1).

Il est donc bien certain que celui qui a quitté sa maison résidentielle pour transporter son domicile dans un autre lieu à raison duquel le droit d'usage n'avait pas été établi, ne peut, même en conservant la propriété de la maison qu'il a quittée, y venir pour percevoir la prestation de bois qu'il y consommait auparavant, et la transporter pour la consommer à l'avenir dans le lieu de sa nouvelle résidence.

Il n'y a que celui qui lui aura succédé dans l'occupation de la maison usagère, qui sera fondé à percevoir les émolumens du droit d'usage inhérent à cet immeuble.

3213. Mais que doit-on décider à l'égard de l'usager qui habite tantôt à la ville, tantôt à sa campagne où il possède une maison à raison de laquelle il a un droit de chauf

(1) Voy. dans les ordonnances du Louvre, tom. 6, pag. 222; - dans SAINT-YON, liv. 1, tit. 29, art. 19, pag. 338; et dans la conférence des ordonnances, liv. 11, tit. 13, §. 64.

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