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ASS.-civ. 7 novembre 1910.

1o CASSATION, ULTRA PETITA, VIOLATION DE LA LOI, ENREGISTREMENT, TRANSMISSION (DROIT DE), ESTIMATION INSUFFISANTE, PRESCRIPTION BIENNALE (Rép., vo Cassation [mat. civ.], n. 3409 et s.; Pand. Rép., vo Cassation civile, n. 1424 et s.). - 2o IMPÔT SUR LE REVENU, SOCIÉTÉ, ACTIONS, DISTRIBUTION DE BÉNÉFICES, PARTS DE FONDATEUR, RACHAT PAR LA SOCIÉTÉ, AUGMENTATION DU CAPITAL, EMISSION D'ACTIONS (Rép., v° Revenu [Impôt sur le], n. 204 et s., 240 et s.; Pand. Rép., vo Valeurs mobilières, n. 1669 et s.).

1o Le jugement qui, tout en réduisant le chiffre des droits supplémentaires de trans

(1-2-3) Si, en principe, une décision qui statue ultra petita donne ouverture, non pas à un pourvoi en cassation, mais seulement à la requête civile (V. Cass. 31 janv. 1912, S. et P. 1912.1.88; Pand. per., 1912.1.88, et le renvoi), il en est autrement, quand cette décision contient, en outre, une violation de la loi (V. Cass. 28 févr. 1898, S. et P. 1898.1.465, et le renvoi), comme c'était le cas dans l'espèce.

L'art. 61, n. 1, de la loi du 22 frim. an 7 soumet à la prescription biennale les suppléments de droits d'enregistrement dus à raison d'insuffisance de perception. Le droit de transmission dû sur les titres de sociétés est un droit d'enregistrement (V. Wahl, Tr. du rég. fiscal des soc. et des val. mob., t. 1, n. 1240). Donc les insuffisances de perception, en matière de droit de transmission, se prescrivent par deux ans, notamment quand, comme dans l'espèce, la taxe a été assise sur une estimation inférieure à la valeur effective des titres. Cette solution est donnée pour la première fois par la Cour de cassation; elle n'a jamais, fait de doute. V. Wahl, op. cit., t. 1, n. 1542. Donc, le jugement qui, sur une demande de la Régie en supplément de droits pour les perceptions faites dans les deux dernières années, faisait remonter à une époque antérieure le point de départ de la dette de la société vis-à-vis du fisc, contenait une violation de la loi, et devait être cassé.

(4-5) La chambre civile reproduit ici les termes d'un arrêt qu'elle avait rendu sur la même question et dans le même sens. V. Cass. 19 nov. 1906 (S. et P. 1909.1.217; Pand, pér., 1909.1.217), et la note de M. Wahl.

La question consiste à rechercher si l'enrichissement procuré aux porteurs de parts de fondateurs par un rachat fait moyennant une somme supérieure à la valeur initiale des parts, ou peutêtre plus exactement par la totalité de la somme qui leur est versée comme prix de ce rachat (V. la note, n. VII, sous Cass. 17 déc. 1906, S. et P. 1909.1.219; Pand. pér., 1909.1.219), est passible de l'impôt sur le revenu, quand la société ne fait pas ces versements sur ses bénéfices, et est ob.igée de se procurer par une opération spéciale, notamment par une émission d'actions nouvelles, les sommes nécessaires.

Dans l'arrêt du 19 nov. 1906, comme dans l'arrêt ci-dessus, la Cour de cassation, pour admettre la négative, s'est fondée sur ce que les distributions ne sont passibles de l'impôt sur le revenu que si elles sont faites à l'aide des bénéfices sociaux. En 1906, la solution était inattendue; la question n'avait pas été agitée devant le tribunal, et la Régie, ne pouvant prévoir qu'elle serait tranANNÉE 1913. .6 cah.

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chée par la Cour de cassation, ne s'était pas préoccupée d'opposer une défense au système adopté par la chambre civile. Cette fois, au contraire, la difficulté a été soulevée, non pas devant le tribunal civil, qui avait admis l'exigibilité de l'impôt, et qui d'ailleurs avait rendu son jugement avant l'arrêt de 1906; mais la société, dans son pourvoi, n'a pas manqué d'invoquer l'autorité de ce précédent.

La Cour de cassation a maintenu la solution qu'elle avait déjà donnée; mais, par cela même que la Cour a reproduit simplement, dans l'arrêt ci-dessus, les termes de l'arrêt de 1906, elle s'est abstenue de réfuter les objections qu'avait soulevées la doctrine par elle admise.

Ces objections se résument ainsi (V. la note n. III, sous Cass. 19 nov. 1906, précité. Adde, Wahl, Tr. du rég. fiscal des soc. et des val. mob., t. 2, n. 2208): En droit, la loi du 29 juin 1872 soumet à l'impôt sur le revenu tous les produits des actions et des parts d'associés; or, la Cour de cassation considère les porteurs de parts comme des associés (V. la note, n. I, sous Cass. 19 nov. 1906, précité), et l'arrêt ci-dessus recueilli les qualifie encore de membres de la société. Par suite, les produits s'opposant au capital, tout ce qui est distribué aux associés, en dehors du remboursement du capital qu'ils ont versé, est passible de l'impôt. Au surplus, la taxe étant simplement avancée par la société, et représentant, en conséquence, un impôt sur l'enrichissement des associés, et non pas sur l'enrichissement de la société, elle est due, dès lors que l'associé est enrichi, c'est-à-dire dès lors qu'il touche une valeur quelconque en dehors du capital qu'il avait déboursé, sans qu'il y ait lieu de rechercher si les fonds versés à l'associé proviennent ou non d'un enrichissement de la société; de même que, réciproquement, le capital remboursé à l'actionnaire échappe à l'impôt, encore bien (ce qui est le plus habituel) que la société effectue ce remboursement à l'aide de ses bénéfices. Enfin, la jurisprudence a reconnu l'exigibilité de l'impôt dans un grand nombre d'hypothèses où les fonds distribués ne provenaient pas des bénéfices de la société distribution de biens apportés par les associés ; de sommes constituant le prix de la vente ou de l'échange d'un actif; intérêt fixe alloué en l'absence de bénéfices; distribution indirecte résultant de la novation de la dette de la société vis-à-vis des associés; capitalisation des intérêts. V. les décisions citées dans la note, n. IV, sous Cass. 19 nov. 1906, précité. Adde, Cass. 27 déc. 1909 (S. et P. 1912.1.529; Pand. pér., 1912.1.529), et la note de M. Wahl.

:

Il nous paraît certain qu'en écartant, dans l'arrêt du 19 nov. 1906 et dans l'arrêt ci-dessus,

la loi du 29 juin 1872 assujettissent à la taxe de 3 p. 100, élevée à 4 p. 100 par la loi du 26 déc. 1890, la distribution, sous quelque forme qu'elle ait lieu, de tous les produits et bénéfices réalisés par les sociétés, sans faire aucune distinction, à raison, soit de l'origine, soit de la nature de ces produits, le prix du rachat de parts de fondateur ne saurait donner ouverture à la perception de l'impôt, lorsqu'il ne constitue pas un bénéfice réalisé par la société et distribué ensuite entre ses membres (4) (L. 29 juin 1872, art. 1er, 1o).

...

Spécialement, lorsque le rachat est effectué, non à l'aide de bénéfices sociaux, mais au moyen d'une augmentation du capital social, par l'émission d'actions nouvelles (5) (Id.).

la perception de l'impôt sur le revenu, par le motif que la somme distribuée ne constitue pas un bénéfice réalisé par la société », la Cour de cassation se met en désaccord avec les arrêts dans lesquels elle a admis l'exigibilité de l'impôt sur des distributions qui ne provenaient pas de bénéfices, et même qui étaient faites à une époque où la société, n'ayant pas encore commencé son exploitation, ne pouvait pas avoir fait de bénéfices. V. Cass. 2 juill. 1894 (S. et P. 1895.1.197; Pand. pér., 1895. 6.32). Ce dernier arrêt décidait que, l'intérêt servi constituant un produit de l'action », l'impôt, par cela seul, se trouvait justifié. D'après les arrêts de 1906 et de 1910, il faut, pour que la taxe soit due, non seulement que les valeurs distribuées soient un produit de l'action, mais qu'elles soient un bénéfice de la société.

Aussi n'est-ce pas sans quelque surprise qu'on lit dans les conclusions prises dans la présente affaire par M. l'avocat général Feuilloley (Gaz. des Trib. du 7 déc. 1910): « C'est toujours ainsi, c'est-à-dire dans le sens de la nécessité de la réunion des deux conditions de l'existence et de la distribution d'un bénéfice, que vous avez interprété la loi de 1872 ».

M. l'avocat général ajoutait : « Jamais, ni votre chambre civile, ni votre chambre des requêtes, n'a écrit dans un seul de ses arrêts un motif, un mot même, duquel il pourrait résulter que vous avez jugé la loi de 1872 applicable à d'autres distributions que des distributions d'intérêts, ou de produits, ou de fruits de capitaux, c'est-à-dire de richesses nouvelles créées par la fructification du capital. - Mais le mot même d'intérêts ne désignet-il pas le produit des parts sociales, c'est-à-dire la rémunération attribuée aux associés, et ne montre-t-il pas que cette rémunération est passible de l'impôt, alors même qu'elle ne provient pas d'un bénéfice de la société? D'autre part, quand on parle de produits du capital, veut-on viser les bénéfices sociaux? L'expression ne convientelle pas davantage aux bénéfices de l'associé? Dans tous les cas, à supposer que les arrêts ne contiennent ni une phrase, ni un mot qui puisse être interprété comme soumettant à l'impôt les produits de la part sociale qui ne correspondent pas à un bénéfice social, ils font plus ils reconnaissent, comme nous l'avons rappelé, l'exigibilité de la taxe dans toutes les hypothèses où, jusqu'à présent, l'actionnaire ou l'associé étaient enrichis par une prestation provenant de la société, bien que cette prestation ne provint pas d'un bénéfice social.

Mais il y a mieux: si, dans certains arrêts, la Cour de cassation dit que les bénéfices realises par la société, et distribués, sont passibles de l'impat

Ire PART. 42

(Comp. générale des laits purs
C. Enregistrement).

La Comp. générale des laits purs s'est constituée en 1889, au capital de 300.000 fr., représenté par 600 actions de 500 fr. En outre étaient créées, pour rémunérer les apports, 150 parts de fondateur, donnant droit à 60 p. 100 des bénéfices nets de la société, après le prélèvement d'un intérêt de 5 p. 100 les actions. Ces parts de fonpar dateur, dans la déclaration d'abonnement pour le droit de transmission, ont été évaluées à un franc seulement. A partir de l'exercice 1900, cette évaluation à été portée à 500 fr. En 1903, la Comp. a racheté les 127 parts de fondateur encore en circulation, moyennant le prix de 6.000 fr. chacune, et a soldé cette opération avec le produit de l'émission de 2.400 actions nouvelles de 500 fr. L'Administration de l'enregistrement a formulé alors une double réclamation: 1° considérant que la valeur de 500 fr., attribuée aux parts pour l'assiette du droit de transmission, était insuffisante, elle a réclamé des droits supplémentaires pour la période du 1er juil. 1901 au 30 juin 1903; 2° elle a prétendu que les sommes versées aux porteurs de parts pour le rachat de leurs titres étaient passibles de l'impôt sur le revenu. La

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(V. Cass. 13 mars 1895, 1er arrêt, S. et P. 1895. 1.513; Pand. pér., 1895.6.33, et la note), ou que la loi atteint la distribution de tous les bénéfices réalisés par les sociétés » (V. Cass. 26 avril 1893, S. et P. 1893.1.433; Pand. pér., 1893.6.43, et la note), elle ne dit pas, dans ces mêmes arrêts, que les distributions aux actionnaires d'intérêts, de dividendes ou d'autres produits ne soient pas passibles de l'impôt, quand ces distributions ne proviennent pas de bénéfices réalisés. Et ailleurs, dans les arrêts auxquels nous faisons allusion plus haut, elle exige le paiement de la taxe dans des hypothèses où il n'y avait pas, où il ne pouvait pas y avoir de bénéfices. Elle dit encore que la loi soumet à la taxe la distribution des intérêts des actions, dès le moment où lesdits intérêts passent de la caisse sociale dans le patrimoine personnel des associés ou actionnaires » (V. Cass. 24 juill. 1899, S. et P. 1900.1.145; Pand. pér., 1900. 6.27), sans se préoccuper de savoir si la société a fait des bénéfices, et dans une espèce où il était démontré que la société n'avait pas fait de bénéfices; la société avait, en effet, payé les intérêts au moyen de bons différés; les statuts, analysés par le tribunal, portaient que « l'intérêt, bien qu'étant acquis à l'action, ne sera payable qu'autant que les bénéfices encaissés le permettront »; les bénéfices n'avaient pas permis le paiement des intérêts. Les intérêts, toujours comme le constatait le tribunal, étaient consolidés au moyen d'une émission d'obligations » remises aux actionnaires. Ils auraient pu être payés aussi bien sur le produit d'obligations placées dans le public. Il n'y avait pas de bénéfices; la taxe cependant a été reconnue exigible. Et, dès lors, nous ne concevons pas que la jurisprudence antérieure ait pu être interprétée, non seulement comme n'étant pas en désaccord avec la doctrine consacrée une première fois par l'arrêt du 19 nov. 1906, et une seconde fois par l'arrêt ci-dessus recueilli, mais encore comme étant inconciliable avec toute autre doctrine, et comme ayant, suivant les expressions de M. l'avocat général Fenilloley, préjugé la solution que

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Comp. ayant formé opposition à la contrainte décernée par la Régie, le tribunal civil de la Seine à statué sur cette opposition par un jugement du 19 nov. 1906. En ce qui concerne la première réclamation, le tribunal a décidé qu'il était dû des droits supplémentaires, moins élevés toutefois que ceux que demandait la Régie, mais que, par contre, le jugement a fait porter sur deux années et demie, au lieu de deux années, comme le prétendait l'Administration. Sur le second chef de réclamation, le tribunal a débouté purement et simplement la Comp. de son opposition.

POURVOI en cassation par la Comp. générale des laits purs. - Ter Moyen. Ultra petita, compliqué de violation de l'art. 61, 1o, de la loi du 22 frim. an 7, de l'art. 6 de la loi du 23 juin 1857 et de l'art. 3 de la loi du 29 juin 1872, en ce que le tribunal de la Seine a accordé à l'Enregistrement le droit de percevoir un supplément de taxe pour une période de trente mois antérieure au jour de la demande, alors, d'une part, que l'enregistrement ne réclamait ce supplément que pour les deux ans ayant précédé sa demande, et, d'autre part, que la prescription biennale était applicable à ce droit.

2e Moyen et Moyen additionnel. Violation la Cour de cassation a définitivement adoptée »>! Nous croyons avoir montré, dans la note, n. VII, sous l'arrêt précité du 19 nov. 1906, que la nouvelle jurisprudence fournira aux sociétés un moyen facile de faire des distributions à leurs membres, même sur leurs bénéfices, sans payer la taxe. Nous ne revenons pas sur ce point. Il faut toutefois dire un mot des conséquences qu'impute M. l'avocat général Feuilloley, dans ses conclusions précitées, à la doctrine que la Cour de cassation a repoussée dans l'arrêt de 1906, et qu'elle condamne à nouveau dans celui que nous rapportons.

Permettez-moi, a dit M. l'avocat général, avant de finir, de vous présenter une dernière observation, qui va vous démontrer que le système de la Régie, s'il était adopté, conduirait souvent à des résultats véritablement iniques et contraires à l'égalité fiscale. Comparons deux sociétés ayant des procédés de gestion différents. En voici une qui a l'habitude de distribuer, après la fin de chaque exercice, l'intégralité de ses bénéfices. Chaque année, la Régie a prélevé sur les dividendes distribués la taxe de 4 p. 100. Un jour, cette société estime que le moment est venu pour elle de faire disparaître des parts de fondateurs, dont l'existence est un obstacle à l'essor de ses actions. N'ayant pas de réserves, puisqu'elle a intégralement distribué ses bénéfices, elle est obligée, pour opérer ce rachat, d'augmenter, ou son capital, par une émission d'actions, ou sa dette, par un emprunt ou une émission d'obligations. Si le système de la Régie est admis, la taxe de 4 p. 100 frappera les sommes employées au rachat des parts. Voici maintenant une autre société qui, à la différence de la précédente, n'a pas distribué tous ses bénéfices, et qui s'est constitué, par des prélèvements sur ses bénéfices, d'importantes réserves. Le fisc n'aura pu asseoir l'impôt de 4 p. 100 que sur les sommes distribuées comme dividendes, à l'exclusion de celles portées à la réserve. Le jour où cette société procédera au rachat de ses parts de fonda

des art. 1er de la loi du 29 juin 1872 et 4 de la loi du 26 déc. 1890, en ce que le jugement a déclaré assujettis à l'impôt de 4 p. 100 sur le revenu les prix des parts de fondateur vendues par les porteurs à la société, alors que ces prix, n'étant pas des produits distribués des titres, échappaient à l'impôt. ARRÊT.

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LA COUR; Sur le premier moyen :

Vu l'art. 61, n. 1, de la loi du 22 frim. an 7; Attendu que le jugement attaqué constate que : 1o la société anonyme, constituée le 28 janv. 1889 sous la dénomination de Comp. générale des laits purs, au capital de 300.000 fr., divisé en 600 actions, a émis 150 parts de fondateur, primitivement évaluées, dans la déclaration d'abonnement souscrite au bureau de l'enregistrement, à un franc chacune, puis à 500 fr. pour les exercices 1900, 1901 et 1902; 2° que la société a, le 4 août 1903, en vertu d'une délibération prise la veille par l'assemblée générale des actionnaires, racheté les 127 parts de fondateur encore en circulation à cette date, au prix de 6.000 fr. chacune, et a procédé à ce rachat moyennant l'émission de 2.400 actions nouvelles de 500 fr.; Attendu qu'à la suite de cette opération, l'Administration de l'enregistrement, estimant que l'éva

teurs, elle trouvera dans ses réserves accumulées le moyen d'y procéder sans emprunt ni augmentation de capital; le fisc prélèvera alors sur les réserves ainsi distribuées la taxe de 4 p. 100. Les résultats seront absolument différents dans l'un ou l'autre cas, si on suit le système de la Régie. Ils seront identiques, si on suit le nôtre. Précisons par des chiffres: la première société a réalisé 2.000.000 de bénéfices, et les a intégralement distribués, puis elle a emprunté 1.000.000 pour le rachat de ses parts; elle paiera l'impôt sur 3.000.000. La deuxième société n'a distribué qu'un million sur ses bénéfices, et a constitué avec le surplus une réserve d'un million, qui lui a servi à racheter ses parts. Elle paiera l'impôt sur 2.000.000 seulement. Est-ce là la justice; est-ce là l'égalité fiscale? C'est là cependant où conduit l'application du système de la Régie. Au contraire, cette inégalité n'existe pas, si, conformément à votre jurisprudence et au texte de la loi, l'impôt n'est assis que sur les distributions pro. venant de bénéfices ou de produits sociaux ».

Nous ne voyons pas en quoi le résultat du système repoussé par la Cour de cassation est ici contraire à la justice. La loi a voulu que les associés eussent à payer une taxe de 4 p. 100 sur la rémunération que recevrait leur capital; il est naturel que, si les associés reçoivent une rémunération de trois millions, ils payent une taxe plus élevée que s'ils ne reçoivent que deux millions. Il ne faut pas oublier c'est le point capital, bien qu'un peu négligé — que la taxe sur le revenu n'est pas due par la société; elle est avancée par elle, et remboursée par chaque associé en ce qui le concerne. Ce qui est peu équitable, c'est de ne pas faire payer aux associés, qui ont reçu trois millions, plus qu'à ceux qui ont reçu deux millions, par le motif que les premiers ont touché un million sur des fonds que la société s'est procurés par émission d'obligations ou d'actions nouvelles. Quelle que soit l'origine des deniers qui leur sont versés, leur enrichissement est le même.

A. W.

luation de 500 fr., attribuée aux parts de fondateur, en 1901, 1902 et 1903, pour l'assiette du droit de transmission était insuffisante, a signifié, le 15 oct. 1903, à la société une contrainte pour le paiement de la somme de 6.600 fr., montant des droits supplémentaires de transmission exigibles pour la période écoulée du 1er juill. 1901 au 30 juin 1903; Attendu que le tribunal a réduit à 1.560 fr. le montant des sommes dues de ce chef au Trésor, mais a compris dans ce chiffre les droits afférents au premier semestre de l'année 1901, alors que la réclamation de l'Administration était limitée à la période biennale n'ayant commencé à courir que du 1er juill. 1901; qu'il a donc statué ultra petita, et que le moyen invoqué par le pourvoi donne. néanmoins ouverture à cassation, puisqu'il se complique d'une violation de l'art. 61, n. 1, de la loi du 22 frim. an 7; que ce texte dispose, en effet, que la réclamation du Trésor est prescrite après deux ans à compter du jour de l'enregistrement, lorsqu'elle concerne un supplément de perception insuffisamment faite ou une fausse évaluation dans une déclaration; At

tendu que la contrainte décernée par l'Administration ne s'appliquait qu'aux droits dus pour la période biennale antérieure aux poursuites, et qu'en la faisant remonter au 1er janv. 1901, le jugement attaqué a violé le texte ci-dessus visé;

Sur le deuxième moyen et le moyen additionnel réunis : Vu les art. 1er de la loi du 29 juin 1872 et 4 de la loi du 26 déc. 1890; Attendu que, des constatations des juges du fond, il résulte que les parts de fondateur de la Comp. des laits purs ont été rachetées, le 4 août 1903, au prix de 6.000 fr. chacune, non à l'aide de bénéfices sociaux, mais au moyen d'une augmentation du capital social, par l'émission de 2.400 actions nouvelles; - Attendu que, si les termes généraux et absolus des art. 1er et 2 de la loi du 29 juin 1872 soumettent à la taxe de 3 p. 100, élevée à 4 p. 100 par la loi du 26 déc. 1890, la distribution, sous quelque forme qu'elle ait lieu, de tous les produits et bénéfices réalisés par les sociétés, sans faire aucune distinction à raison, soit de l'origine, soit de la nature de ces produits, le prix de rachat, dans l'espèce, ne saurait donner ouverture à l'impôt de 4 p. 100, puisqu'il ne constitue pas un bénéfice réalisé par la société et distribué ensuite entre ses membres; d'où il suit qu'en validant la con

(1-2) L'art. 2 des conditions générales d'application des tarifs spéciaux de petite vitesse, homologuées par décision ministérielle du 27 oct. 1900 (J. off. du 29 oct. 1900, p. 7149), avait, pour la détermination des causes d'irresponsabilité que pourraient invoquer les Comp., substitué aux rẻgles antérieures des tarifs des dispositions empruntées aux art. 31 et 32 de la Convention de Berne. Cet art. 2 ne modifiait pas très sensiblement la situation des expéditeurs et destinataires (V. la note 1, n. II, sous la loi du 17 mars 1905; S. et P. Lois annotées de 1905, p. 945, 8° col.). Cependant, une de ses dispositions, le § 2, tel qu'il avait été interprété par le rapport du directeur des chemins de fer qui avait précédé l'homologation, avait pour effet d'interdire aux Comp. d'arguer

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CASS.-civ. 27 décembre 1911. CHEMIN DE FER, TRANSPORT DE MARCHANDISES, RESPONSABILITÉ, AVARIE, EMBALLAGE DEFECTUEUX, EXPERTISE, LOI DU 17 MARS 1905 (Rép., v Chemin de fer, n. 3706; Pand. Rép., Suppl., eod. verb., n. 1058 et s.).

L'art. 2 des conditions générales d'application des tarifs spéciaux de petite vitesse, homologuées le 27 oct. 1900, qui avait inséré dans les tarifs spéciaux un ensemble de présomptions de libération en faveur des Comp. de chemins de fer, a été frappé de nullité dans toutes ses dispositions, quels qu'en fussent le sens et la portée, par la loi du 17 mars 1905, qui prohibe toute clause contraire au principe de la responsabilité du transporteur, inscrit dans l'art. 103, C. comm. (1) (C. comm., 103; L. 17 mars 1905).

En conséquence, doit être cassé le jugement qui, en présence d'une expertise attri buant une avarie à une insuffisance d'emballage, a condamné la Comp. de chemins de fer à des dommages-intérêts à raison de celle avarie, motifs pris de ce que l'expertise aurait été illégalement provoquée, l'art. 2, 52, des conditions générales d'application des tarifs spéciaux de petite vitese, homologuées le 27 oct. 1900, interdisant aux Comp. de chemins de fer « de se prévaloir des défectuosités de l'emballage pour refuser une indemnité, si ces défectuosités n'ont pas été constatées dans la déclaration d'expédition (2) (Id.). (Chem. de fer de Paris-Lyon-Méditerranée C. Spanjaard). — ARRÈT.

D

LA COUR; - Sur le moyen unique : Vu l'art, 103, C. comm.; Attendu qu'il résulte des qualités et des déclarations du jugement attaqué: 1° que sept balles de tapis, expédiées, par petite vitesse, avec réquisition du tarif spécial, le 16 oct. 1906, de

Paris-La-Chapelle, à Spanjaard, en gare de Marseille, ont été mises, le 25 octobre suivant, à la disposition du destinataire,

du vice d'emballage, lorsqu'elles n'avaient pas fait constater les défectuosités de cet emballage au moment de la déclaration d'expédition.

Depuis l'arrêté du 27 oct. 1900, est intervenue la loi du 17 mars 1905, prohibant toutes clauses de non-responsabilité dans les tarifs de chemins de fer, et les déclarant nulles et non avenues. L'effet de cette loi a été de frapper d'inefficacité toutes réglementations antérieures sur la portée des clauses de non-responsabilité inscrites dans les tarifs, et, par suite, d'abroger l'art. 2 des conditions générales d'application des tarifs spéciaux de petite vitesse, et de l'abroger dans toutes ses parties, aussi bien dans celles qui étaient favorables à l'expéditeur ou au destinataire que dans celles qui leur étaient contraires; en conséquence,

qui refusa de prendre livraison de deux balles, portant des traces apparentes d'avarie, qu'il n'a retirées que le 5 décembre, sous réserves; 2o qu'en présence de ce refus, la Comp. requit, conformément aux prescriptions de l'art. 106, C. comm., la nomination d'un expert, qui a constaté l'avarie d'un tapis, et a émis l'avis qu'elle était due à l'insuffisance de l'emballage;

Attendu que le jugement attaqué ne contredit pas, en fait, les conclusions de l'expert; qu'il ne méconnait pas davantage que les délais réglementaires ne fussent pas expirés, lorsque les marchandises ont été mises pour la première fois à la disposition du destinataire; qu'il condamne, cependant, la Comp. à des dommages-intérêts, comme responsable à la fois de l'avarie du tapis et d'un retard dans la livraison, en se fondant uniquement sur ce motif de droit que l'expertise aurait été illégalement provoquée », l'art. 2, 2, des conditions générales d'application des tarifs spéciaux de petite vitesse, homologuées le 27 oct. 1900, ne permettant plus aux Comp., aux terines mèmes du rapport du directeur des chemins de fer adressé au ministre des travaux publics pour l'homologation,

de se prévaloir des défectuosités de l'emballage pour refuser une indemnité, si ces défectuosités n'ont pas été constatées dans la déclaration d'expédition »; - Mais attendu que cet article, insérant dans les tarifs spéciaux un ensemble de présomptions de libération en faveur des Comp. de chemins de fer, a été frappé de nullité, dans toutes ses dispositions, quels qu'en fussent le sens et la portée, par la loi du 17 mars 1905, qui prohibe toute clause contraire au principe de la responsabilité du transporteur, inscrit dans l'art. 103, C. comm.; d'où il suit qu'en statuant comme il l'a fait, le tribunal de commerce de Marseille n'a pas légalement justifié sa décision, et a, ainsi, violé l'article de la loi susvisé ; Casse le jugement du tribunal de commerce de Marseille du 8 mars 1907, etc.

Du 27 déc. 1911. Ch. civ. MM. Baudouin, le prés.; Potier, rapp.; Lombard, av. gén. (concl. conf.); Labbé, av.

CASS.-REQ. 17 juillet 1912. CHEMIN DE FER, RESPONSABILITÉ, FORCE MAJEURE, GRÈVE, OUVRIERS ET EMPLOYÉS, LI

les expéditeurs et destinataires ne peuvent plus se prévaloir de la partie de cet article qui rendait les Comp. irrecevables à invoquer le vice d'emballage, quand elles n'avaient pas fait constater les défectuosités de cet emballage au moment de la déclaration d'expédition. L'interprétation donnée par le directeur des chemins de fer était d'ailleurs très contestable. V. Cass. 15 janv. 1906 (S. et P. 1908.1.479; Pand. pér., 1908.1.479), et la note. Mais, quelle que soit l'interprétation à laquelle on dut se rattacher, il est certain que la loi du 17 mars 1905 a abrogé l'art. 2, § 2, des conditions générales d'application des tarifs spéciaux de petite vitesse; c'est ce que décide avec raison l'arrêt cidessus recueilli.

VRAISON DE WAGONS, RETARD, ENCOMBREMENT, AFFLUX DE MARCHANDISES, NAVIGATION FLUVIALE, CHÔMAGE, RESERVES (ABSENCE DE), LIVRAISON PARTIELLE DE WAGONS, AVANTAGE PARTICULIER, CASSATION, MOYEN, INTÉRÈT (DÉFAUT D') (Rép., v° Chemin de fer, n. 3061, 3160 et s., 3198 et s., 3636 bis et s.; Pand. Rép., eod. verb., n. 5444 et s., 6930 et s., 7309 et s.).

Une grève, qui, pendant les six jours de sa durée, a frappé un réseau tout entier de chemins de fer (celui des chemins de fer de l'Etat), en le privant brusquement de la majeure partie de son personnel technique, el qui a eu pour effet, par sa soudaineté et sa généralité, non pas seulement d'apporter une gêne momentanée et un trouble sérieux dans la marche de l'ensemble des services, mais d'en produire l'arrêt complet, réunit tous les caractères de la force majeure (1) (C. civ., 1148).

Mais l'Administration de chemins de fer ne peut opposer la force majeure pour s'exonérer de la responsabilité du retard apporté à la fourniture de wagons vides demandés plus d'un mois après la reprise du travail, alors qu'il est constaté par les juges du fond que la grève n'a pas été la cause déterminante de l'encombrement dont se prévaut la Comp., que cel encombrement existait dès avant la grève, le réseau ne parvenant pas, dès ce moment, à effectuer le transport des marchandises dans les délais légaux, et que le service normal aurait été certainement rétabli, à la date de la demande des wagons, si le réseau avait disposé d'un matériel suffisant (2) (Id.).

Le sourd mécontentement, l'état d'indiscipline plus ou moins apparent qui aurait persisté dans une partie du personnel de l'Administration de chemins de fer, l'inertie plus ou moins volontaire d'un certain nombre de ses employés, ne sauraient la soustraire à la responsabilité que font peser sur elle les constatations qui viennent d'être indiquées (3) (Id.).

En repoussant, dans ces conditions, l'exception tirée de la force majeure, les juges du fond déduisent les conséquences légales des faits consécutifs à la grève, par eux souverainement constatés (4) (Id.).

Les juges du fond décident également à bon droit que l'arrêt de la batellerie, sur une voie fluviale desservant les mêmes régions que les lignes de l'Administration de chemins de fer, et l'afflux des marchandises qui

(1 à 7) V. dans le même sens, l'arrêt de Rouen, 15 nov. 1911 (S. et P. 1912.2.213; Pand. pér., 1912.2.213), rendu dans une espèce identique, et

la note.

(8) L'arrêt attaqué n'avait nullement considéré l'absence de réserves de la Comp., lors des commandes de wagons, comme un aveu de responsabilité de nature à mettre obstacle à ce qu'elle se prévalût ultérieurement de la force majeure; il avait simplement fait observer que l'absence de réserves paraissait impliquer que l'Administration des chemins de fer, au moment où elle avait reçu les commandes, n'avait pas considéré qu'elle fût dans un cas de force majeure; c'était là, en présence des considérations par lesquelles l'arrêt attaqué avait répondu aux conclusions de l'Administration de chemins de fer, invoquant la force majeure, un

en estrésulté, ne sauraient être considérés comme un cas de force majeure, exonérant celle Administration de ses obligations envers les expéditeurs ou destinataires, alors qu'il est constaté que, soit par l'effet des crues, soit sous l'influence des basses eaux dans les années de sécheresse, ou des gelées dans les hivers exceptionnellement rigoureux, la navigation est exposée à un chômage plus ou moins long, comportant pour les transports un aléa dont l'Administration de chemins de fer devait tenir compte (5) (Id.).

Que, cependant, l'Administration de chemins de fer n'avait rien fait pour remédier à l'insuffisance de ses voies de garage et de triage (6) (Id.).

Et que, d'ailleurs, l'arrêt de la batel lerie n'a pas eu de répercussion sérieuse sur les transports par voie ferrée pendant la période contemporaine des faits à raison desquels l'Administration des chemins de fer est assignée en responsabilité (7) (Id.).

On ne saurait d'ailleurs reprocher aux juges du fond d'avoir fait état, pour écarter l'exception de force majeure, de l'absence de réserves de la part de l'Administration au moment de la réception des commandes de wagons, alors que, loin de voir dans l'absence de réserves l'aveu de l'inexistence de la force majeure, ils ont expressément déclaré que l'omission de toutes réserves n'était pas, par elle-même, de nature à rendre irrecevable le moyen fondé sur la force majeure, et qu'ils se sont bornes à tirer de l'absence deréserves cette simple conclusion, d'ailleurs surabondante, que l'encombrement, dont l'Administration se prévalait, ne lui paraissait pas avoir le caractère de la force majeure au moment où elle avait pris les commandes (8) (Id.).

D'autre part, doit être rejeté, comme étant étranger à la question de l'existence des cas de force majeure invoqués par l'Administration, et comme étant, par suite, actuellement sans intérêt, le moyen tiré de ce que les juges du fond auraient fait à tort grief à l'Administration d'avoir réparti son matériel disponible entre les expéditeurs pro. portionnellement au nombre de wagons qui lui étaient demandés par chacun d'eux (9) (C. civ., 1148; Ordonn., 15 nov. 1846, art. 50). (Chem. de fer de l'Ouest-Etat C. Dreyfus et Cie).

L'Administration des chemins de fer de l'Etat s'est pourvue en cassation contre un arrêt rendu par la Cour d'appel de Rouen,

motif surabondant, motif qui, quelle qu'en fût la portée, et fût-il même erroné, ne pouvait donner ouverture à cassation. V. Cass. 9 févr. 1910 (Supra, 1 part., p. 150), et les renvois.

(9) L'art. 7 du chap. 9 du tarif P. V. n. 29 autorisait la Comp. de l'Ouest à ne faire droit aux demandes de matériel que suivant les convenances de son service et au prorata de l'importance des demandes représentant les besoins réels. Le pour. voi prétendait, dans son second moyen, que ce texte dérogeait aux dispositions de l'art. 50 de l'ordonn. du 15 nov. 1846, dont la violation aurait été reprochée à tort à l'Administration des chemins de fer de l'Etat par les juges du fond. V. Rouen, 15 nov. 1911 (S. et P. 1912.2.213; Pand. pér., 1912.2.213), et la note. La Cour de cassation a écarté ce moyen comme étant actuellement.

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le 15 nov. 1911, au profit de MM. Dreyfus et (ie, et identique à l'arrêt de la même date, rapporté S. et P. 1912.2.213; Pand. pėr., 1912.2.213. 1er Moyen. Violation des art. 104, C. comm., 1148, 1382 à 1384, C. civ., 50 de l'ordonn. du 15 nov. 1846, 49 et 50 du cahier des charges des Comp. de chemins de fer, et 7 de la loi du 20 avril 1810, en ce que l'arrêt attaqué, sans répondre aux conclusions de l'Administration des chemins de fer de l'Etat, et par des motifs d'ailleurs contradictoires, a rejeté l'exception de force majeure, opposée par celle-ci à une demande de dommagesintérêts prise d'un défaut de fourniture de wagons, exception fondée notamment sur les actes d'indiscipline et de malveillance commis par les employés du chemin de fer et découlant de la grève, quoique postérieurs à la reprise du travail, ainsi que sur l'arrêt momentané de la navigation fluviale, sous le triple prétexte que cette Administration serait responsable du fait de ses préposés, qu'elle devrait, en. prévision des crues de la Seine, avoir un outillage suffisant pour suppléer la batellerie, et que l'absence de réserves, au moment de la réception des demandes, équivaudrait à un aveu de l'inexistence de la force majeure, alors, d'une part, que les actes d'indiscipline et de malveillance commis par le personnel, comme conséquence de la grève, peuvent, au même titre que la grève elle-même, constituer un cas de force majeure, lorsqu'il n'a pas été au pouvoir de l'Administration de les prévenir et de les conjurer, alors, d'autre part, que les tarifs imposés au chemin de fer par les décisions ministérielles ne lui permettent pas de concurrencer utilement la batellerie en temps normal, et qu'on ne peut légalement faire grief au réseau de ne pas s'être muni d'un matériel qui n'aurait d'emploi que durant les rares périodes de crues extraordinaires, alors, enfin, que, les réserves étant inopérantes et d'ailleurs inutiles pour permettre au voiturier d'invoquer la force majeure, l'absence de réservés ne peut être retenue, ni comme une renonciation par lui à se prévaloir d'un tel moyen de défense, ni comme un aveu de la possibilité où il se serait trouvé d'exécuter ses obligations.

20 Moyen. Violation de l'art. 50 de l'ordonn. du 15 nov. 1846, du tarif spécial P. V. n. 29, chap. 9, art. 7, et de l'art. 7 de la loi du 20 avril 1810, en ce que l'arrêt attaqué

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sans intérêt. En effet, l'arrêt attaqué se bornait à déclarer l'Administration des chemins de fer de l'Etat mal fondée à opposer l'exception de force majeure », et, avant faire droit sur les dommages-intérêts, il renvoyait la cause devant un arbitre, avec la mission d'examiner tous les éléments du préjudice, d'en vérifier la réalité et d'en déterminer l'importance ». Ce dispositif ne tranchait que la question de l'existence des cas de force majeure, à laquelle le second moyen du pourvoi était étranger. C'est la raison pour laquelle la Cour de cassation a estimé que le moyen était sans intérêt; il n'y avait pas chose jugée sur ce point; le mode de répartition des wagons était un des éléments du préjudice, dont la détermination était réservée à un débat ultérieur.

fait grief à l'Administration des chemins de fer de l'Etat d'avoir réparti son matériel disponible entre les expéditeurs proportionnellement au nombre de wagons qui lui était demandé par chacun d'eux, au lieu de suivre exactement l'ordre des demandes, alors que le tarif applicable à l'espèce, auquel la Cour d'appel a eu le tort de ne pas se référer, autorise cette Administration à ne faire droit aux demandes de matériel que suivant les convenances de son service et au prorata de l'importance des demandes représentant les besoins réels.

ARRÊT.

LA COUR; Sur le premier moyen de cassation: --- Attendu que, pour échapper à la responsabilité de retards dans la fourniture de wagons, demandés par les défendeurs éventuels du 25 nov. 1910 au 23 janv. 1911, l'Administration des chemins de fer de l'Etat a soutenu qu'elle avait été empêchée de tenir ses engagements par suite de l'encombrement du réseau, dû, notamment, à la grève de ses employés et au désordre dans les divers services qui en a été la conséquence, ainsi qu'à l'arrêt de la batellerie, motivé par la crue de la Seine; que le pourvoi fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir, par des motifs contradictoires, rejeté cette exception de force majeure ; Mais, attendu qu'il résulte des constatations des juges du fond que, si la grève des employés de l'Ouest-Etat, commencée le 12 oct. 1910, a, pendant les six jours de sa durée, réuni tous les caractères de la force majeure, parce qu'elle a frappé le réseau tout entier, en le privant brusquement de la majeure partie de son personnel technique, et à eu pour effet, par sa soudaineté et sa généralité, non pas seulement d'apporter une gêne momentanée et un trouble sérieux dans la marche de l'ensemble des services, mais d'en produire l'arrêt complet, il n'en était plus de même à la date du 25 novembre, soit 37 jours après la reprise du travail, époque à laquelle Genestal et fils, commissionnaires transitaires au Havre, ont adressé à l'Administration, pour le compte de Dreyfus et Cie, importateurs de blés à Paris, leur première demande de wagons; que le service normal aurait été certainement rétabli à ce moment, si le réseau avait disposé d'un matériel suffisant; mais que, sur les wagons demandés du 25 nov. 1910 au 23 janv. 1911, 267 seulement ont été fournis ; que la grève des employés n'a point été la cause déterminante de l'encombrement dont se prévaut l'Ouest-Etat; que cet encombrement existait dès avant la grève, alors que, déjà, le réseau ne parvenait pas à effectuer le transport des marchandises dans le délai des tarifs; que le sourd mécontentement,

(1-2) Les lois des 30 déc. 1903 (S. et P. Lois annotées de 1904, p. 697; Pand. pér., 1904.3.49), et 23 mars 1908 (S. et P. Lois annotées de 1908, p. 697; Pand. pér., Lois annotées de 1908, p. 697), en disposant que les faillis pourraient être inscrits sur les listes électorales trois ans après leur mise en faillite, ont exclu expressément du bénéfice de cette disposition les faillis condamnés pour banqueroute. Le demandeur en cassation ne pou

l'état d'indiscipline plus ou moins apparent, qui auraient persisté, suivant l'Administration, dans une partie de son personnel, l'inertie plus ou moins volontaire d'un certain nombre de ses employés, ne sauraient la soustraire à la responsabilité que font peser sur elle les constatations susvisées; Attendu qu'en statuant ainsi, la Cour d'appel de Rouen, dont les motifs ne présentent aucune contradiction, a déduit la conséquence légale des faits consécutifs à la grève d'octobre 1910, par elle souverainement constatés;

Attendu qu'il résulte également des constatations de l'arrêt attaqué que, soit par l'effet des crues qui se renouvellent périodiquement à des intervalles plus ou moins rapprochés, soit sous l'influence des basses eaux dans les années de sécheresse, ou encore des gelées dans les hivers exceptionnellement rigoureux, la navigation sur la Seine, par chalands et péniches, se trouve habituellement exposée à un chômage partiel ou complet, qui se prolonge plus ou moins longtemps, suivant les années; qu'en raison de ces circonstances, le régime des transports fluviaux comporte un aléa, dont une Comp. de chemins de fer, riveraine de la Seine sur tout son parcours, doit tenir compte; que l'afflux des marchandises dans les gares du réseau ne peut donc, d'une manière générale, être considéré comme un événement exceptionnel et imprévu; que l'Ouest-Etat n'a rien fait pour remédier à l'insuffisance de ses voies de garage et de triage; que c'est seulement sous la pression des derniers événements que l'Administration s'est enfin résolue à faire procéder à des travaux d'agrandissement et d'amélioration, qui, depuis longtemps, auraient dû être entrepris et a passé les commandes de locomotives et de wagons dont elle avait un urgent besoin; qu'en réalité, l'arrêt de la batellerie n'a pas eu de répercussion sérieuse sur le transport des marchandises par les voies de l'Ouest-Etat en 1910-1911, puisque, pendant la période critique, du 11 nov. 1910 au 15 janv. 1911, le réseau a proportionnellement transporté moins de marchandises que durant les dix premiers mois de 1910, même en y comprenant le mois d'octobre, au cours duquel a éclaté la grève; qu'ainsi, le fait allégué ne saurait être retenu comme un cas de force majeure ;

Attendu que le pourvoi reproche à l'arrêt attaqué d'avoir fait état de l'absence de réserves de la part de l'Administration au moment de la réception des commandes, ce qui équivaudrait à un aveu de l'inexistence de la force majeure, alors que ces réserves étaient inopérantes et inutiles pour permettre au voiturier d'invoquer cette exception, et que le défaut de réserves ne pouvait être retenu comme

vait donc, dans l'espèce, pour demander son inscription sur les listes électorales, se prévaloir de ces lois. Condamné successivement à 50 fr. d'amende pour banqueroute simple, et à six mois d'emprisonnement pour escroquerie, avec sursis, et cette dernière condamnation étant effacée, avec les incapacités qui pouvaient y être attachées, par l'expiration de cinq ans depuis la condamnation (L. 26 mars 1891, art. 2), il prétendait que, réha

une renonciation à se prévaloir de ce moyen de défense; Attendu que l'arrêt n'a point donné ce motif comme un élément d'appréciation d'un cas de force majeure; qu'il reconnait, au contraire, et déclare expressément que l'omission de toutes réserves, par elle-même, n'était pas de nature à entrainer contre l'Ouest-Etat une déchéance, au sens juridique du mot, ni à le rendre irrecevable dans le moyen proposé; qu'il a tiré du silence de l'Administration cette simple conclusion, d'ailleurs surabondante, que l'encombrement, qu'elle affirme aujourd'hui avoir été constitutif de la force majeure, ne lui apparaissait pas avec ce caractère le 25 nov. 1910; qu'ainsi, le premier moyen n'est pas fondé ;

Sur le deuxième moyen: - Attendu que le pourvoi reproche à l'arrêt attaqué d'avoir fait grief à l'Administration des chemins de fer de l'Etat d'avoir réparti son matériel disponible entre les expéditeurs proportionnellement au nombre de wagons qui lui étaient demandés par chacun d'eux. alors que le tarif applicable à l'espèce, auquel la Cour d'appel a eu le tort de ne pas se référer, autorise l'Administration à ne faire droit aux demandes de matériel que suivant les convenances de son service et au prorata de l'importance des demandes représentant les besoins réels; Attendu que ce moyen est étranger à la question de l'existence des cas de force majeure invoqués par l'Ouest-Etat; que, par suite, il est actuellement sans intérêt; Attendu que l'arrêt attaqué, dûment motivé, n'a donc violé aucun des textes visés au pourvoi; Rejette, etc.

Du 17 juill. 1912. Ch. req MM. Tanon, prés.; Duboin, rapp.: Blondel, av. gén. (concl. conf.); Pérouse, av.

CASS.-CIV. 12 mars 1912. ELECTIONS (EN GÉNÉRAL), INCAPACITÉ, FAILLI, BANQUEROUTIER, REHABILITATION, RÉHABILITATION DE PLEIN DROIT, LISTE ÉLECTORALE, INSCRIPTION (Rép., vo Elections, n. 262; Pand. Rép., eod. verb., n. 759).

La réhabilitation de plein droit, acquise au failli condamné pour banqueroute simple par le seul effet du temps écoulé, en vertu des lois des 5 août 1899 et 11 juill. 1900, laisse subsister l'état de faillite, qui ne prend fin, pour le failli condamné pour banqueroute, en ce qui concerne les droits électoraux, que par la réhabilitation commerciale (1) LL. 5 août 1899, art. 8 et 10; 11 juill. 1900; 30 déc. 1903; 23 mars 1908, art. 1er).

Dès lors, le failli condamné pour banqueroute, qui n'a pas obtenu sa réhabilitation commerciale, ne peut être inscrit sur les listes électorales (2) (Id.).

bilité de plein droit de la condamnation pour banqueroute simple, en vertu de l'art. 10 de la loi du 5 août 1899 (S. et P. Lois annotées de 1900, p. 937), modifiée par la loi du 11 juill. 1900 (S. et P. Lois annotées de 1900, p. 1137; Pand. pér, 1901.3.1), par un laps de dix ans écoulé depuis cette condamnation, il avait recouvré par là même sa capacité électorale. Mais la réhabilitation de plein droit de la condamnation pour banqueroute simple

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