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place au nombre de ces circonstances la tolérance de l'auteur à l'égard d'un fait quelconque de publication ou d'usage de ses œeuvres; - Considérant que tout comme la prescription couvrant une édition d'un ouvrage faite sans la permission de l'auteur n'en autorise pas une autre, de même la représentation d'une pièce contrairement au droit du propriétaire, amnistiée par la prescription, n'en légitime pas de nouvelles; - Qu'ainsi, dans la cause, Bagier agisssant en son nom personnel, ou comme se prétendant aux droits des auteurs de libretti, ne peut se prévaloir des représentations données sur son théâtre ou sur d'autres, à quelque époque que ce soit, pour les continuer au préjudice des droits de la veuve d'Eugène Scribe; Considérant d'ailleurs, en fait, que les documents de la cause établissent qu'Eugène Scribe a constamment protesté contre les représentations des pièces dont il s'agit, et que les droits réciproques ont été plusieurs fois réservés entre lui et les directeurs successifs du Théâtre-Italien de Paris; Sur le troisième moyen - Considérant que le fait de la représentation d'une pièce de théâtre appartient principalement au directeur de l'entreprise théâtrale; ~ Que celui-ci ne peut opposer à l'auteur original la convention passée entre lui et le contrefacteur, pas plus que le débitant d'une invention contrefaite ne peut maintenir son débit en s'appuyant sur le contrat intervenu entre lui et le fabricant de l'objet contrefait et renvoyer l'inventeur à se pourvoir contre ledit fabricant; Sur le défaut d'intérêt : Considérant que le droit de propriété est absolu, en ce sens que le propriétaire a la faculté de s'opposer à l'usurpation de la chose, sans être tenu de rendre compte des motifs qui le déterminent; Qu'en fait de propriété littéraire, l'auteur peut avoir un intérêt moral à ne pas voir son œuvre défigurée par les imitateurs; Qu'enfin, il est bien évident que le droit de s'opposer à une impression où représentation entraîne la faculté de les permettre moyennant une rétribution ;- Qu'ainsi, sous tous les rapports, l'auteur d'une pièce a intérêt et, par suite, action à l'effet d'empêcher les publications et représentations de son œuvre et les contrefaçons ou imitations qui pourraient en être faites; Par ces motifs, infirme, etc. »Supevi

POURVOI en cassation par le sieur Bagier. -1er Moyen. Violation par fausse application de l'art. 1er de la loi du 19 juill. 1793, en ce que l'arrêt attaqué a considéré comme une contrefaçon de l'ouvrage original une traduction en langue étrangère, bien qu'elle ne fût pas une copie servile de l'original, que son plan et son arrangement fussent tout différents et appropriés à une tout autre destination. L'art. 1" de la loi de 1793, a-t-on dit, reconnaît à l'auteur d'un écrit le droit exclusif de vendre, faire vendre et distribuer son ouvrage, et d'en céder la propriété en

tout ou en partie. Le droit exclusif de traduction n'étant pas compris dans cette énumération, on est déjà fondé à en conclure que le législateur n'a pas entendu le réserver à l'auteur. L'art. 425, C.pén., vient à l'appui de cette interprétation, car il définit ainsi la contrefaçon : « Toute édition d'écrits..., imprimée ou gravée en entier ou en partie, au mépris des lois et règlements relatifs à la propriété des auteurs. Ainsi la contrefaçon, c'est l'édition, c'est-à-dire la reproduction même de l'œuvre dans la langue où elle a été écrite. Une traduction ne constitue donc pas une contrefaçon. Ce silence de la loi à l'égard du traducteur se comprend d'ailleurs parfaitement. Elle a voulu, sans doute, protéger l'auteur contre tout usage préjudiciable que les tiers pourraient faire de son œuvre ; mais l'intérêt public ne lui permettait pas de dépasser ce but. Or, il est évident que le traducteur ne porte aucun préjudice à l'auteur, car l'ouvrage original ne peut se vendre qu'à ceux qui connaissent la langue dans laquelle il est écrit, tandis que la traduction, au contraire, ne s'adresse qu'à ceux auxquels cette langue est inconnue. Si, en principe, la traduction ne constitue pas la contrefaçon, à plus forte raison doit-il en être ainsi lorsque l'œuvre originale a subi, comme dans l'espèce, des modifications et des agencements, sans lesquelles elle n'eût pu être représentée sur une scène à laquelle elle n'avait pas été destinée, c'est-à-dire lorsqu'il ne s'agit pas d'une reproduction exacte, mais d'une simple imitation. En résumé, Romani et Somma n'ont pas contrefait les pièces de Scribe, 1° parce que traduire n'est pas contrefaire; 2° parce qu'ils ne se sont pas bornés à traduire. Donc, Bagier n'a pu se rendre coupable du délit de représentation d'ouvrages contrefaits.

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2o Moyen. Violation des art. 637 et 638, C. instr. crim., en ce que l'arrêt attaqué a décidé que la prescription acquise se réduisait dans ses effets à couvrir les faits de publication consommés, sans mettre la traduction elle-même à l'abri de toutes poursuites. La prescription criminelle a pour effet de mettre celui qui s'est rendu coupable d'un crime ou d'un délit à l'abri de toute poursuite et de toute peine, d'effacer par conséquent, au point de vue légal, ce délit ou ce crime, et de faire qu'il n'ait jamais existé. Donc, en s'accomplissant, la prescription du délit dont on prétend que Romani et Somma se seraient rendus coupables, aurait eu pour effet d'anéantir ce prétendu délit de contrefaçon et de faire de l'œuvre de ces auteurs une oeuvre qui doit être considérée, légalement parlant, comme leur appartenant en propre, et que, par conséquent, ils ont eu le droit d'imprimer et de faire représenter. Il n'y a plus de délit de contrefaçon, plus de contrefaçon, plus de représentation d'ouvrages contrefaits. C'est, du reste, ce que la Cour de Paris, mieux inspirée, a décidé elle-même par un arrêt du

13 nov. 1855. (P. 1855.2.610.— S. 1856.2. 158.)

3 Moyen. Violation des art. 1382, C. Nap., 425 et 429, C. pén., 1 et 3 de la loi du 19 juill. 1793, en ce que la Cour impériale, tout en reconnaissant qu'aucun préjudice n'avait été causé, a cependant prononcé l'interdiction demandée, et accueilli, par suite, une action sans intérêt. Sans doute le droit de propriété est absolu; sans doute l'usurpation de ce droit peut donner lieu à une action de la part du propriétaire, sans qu'il ait à justifier d'aucun intérêt, et il en est ainsi spécialement de l'usurpation de la propriété littéraire d'un auteur, au moyen d'éditions frauduleuses de ses œuvres. Mais il ne s'agit point de cela dans l'espèce : il s'agit d'une traduction, d'une œuvre spéciale qui est la propriété du traducteur, cela est incontestable, et sur laquelle l'auteur originaire n'a absolument aucun droit. Si la publication de cette œuvre peut donner lieu à une action de la part de ce dernier, ce ne peut être par la raison qu'on a usurpé son ouvrage, mais seulement par cette raison qu'on en a entravé la vente par une concurrence déloyale et qu'on a ainsi réduit ses droits d'auteur. Or, sur ce terrain, les principes de l'art. 1382, ou de la loi de 1793 et des art. 425 et suiv., C. pén., sont d'accord. Il n'y a point de droit spécial; il ne peut y avoir revendication de propriété ; il ne peut y avoir qu'une action en dommages-intérêts ordinaire, laquelle ne peut être basée que sur le préjudice causé. Il faut, par conséquent, que ce préjudice soit prouvé. Or, la Cour reconnaît qu'il n'y a point de dommage pour le passé, et elle ne peut affirmer qu'il y en aura pour l'avenir..

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ARRÊT.

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LA COUR ; En ce qui touche le premier moyen: Attendu qu'aux termes de la loi du 13 janv. 1791, les ouvrages des auteurs vivants ne peuvent être représentés sur aucun théâtre public, sans le consentement formel et par écrit desdits auteurs; Attendu qu'il est établi, en fait, par l'arrêt attaqué, comme résultant de la lecture qui en a été faite par les juges du fond, que, dans les trois pièces que Bagier a fait représenter à Paris, sur le Théâtre-Italien dont il est directeur, les sujets, la disposition des scènes et la marche générale de ces ouvrages sont les mêmes dans les pièces françaises de Scribe et dans les imitations italiennes; qu'ainsi, en réalité, ce sont les productions du théâtre d'Eugène Scribe qui sont données au public par les imitateurs; Attendu que l'arrêt attaqué ajoute que ces reproductions ou contrefaçons sont aussi exactes que le permettaient les convenances et les intérêts des imitateurs;- Qu'en cet état des faits, dont le demandeur n'a pas contesté l'exactitude, l'arrêt attaqué a pu, sans violer aucun texte de la loi, conclure que lesdites pièces ne pouvaient

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JUGES, NOMBRE, PARENTÉ, OPINIONS
OPPOSÉES.

Lorsque les magistrats d'une Cour impériale siégent au nombre de sept seulement (nombre rigoureusement nécessaire pour la légalité de leur décision), et que parmi eux il se trouve deux parents au degré prohibé, l'indication des opinions opposées de chacun d'eux, quand cette opposition se manifeste, ne saurait entraîner la nullité de l'arrêt: une telle indication étant la conséquence forcée de la règle suivant laquelle, en cas de conformité d'opinions de deux magistrats parents, leurs voix ne comptent que pour une scule, et étant nécessaire pour faire connaître que le nombre des voix comptées a été celui déterminé par la loi (LL. 27 vent. an 8, art. 27, et 20 avr. 1810, art. 7; av. Cons. d'Et., 23 avril 1807.) (1)

Il en est ainsi pourvu toutefois que la révélation des votes opposés ne fasse pas connaître qu'elle a été l'opinion embrassée particulièrement par chacun des deux magistrats, et ne viole pas ainsi le secret des délibérations.

Dans le cas ci-dessus, il n'est pas néces

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saire que, sur chaque chef de décision, l'arrêt constate la contrariété d'opinions entre les deux magistrats: il suffit que leur dissentiment y soit énoncé d'une manière générale.

(Decori C. Calvi.)

Un arrêt rendu le 16 mai 1864 par la Cour de Bastia, sur un appel du sieur Decori contre le sieur Calvi, constatait que la décision avait été délibérée secrètement par la chambre civile de la Cour, composée ce jour-là de sept conseillers parmi lesquels ils s'en trouvait deux parents au degré prohibé, «mais que ceux-ci ayant voté en sens contraire, il n'avait pas été nécessaire d'appeler un autre conseiller pour compléter la chambre. >>

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POURVOI en cassation de la part du sieur Decori; 1° Violation du secret des délibérations, en ce que l'arrêt mentionne la dissidence d'opinions de deux des magistrats qui ont concouru à le rendre, et, par voie de conséquence, violation de l'art. 7 de la loi du 20 avr. 1810, en ce que, deux des magistrats qui ont pris part à cet arrêt étant parents au degré prohibé et leurs voix ne devant compter que pour une, cet arrêt n'a pas été rendu par un nombre suffisant de juges.

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On a dit pour le demandeur: Un point indubitable, c'est que si les deux magistrats, parents au degré prohibé et ayant obtenu l'autorisation de siéger simultanément, avaient opiné dans le même sens, le président n'eût dû compter leurs voix que pour une seule; et, à défaut de mention contraire, la présomption est qu'en effet les deux voix se confondent. (V. L. 27 vent. an 8, art. 27; L. 20 avr. 1810, art. 7; Avis Cons. d'Etat, 17 mars-23 avr. 1807.) Il résulte de là qu'en principe, si la Cour ne se compose que de sept juges, parmi lesquels deux sont au degré prohibé, sans qu'aucune mention soit faite de la contrariété d'opinions de ces deux juges, l'arrêt est nul comme n'étant pas rendu par le nombre légal de magistrats. Il en résulte, à l'inverse, qu'en pareil cas si la contrariété des opinions est indiquée, la décision se trouve sans doute rendue par le nombre de magistrats que la loi exige, mais alors c'est le principe tutélaire du secret des délibérations qui est violé et la violation de ce principe entraîne également la nullité de l'arrêt. Une décision judiciaire n'est pas, en effet, l'œuvre de tels ou tels conseillers; c'est l'œuvre de la Cour entière, considérée comme ne formant qu'une seule personne une personne in abstracto. Chacun des juges n'y a pas une part personnelle; mais l'arrêt est leur ceuvre commune. Il est donc interdit de faire connaître, par le libellé de l'arrêt, non pas seulement l'avis personnel de tel ou tel juge, mais encore l'existence même d'une minorité parmi les membres de la Cour. On comprend qu'une indication de

cette sorte serait une atteinte sérieuse portée à l'autorité de la décision: la chose jugée en serait moralement ébranlée. L'arrêt ne doit donc point, à peine de nullité, porter trace de ce qui s'est passé au sein de la délibé ration. Il ne saurait y avoir d'exception même au cas où, parmi les conseillers composant la chambre délibérante, il se rencontrerait deux parents au degré prohibé. Sans doute l'avis du Conseil d'Etat de 1807 dit qu'en pareille circonstance, les voix de ces magistrats, lorsqu'elles sont conformes, ne doivent être comptées que pour une. Mais il n'en ressort pas que, quand ces voix sont opposées l'une à l'autre, le dissentiment puisse être manifesté. Il y a, dans la disposition de l'avis précité, une règle de conduite pour le président de la chambre, alors qu'il recueille les voix, sur la manière d'en tenir compte, et rien de plus. Cet avis est donc sans application possible, dès que l'arrêt émane d'une chambre composée de sept magistrats seulement, parce qu'encore une fois, selon que le dissentiment dont s'agit ne sera pas mentionné, ou le sera par l'arrêt, il y aura soit présomption d'opinions uniformes chez tous les magistrats, soit violation du secret de la délibération, alternative qu'évidemment n'a pu vouloir admettre un avis qui a dû songer à respecter tous les principes. Or, ce respect, l'arrêt attaqué y a, dans tous les cas, manqué à l'un de ces points de vue, et dès lors il ne saurait échapper à la cassation.

2o Autre violation de l'art. 7 de la loi du 20 avr. 1810, en ce qu'en admettant même que la mention dont s'agit ne constituerait pas la violation du secret de la délibération, il faudrait alors qu'elle portât spécialement sur chacun des chefs de la décision.

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ARRET (après délib. en ch. du cons.).

LA COUR; Sur les 1er et 2e moyens: Attendu que les magistrats ou parents au degré prohibé reçoivent de leur institution, avec dispense en raison du lien de parenté qui les unit, capacité complète pour concourir dans une même Cour au jugement d'une même affaire; Que lorsque les magistrats d'une Cour impériale siégent au nombre de sept, nombre rigoureusement nécessaire pour assurer la légalité de leur décision, et que parmi eux se trouvent deux magistrats parents au degré prohibé, l'indication des opinions opposées de chacun d'eux, quand cette opposition se manifeste, est la conséquence forcée de la règle établie par l'avis du conseil d'Etat approuvé le 23 avr. 1807, et suivant laquelle en cas de conformité d'opinion des deux magistrats, leurs deux voix ne comptent que pour une seule; Qu'elle est nécessaire pour faire connaitre que le nombre des voix comptées a été celui déterminé par la loi; Que, d'ailleurs, la connaissance donnée dans ce cas des votes opposés des deux magistrats n'est pas une

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révélation de leur opinion, puisqu'elle ne fait pas savoir quelle a été celle embrassée particulièrement par chacun d'eux; Que l'indication d'un partage d'opinions, sans révélation des opinions individuelles, n'emporte pas la violation du secret des délibérations;

Que l'arrêt énonçant cette contrariété d'opinions d'une manière générale et absolue, cette énonciation s'applique nécessairement à tous les chefs de l'arrêt; Rejette, etc.

Du 21 nov. 1866. Ch. civ.-MM. Pascalis, prés.; Delapalme, rapp.; de Raynal, av. gén. (concl. conf.); Pougnet, av.

CASS.-CIV. 15 janvier 1867.

JUGE DE PAIX, OCTROI, EXCES DE POUVOIR, CASSATION.

La fausse interprétation qui serait donnée par le juge de paix à une loi ou à un règlement qu'il est chargé d'appliquer (spéciale

ment à un tarif d'octroi dont le sens et le mode d'application étaient contestés devant lui), ne constitue pas un cxcès de pouvoir et ne peut, dès lors, ouvrir le recours en cassation contre le jugement qui la renferme rait (1). (L. 25 mai 1838, art. 15.)

(Octroi de Bergerac C. Argivier.)

Un article spécial du tarif de l'octroi de la ville de Bergerac impose au droit de 9 centimes par mètre courant les madriers du Nord d'une épaisseur de 55 à 110 millimètres et d'une largeur inférieure à 194 millimètres.Le 12 mai 1865, le sieur Argivier, marchand de bois, a présenté au bureau de l'octroi deux madriers du Nord, l'un de 77 mètres, l'autre de 64 mètres, portant tous les deux 70 millimètres d'épaisseur sur 110 millimètres de largeur. L'introduction de ces deux pièces de bois a donné lieu à une perception de 9 centimes par mètre courant, soit de 13 fr. 6 cent. au total. Le sieur Argivier a réclamé contre cette perception et prétendu ne devoir payer que 6 centimes et non 9 centimes par mètre courant. Cette prétention reposait sur des considérations que relate suffisamment la sentence du juge de paix de Berge

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(1) La Cour de cassation a consacré le même principe par un arrêt du 14 août 1865 (P.1866. 1200.-S.1866.1.445). L'application qu'elle en fait aujourd'hui est d'autant plus remarquable que l'on reprochait au jugement attaqué, non pas seulement d'avoir écarté à tort un article du tarif d'octroi, en appréciant faussement le caractère et la nature de l'objet imposé, mais surtout d'avoir substitué, au moyen de calculs, au droit fixé par ce tarif pour une certaine nature d'objets, un droit proportionnel que le tarif n'avait ni prévu ni admis, et que l'on qualifiait, dès lors, de droit arbitraire et de fantaisie. V. au reste, l'annotation sous l'arrêt précité.

rac, en date du 24 juin 1865, qui l'a admise et qui est ainsi conçue : — « Attendu que les auteurs du tarif y ont énoncé que les madriers du Nord, de 55 à 110 millimètres d'épaisseur et 194 millimètres de largeur et au-dessus, paieraient un droit de 12 centimes par mètre courant, et que ceux des mêmes bois, même épaisseur et au-dessous de 194 millimètres de largeur, paieraient 9 centimes le mètre courant, ils ont entendu et dû nécessairement entendre parler des madriers proprement dits tels qu'ils ont été expédiés du Nord, et non de parcelles de madriers que les besoins du détail ou l'emploi auquel on les destine oblige d'en extraire, en les refendant en deux, en trois ou en quatre, avant de les introduire dans le rayon de l'octroi; que, d'ailleurs, le plus souvent, comme dans le cas où ont été perçus les droits qui ont fait l'objet des deux quittances sur lesquelles on demande un remboursement, on a eu la précaution de le bout, afin d'indiquer que ces trois ou laisser tenir ces parcelles aux chevrons par quatre parcelles divisées par le trait de scie ne formaient avant qu'un même madrier; que, dès lors, ce n'était qu'un droit proportionnel en réalité qui devait être perçu ; qu'il est vrai que les fermiers de l'octroi ne sont pas obligés, lorsqu'on leur présente à l'octroi des chevrons séparés provenant d'un madrier refendu, de demander quelle était la largeur du madrier dont ils ont été extraits; mais qu'alors ils ne devaient pas considérer comme madrier une pièce de bois presque égale en largeur et en épaisseur, qui, de forme presque carrée, devait plutot être considérée comme chevron que comme madrier, et être taxée au mètre cube au lieu de l'être au mètre courant; Atteudu que les divers architectes auxquels s'est adressé le tribunal ont été d'accord pour déclarer verbalement que l'on ne pouvait considérer les bois qui ont fait l'objet de la difficulté que comme de véritables chevrons destinés, soit à faire des toitures, soit à faire des montants de cloisons, et qui, provenant de madriers refendus, ne devaient être passibles que d'un droit proportionnel; -Attendu que les fermiers de l'octroi l'ont si bien pensé de même, qu'il n'y a que peu de temps qu'ils perçoivent le droit à raison de 9 centimes le mètre courant, et que même, s'il faut en croire la rumeur publique, ils ne l'exigent ainsi que du sieur Argivier, et adoptent un autre mode de perception à l'égard d'autres marchands, si ce n'est depuis la nais sance de la contestation actuelle et pour le besoin de la cause seulement;-Attendu que, s'il en était réellement ainsi, on ne saurait se dissimuler que cela porterait un grand préjudice au sieur Argivier, dont on éloignerait la clientèle au profit de ses concurrents;

Attendu qu'en percevant 9 centimes le mètre courant pour le bois dont s'agit, au lieu de se borner à percevoir 6 centimes pour les madriers refendus en deux, 4 centimes pour

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ceux refendus en trois, et 3 centimes pour ceux refendus en quatre, les fermiers de l'octroi paraissent avoir excédé les droits qui leur reviennent légitimement, et qu'il y a lieu de les condamner à rembourser cet excédant; - Par ces motifs, déclare qu'en percevant und droit fixe de 9 centimes du mètre courant sur les bois introduits par le sieur Argivier le 12 mai et qui ont fait l'objet des deux quitta percu à lui délivrées, le receveur de l'octroi en trop une somme de 1 fr. 92 c. sur une de ces quittances, celle relative à 64 mètres de prétendus madriers, et celle de 2 fr. 31 c. sur celle relative à de 2 fr. 3 77 mètres des mêmes bois, revenant lesdites sommes réunies à 4 fr. 23 c.; condamne, en conséquence, les fermiers de l'octroi à restituer à Argivier ladite somme, etc. »>

POURVOI en cassation par les fermiers de P'octroi, pour excès de pouvoir, en ce que le jugement attaqué: 1° a statué par voie de disposition réglementaire, au moins dans ses motifs; 2° a réduit arbitrairement le droit formellement autorisé par le tarif d'octroi

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opérée sur chacun des deux madriers du Nord présentés à l'octroi devaient être sou: mises chacune à un droit proportionnel de 6 centimes par mètre courant, n'a fait que se livrer à un calcul fondé sur l'état matériel des madriers au moment de leur présentation, par suite duquel il a été conduit à reconnaître qu'en l'état des faits, ce n'était point le n° 8 du tarif de l'octroi de Bergerac (chapitre des matériaux) qui leur était applicable, mais bien le n° 7 de ce même tarif qui comportait une perception de 12 centimes par mètre courant; De tout quoi il résulte que la sentence dénoncée s'appuie sur une appréciation de faits et sur une appréciation du tarif, lesquelles, fussent-elles erronées, ce qu'il n'échet d'examiner, n'excédaient cependant pas les limites des attributions du juge de paix, et ne peuvent, dès lors, être considérées comme constituant un excès de pouvoir, qui seul, aux termes de l'art. 15 de la loi du 25 mai 1838, aurait pu ouvrir le recours en cassation contre la sentence souveraine et en dernier ressort déférée à la censure de la Cour; Rejette, etc. Du 15 janv. 1867. Ch. civ. MM. Trop

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pour les madriers, d'après des règles de pro- long, 1 prés.; Aylies, rapp.; de Raynal, 1er portionnalité que ce tarif n'admet pas. av. gén. (concl. conf.); Jager-Schmidt et nigol,ab emion ARRÊT. Bosviel, av.

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LA COUR; Attendu que le pourvoi se fonde, d'une part, sur ce que la sentence attaquée aurait statué par voie générale et réglementaire, et, d'autre part, sur ce qu'elle aurait substitué au droit déterminé et spécifié par le tarif de l'octroi de Bergerac un prétendu droit proportionnel complétement en dehors des dispositions de ce tarif': ce qui constituerait, sous un double rapport, un excès de pouvoir; Mais attendu, sur le premier point, qu'il résulte, soit des motifs, soit du dispositif de la sentence attaquée, que, loin de procéder par voie de disposition générale et réglementaire, elle a, au contraire, uniquement et exclusivement statué en vue des faits spéciaux et particuliers débattus entre les parties; Attendu, sur le deuxième point, que le juge de paix, en déclarant que les deux parties produites par la refente

(1) Cette solution est importante à raison de la gravité des intérêts qui s'y rattachent, mais elle ne semblait pas susceptible d'une difficulté bien sérieuse. La raison de douter naissait de ce que, dans le cours de la discussion de la loi du 4 juin 1859, le commissaire du Gouvernement a paru-limiter au cas de vol à main armée, la force majeure dont pourrait exciper l'administration des postes pour dégager sa responsabilité en cas de perte de lettres à valeurs déclarées; mais le texte de la loi ne contient rien qui puisse faire penser que cette interprétation restrictive des mots force majeure ait été accueillie par le législateur, et M. Duvergier, Coll. des lois (sous la loi de 1859, p. 213), la repousse d'une manière formelle.

Le tribunal de la Seine s'est prononcé récem

CASS. CIV. 26 décembre 1866.

POSTES, VALEURS DÉCLARÉES, PERTE, NAUFRAGE, FORCE MAJEURE, RESPONSABILITÉ, FREUVE, MOYEN NOUVEAU.

L'exception apportée par l'art. 3 de la loi du 4 juin 1859, pour le cas de perte par force majeure, au principe de responsabilité des valeurs déclarées dont cette loi frappe l'admi nistration des postes, n'est pas restreinte à la seule force majeure résultant de vol à main armée: la force majeuredont il s'agit doit s'entendre, selon l'acception ordinaire,de tout événement qu'on n'a pu ni prévoir,ni prévenir, ni vaincre.-Spécialement, l'administration des postes est dégagée de toute responsabilité en cas de perte survenue par suite de naufrage (1).

ment dans le sens de l'arrêt ci-dessus (aff. Delettrez) par un jugement dont voici le texte :

a

LE TRIBUNAL;-Attendu qu'il résulte des documents produits que les deux lettres contenant des valeurs déclarées, remises par Delettrez à l'administration des postes le 12 déc. 1865, à l'adresse de Sabatier, propriétaire à Rivoli (Algorie), ont été insérées dans le paquet des dépêches destiné au bureau de Mostaganem et portées le 13 décembre à bord du Borysthène, en partance pour Oran; Attendu que le Borysthène a quitté le port de Marseille le même jour, et est venu, dans la nuit du 15 au 16 déc. 1865, se briser sur les récifs de l'île Plane; que cinquante-six personnes ont péri, et que les valeurs réclamées par Delettrez ont été perdues; Attendu qu'il a été

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