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voie de réglement de juges, sans s'arrêter au jugement du tribunal correctionnel de Bastia, lequel sera déclaré nul et comme non avenu, RENVOIE le prévenu et les pièces du procès devant le tribunal de première instance d'Aix, chambre de police correctionnelle, pour y être procédé conformément à la loi ; et en cas d'appel du jugement à intervenir, devant le tribunal ou la Cour à qui la connaissance en appartiendra dans l'ordre de la hiérarchie judiciaire,

ORDONNE, etc.

Du 14 décembre 1820. - Section criminelle. président. M. le conseiller Aumont, rapporteur.

M. le baron Barris,

BILLET A ORDRE.-ENDOSSEMENT.-VALEUR FOURNIE.

L'endossement d'un billet à ordre qui ne porte la signature d'aucun négociant, et qui, par cela, n'est point un effet de commerce, est-il assujéti aux formalités prescrites par l'art. 137 du Code de commerce, quant à l'énonciation de la nature de la valeur fournie? Rés. nég.

Suffit-il qu'il soit causé valeur reçue pour transmettre la propriété du billet? Rés. aff. (Code de commerce, art. 137 et 138.)

(Les frères Trssik C. le sieur CATHALA.)

Un billet à ordre de la somme de 3,000 francs avait été tiré par un sieur Négrail sur un sieur Marquier, à l'ordre du sieur Tissié père, qui l'avait transmis au sieur Cathala par un endossement ainsi conçu : « Payez à l'ordre du sieur Cathala, valeur reçue dudit. Carcassonne, le 1 janvier « 1815. Signé Tissié. >>

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Ce billet n'ayant point été acquitté à son échéance, et le sieur Tissié père étant décédé, le sieur Cathala a exercé son action récursoire contre les frères Tissié, héritiers de leur père, et les a fait assigner devant le tribunal de commerce de Castelnaudary qui, considérant qu'il s'agissait d'un billet à ordre entre particuliers dont aucun n'était commerçant s'est déclaré incompétent par jugement du 12 mars 1816. Ce jugement n'a pas été attaqué et est passé en force de chose jugée.

Devant le tribunal civil de Castelnaudary, où le sieur Cathala a porté son action, les frères Tissié ont prétendu que l'endossement, en vertu duquel il tenait de leur père le billet dont il s'agit, n'était point régulier; qu'il ne contenait point la mention de la valeur fournie, mention impérieusement exigée par l'article 157 du Code de commerce, et qu'il ne pouvait dès-lors être considéré que comme une simple procuration, conformément à l'art. 138 du même Code; qu'ainsi le recours en garantie formée par le sieur Cathala n'avait aucune espèce de fondement.

Cette prétention a été successivement condamnée par jugement du 26 mars 1817, et sur l'appel, par arrêt de la Cour royale de Montpellier, du 24 novembre 1818, dont les motifs portent: « Attendu que les

termes dans lesquels est conçu l'effet de 3,000 francs, dont est porteur le sieur Cathala et dont il demande le remboursement, ne réunit pas les conditions requises pour caractériser une lettre de change, et qu'aucune des parties qui y sont dénommées n'était négociant ; attendu que dès-lors l'obligation dont il s'agit ne saurait être réputée un effet de commerce, et qu'ainsi, par jugement qui a acquis l'autorité de la chose jugée, l'a décidé le tribunal de commerce de Castelnaudary, qui, à raison de ce, s'est déclaré incompétent; attendu, conséquemment, que les lois qui régissent les actes de commerce, et notamment l'article 138 du Code, ne sont point applicables à l'espèce; attendu que l'effet susdit, considéré comme obligation civile, contient une déclaration formelle de Tissié, qu'il avait reçu du sieur Cathala la valeur exprimée, ce qui entraîne pour lui une obligation valable, aux termes de l'article 1138 du Code civil, quoique la cause n'en soit pas exprimée; attendu que, vainement, pour faire rejeter cette obligation comme civile, on exciperait de ce qu'aux termes de l'art. 1326, elle n'est pas en entier écrite de la main de Tissié, lorsqu'il est reconnu qu'elle est en entier de la main de Négrail qui, le premier, l'avait consentie en faveur de Tissié, lequel l'avait endossée à l'ordre du sieur Cathala; attendu que de tous ces faits résulte la conviction que, mal à propos et contre toute justice, les frères Tissié voudraient méconnaître et contester une obligation consentie par leur père en faveur du sieur Cathala et causée par lui valeur reçue dudit.

Les frères Tissié se sont pourvus en cassation de cet arrêt, pour violation des art. 137 et 138 du Code de commerce; en ce que la Cour royale de Montpellier avait validé un endossement qui n'exprimait point la valeur fournie, et qui ne pouvait valoir que comme un mandat à l'effet de recevoir le montant du billet.

Les demandeurs soutenaient que, quoique le billet à ordre dont il s'agit ne portât la signature d'aucun négociant et ne fût pas un effet de commerce, il n'en demeurait pas moins assujéti aux formalités prescrites par le Code de commerce, pour la régularité de l'endossement des billets à ordre en général, puisque ce Code n'avait fait aucune distinction à cet égard entre ceux de ces billets émanés de commerçans et ceux souscrits par des non commerçans.

que

ARRÊT.

LA COUR, sur les conclusions de M. Lebeau, avocat général; ATTENDU.

les art. 137 et 138 du Code de commerce ne sont pas applicables à l'espèce où il n'est pas question d'un effet de commerce, ainsi qu'il a été jugé par le tribunal de commerce, dont la décision n'a été ni ne peut être attaquée; -ATTENDU que, dans les obligations civiles, la mention de la valeur qui a été fournie n'est pas exigée par la loi qui les régit, et qu'il est fait mention, dans l'ordre du billet dont il s'agit, qu'il a eu lieu moyennant valeur reçue; ce qui est suffisant pour autoriser celui à qui il a été passé, à en poursuivre le

paiement contre le débiteur originaire; -ATTENDU enfin qu'il a été reconnu d'ailleurs que la somme portée audit billet était bien et légitimement due.... - REJETTE.

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Section des requêtes. M. le conseiller Lasau-
M. le conseiller baron Dunoyer, rapporteur.-

M. Molinier-de-Montplanqua, avocat.

PEINE.-CENSURE.-DÉLIT DE LA PRESSE.

L'art. 463 du Code pénal qui accorde aux tribunaux correctionnels le droit de modérer la peine, lorsque le préjudice causé n'excède pas vingt-cinq francs, et que les circonstances sont atténuantes, est-il applicable aux peines portées par les lois nouvelles contre les délits de la presse? Rés. nég. (Code pénal, art. 463, et loi du 31 mars 1820, art. 5.)

(Le MINISTÈRE PUBLIC C. le sieur DUNOYER.)

La Cour de cassation a déjà jugé ainsi, par un arrêt du 13 avril 1820, dans une espèce où il s'agissait de diffamation. En rapportant cet arrêt, nous en avons indiqué plusieurs autres, desquels il résulte que l'application de l'art. 463 du Code pénal doit être restreinte aux délits prévus et punis par le Code pénal, et ne peut se faire à ceux qui sont l'objet de lois spéciales (1).

Voici dans quelles circonstances a été rendu l'arrêt que nous recueillons aujourd'hui :

Par jugement du tribunal correctionnel de la Seine, en date du 22 juillet 1820, le sieur Dunoyer, éditeur responsable du Censeur européen, a été condamné à l'emprisonnement et à l'amende portée par l'art. 5 de la loi du 31 mars 1820, pour avoir imprimé et distribué un écrit intitulé: Rognures faites au Censeur européen des 4 et 5 avril par MM. les membres de la commission de censure.

Sur l'appel, la Cour royale de Paris, vu les circonstantes atténuantes, et attendu que le dommage causé n'excédait pas vingt-cinq francs, a cru pouvoir user de la faculté accordée par l'art. 463 du Code pénal; en conséquence, par arrêt du 21 novembre 1820, elle a supprimé l'emprisonnement et réduit la peine à une amende.

M. le procureur général près la Cour royale de Paris s'est pourvu en cassation de cet arrêt, pour fausse application de l'art. 463.

(1) Voyez ce Recueil, vol. de 1820, pag. 287.

Une expérience journalière nous démontre, disait-il, combien est sage cette faculté accordée aux magistrats dans les affaires correctionnelles, de prendre en considération les circonstances atténuantes qui accompagnent un délit; la loi établit des catégories générales, et ne peut descendre à des détails qui surchargeraient infructueusement nos Codes et embarrasscraient la marche de la justice. Cette réserve nécessaire a donc besoin d'être supplééc par une grande latitude dans la mesure de la peine. Alors seulement les délits sont punis d'une manière proportionnée à leur intensité, et la société n'a point à gémir de ce que la loi, toujours juste dans son principe, devienne quelquefois d'une sévérité excessive dans son application.

Ces heureux résultats font désirer que les dispositions de l'art. 463 du Code pénal, restreintes dans des limites trop étroites, soient étendues à toute notre législation pénale; on en sentirait surtout la sagesse dans les délits de la presse, qui, par leur nature, donnent lieu à des modifications qu'il est impossible de prévoir.

Mais, tout en reconnaissant les avantages du système consacré par la Cour royale, et en émettant lui-même le vœu de le voir passer dans notre législation pénale, le ministère public n'estime pas moins que, dans l'état actuel de cette législation, ce système ne peut être admis sans donner à l'art. 463 une extension que ses termes et la nature de la disposition qu'il renferme ne sauraient comporter.

Par ses termes, en effet, cet article se rattache expressément et exclusivement au Code pénal et aux peines qu'il prononce; et, quant à la nature de sa disposition, il est assez difficile de concevoir que le législateur ait voulu créer des moyens d'atténuation pour des peines qui n'existaient pas encore, et qui, par conséquent, n'ont pu être l'objet de ses méditations.

ARRÊT.

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LA COUR, sur les conclusions de M. Hua, avocat général; Vu les dispositions de l'art. 5 de la loi du 31 mars 1820; -Vu aussi l'art. 463 du Code pénal,-Et ATTENDU que les dispositions de ce dernier article, évidemment restrictives, ne peuvent, d'après son texte, avoir lieu que dans les cas où la peine d'emprisonnement est portée par le Code même dont cet article est, à cet égard, le complément, et par conséquent sur les délits prévus par ce Code, et contre lesquels la peine de l'emprisonnement est prononcée d'après ses dispositions; qu'il n'est donc pas permis d'étendre un texte aussi précis à une matière non réglée par le Code, et à une peine prononcée en vertu d'une loi postérieure et spéciale sur la censure des journaux; Et ATTENDU que le défendeur, jugé coupable du délit prévu par l'article 5 de la loi du 31 mars 1820, devait, aux termes de cet article, être puni d'un emprisonnement qui ne pouvait être moindre d'un mois; que cependant la Cour royale de Paris, en reconnaissant le défendeur passible des peines prononcées par cet article, a cru pouvoir l'exempter de l'emprisonnement en exerçant en sa faveur la faculté accordée aux tribunaux par ledit article 463 du Code pénal; qu'en cela elle a fait une fausse application de cet article et violé le sudit art. 5 de la loi du 31 mars 1820; - Par ces motifs; CASSE.

--

Du 5 janvier 1821. Section criminelle. - M. le baron Barris, pré

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sident. M. le conseiller de Chantereyne, rapporteur. Barrot, avocat.

M. Odilon

LETTRE DE CHANGE.-ENDOSSEMENT. - DÉCHÉANCE. - PRESCRIPTION. —GARANTIE.-CHOSE JUGÉE.

Un ordre en blanc pour lequel il est reconnu qu'aucune valeur n'a été fournie, peut-il, suivant les circonstances, n'étré pas, considéré comme un simple mandat, mais bien comme un cautionnement, sans que l'arrêt qui le décide ainsi donne prise à la censure de la Cour de cassation? Rés. aff. (Code de commerce, art. 137 et 138.)

Celui qui a ainsi endossé une lettre de change après son échéance et avec promesse de garantir le porteur de toute prescription, est-il recevable à lui opposer la déchéance résultant du défaut de protét et de dénonciation de protét en temps utile? Rés. nég. (Code de commerce, art. 168 et 169.) Peut-il opposer la prescription de cinq ans établie pour les lettres de change, sous le prétexte qu'il n'a pu renoncer à une prescription non encore acquise? Rés. nég. (Code de commerce, art. 189, et Code civil, art. 2220.) Lorsque, sur l'appel du jugement qui a condamné le tireur de la lettre de change, endossée comme il vient d'étre dit, à en payer le montant, la Cour royale condamne solidairement l'endosseur renvoyé de l'action par les premiers juges, et considère, dans les motifs de son arrêt, que, si l'endosseur n'avait donné qu'un simple mandat au porteur et ne lui avait pas transmis la propriété de l'effet, il aurait réclamé contre la disposition du jugement qui condamnait le tireur à payer à ce dernier, cette induction constitue-t-elle une violation de la chose jugée? Rés. nég. (Code civil, art. 1350 et 1351.)

(Le sieur CLAVEL fils C. le sieur PETIT.)

Le 16 juin 1810, le sieur Clavel père tira de Clermont une lettre de change de 2,000 livres tournois, payable à son ordre, dans un an, sur les sieurs Henry, négocians à Thiers.

Cette lettre de change fat endossée le 12 avril 1812 au profit du sieur Clavel fils.

Vient ensuite un second endossement ainsi conçu : « Payez, à l'ordre de M. Petit, la somme de 2,000 francs, montant dudit billet, auquel je promets garantir ladite somme, dans le cas où un jour on opposerait la péremption de ladite lettre de change. A Thiers, le 16 juin 1814. Signé Clavel fils. » Cet endossement, sauf la signature, n'est point écrit de la main de l'endosseur.

La lettre de change, comme on vient de le voir, était payable le 16 juin 1811; mais ce ne fut que sept ans après, et le 25 août 1818, que le sieur Petit la fit protester au domicile des sieurs Henry, et qu'il fit assigner les sieurs Clavel père et fils devant le tribunal de commerce, pour se voir condamner solidairement à en payer le montant, l'un comme tireur, et l'autre comme endosseur

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