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moyen sûr et prompt d'éviter les procès, de rétablir l'ordre des compétences et de ramener les parties sans frais et sans détours vers l'autorité administrative dans tous les cas où les lois confèrent à cette autorité le pouvoir de juger. Ainsi, l'action de l'administration marche, s'avance el s'arrête avec l'action des tribunaux; de sorte que ce système embrasse dans la simplicité de sa règle tous les cas et tous les degrés de la hiérarchie judiciaire. >>

La Cour de cassation vient de rendre hommage à cette jurisprudence, comme on le verra par les deux arrêts que nous allons rapporter.

PREMIÈRE ESPÈCE,

(La princesse DE WAGRAM C. le sieur CASIN-DONNINCTHUNT.)

Le 20 brumaire an 12, à l'époque où l'armée française était cantonnée à Boulogne-sur-Mer ou aux environs, le maire de cette ville prit l'arrêté suivant: «< Vu la lettre du commandant d'armes de la place, en date de ce jour, portant, d'après les ordres du chef de l'état-major général de l'armée, invitation et réquisition au besoin de faire remettre dans le jour à la disposition de l'administration de l'armée, la maison qui devait être affectéc au ministre de la guerre, et celle qui était affectée au ministre des relations extérieures, arrête ce qui suit: Les maisons sus-désignées, l'une appartenant au sieur Casin-Donnincthunt, et l'autre au sieur Dussolier, seront remises à la disposition de l'administration de l'armée; les propriétaires de ces maisons seront de suite prévenus de cette mesure. »>

En exécution de cet arrêté, le sieur Casin laissa sa maison toute meublée à la disposition de qui devait l'occuper; cette occupation eut lieu par le prince de Wagram, major-général de l'armée, et par toutes les personnes attachées à son administration et à sa suite.

En 1817, c'est-à-dire après douze années de silence et deux ans après la mort du duc de Wagram, le sieur Casin a formé, contre la princesse, sa veuve, une demande en paiement de la somme de 16,900 fr. pour indemnité de l'occupation que le prince avait faite de sa maison.

Par jugement du 5 août 1817, le tribunal civil de la Seine déclara le sieur Casin non recevable dans sa demande, attendu qu'il ne justifiait pas que le prince de Wagram eût occupé sa maison à titre de location.

Mais, sur l'appel, la Cour royale de Paris rendit une décision contraire ; elle condamna, par arrêt du 4 mai 1818, la princesse de Wagram à payer au sieur Casin la somme de 11,000 francs, à laquelle elle arbitra d'office l'indemnité qu'elle jugea lui être due.

Cet arrêt fut notifié, le 21 du même mois, à la princesse de Wagram. Le 27, c'est-à-dire six jours après, arrêté du préfet de la Seine qui, à la demande du ministre de la guerre, revendique la contestation comme étant du ressort de l'autorité administrative.

Le 14 août, dans les trois mois de la signification, la princesse de Wagram se pourvut en cassation de l'arrêt de la Cour royale de Paris,

Le ministre de la justice fit son rapport sur le conflit élevé par le préfet de la Seine; la princesse de Wagram intervint dans l'instance et demanda le maintien de l'arrêté de conflit; l'instance s'engagea contradictoirement au conseil d'état entre elle et le sieur Casin, et, le 19 du mois d'août 1819, Sa Majesté rendit, sur le rapport du comité contentieux, une ordonnance qui approuva le conflit élevé par le préfet de la Seine, annulla l'arrêt de la Cour royale de Paris du 4 mai 1818 et le jugement du tribunal civil de la Seine du 5 août précédent, sauf au sieur Casin à se pourvoir devant le ministre de la guerre pour l'indemnité par lui réclamée.

C'est en cet état que le pourvoi en cassation formé par la princesse de Wagram contre l'arrêt de la Cour royale de Paris s'est présenté devant la section civile de la Cour, où le sieur Casin a fait défaut.

ARRÊT.

LA COUR, sur les conclusions de M. Cahier, avocat général, et après qu'il en a été délibéré en la chambre du conseil à l'audience d'hier et d'aujourd'hui ;-CONSIDÉRANT que l'arrêt rendu par la Cour royale de Paris le 4 mai 1818 n'a été signifié à la princesse de Wagram que le 21 dudit mois; que, dès le 27 du même mois, le préfet du département de la Seine avait élevé le conflit; que, le 14 août suivant, la princesse de Wagram s'était pourvue en cassation pour cause d'incompétence ratione materiæ; que ce recours lui était ouvert par la loi, et qu'en l'absence du conflit, la Cour aurait été tenue d'y statuer; mais que, sur l'instance en conflit instruite contradictoirement au conseil d'état, une ordonnance royale du ig août 1819, rendue sur le rapport du comité du contentieux, a approuvé le conflit et a statué que l'arrêt du 4 mai 1818, ainsi que le jugement du tribunal de la Seine du 5 août 1817, seraient regardés comme non avenus, sauf au sieur Casin à se pourvoir, si bon luí semble, vers le ministre de la guerre, pour l'indemnité qu'il réclame; CONSIDÉRANT que l'arrêt du 4 mai 1818 n'existant plus et ne pouvant désormais avoir aucun effet, la Cour n'a rien à prononcer sur cet arrêt; en conséquence, DONNE défaut contre Çasin, et, en jugeant le profit, DIT qu'il n'y a lieu de statuer sur la demande en cassation; et néanmoins attendu que le pourvoi a été régulièrement formé, et que l'arrêt du 4 mai 1818 a été déclaré comme non avenu par l'ordonnance royale du 19 août 1819, ORDONNE la restitution de l'amende consignée, etc., etc..

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M. Brisson, président. M. Raoul, avocat.

DEUXIÈME ESPÈCE,

(Le sieur RATISBONNE C. les frères THOMAS.)

Il serait superflu de retracer les faits de cette seconde espèce, où le conflit a été élevé par l'autorité administrative dans les mêmes circonstances que dans l'espèce précédente, sauf toutefois cette légère différence, insignifiante pour le point de droit, que le conflit a été élevé postérieurement au pourvoi en cassation formé par le sieur Ratisbonne contre l'arrêt

de la Cour royale de Colmar, du 14 mai 1817, tandis que, dans la première espèce, le conflit était antérieur au pourvoi.

ARRÊT.

LA COUR, -sur les conclusions de M. Cahier, avocat général, et après qu'il en a été délibéré en la chambre du conseil ; ATTENDU qu'il n'existe de pourvoi que contre la disposition de l'arrêt qui juge que la somme due par les frères Thomas doit être fixée d'après le traité fait entre le ministre de la guerre et la compagnie Leleu, et que cette disposition est déclarée comme non avenue par l'ordonnance royale du 18 janvier dernier; DECLARE qu'il n'y a lieu à prononcer sur la demande en cassation, et néanmoins onDONNE la restitution de l'amende, etc..

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Du 13 mars 1821. Section civile. M. Brisson, président. M. le conseiller Cassaigne, rapporteur. MM. Dufour-d'Astafort et Delagrange, avocats.

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DOMMAGES-INTÉRÊTS.-JUGEMENT.—INEXÉCUTION.-DOUANES.CHOSE JUGÉE.

Lorsque, par un premier jugement, une saisie de marchandises faite par la direction des douanes a été déclarée nulle, parce que les marchandises ont été reconnues n'être pas prohibées, et que la direction a été condamnée à payer au propriétaire une somme à titre de dommages-intéréts, peut-elle, sans qu'il y ait violation de la chose jugée, étre condamnée, par un second jugement, à d'autres dommages-intérêts pour réparation du préjudice qu'elle a causé au propriétaire des marchandises saisies, par le retard qu'elle a mis à les lui rendre et à exécuter le premier jugement? Rés. aff. (Code civil, art. 1351, et loi du 22 août 1791, art. 2 du titre 11.)

(La DIRECTION GÉNÉRALE DES DOUANES C. le sieur BEUvain.)

Le 13 septembre 1815, après le rétablissement des lignes des douanes qui avaient été levées à cause de la guerre, les employés des douanes se présentèrent à la fabrique de sels du Petit-Dour, appartenant au sieur Beuvain, qui, en ce moment, se trouvait absent. Ces employés, sur le refus qui leur fut fait d'ouvrir les magasins, à cause de l'absence du propriétaire, se firent accompagner par l'adjoint municipal, firent ouvrir les portes, et constatèrent l'existence d'une quantité de sels supérieure à celle. qui était en magasin trois mois auparavant; et, attendu qu'il n'était pas justifié de l'origine de ces sels, ils les regardèrent comme un entrepôt frauduleux, en déclarèrent la saisie, et mirent les scellés sur l'usine et sur les magasins; scellés qui furent réapposés le lendemain par le juge de paix, sur leur réquisition.

N. VI.-Année 1821.

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Le 30 du même mois, jugement par lequel le juge de paix du canton d'Est de Valenciennes, considérant, en fait, que l'introduction, dans les magasins du sieur Beuvain, des quantités de sels par lui déclarées venir de l'intérieur, est vérifiée par la représentation des lettres de voiture et des acquits de paiement des droits; considérant, en point de droit, qu'à l'époque où Beuvain a fait entrer les sels dans ses magasins, la douane n'exerçait plus dans le rayon de la ligne frontière à raison des circonstances de la guerre, déclare la saisie faite par les préposés de la direction nulle et de nul effet, en ordonne la main-levée après la vérification de la quantité, afin d'établir par la suite la situation de Beuvain vis-à-vis de l'administration; ordonne aussi la levée des scellés et l'exécution provisoire du jugement, et alloue à Beuvain, à titre de dommages-intérêts, un pour cent de la valeur qui sera donnée aux sels mis sous le séquestre, à compter du 13 septembre jusqu'au jour de la remise en jouissance de ces sels.

Sur l'appel, cette décision a été confirmée par jugement du tribunal civil de Valenciennes, du 8 décembre 1815, qui a été signifié à la direction, avec commandement, le 12 du même mois.

Le 18, la direction générale fit déclarer au sieur Beuvain que, se trouvant contrainte et forcée d'exécuter provisoirement, elle consentait, sous la réserve de se pourvoir en cassation, à ce que le sieur Beuvain reprît purement et simplement la possession du sel saisi chez lui, avec offres réelles de la somme de 344 fr. pour les frais liquidés et le coût du jugement et de la signification.

Le sieur Beuvain répondit qu'il ne pouvait accepter ces offres qu'autant que la douane lui fournirait les passavans nécessaires pour faire rentrer dans l'intérieur de la ligne les sels dont il s'agit; qu'au surplus, ces offres étaient insuffisantes.

La direction ne s'est pas pourvue en cassation contre le jugement du 8 décembre 1815, en sorte que ce jugement a acquis l'autorité de la chose jugée.

Il paraît que Beuvain fit beaucoup de démarches auprès de l'autorité administrative pour obtenir la rentrée en France de ses sels; mais l'administration y opposait qu'il n'était pas vraisemblable que Beuvain eût tiré, comme il l'alléguait, ces sels de l'intérieur; qu'il avait été surpris, au mois de septembre 1815, introduisant en France des sels étrangers; que, d'ailleurs, la preuve de la nationalité n'établissait pas celle de l'acquittement des droits; que, sur le compte qui avait été rendu de cette affaire au ministre des finances, il avait rejeté, le 28 novembre 1816 (onze mois après le jugement passé en force de chose jugée, du 8 décembre 1815), la demande du sieur Beuvain, etc., etc. etc.

Dans cet intervalle, les frontières avaient changé. Dour était devenu étranger, et les sels se trouvaient hors de France. D'un autre côté, le directeur général des douanes offrit au sieur Beuvain de lui faire payer 3,779 fr.

pour intérêts pendant quinze mois de 65,300 kilogrammes de sels existant dans ses magasins, suivant sa propre déclaration, en y ajoutant 344 fr, pour frais, et sous la déduction de 2,650 fr. par lui dus à l'administration.

Telles sont les circonstances dans lesquelles le sieur Beuvain s'est pourvu, par citation du 15 avril 1818, devant le juge de paix de Valenciennes, pour obtenir contre la direction générale des douanes des dommages-intérêts, à raison de l'inexécution du jugement du 8 décembre 1815, avait acquis la force de la chose jugée. Il a demandé la somme de 44,586 fr., qui en prenant pour base la valeur des droits qu'il avait payés sur les 143,680 kilogrammes de sels par lui déclarés, et indépendamment de l'indemnité à lui adjugée par le jugement du 8 décembre 1815.

Le 29 mai 1818, jugement du juge de paix qui condamne la direction à payer au sieur Beuvain la somme de 19,590 fr. pour montant des droits perçus sur 65,300 kilogrammes de sels dont elle a empêché la circulation et la vente dans le royaume, sans préjudice de l'indemnité allouée pour la privation des marchandises depuis la saisie, et saufla déduction de 2,650 fr. que réclame la direction, et dont Beuvain se reconnaît débiteur envers elle.

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Appel de la part de toutes les parties, et, le 15 janvier 1819, jugement du tribunal de Valenciennes, qui confirme par les motifs suivans: «< Considérant qu'il faut distinguer l'intérêt d'indemnité fixé par l'art. 16 de la loi du 9 floréal an 7, des dommages et intérêts réglés par les articles 1382, 1383, 1384, 1446, 1447 et 1449 du Code civil; que l'intérêt d'indemnité est le dédommagement ou le désintéressement pour la retenue de l'objet saisi, et que les dommages-intérêts sont en général de la perte qu'on a faite et du gain dont on a été privé par le fait d'autrui; considérant que, par la demeure de l'administration des douanes à exécuter le jugement du 8 décembre 1815, les scellés ont existé jusqu'au 20 décembre 1816, comme elle-même l'a reconnu; ce qui a empêché Beuvain de disposer de ses sels dont il avait payé les droits pour leur circulation en France, et ce qui l'a mis encore dans le cas d'acquitter de nouveaux droits pour leur circulation dans le royaume des Pays-Bas; considérant que la perte d'une partie de ces sels, résultant de la retenue sous les scellés, doit encore entrer en considération pour fixer les dommages-intérêts; considérant que le jugement dont est appel, en fixant ces dommages-intérêts à la valeur du montant des droits perçus sur les 65,300 kilogrammes de sel, est basé sur l'équité, puisque, d'une part, l'administration n'éprouve aucun tort réel, attendu que les sels n'ont pas été consommés en France, et que, d'autre part, Beuvain ne fait aucun gain à cet égard; considérant que le dispositif de ce jugement portant condamnation à payer au demandeur, pour dommages, la somme de 19,590 fr., montant des droits perçus, n'ordonne pas la restitution de l'impôt perçu, ce qui serait contraire à la loi, mais prend l'importance de ces droits perçus pour fixer les dommages

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