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(Legembre et fils C. Burke Delacroix et autres).

MM. Legembre et fils se sont pourvus en cassation contre l'arrêt de la Cour d'Alger du 26 déc. 1907, partiellement reproduit S. et P. 1909.2.163; Pand. pér., 1909.2.163. Cet arrêt, après avoir admis la validité de la clause compromissoire, contenue dans

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contrat passé en Angleterre, dont MM. Legembre et Cie invoquaient la nullité pour soutenir que le tribunal de commerce d'Alger, puis la Cour d'Alger, avaient été compétemment saisis de leur action contre MM. Worms et Cie, Cory, Brothers et Cie, et après s'être refusé à examiner un grief tiré par MM. Legembre et fils, contre le contrat contenant la clause compromissoire, de l'erreur et du dol, en ce qu'ils auraient « ignoré les termes précis de la convention signée en leur nom par Moxey, Savon et Cie, lesquels auraient, en ce faisant, outrepassé le mandat dont ils étaient investis», et ce, par le motif que la Cour ne saurait statuer sur l'erreur et le dol entachant un contrat dont l'exception d'incompétence soulevée devant elle lui interdit l'examen », continuait ainsi : « La Cour; Attendu que vainement Legembre et fils jeune Soutiennent encore que l'acte du 2 déc. 1903 serait entaché d'une nullité radicale, comme tendant à violer, sur le territoire francais, les prescriptions de l'art. 419, C. pén., lequel interdit entre commerçants toute coalition ayant pour but d'amener la hausse ou la baisse factice d'une marchandise ou d'une denrée quelconques; tendu, tout d'abord, et d'une façon générale, que le contrat incriminé, comme tout autre de même nature, ne saurait produire en France aucun effet civil, tant qu'il n'a pas été suivi d'une ordonnance d'exequatur; que, d'autre part, au cas où les effets d'une hausse où d'une baisse frauduleusement obtenues viendraient à se produire sur le territoire français, le ministère public conserverait le droit absolu de constater ce délit et d'en poursuivre la répression par toutes les voies de droit; qu'ainsi, et, à quelque point de vue que l'on se place, la convention litigieuse ne pouvait avoir pour conséquence de troubler impunément l'ordre public, ainsi qu'à tort on l'a prétendu; Attendu,

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d'ailleurs, que, dans l'espèce, la Cour n'a point à examiner en lui-même, et dans sa portée juridique, le moyen tiré de l'art. 419, C. pén., mais qu'elle doit seulement envisager ce même moyen dans les rapports qu'il peut avoir avec l'exception d'incompétence dont elle est saisie; Attendu qu'il y a lieu de constater, avant tout, que, suivant une jurisprudence unanime, les dispositions de l'art. 419, précité, ne sauraient recevoir leur application qu'autant que la coalition entre vendeurs d'une même marchandise revêtirait un caractère frauduleux, et cela sous la condition formelle que la hausse ou la baisse de cette marchandise se soient réellement produi

vention, peut, au cas de déclinatoire fondé sur cette clause compromissoire, examiner, avant de sta

tes; que, dans tout autre cas, cette même coalition ne constituerait aucun crime ou délit punissables; - Attendu que, dans l'espèce, ni ce caractère frauduleux, ni l'existence réelle d'une hausse ou d'une baisse factices, n'apparaissent de plano; que, pour rechercher si ces éléments caractéristiques du délit de coalition se rencontrent au procès, il deviendrait indispensable d'aborder le fond du litige, ce que les art. 168 et s., C. proc., interdisent formellement à toute juridiction régulièrement saisie d'une exception d'incompé tence; Attendu que, dans le litige aujourd'hui soumis à l'appréciation de la Cour, l'exception proposée par les intimés porte sur l'incompétence ratione materiæ du tribunal de commerce d'Alger; - Attendu que, si les exceptions de cette nature peuvent être soulevées en tout état de cause, il n'en est pas moins certain que, dès l'instant où le tribunal devant lequel on les invoque en est saisi, tout examen du fond doit être nécessairement écarté; Attendu que, dans ces conditions, Legembre et fils jeune ne sauraient être admis à rapporter devant la Cour la preuve du délit de coalition prétendu par eux, et qu'il échet, en conséquence, de rejeter comme irrecevable le moyen tiré de la nullité radicale dont la convention du 2 déc. 1903 serait entachée; motifs; Confirme, etc. ».

Par ces

POURVOI en cassation par MM. Legembre et fils. Moyen unique. Violation des art. 3, 14, 1108, 1131, 1133, C. civ., 168 et s., 172, 425, C. proc., 419, C. pén., 3, C. proc.; de la règle locus regit actum, et de l'art. 7 de la loi du 20 avril 1810, en ce que l'arrêt attaqué a déclaré les tribunaux français incompétents pour connaitre d'une action tendant à faire prononcer la nullité d'un contrat passé à Londres le 2 déc. 1903, soit comme entaché d'erreur et de dol, soit comme contraire à l'ordre public, en ce qu'il avait pour objet une entente concertée entre les principaux détenteurs de charbon de terre à Alger, dans le but de provoquer la hausse factice des prix, sous prétexte que ce contrat contenait une clause compromissoire déférant tout litige entre les parties à un arbitre anglais, et que le juge français devrait dès lors nécessairement écarter tout examen du fond du litige, alors que, le juge français, ayant été compétemment saisi en vertu de l'art. 14, C. civ., ne pouvait se dessaisir du litige que si les défendeurs justifiaient devant lui d'une convention d'arbitrage valable, et que, dans ce cas, l'examen du fond pour statuer sur la question de compétence était une nécessité qui résulte de la nature même du contrat.

ARRET (apr. délib. en ch. du cons.). LA COUR; - Sur la mise hors de cause de Moxey, Savon et Cie : Attendu que l'arrêt attaqué a, conformément aux conclusions de Moxey, Savon et Cie, condamné Legembre et fils au paiement de tous les

tuer sur la compétence, le fond même de l'affaire, c'est-à-dire la validité de la convention, à laquelle

frais exposés par cette partie; que Legembre et fils étaient dès lors en droit de former un pourvoi en cassation contre Moxey, Savon et Cie, aussi bien que contre les autres défendeurs; Rejette la demande de mise hors de cause de Moxey, Savon et Cie; - Et statuant à l'égard de tous les défendeurs;

Sur le moyen unique de cassation : Vu l'art. 14, C. civ.; Attendu qu'aux termes de cet article, l'étranger même non résidant en France peut être cité devant les tribunaux français pour l'exécution des obligations par lui contractées en pays étranger envers des Français: - Attendu qu'il résulte des qualités et des constatations de l'arrêt attaqué que Legembre et fils, négociants français, demeurant à Alger, ont assigné, devant le tribunal de commerce de cette ville, Burke Delacroix et autres, à l'effet de faire prononcer, avec allocation de dommages-intérêts, la nullité d'un contrat qu'ils avaient passé avec ces parties, à Londres, le 2 déc. 1903; que cette demande était fondée, d'une part, sur ce que le consentement de Legembre et fils aurait été donné par erreur, leurs mandataires ayant outrépassé leurs pouvoirs, et, d'autre part, sur ce que la convention litigieuse serait contraire à l'ordre public français, comme constituant un traité de coalition concerté entre les principaux détenteurs de charbon de terre à Alger, en vue d'opérer une hausse factice sur le prix de cette marchandise, fournie aux navires se ravitaillant dans le port de ladite ville; Attendu que Burke-Delacroix et autres, après avoir mis en cause Moxey, Savon et Cie, mandataires de Legembre et fils, ont soulevé une exception d'incompétence, tirée de ce que le contrat du 2 déc. 1903 contenait une clause valable d'après la loi anglaise, et attribuant à un arbitre la connaissance de tous les différends qui pourraient naître au sujet de l'exécution de la convention; Attendu que l'arrêt attaqué a accueilli cette exception, par le double motif que le contrat passé à Londres ferait la loi des parties, et que les art. 168 et s., C. proc., mettraient obstacle à ce que la Cour, saisie d'une exception d'incompétence, examinât, au fond, les moyens de nullité invoqués contre la convention; Mais attendu, sur le premier point, que, s'il est loisible au Français traitant avec des étrangers de se soumettre à l'application de la loi du pays où le contrat a été passé, les tribunaux français ne peuvent donner effet à la convention ainsi conclue qu'autant qu'elle a été librement consentie et qu'elle n'est pas contraire à l'ordre public; Attendu, sur le second point, que si, en principe, le juge dont la compétence est contestée ne peut se prononcer sur le fond qu'après avoir, au préalable, rejeté le déclinatoire par une décision spéciale, il en est autrement, lorsque l'examen du fond est indispensable pour lui permettre de statuer sur sa propre compétence; Attendu que, dans l'espèce, le tribunal de commerce d'Alger,

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compétent d'après la règle générale formulée dans l'art. 14, C. civ., ne devait se dessaisir que si la clause, opposée comme attribuant la connaissance du litige à une autre juridiction, eût été contenue dans un contrat exempt des vices ci-dessus indiqués; Or, attendu que Legembre et fils relevaient, tout à la fois, contre ledit traité, un défaut de consentement et une atteinte à l'ordre public; qu'il était, dès lors, de toute nécessité que la Cour d'appel se prononçat sur la validité d'une convention, dont la nullité eût, par voie de conséquence nécessaire, frappé d'inefficacité en France, la clause compromissoire, et qu'en refusant de le faire, elle a faussement appliqué les art. 172 et 425, C. proc., et a violé l'art. 14, susvisé, C. civ.; Casse, etc.

Du 8 janv. 1913. Ch. civ. - MM. Baudouin, er prés.; Rau, rapp.; Mérillon, av. gén. (concl. conf.); Hannotin, Morillot et Bickart-Sée, av.

CASS.-CIV. 9 juillet 1912 (2 ARRÊTS). 1° CASSATION, CONSIGNATION DE L'AMENDE, AMENDE UNIQUE, PLURALITÉ DE JUGEMENTS (Rép., v Cassation [mat. civ.], n. 306 et s.; Pand. Rép., vo Cassation civile, n. 523 et s.). 2o JUGE DE PAIX, DEMANDE RECONVENTIONNELLE, DEMANDE

(1) V. conf., Cass. 1er juill. 1907 (S. et P. 1909. 1.13; Pand. per.., 1909.1.13), et le renvoi.

(2-3-4) Le juge saisi d'une demande reconventionnelle ne peut se dispenser de la juger en même temps que la demande principale, sous cette double condition 1° qu'elle rentre dans sa compétence (V. Cass. 9 juin 1886, S. 1886.1.425. P. 1886. 1.1033; Pand. pèr., 1886.1.151), c'est-à-dire que le juge ne soit pas incompétent ratione materiæ pour en connaître (V. la note et les renvois sous Cass. 9 juin 1886, précité; adde, Glasson, Précis de proc., 2o éd., par Tissier, t. 1er, n. 862 et 866. Comp. Garsonnet, Tr. de proc., 2e éd., par CézarBru, t. 1, p. 672, § 396; et notre Rép. gén. du dr. fr., v Demande reconventionnelle, n. 16; Pand. Rep., v Conclusions, n. 314); 2° que la demande reconventionnelle ne soit pas pour la solution du procès une cause de retard ou d'embarras. V. les autorités citées dans la note sous Cass. 9 juin 1886. Adde, Garsonnet, op. et loc. cit.; Glasson, op. cit., t. 1o, n. 863.

Ces règles s'appliquent sans difficulté à la procédure devant les juges de paix. On décidait déjà, sous l'empire de la loi du 25 mai 1838, par application de l'art. 7 de cette loi, qui attribuait aux juges de paix la connaissance de toutes les demandes reconventionnelles ou en compensation qui, par leur nature ou leur valeur, sont dans les limites de sa compétence, que le juge de paix ne peut se dessaisir d'une demande reconventionnelle dont il est compétemment saisi. V. Cass. 9 juin 1886, précité, et la note. La même solution doit être maintenue depuis la loi du 12 juill. 1905, dont l'art. 10 reproduit la disposition de l'art. 7 de la loi de 1838. V. en ce sens, Hudelot, Compét. des juges de paix, n. 174. Ce n'est qu'autant que le juge de paix serait incompétent ratione materiæ pour statuer sur la demande reconventionnelle, ou que cette demande serait de nature à retarder le jugement de la demande principale qu'il serait dis

PRINCIPALE, JONCTION D'INSTANCES, CONCLUSIONS, CONNEXITÉ, COMPENSATION, BAIL, DEMANDE EN PAIEMENT DE LOYERS, TROUBLE DE JOUISSANCE, DEMANDE EN DOMMAGES-INTERETS, JUGEMENT D'INCOMPÉTENCE, INCOMPÉTENCE RATIONE LOCI », DIVISION DE LA DEMANDE (Rép., vo Demande reconventionnelle, n. 1 et s., 16; Pand. Rép., vis Appel civil, n. 1336 et s., Conclusions, n. 314).

1° Lorsque deux jugements, entrepris par le même pourvoi, ont été rendus entre les memes parties, à l'occasion du même litige, la consignation d'une seule amende est suffisante (1) (Règl., 28 juin 1738, Ire part., tit. 4, art. 5). ler arrêt.

20 Le juge de paix, saisi d'une demande en paiement de loyers, en validité de saisiegagerie, en résiliation de bail et en expulsion, formée par un bailleur contre son locataire, ne peut se refuser à prononcer lajonction, réclamée par le défendeur, d'une demande reconventionnelle en dommagesintérêts par lui formée, pour troubles de jouissance depuis la saisie-gagerie, cette demande reconventionnelle étant connexe à la demande principale, et lui étant opposée dans le but d'en paralyser ou d'en restrein dre les effets (2) (C. proc., 171; L. 12 juill. 1905, art. 10). 1er arrêt.

Il ne peut davantage se déclarer incompétent pour statuer sur la demande reconventionnelle en dommages-intérêts pour

pensé de la juger en même temps. V. les autorités citées dans la note sous Cass. 9 juin 1886, précité. Adde, Leduc, Nouv. tr. formul. de la justice de paix, p. 396 et s.

Dans les deux affaires ci-dessus, pour apprécier si le juge de paix s'était à tort déclaré incompétent à l'effet de statuer sur la demande en dommages-intérêts pour trouble de jouissance opposée par un locataire à la demande en paiement de loyers, en résiliation de bail et en validité de saisie-gagerie formée contre lui par le bailleur, deux points étaient à examiner : 1° La demande du défendeur était-elle une demande reconventionnelle? 2o Le juge en était-il compétemment saisi?

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1° Que la demande du locataire eût le caractère d'une demande reconventionnelle, c'est ce qui ne pouvait être sérieusement contesté. On s'accorde à décider que la demande incidente formée par le défendeur doit être considérée comme une demande reconventionnelle lorsqu'elle est une défense à l'action principale, dont elle a pour but d'anéantir ou de restreindre les effets. V. Metz, 27 avril 1869 (S. 1869.2.237. - P. 1869.995), et les renvois; Nancy, 18 mai 1872 (S. 1872.2.197. - P. 1872.818); Cass. 9 févr. 1881 (S. 1881.1.160. - P. 1881.1.379); Garsonnet, op. cit., t. 1er, p. 670 et s., § 396; Glasson, op. cit., t. 1o, n. 865; Pabon, Tr. des justices de paix, 2o éd., t. 1, n. 472: CorBilliat, Tr. de la compét. des juges de paix, p. 239; Hudelot, op. cit., p. 173; Leduc, op. cit., p. 393 et s.; Henri Chevalier, Guide formul. des juges de paix, 3o éd., t. 2, p. 457: Bloch et Chaumel, Tr. des cons. de prud'hommes, n. 623; notre C. proc. anneté, par Tissier, Darras et Louiche-Desfontaines, t. 1, p. 57, sur l'art. 7 de la loi du 25 mai 1838, n. 1; et notre Rép. gen. du dr. fr., v° Demande reconventionnelle, n. 1; Pand. Rép., v° Appel civil, n. 1336. Et la connexité peut être une cause de reconvention. V. Garsonnet, op. cit., t. 1er, p. 672, § 396; Glasson, op. cit., t. 1o, n. 865; Leduc,

trouble de jouissance opposée à la demande en paiement des loyers, et qui, découlant du même contrat synallagmatique que la demande principale, lui est connexe et a pour but d'en restreindre ou d'en paralyser les effets, sous prétexte que la demande reconventionnelle constituerait une demande purement personnelle, et que le bail leur, contre qui elle est formée, n'habiterail pas dans le ressort de la justice de paix (3) (Id.). ler arrêt (sol. implic.), et 2o arrêt. Il importe peu que, le locataire ayant d'abord opposé à la saisie-gagerie deux demandes en dommages-intérêts pour troubles apportés à sa jouissance, en premier lieu, jusqu'à la date de la saisie-gagerie, puis de cette dale au jour de son assignation, et ayant ensuite, sur la citation signifiée par le bailleur à fin de validité de la saisiegagerie, de paiement de loyers et de rési liation, formulé une nouvelle demande pour troubles de jouissance depuis la date de son assignation, l'ensemble des demandes par lui formées, dont chacune est inférieure au taux de la compétence du juge de paix, soit supérieur à ce taux, dès lors que la dernière demande, qui se reliait indivisiblement à la demande principale du bailleur en validité de saisiegagerie, en paiement de loyers et en résiliation de bail, rentrait, par son chiffre, dans la compétence du juge de paix (4) (Id.). - ler arrêt.

op. et loc. cit.: Bloch et Chaumel, op. et loc. cit. Au contraire, la demande du défendeur n'a pas le caractère reconventionnel, quand il n'existe aucune connexité entre les deux demandes, et qu'elle ne constitue pas une défense à l'instance principale. V. Cass. 3 mars 1879 (S. 1881.1.351. P. 1881.1.858); 22 nov. 1886 (S. 1887.1.118. P. 1887.1.277; Pand. pér., 1888.1.240). Or, il est indéniable qu'une demande, par laquelle un locataire prétend que le bailleur ne lui a pas procuré la jouissance paisible de la chose louée, et n'a pas exécuté les conditions du bail sur lequel il fonde la demande, tend à paralyser les effets de la demande formée contre lui par le bailleur, en paiement de loyers et en résiliation pour défaut de paiement, et qu'ayant ainsi pour objet de faire admettre la compensation judiciaire entre les sommes réclamées de part et d'autre, elle présente bien les caractères de la demande reconventionnelle ou en compensation, au sens de l'art. 10 de la loi du 12 juill. 1905.

2o Mais le juge de paix était-il compétent pour connaître de la demande reconventionnelle? Il avait compétence dans l'une et l'autre affaires pour statuer sur les demandes du bailleur, quel qu'en fût le montant, en vertu de l'art. 3 de la loi du 12 juill. 1905, parce qu'il s'agissait d'une location n'excédant pas annuellement 600 fr. Il avait d'ailleurs compétence pour statuer, dans la seconde affaire, sur la demande reconventionnelle du locataire, puisque cette demande, par son chiffre (600 fr.), rentrait dans la compétence générale attribuée aux juges de paix en premier ressort par l'art. 1 de la loi du 12 juill. 1905, en ce qui concerne les actions purement personnelles et mobilières.

Le tribunal avait objecté que, s'agissant d'une action personnelle-mobilière, la demande reconventionnelle aurait dû être portée devant le tribunal du domicile du bailleur (C. proc., 59, § 1o).

L'objection eût été fondée, si la demande du locataire avait été une demande principale; mais

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Mme Arachequesne avait loué à M. Daux, par bail du 16 févr. 1900, pour neuf années et moyennant un loyer de 550 fr. par an, un appartement sis à Paris, 14, rue de l'Ouest. Le 23 août 1907, Mme Arachequesne a fait pratiquer une saisie-gagerie pour avoir paiement de loyers impayés. A la suite de cette saisie, M. Daux a formé, le 9 sept. 1907. devant le juge de paix du 14 arrondissement de Paris, une demande en nullité de la saisie, faute par Mme Arachequesne d'avoir procuré au preneur la jouissance paisible des lieux loués, et en 600 fr. de dommages-intérêts, pour le trouble apporté à la jouissance du preneur depuis le 1er sept. 1907 jusqu'au jour de la citation. Le 11 sept. 1907, deux nouvelles citations: 1o en 600 fr. de dommages-intérêts pour trouble à la jouissance du preneur du 1er juill. 1906 au 16 janv. 1907; 20 en 600 fr. de dommages-intérêts pour trouble de jouissance du 16 janv. au 1er sept. 1907. Le 14 sept. 1907, Mme Arachequesne ayant elle-même cité M. Daux devant le même juge de paix en validité de la saisie-gagerie, en paiement de loyers, en résiliation de bail et en expulsion, M. Daux, le 10 oct. 1907, a, par conclusions: 1 formé une demande reconventionnelle en 600 fr. de dommages-intérêts pour trouble de jouissance depuis le 10 sept. 1907 jusqu'à ce jour; 2o demandé la jonction de ces diverses demandes. - Le 17 oct. 1907, par un premier jugement, le juge de paix a refusé la jonction des instances, sauf en ce qui concernait la demande de M. Daux en dommages-intérêts du 9 sept. 1907, et a sursis à statuer, à raison d'une inscription de faux, sur les instances jointes. Par un second jugement rendu à la même date, le juge de paix s'est déclaré d'office incompétent sur les demandes en dommages-intérêts de M. Daux, qui avaient été disjointes, par le motif qu'elles formaient une demande globale de 1.800 fr.,

c'était une demande reconventionnelle, qui échappait à ce titre aux règles de la compétence ratione loci. V. Boitard, Colmet d'Aage et Glasson, Lec. de proc., 15 éd., t. 1o, n. 527; Garsonnet, op. cit., t. 1, p. 672, § 396; Glasson, op. cit., t. 1o, n. 862 et 864.

Dans la première affaire, la question était plus délicate. Ce n'était pas une demande en 600 fr. de dommages-intérêts pour trouble de jouissance que le locataire avait opposée à la demande principale du bailleur en validité de saisie-gagerie, en paiement de loyers et en résiliation; c'étaient plusieurs demandes de 600 fr. chacune, s'échelonnant depuis la date de la saisie-gagerie jusqu'après l'assignation donnée par le bailleur en validité de la saisie-gagerie, en paiement de loyers et en résiliation. Toutes ces demandes, dont chacune atteignait le taux maximum de la compétence du juge de paix (600 fr.), avaient le même objet; mais le trouble de jouissance dont elles demandaient la réparation était, pour chacune, afférent à une période du bail différente. La division de ces demandes avait visiblement pour but de les soumettre au juge de paix, au lieu de les porter devant le tribunal civil, qui aurait été compétent, si elles

et qu'en outre, la partie adverse n'avait pas son domicile dans le ressort de la justice de paix. Sur appel principal par M. Daux, et sur appel incident de Mme Arachequesne, le tribunal de la Seine, par un premier jugement du 19 mars 1908, a confirmé la première décision du juge de paix en ce qui concerne la disjonction, l'a infirmée en ce qui concerne le sursis, et, statuant au fond, a fait droit aux conclusions de Mme Arachequesne. Par un second jugement du même jour, le tribunal a confirmé, par adoption de motifs, la seconde sentence, par laquelle le juge de paix se déclarait incompétent sur les demandes en dommages-intérêts disjointes.

POURVOI en cassation par M. Daux contre ces deux jugements. 1er Moyen...

2o Moyen. Violation des art. 1, 3, de la loi du 12 juill. 1905, 7 de la loi du 20 avril 1810, et fausse application de l'art. 1291, C. civ., en ce que le tribunal, méconnaissant à la fois l'objet et le caractère légal de la demande en dommages-intérêts dont il était saisi, a refusé de prononcer la jonction d'instances qui ne pouvaient être examinées séparément, et dont l'une au moins était indivisible de la demande que le juge a retenue et qu'il a solutionnée au fond.

3 Moyen. Violation de l'art. 1er de la loi du 12 juill. 1905, et fausse application de l'art. 59, C. proc., en ce que le jugement attaqué a maintenu une décision du juge de paix qui s'était déclaré à tort et d'office incompétent pour statuer sur des demandes dont chacune ne dépassait pas 600 fr., sous prétexte que la défenderesse ne serait pas domiciliée dans l'arrondissement, alors que l'une au moins de ces demandes était purement reconventionnelle.

Mme Arachequesne a soulevé une fin de non-recevoir, tirée de ce que, le pourvoi ayant été formé contre deux jugements distincts, il n'avait été consigné qu'une seule amende.

avaient été réunies, soit qu'on les considérât comme des demandes principales, soit qu'elles eussent le caractère de demandes reconventionnelles (L. 12 juill. 1905, art. 11, § 4). Or, la volonté des parties étant inpuissante à déroger à l'ordre des juridictions (V. Cass. 16 janv. 1883, S. 1888.1.263. P. 1883.1.630; Cass., motifs, 4 nov. 1885, S. 1888.1.459. P. 1888.1.1139), il s'ensuit qu'une partie ne peut fractionner sa demande de manière à la porter devant un juge qui, régulièrement, ne peut en connaître. V. Trib. de la Seine, 9 févr. 1894 (Gaz. des trib., 2 oct. 1894). Aussi le juge de paix, et, sur appel, le tribunal civil s'étaient-ils déclarés d'office incompétents pour statuer sur les demandes du locataire.

La chambre civile casse par le motif que la demande dernière en date rentrait dans la compétence du juge de paix, et était liée indivisiblement à la demande principale. Le motif est un peu énigmatique. L'explication peut en être que, des quatre demandes en 600 fr. de dommages-intérêts pour trouble de jouissance formées par le locataire, trois, introduites après la saisie-gagerie, étaient antérieures à l'assignation du bailleur en validité de saisie-gagerie; une seule, celle que

ARRET (apr. délib, en ch, du, cons.).

--

LA COUR; Sur la fin de non-recevoir opposée au pourvoi : - Attendu que la défense soutient que, s'agissant de deux jugements complètement distincts, quoique rendus le même jour par le tribunal civil de la Seine, la consignation d'une seule amende était insuffisante; - Mais attendu que les deux jugements ont été rendus entre les mêmes parties, à l'occasion du même litige; Rejette la fin de non-recevoir;

Sur le second moyen, dirigé contre le premier jugement: Vu l'art. 10 de la loi du 12 juill. 1905; - Attendu que, des qualités et des motifs de la sentence, adoptés par le jugement attaqué, il résulte qu'à la suite d'une saisie-gagerie pratiquée le 23 août 1907 par la veuve Arachequesne contre Daux, son locataire, à défaut de paiement des loyers courus du 1er oct. 1906 au 1er juill. 1907, Daux a, par exploit du 9 sept. 1907, assigné Mme Arachequesne devant le juge de paix du 14 arrondissement de Paris, pour voir prononcer la nullité de ladite saisie-gagerie, en donner mainlevée, et s'entendre condamner en 600 fr. de dommages-intérêts, à raison des troubles de jouissance que lui auraient causés, du 1er au 9 sept. 1907, l'installation d'un phalanstère au 1er étage de la maison, celle d'un bar au rez-de-chaussée, et les actes abusifs d'une autre locataire; que, par deux autres exploits, du 11 du même mois, il a fait citer la veuve Arachequesne, devant le même juge de paix, pour s'entendre condamner à deux indemnités de 600 fr. pour troubles de jouissance identiques, du 1er août 1906 au 16 janv. 1907. et de cette dernière date au 1er septembre suivant; que, de son côté, la veuve Arachequesne a, suivant exploit du 14 sept. 1907, fait assigner Daux devant le même juge de paix en paiement de trois termes de loyer (367 fr.) et de 34 fr. 05 pour charges, en validité de saisie-gagerie et en résiliation du bail, avec expulsion; Attendu, de plus, que la sentence cons

retient la Cour de cassation, avait été formée après cette assignation; celle-là, par les motifs mêmes que nous avons donnés en ce qui concerne la première affaire, avait incontestablement le caractère d'une demande reconventionnelle, et, à ce titre, prise en soi, elle rentrait dans la compétence du juge de paix, qui, si elle avait été seule, n'aurait certainement pas dû s'en dessaisir.

Mais cette explication est médiocrement satisfaisante. Était-il possible, pour apprécier la compétence du juge de paix en ce qui concerne cette demande, de faire abstraction des autres demandes, qu'elles eussent ou non, à raison de la date à laquelle elles avaient été formées, le caractère de demandes reconventionnelles? Si le locataire, en divisant ses demandes, avait eu pour objet de faire fraude aux lois sur la compétence, en [quoi le fait que la dernière demande était postérieure à l'assignation du bailleur pouvait-il empêcher qu'elle encourût le même reproche, et faire que son sort dût être séparé de celui des autres demandes? S'il y avait eu fraude à la loi, il semble bien que cette fraude existait pour toutes les demandes du locataire, et non pas pour toutes, à l'exception de la dernière.

tate qu'à l'audience du 10 oct. 1907, où ont été appelées ces quatre affaires, Daux, par conclusions déposées, a formé, en outre, une demande reconventionnelle en 600 fr. de dommages-intérêts, pour troubles de jouissance qui se seraient produits du 10 sept. au 10 oct. 1907; et que Daux a réclamé la jonction de toutes les demandes; Attendu que le juge de paix, dont la décision est confirmée par le jugement attaqué, a joint les deux instances des 9 et 14 sept. 1907, mais a refusé de joindre avec elles tant la demande reconventionnelle du 10 oct. 1907 que les deux demandes du 11 sept. 1907; Mais attendu, sans rechercher quel était le caractère des deux demandes du 11 sept. 1907, que le tribunal était tenu, en vertu des art. 10 et 11 de la loi du 12 juill. 1905, de statuer, en même temps, sur l'action du 14 septembre et sur la demande reconventionnelle, laquelle lui était connexe par identité d'origine, et était opposée dans le but d'en paralyser ou d'en restreindre les effets; Attendu qu'en refusant de prononcer la jonction, le jugement attaqué à supprimé arbitrairement du litige un de ses éléments essentiels, et a violé l'article de loi susvisé; Sans qu'il soit besoin de statuer sur le premier moyen; - Casse le premier jugement;

Sur le troisième moyen, dirigé contre le second jugement : Vu l'art. 10 de la loi du 12 juill. 1905; Attendu que, par ce second jugement, le tribunal s'est déclaré incompétent sur les deux demandes de Daux, précitées, du 11 sept. 1907, et sur la demande reconventionnelle susvisée du 10 oct. 1907; qu'il décide que ces trois demandes, chacune de 600 fr. de dommagesintérêts, n'en forment, en réalité, qu'une seule, d'un chiffre total de 1.800 fr., qui ne pouvait être fractionnée; qu'il ajoute que cette dernière somme ne pouvait être réclamée à la veuve Arachequesne que par une action personnelle et mobilière, portée devant le juge de son domicile; Mais attendu que la demande reconventionnelle du 10 oct. 1907 rentrait dans la compétence du juge de paix du 14e arrondissement, et était liée indivisiblement à la demande principale de la veuve Arachequesne, du 14 sept. 1907; Casse le second jugement, etc.

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Du 9 juill. 1912. — Ch. civ. MM. Baudouin, ler prés. ; Fabreguettes, rapp.; Lombard, av. gén. (concl. conf.); de Lalande et Palyart, av.

32.

Postérieurement à sa demande du 14 sept. 1907 en validité de saisie-gagerie, en paie

(1-2) Une demande est nouvelle, et, partant, non recevable en appel (C. proc., 464), notamment quand elle diffère de la demande originaire dans sa cause (V. Garsonnet, Tr. de proc., 2o éd., par Cézar-Bru, t. 6, p. 73 et s., § 2124; Glasson, Précis de proc., 2o éd., par Tissier, t. 2, n. 1014, p. 103; notre C. proc, annoté, par Tissier, Darras et LouicheDesfontaines, sur l'art. 464, n. 13; et notre Rép. gén, du dr. fr., vis Appel [mat. civ.], n. 8214, 3252, et Demande nouvelle, n. 32; Pand. Rép., vo Appel civil, n. 4530 et s. Adde, comme application, Cass. 1er août 1893, S. et P. 1898.1.14, et la note;

ment de loyers, en résiliation de bail et en expulsion, Mme Arachequesne a formé, le 30 nov. 1907, devant le juge de paix du 14o arrondissément de Paris, une nouvelle demande tendant aux mêmes fins, à raison. d'un terme de loyers échu depuis l'introduction de la première demande. M. Daux a opposé une demande reconventionnelle en 600 fr. de dommages-intérêts pour trouble à sa jouissance depuis la date de ses conclusions du 10 oct. 1907 (V. le § ler). Le 12 déc. 1907, un jugement, confirmé par le tribunal de la Seine, le 19 mars 1908, par adoption de motifs, a fait droit aux conclusions de Mme Arachequesne, et s'est déclaré incompétent sur la demande reconventionnelle.

POURVOI en cassation par M. Daux. Jer Moyen...

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2o Moyen. Violation de l'art. 10 de la loi du 12 juill. 1905; fausse application des art. 59 et 171, C. proc.; violation des art. 68 et 69 du même Code, en ce que le juge de paix s'est déclaré d'office incompétent pour statuer sur une demande reconventionnelle qui était connexe à la demande principale par identité d'origine.

2e ARRÊT (apr. délib. en ch. du cons.). LA COUR; Sur le deuxième moyen: Vu les art. 1er et 10 de la loi du 12 juill. 1905; Attendu que les juges de paix, compétents, d'après l'art. Ier de la loi du 12 juill. 1905, en matière civile, à charge d'appel jusqu'à la valeur de 600 fr., quant aux actions purement personnelles et mobilières, connaissent, suivant l'art. 10 de la même loi, de toutes les demandes reconventionnelles qui, par leur nature ou leur valeur, sont dans les limites de cette compétence; Attendu qu'assigné par la veuve Arachequesne, suivant exploit du 30 nov. 1907, devant le juge de paix du 14o arrondissement de Paris, en paiement d'un terme de loyers (133 fr. 85, échu le 15 oct. 1907, etc...), Daux a, par des conclusions rapportées aux qualités, formé une demande reconventionnelle en 600 fr. de dommages-intérêts pour troubles de jouissance, et s'est prévalu, de ce chef,

d'un droit de rétention sur les loyers »; qu'il a soutenu que la garantie d'une jouissance utile et paisible est la condition du paiement; que, notamment, le bar installé dans l'immeuble était la maison la plus mal famée, et que des forces de police se tenaient, en permanence, autour de cet établissement »; qu'après avoir demandé que les rapports de police soient versés aux débats, Daux a offert la preuve troubles successifs causés par le bar, le

des

Pau, 1er juin 1896, S. et P. 1897.2.308; Nancy, 28 nov. 1908, 8. et P. 1910.2.33; Pand. pér., 1910.2.33, et le renvoi), ou par la qualité en laquelle la partie intéressée se présente. V. Pau, 4 déc. 1902 (S. et P. 1903.2.191), et les renvois; Nancy, 25 nov. 1905 (S. et P. 1906.2.264), et les renvois; adde, Garsonnet, op. cit., t. 6, p. 75, § 2124; Glasson, op. et loc. cit.; notre C. proc. annoté, loc. cit.; et notre Rép. gen. du dr. fr., vis Appel civil, n. 3214, 3296 et s., et Demande nouvelle, n. 32, 102 et s.; Pand. Rép., verb. cit., n. 4619 et s.- - A ce double point de vue, l'arrêt ci-dessus est

phalanstère (installé au 1er étage), les propos dégoûtants ou bruits d'une locataire, l'état de malpropreté de l'escalier »;

Attendu que, pour se déclarer incompétent sur cette demande reconventionnelle, tout en accueillant les prétentions de Mme Arachequesne, la sentence, dont le jugement attaqué adopte les motifs, décide qu'elle constitue une demande purement personnelle, et que la dame Arachequesne n'habite pas dans le 14 arrondissement; Mais, attendu que la demande reconventionnelle, telle qu'elle était formulée, était connexe à la demande principale; que les deux demandes découlaient d'un seul et même contrat synallagmatique; que la demande reconventionnelle était opposée à la demande principale, dans le but d'en restreindre ou d'en paralyser les effets; Sans qu'il soit besoin de statuer sur les premier et troisième moyens; Casse, etc.

Du 9 juill. 1912. Ch. civ. MM. Baudouin, ler prés. ; Fabreguettes, rapp.; Lombard, av. gén. (concl. conf.); de Lalande et Palyart, av.

CASS.-CIV. 14 mai 1912. DEMANDE NOUVELLE, LOUAGE DE SERVICES, BRUSQUE CONGÉDIEMENT, SOCIÉTÉ, GERANT, EMPLOYÉ, QUALITÉ NOUVelle, Cause NOUVELLE (Rép., vis Appel [mat. civ.], n. 3214 et s., 3296 et s., Demande nouvelle, n. 32 et s., 102 et s.; Pand. Rép., v Appel civil, n. 4530 et s., 4619 et s.).

Le gérant révoqué d'une société en commandite, qui a forme contre celle-ci une demande en dommages-intérêts, fondée sur un prétendu abus commis par l'assemblée générale dans l'exercice de son droit statulaire de révoquer les gérants, ainsi que sur la méconnaissance de certaines prescriptions de ces statuts, ne peut, pour la première fois en appel, sous le prétexte qu'en même temps que gérant de la société, il en aurait été simultanément l'employé, baser subsidiairement sa demande en dommages-interêts sur la rupture, sans observation des délais de congédiement, d'un contrat de louage de services qui le lait à la société comme employé (1) (C. proc., 464).

Cette demande subsidiaire, différant de la demande originaire tout à la fois par la qualité en laquelle agissait le demandeur et par la cause de l'action, est nouvelle, et, partant, non recevable (2) (Id.). (Soc. des Grands Magasins de la place Clichy C. Morice).

La Société des Grands Magasins de la

justifié, puisque l'appelant, qui avait, en première instance basé sa demande uniquement sur sa révocation en qualité de gérant de la société, invoquait subsidiairement, en appel, la qualité d'employé de la société, qu'il aurait cumulée avec celle de gérant, et que, de plus, il donnait à sa demande en dommages-intérêts une cause nouvelle et différente, en la fondant, non plus seulement, comme en première instance, sur la violation du contrat de mandat qui le liait à la société, mais aussi sur la rupture injustifiée du contrat de louage de services, à raison duquel il était l'employé de la société.

--

place Clichy et MM. Darène et autres, gérants de cette société, se sont pourvus en cassation contre un arrêt de la Cour de Paris, en date du 6 févr. 1909. 1er Moyen. Violation de l'art. 464, C. proc.; contrariété de motifs, et violation de l'art. 7 de la loi du 20 avril 1810, en ce que, tout en reconnaissant que la demande primitive de M. Morice tendait à l'allocation de dommages-intérêts, justifiés par sa révocation comme gérant, l'arrêt n'en a pas moins décidé que la demande de dommages-intérêts, par lui formulée pour la première fois en appel, à raison de son brusque congédiement comme employé, ne constituait pas une demande nouvelle, sous prétexte qu'elle aurait été virtuellement comprise dans la demande, qu'elle procédait de la même cause (son renvoi de la société), avait le même but, l'allocation de dommages-intérêts, et qu'il y avait identité de personnes, alors, d'une part, que l'arrêt constate lui-même qu'il y avait là deux situations bien distinctes, que Morice agissait donc en une autre qualité, et demandait des dommages-intérêts pour une autre cause qu'en première instance, et que la demande forinée par lui en appel pouvait d'autant moins être considérée comme virtuellement comprise dans sa demande originaire que, dans son assignation, il reconnaissait expressément que sa nomination aux fonctions de gérant avait fait disparaître sa qualité de chef du rayon des tapis et d'employé intéressé. 2o Moyen...

3 Moyen...

ARRET.

Attendu

LA COUR; Sur le premier moyen : Vu l'art. 464, C. proc.; qu'aux termes de cet article, aucune demande nouvelle ne peut être formée en appel, à moins qu'il ne s'agisse de compensation ou que la demande nouvelle ne soit la défense à l'action principale; Attendu qu'il résulte des qualités de l'arrêt attaqué que Morice a introduit, devant le tribunal de commerce de la Seine, contre la Société en commandite des Grands Magasins de la place Clichy et contre Darène et autres, une action en paiement de dommages-intérêts, fondée sur ce qu'il aurait été, sans droit, révoqué de ses fonctions de gérant de ladite société par l'assemblée générale des actionnaires; qu'il concluait à l'annulation de cette révocation, et à l'allocation d'une indemnité; qu'en outre, prévoyant l'hypothèse où la destitution serait considérée comme irrévocable, il demandait le paiement de dommages-intérêts, en raison de la perte non justifiée de sa position de gérant; Attendu que, la demande ayant été rejetée sur tous les chefs par un jugement en date du 7 août 1907, Morice a, devant la Cour de Paris, saisie de l'appel de cette décision, reproduit les griefs par lui invoqués

(1-2) Les dépens de l'instance ne peuvent entrer en ligne de compte pour la fixation du taux du ressort. V. les renvois de la note sous Cass. 17 févr. 1897 (S. et P. 1901.1.446; Pand. pér., 1900.7.14, et les renvois de la note sous Cass. 22 nov. 1909 (S. et P. 1911.1.319; Pand. pér., 1911.

en première instance: qu'il a, de plus, formé une demande subsidiaire, dans la quelle il alléguait qu'au moment de sa révocation, il était, non seulement l'un des gérants des Grands Magasins de la Place Clichy, mais encore un employé de cette maison, et qu'à ce dernier titre, il avait droit à une indemnité pour brusque congédiement; Mais attendu, d'une

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part, que, devant le tribunal, Morice s'était uniquement prévalu de sa qualité de gérant; que, loin de prétendre qu'il y joi gnait celle toute différente d'employé au rayon des tapis, il avait exposé, dans son assignation, qu'il n'était parvenu à la gérance qu'après avoir gravi tous les échelons de la hiérarchie, et qu'il se qualifiait lui-même, dans cet acte, « d'ancien chef du rayon des tapis »; Attendu, d'autre part, que la demande primitive était fondée sur un prétendu abus, commis par l'assemblée générale, du droit de révoquer les gérants, à elle conféré par les statuts sociaux, ainsi que sur la méconnaissance de certaines prescriptions desdits statuts, et que la demande présentée subsidiairement devant la Cour avait pour cause la rupture, sans observation des délais de congédiement, d'un contrat de travail qui aurait été passé entre la société et l'un de ses employés; que la demande subsidiaire différait donc de la demande principale originaire, tout à la fois par la qualité en laquelle Morice agissait et par là cause de Faction; qu'elle constituait, dès lors, une demande nouvelle, qui, n'ayant point trait à une compensation et n'étant pas une défense à une action principale, ne pouvait être formée en cause d'appel; que la Cour de Paris a, néanmoins, déclaré cette demande recevable, et qu'après avoir dé cidé que la révocation prononcée contre Morice, comme gérant, par l'assemblée générale, n'était susceptible d'aucun recours, elle a statué au fond sur la question de congédiement; en quoi elle a violé le texte de loi susvisé; - Sans qu'il soit besoin de statuer sur les deuxième et troisième moyens du pourvoi; Casse, etc. Du 14 mai 1912. Ch. civ. MM. Baudouin, le prés.; Rau, rapp.; Mérillon, av. gén. (concl. conf.); Boivin-Champeaux et Bressolles, av.

CASS.-CIV. 25 février 1913. DERNIER RESSORT, DÉPENS, INSTANCE ANTÉRIEURE, JUGEMENT D'Incompétence (Rép., vo Appel [mat. civ.], n. 469 et s.; Pand. Rép., vo Appel civil, n. 1137 et s.).

Si les dépens exposés dans l'instance n'en sont que l'accessoire, il en est autrement de ceux qui se rapportent à un autre litige, antérieurement engagé entre les mêmes parties et terminé par un précédent jugement; ces frais, étrangers au procès

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nouveau, constituent un chef principal de demande, qui doit entrer en compte pour la détermination du taux du ressort (1) (L. 11 avril 1838, art. 1er).

Tel est le cas où le demandeur a conclu. devant le tribunal civil, à la condamnation du défendeur au paiement, à titre de dommages-intérêts, des dépens d'une instance antérieurement portée devant le juge de paix, et dont les dépens avaient été mis à la charge du demandeur (2) (Id.).

ARRÈT.

(Bruneaux C. Couesnon). LA COUR; Sur le moyen unique du pourvoi : Vu l'art. 1er de la loi du 11 avril 1838; Attendu qu'aux termes de cet article, les tribunaux civils de première instance connaissent en dernier ressort des actions personnelles et mobilières jusqu'à la valeur de 1.500 fr. en principal; Attendu que, si les dépens exposés dans l'instance n'en sont que l'accessoire, il en est autrement de ceux qui se rapportent à un autre litige, antérieurement engagé entre les mêmes parties et terminé par un précédent jugement; que ces frais, étrangers au procès nouveau, constituent un chef principal de demande, qui doit entrer en compte pour la fixation du taux du ressort; Attendu que, des qualités et des motifs du jugement de première instance et de l'arrêt attaqué, il appert que Couesnon avait, d'abord, assigné Bruneaux, en paiement de dommages-intérêts, à raison de dégâts causés à ses récoltes, devant le juge de paix de Charly; que ce magistrat s'est déclaré incompétent pour statuer sur la demande, qui nécessitait l'interprétation d'un acte de bail, et a condamné Couesnon aux dépens; Attendu que ce dernier a porté son action devant le tribunal de Chateau Thierry, et a réclamé, outre la somme de 1.500 fr., en réparation du préjudice subi, la condamnation de Bruneaux en tous les dépens, y compris les frais exposés en justice de paix; Attendu que le jugement a condamné le défendeur aux dépens, et a alloué au demandeur, à titre de dommages-intérêts, les frais faits devant le juge de paix; Attendu que l'arrêt attaqué a déclaré non recevable l'appel interjeté contre ce jugement, par le motif que la demande principale n'excédait pas 1.500 fr., et que, si les frais de justice de paix se référaient à l'instance antérieure et terminée, ils n'avaient été réclamés devant le tribunal que comme compris dans les dépens de l'instance pendante; Attendu qu'en statuant ainsi, l'arrêt attaqué a violé le texte de loi ci-dessus visé; Casse l'arrêt rendu, le 6 juill. 1910, par la Cour d'Amiens, etc.

Du 25 févr. 1913. Ch. civ.- MM. Baudouin, le prés.; Falcimaigne, rapp.; Lombard, av. gén. (concl. conf.); Morillot. av.

sonnet, Tr. de proc., 2o éd. par Cézar-Bru, t. 5, p. 718, texte et note 16, § 2012; Glasson, Précis de proc., 2e éd., par Tissier, t. 2, n. 990), lorsqu'ils ont été adjugés par jugement avant l'introduction de la nouvelle instance. V. Cass. 22 nov. 1909, précité, et la note.

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