dame Moulle, fille issue d'un premier mariage de la dame Dourlen, et au sieur Moulle, son mari, la moitié d'une maison à eux appartenant et située à Montmartre. L'acte de cession, en date du 15 novembre 1836, contient la clause suivante : << Dans le cas où, par suite du décès de l'un ou de plusieurs des copropriétaires, ou pour toute autre cause, la vente de ladite propriété viendrait à être réclamée, les autres copropriétaires pourront en devenir, à leur choix, acquéreurs pour une somme fixée à présent à 15,000 fr.....>> En 1864, la dame Moulle, devenue femme Soupé par suite du premier décès de son mari, était propriétaire de la moitié de l'immeuble dont s'agit, et la veuve et les héritiers Dourlen propriétaires pour l'autre moitié. La veuve Dourlen ayant provoqué la vente par voie de licitation, la dame Soupé pensa que l'hypothèse prévue par l'acte du 15 nov. 1836 s'était réalisée et manifesta, tant à la veuve Dourlen qu'aux héritiers Dourlen, l'intention de devenir seule propriétaire de l'immeuble moyennant le prix, stipulé audit acte, de 15,000 fr. Les héritiers Dourlen refusèrent d'accéder à cette prétention et soutinrent: 1o que la clause invoquée par la dame Soupé était nalle; 2° qu'en tout cas, ils pouvaient, aussi bien que cette dernière, en invoquer le bénéfice. La veuve Dourlen, persistant dans sa demande en licitation, s'en rapporta à justice quant au litige né entre la dame Soupé et les héritiers Dourlen. 19 mai 1865, jugement du tribunal de la Seine qui donne gain de cause à la dame Soupé et qui décide en substance: 1° que la clause de l'acte du 15 nov. 1836 devait être considérée comme parfaitement licite ; 2o qu'il résultait de son texte et de son esprit qu'elle avait été écrite dans l'intérêt exclusif des contractants et à l'encontre des représentants de la partie qui viendrait à décéder; que c'était donc à tort que les héritiers Dourlen excipaient de leur qualité d'héritiers pour prétendre au bénéfice de la clause; qu'à cet égard, leur prétention serait, non pas l'application, mais la violation formelle de la convention. Appel par les héritiers Dourlen, qui, modifiant leur système, contestent la demande en licitation formée par la veuve Dourlen, et Soutiennent que cette demande n'a été introduite que pour permettre à la dame Soupé d'invoquer le bénéfice de l'acte du 15 nov. 1836. Le 30 août 1865, arrêt infirmatif de la Cour de Paris, qui repousse la demande en licitation par les motifs suivants : << Considérant que la clause stipulée en l'acte du 15 nov. 1836 a un véritable caractère de pénalité contre ceux qui tenteraient de sortir de l'indivision, et qu'il est impossible de concevoir raisonnablement comment la veuve Dourlen introduit une pareille demande devant la justice; qu'en effet, elle est éminemment contraire à ses intérêts, puisqu'elle a pour conséquence de lui faire perdre l'usu fruit de l'immeuble où elle habite et dont la valeur paraît, d'après les documents de la cause, excéder de beaucoup la somme de 30,000 fr.; qu'une pareille conduite ne peut s'expliquer que par l'affaiblissement des facultés intellectuelles de cette femme, âgée de quatre-vingt-six ans, affaiblissement prouvé jusqu'à l'évidence par les réponses qu'elle a faites dans son interrogatoire, et, en même temps, par la complaisance avec laquelle elle s'est prêtée à une combinaison ayant pour but de faire acquérir à la femme Soupé, sa fille, l'immeuble dont il s'agit, à un prix beaucoup inférieur à sa valeur réelle; Considérant que cette demande en licitation n'étant basée sur aucun motif sérieux et légitime, ne peut être accueillie par la Cour; - En ce qui touche la demande en attribution formée par la femme Soupé de l'immeuble susdésigné, moyennant le prix de 15,000 fr.: Considérant qu'il résulte des motifs qui viennent d'être développés que cette demande aurait pour résultat de faire obtenir à vil prix à la femme Soupé la maison indivise entre elle et les héritiers Dourlen, et de frustrer ceux-ci, qui ne demandent pas la licitation de ladite maison, de la majeure partie des biens dont leur auteur a déclaré leur léguer l'intégralité ;-Considérant, en conséquence, qu'il y a lieu de la déclarer mal fondée dans sa demande et de l'en débouter; Considérant, dès lors, qu'il devient inutile de statuer sur les conclusions subsidiaires des appelants, soit afin de faire déclarer nulle la clause dont s'agit, soit afin de prononcer à leur profit, aussi bien qu'à celui de la dame Soupé, l'attribution réclamée par celle-ci, etc. >> POURVOI en cassation par la dame Soupé et par la dame Dourlen, pour violation de l'art. 815, C. Nap., en ce que l'arrêt attaqué a rejeté une demande en licitation régulièrement formée, en se fondant sur ce que cette demande, n'étant basée sur aucun motif sérieux et légitime, ne devait pas être accueillie. ARRÊT. LA COUR; Vu l'art. 815, C. Nap.; Attendu que la veuve Dourlen, n'étant ni interdite ni pourvue d'un conseil judiciaire, était maîtresse de ses droits, lorsque, pour parvenir à la liquidation de la communauté qui avait existé entre elle et son mari, ainsi que de la succession de celui-ci, elle a formé une demande en licitation de l'immeuble indivis entre elle, sa fille d'un premier lit, la femme Soupé, et les héritiers Dourlen; que personne n'ayant prétendu que ledit immeuble fût partageable en nature, et la licitation demandée étant le seul moyen de sortir de l'indivision, l'action exercée par la veuve Dourlen constituait l'exercice d'un droit absolu que l'on ne pouvait dénier sans contrevenir à un principe d'ordre public; - Attendu cependant que la Cour impériale de 1° Une compagnie de chemin de fer est responsable de l'incendie dont ont été atteints des bâtiments riverains de la voie par le feu échappé de ses locomotives, bien que ces bâtiments, contenant un dépôt de matériaux combustibles, soient situés à une distance moindre que celle prescrite par l'art. 7 de la loi du 15 juill. 1845, s'ils existaient déjà avant la création de la voie ferrée (1). (C. Nap., 1382, 1383.) 2o Les juges ne peuvent, au cas où ils ordonnent une expertise sur la demande des parties ou de l'une d'elles, ne nommer qu'un seul expert: il y a obligation pour eux d'en nommer trois, à moins de consentement de toutes les parties à ce qu'il n'y en ait qu'un seul (2). (Č. proc., 303.) Ils ne peuvent non plus désigner l'expert ou les experts, sans réserver aux parties la faculté de les choisir elles-mêmes dans le délai déterminé par la loi, c'est-à-dire dans les trois jours de la signification du jugement (3), (C. proc., 305.) (1) C'est ainsi que le Conseil d'Etat a décidé que le propriétaire d'un bâtiment couvert en chaume, situé à la distance prohibée d'un chemin de fer, mais dont l'existence est antérieure à l'exécution de ce chemin, peut, sans autorisation, faire à sa toiture des réparations d'entretien: arrêts des 27 août 1854 (P. chr. S.1855.2.276) - S.1859.2.696). et 16 mars 1859 (P. chr. Mais il ne peut la reconstruire entièrement: arrêt du 31 janv. 1866 (P. chr.-S.1866.2.372). Le Conseil d'Etat a également décidé qu'un dépôt de matériaux combustibles, établi antérieurement à la construction du chemin de fer, peut, encore qu'il se trouve depuis cette construction dans la zone prohibée, être incessamment renouvelé et que la suppression ne peut en être ordonnée que moyennant indemnité arrêt du 1er sept. 1860 (S. 1861.2.425). V. aussi M. Palaa, Dict. des chem. de fer, yo Couverture en 3. Lorsqu'un jugement, confirmě sur la demande principale, n'est infirmé que sur les débats soulevés entre le défendeur et celui qu'il a appelé en garantie, la Cour impériale peut en renvoyer l'exécution au tribunal qui l'a rendu 4). (C. proc., 472.)nschen al (Chemin de fer de la Méditerranée Le 24 oct. 1860, un incendie dévorait des bâtiments occupés par le sieur Teyssier, fermier d'un sieur de Lamure. Celui-ci poursuivit son locataire conime responsable aux termes de l'art. 1733, C. Nap. Le sieur Teyssier se replia alors en garantie contre la Compagnie du chemin de fer de Paris à la Méditerranée, soutenant que l'incendie des bâtiments, situés à cinq mètres seulement de la voie ferrée, avait été allumé par les flammèches échappées de l'une des locomotives qui, ce jour-là, avaient desservi la voie. En outre, il actionna la Compagnie en paiement des dommages que cet incendie lui avait causés personnellement. Le 21 avr. 1860, jugement du tribunal de Montélimar qui accueille la demande du propriétaire contre le fermier et ordonne qu'entre eux les dommages seront estimés par un expert que le tribunal désigne et commet. Quant aux demandes du sieur Teyssier, soit récursoire, soit en responsabilité, il en est débouté, ses allégations tendant à établir une faute à la charge de la Compagnie n'ayant pas paru concluantes.bot Appel de la part du sieur Teyssier. La Cour de Grenoble, à la suite d'une enquête ordonnée par un premier arrêt à la date du 28 juin 1862, en rendit un second le 21 août suivant qui, sur la demande principale du sieur de Lamure, confirma, mais qui, sur les demandes du sieur Teyssier contre la Compagnic, infirma, au contraire, En conséquence, cet arrêt dit que cette dernière garantira le sieur Teyssier de la condamnation prononcée contre lui au profit du propriétaire et, de plus, paiera au même le chaume, p. 134. V. au surplus, sur la responsabilité des compagnies de chemins de fer à raison des incendies occasionnés par les charbons, ou étincelles qui s'échappent des locomotives, Bordeaux, 21 juin 1859, et trib. de la Seine, 30 nov. 1859 (P.1860.310.-S.1860.2.41)... (2-3) La jurisprudence admet l'unité d'expert et sa désignation sans réserve, au cas seulement où l'expertise est ordonnée d'office par le juge pour se procurer des renseignements:V. Rep. gén. Pal. et Supp., v° Expertise, n. 122 et suiv.; Table gén. Devill. et Gilb, cod. verb., n. 30 et suiv.; Table décenn., Ibid., n. 8. Adde Cass. 25 mai 1859 (P.1860.291. S.1859.1.736) et 15 juill. 1861 (P.1862.1022.-S.1862.1.256). (4) V. en ce sens, 12 nov. 1862, et les autorités citées à (P.1863,696. S. 1863.1.214). not 1 ران l'art. 1382, C. Nap., en ce que l'arrêt attaqué a déclaré la Compagnie responsable de l'incendie d'un amas de matières inflammables, déposé à moins de vingt mètres de la voie ferrée. Sur ce point, on a soutenu que la disposition précitée de la loi de 1845 s'appliquait évidemment au propriétaire ou fermier qui, ayant des bâtiments très-rapprochés de la voie ferrée, y engrange des pailles et des foins, en laissant les fenêtres ouvertes du côté du chemin de fer, ou, s'il les clôt, en les fermant avec des bouchons de paille qui semblent placés là exprès pour recevoir les flammèches des locomotives. Il n'y a pas, en effet, à faire de différence entre un fermier aussi imprudent et l'individu qui, sur son champ, laisse une meule de paille à une distance moindre de vingt mètres de la voie ferrée. Dans les deux cas, il y a dépôt de matières inflammables; dans les deux cas, l'imprudence est égale et tombe, par conséquent, sous le coup de la loi qui régit la police des chemins de fer. Sans doute, les bâtiments où le dépôt dont il s'agissait au procès avait été effectué, avaient une existence antérieure à celle du chemin de fer; mais ce que la Compagnie conteste au propriétaire ou à son fermier, ce n'est pas le droit de conserver son bâtiment, ni même celui de s'en servir pour y engranger des fourrages; elle prétend seulement qu'ils ne peuvent y placer ces fourrages de façon à être exposés aux flammèches projetées par les locomotives. Du jour, en effet, où la loi ci-dessus a été promulguée, les riverains ont cessé de pouvoir déposer aucun amas de matières inflammables à moins de vingt mètres de la voie. montant des dommages que l'incendie lui a causés personnellement, le tout << suivant l'estimation, porte le dispositif, qui en sera faite par l'expert que les premiers juges ont nommé. » Il était encore dit au dispositif que, la réformation du jugement n'étant que partielle, l'exécution de l'arrêt était renvoyée devant les premiers juges. La partie de l'arrêt relative aux demandes du sieur Teyssier contre la Compagnie est ainsi motivée : -«Attendu, comme l'a décidé l'arrêt interlocutoire du 28 juin 1862, que si l'art. 1733, C. Nap., en rendant le locataire responsable de l'incendie, lui permet de prouver directement qu'il est arrivé par cas fortuit ou force majeure, fet de renvoyer ainsi le propriétaire à se pourvoir contre qui de droit, ce n'est pas une raison pour que le locataire, traduit devant les tribunaux, ne puisse lui-même amener en c cause l'auteur du sinistre et exercer contre lui un recours personnel; qu'il résulte de là que, tout en maintenant la condamnation prononcée par les premiers juges contre Teyssier, la Cour doit statuer sur le recours de ce dernier contre la Compagnie; Attendu que les faits retenus par cet arrêt interlocutoire ont été établis par les enquêtes, et qu'il en résulte la preuve que l'incendie des bâtiments de M. de Lamure, affermés à Teyssier, doit être attribué aux étincelles sorties des locomotives au moment du passage des trains de la Compagnie du chemin de fer de Ja Méditerranée; Attendu que le grenier à foin incendié existait avant la construction du chemin de fer, et que l'usage de ce bâtiment n'a aucune analogie avec le fait, prohibé par l'art. 7 de la loi du 15 juill. 1846, d'établir des meules de paille à une distance de moins de 20 mètres d'un chemin de fer; que l'obligation de tenir les fenêtres d'un grenier à foin fermées, ou d'y poser des volets quand elles en manquent, ou de ne pas placer de la paille jusqu'au bord de la fenêtre, n'est pas au nombre des servitudes imposées par la loi précitée aux propriétés riveraines des chemins de fer, en sorte que Teyssier a pu jouir du grenier à foin dont il s'agit de la même manière qu'il en jouissait auparavant; Attendu qu'il résulte de là que la Compagnie est responsable envers Teyssier, soit du dommage que l'incendie lui a causé personnellement, soit de celui à la réparation duquel il est condamné envers de Lamure, et qu'il y a lieu de faire pleinement droit au recours de Teyssier, même quant aux dépens; Attendu que ces domimages ne sont pas susceptibles d'être liquidés en l'état, et qu'il y a lieu, pour ceux causés à Teyssier, comme il a été fait par les premiers juges pour ceux causés à M. de Lamure, d'en ordonner l'estimation par experts, etc. n 8321 £381.2 8901.381 2 Moyen. Violation de l'art. 303, C. proc. civ., en ce que l'arrêt attaqué n'a désigné qu'un seul expert pour procéder à la vérification des dommages causés par l'incendie, et cela sans le consentement constaté de la Compagnie défenderesse. 3 Moyen. Violation de l'art. 472, C. proc. civ., en ce que la Cour impériale a renvoyé l'exécution de son arrêt aux premiers juges, dont la décision, en ce qui touche les demandes dirigées contre la Compagnie, avait été infirmée pour le tout. Pour le défendeur, on a répondu sur le premier moyen: A raison des difficultés que pourraient éprouver les compagnies pour éviter les incendies que leurs locomotives peuvent lancer malgré toutes les précautions possibles, la loi a dû prendre des mesures afin de diminuer ce danger d'incendie dans l'intérêt des propriétés riveraines, aussi bien que dans celui de la responsabilité des compagnies. Tel est l'objet de l'art. 7 de la loi du 15 juill. 1845; mais la prohibition édictée par cet article ne l'a été que pour l'avenir. La preuve en est dans l'art. 10 de la ménie loi, qui dispose que, pour éviter les dangers Violation de que peuvent présenter les Couvertures en chaume et les dépôts de matières inflammables préexistants, à une distance de moins 11 » POURVOI en cassation de la part de la Compagnie. Pento Moyen. sup l'art. 7 de la loi du 15 juill. de vingt mètres, et pour restreindre autant que possible leur responsabilité, les compagnies doivent procéder par voie de suppression moyennant une indemnité. Dans l'espèce, d'ailleurs, le dépôt dont il s'agissait était tout intérieur. Or, la loi défendant seulement le dépôt à l'extérieur de matières inflammables, permet par cela même les dépôts à l'intérieur; et, comme elle ne prescrit aucune mesure pour les dépôts de cette dernière sorte, on ne se met en contravention ni directement ni indirectement, lorsqu'en ce qui concerne ces dépôts, on prend telle ou telle mesure ou même lorsqu'on s'abstient d'en prendre aucune. D'ailleurs, l'obligation de tenir fermées les fenêtres d'un bâtiment situé près d'une voie ferrée et l'interdiction de placer de la paille jusqu'au bord de la fenêtre constitueraient des servitudes onéreuses pour tous les bâtiments qui seraient dans cette situation. Or, la loi du 15 juill. 1845 a énuméré avec soin toutes les servitudes auxquelles elle entendait asservir les propriétés riveraines des chemins de fer; les servitudes dont il s'agit n'y sont nullement mentionnées; et comme, en pareille matière, il n'est pas permis de suppléer au silence de la loi, on doit en conclure qu'elle n'a pas entendu les imposer à ces propriétés. Les principes de la matière sont donc contraires au système du pourvoi, et, de ce premier chef déjà, il doit être repoussé. En ce qui touche le second moyen, on n'a pas contesté pour le défendeur que les termes de l'art. 303, C. proc., exigent la nomination de trois experts; mais on a soutenu que cette disposition concerne uniquement les expertises réclamées par les parties, et tel n'était pas, disait-on, le caractère de celle qui avait été ordonnée dans l'espèce; cette expertise, à raison de ce que, dans ses conclusions, la Compagnie avait gardé le silence sur ce sujet, devait être considérée comme lui ayant été imposée d'office par le juge. Or, il est constant, d'après la jurisprudence, que pour les expertises ordonnées d'office, le juge peut les confier à un seul expert, sans contrevenir à l'art. 303 (V. ad notam.) Enfin, relativement au troisième moyen, on faisait remarquer que l'art. 472, C. proc., ne prévoyait pas le cas d'une infirmation et d'une confirmation partielles; que, dans cette situation, s'il avait été jugé quelquefois que du moment où il y avait infirmation, on ne pouvait plus renvoyer aux mêmes juges (Bourges, 26 avr. 1824; Bordeaux, 12 août 1829), il avait été également décidé que la confirmation partielle devait faire attribuer la connaissance de l'affaire aux mêmes magistrats, quand bien même leur décision eût été infirmée en partie (Amiens, 15 juin 1822; Rennes, 1er juill. 1827; Colmar, 22 mai 1850, P. 1851.2.237.-S.1852. 2.435). Dans ce conflit d'opinions, faisait-on observer au nom du défendeur, la Cour suprême a toujours rejeté les pourvois fondés sur l'art. 472, en cas d'infirmation et de confirmation partielles, sans doute par ce motif que cet article, ne déterminant pas la marche que les tribunaux avaient à suivre en pareille occurrence, ils ne pouvaient pas, quelque parti qu'ils eussent pris, être reputés avoir violé une loi qui ne prévoyait pas l'hypothèse. Sur le second moyen, M. le conseiller rapporteur, après avoir constaté les tendances de la jurisprudence vers l'expert unique, s'est demandé si cette tendance était bien conforme à la loi et si elle ne présentait pas quelques dangers dans la pratique? « On ne peut se dissimuler, répondait ce magistrat à la question qu'il s'était posée, que l'expertise ordonnée d'office ne soit, en réalité, une véritable expertise, régie dès lors par les termes si formels de l'art. 303: « l'expertise ne pourra être faite que par trois experts, ⚫ne distinguant pas entre les expertises demandées par les parties et celles que le juge ordonnerait de lui-même. -On ne peut se dissimuler que si les tribunaux doivent chercher à éclairer leur conscience, il faut toujours qu'ils le fassent dans la forme légale. On ne peut se dissimuler que le juge, en nommant d'office un seul expert au lieu de trois, enlève aux parties cette garantie du nombre que la loi a voulu leur donner, non pas seulement dans la personne de leurs juges, mais encore dans celle des hommes appelés à leur donner des avis souvent décisifs. On ne peut se dissimuler qu'il prive les parties et qu'il se prive lui-même des renseignements qui découlent souvent de la variété d'opinions des experts et de leur discussion. -On ne peut se dissimuler que ce choix unique peut avoir d'autant plus de dangers pour les parties, qu'elles ne sont pas appelées le plus souvent à s'expliquer sur le point que l'on veut faire vérifier d'office, pas plus que sur la personne à laquelle on veut confier l'opération, et que cependant l'avis de cet expert unique aura d'autant plus d'influence sur l'esprit du juge que le choix même qu'il en a fait est la preuve la plus certaine de la confiance qu'il a en ses lumières et son honnêteté. Ces considérations n'ont pas échappé aux auteurs qui ont écrit sur la matière. Aussi Boncenne (t. 4, p. 462) considère-t-il l'arrêt du 22 fév. 1837 (P.1837.2.382.-S.1837.1.243) comme ayant fait de Fart. 303 une interprétation un peu hasardée: divinatio non interpretatio dit cet auteur.-Ces inconvénients graves de l'expertise par un seul doivent tenir les tribunaux en éveil, et si parfois ils se décident à s'écarter du texte de l'art. 303, C. proc. civ., ce ne doit être que dans les cas tout exceptionnels dont parlait M. l'avocat général Laplagne-Barris, sur les conclusions duquel a été rendu l'arrêt de 1837 : Quand l'expertise est ordonnée d'office, disait ce savant magistrat, ce n'est plus une exper«tise proprement dite, c'est seulement un moyen « que prend le juge de se procurer des renseignements utiles. Si, dans ce cas, le juge était ⚫ forcé ou de nommer trois experts ou d'en remettre le choix aux parties, il n'atteindrait presque jamais son but, qui est d'avoir des a LA COUR; Attendu que si l'art. 7 de la loi du 15 juill. 1845, sur la police des chemins de fer, défend d'établir à une distance de moins de vingt mètres d'un chemin de fer desservi par des machines à feu, des couvertures en chaume, des meules de paille, de foin et autres dépôts de matières inflammables, cette disposition ne saurait être appliquée au propriétaire ou fermier qui engrange ses récoltes dans des bâtiments situés à moins de vingt mètres de la voie ferrée, mais qui existaient avant l'établissement de cette voie, alors surtout qu'il est constaté, en fait, que les habitants de ces bâtiments en jouissent depuis la création de la voie ferrée de la même manière qu'ils en jouissaient avant; - Qu'en ce cas, si la sûreté publique et la conservation du chemin de fer l'exigent, le propriétaire de ces bâtiments, trop rapprochés de la voie ferrée, peut sans doute être exproprié moyennant une juste indemnité, mais que là se borne le droit que peut invoquer la Compagnie du chemin de fer, et qu'elle ne saurait exiger que, dans son intérêt particulier et tout en conservant les bâtiments, on imposât dans leur jouissance ou leur exploitation à leur propriétaire certaines règles ou certaines restrictions qui le gêneraient dans le libre et légitime exercice de son droit de propriété. Sur le moyen tiré de la violation de l'art. 472, C. proc.: Attendu que le jugement rendu entre toutes les parties par le tribunal de Montélimar, le 21 avr. 1862, a été confirmé par l'arrêt attaqué sur la demande principale formée par de Lamure contre son fermier Teyssier; que, s'il y a eu infirmation sur la demande en garantie formée par Teyssier contre la Compagnie et niême sur la demande principale qu'il formait encore contre elle en dommages-intérêts, ces deux dernières demandes n'étaient que des conséquences et comme des annexes de la demande originaire de de Lamure; que, dans ces circonstances, l'arrêt attaqué a pu, sans violer l'art. 472, C. proc., renvoyer l'exécution du tout devant le tribunal de Montélimar; - Rejette ces deux moyens. Mais sur le 2 moyen:- Vu les art. 303 et 315, C. proc.;-Attendu que, d'après ces dispositions, lorsqu'il y a lieu à expertise, elle doit être faite par trois experts, à moins que les parties ne consentent qu'il soit procédé par un seul; - Attendu, en outre, que la loi veut que les parties aient toujours la faculté de convenir du choix des experts, et que c'est seulement lorsqu'elles ne se sont par accordées à cet égard dans le délai fixé qu'il est procédé à l'expertise par les experts nommés d'office par le jugement; - Attendu, en fait, que l'arrêt attaqué, reconnaissant qu'il y avait lieu à l'expertise demandée expressément par les conclusions de Teyssier, nomme pour y procéder le sieur Fontanelle, sans que les parties cussent déclaré consentir à ce qu'il fût procédé par un seul expert; — Que, d'un autre côté, l'arrêt ordonne d'une manière absolue que l'expert par lui commis opérera, sans réserver aux parties la faculté de convenir entre elles du choix des experts dans le délai déterminé par la loi; Qu'en statuant ainsi, la Cour impériale de Grenoble a violé les articles de loi ci-dessus visés; Casse, etc. Du 20 nov. 1866. Ch. civ. - MM. Pascalis, prés.; Rieff, rapp.; de Raynal, 1er av. gén. (concl. conf.); Beauvois-Devaux et Jozon, av. CASS.-REQ. 2 janvier 1867. TRAVAUX PUBLICS, ENTREPRENEUR, FOURNISSEURS, SOUS-TRAITANT, COMPÉTENCE. La clause d'une entreprise de travaux publics, qui, en soumettant les adjudicataires aux conditions du règlement général du 25 août 1833, leur interdit par cela même de prendre des sous-traitants (art. 4) et les oblige à faire personnellement tous les achats de matériaux (art. 11), peut être interprétée en ce sens que l'entrepreneur est responsable directement, envers les fournisseurs auxquels un sous-traitant a eu recours, du prix des matériaux par eux livrés et qui ont été reçus pour être employés dans l'entreprise.Peu importe que ces fournisseurs n'aient pas été parties au cahier de charges, la clause dont il s'agit devant être réputée contenir à leur profit une stipulation dont l'art. 1121, C. Nap., leur permet de réclamer le bénéfice (1). (C. Nap., 1797.) L'autorité judiciaire est seule compétente, à l'exclusion de l'autorité administrative, pour déterminer, entre les entrepreneurs de travaux publics, les sous-traitants et les tiers, les effets résultant des conditions dans lesquelles ils ont contracté les uns avec les autres. (2). Cour de cassation du 28 mai 1866 (P.1866.781. S.1866.1.299) à posé en thèse que le caractère public des travaux entrepris ne suffit pas pour déterminer la compétence de l'administration; qu'il faut, en outre, pour que ce principe soit applicable, que la contestation intéresse l'Etat; qu'au contraire, si elle n'intéresse que l'entrepreneur et son sous-traitant, elle reste sous l'em |