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coupables moyens avaient déjà rendu Bapst débiteur de Po tet pour de très-fortes sommes, lorsque, le 30 frimaire an 1 dans le moment où ses affaires étaient dans le plus déplora ble état, il eut la perfidie de faire engager son crédule an pour 85,000 fr. Les frauduleuses manœuvres qu'il employa consistaient à se supposer des terres, une maison, des créa ces, qu'il n'ayait jamais eues. Tous ces faits étaient prouv tant par la correspondance de Bapst lui-même que par dépositions des témoins.

Sur l'appel, arrêt confirmatif de la Cour de justice cr minelle de la Gironde.

Pourvoi en cassation; et, le 28 mai 1808, ARRÊT de la se tion criminelle, M. Barris président, M. Guieu rapporteu par lequel :

« LA COUR, Sur les conclusions de M. Giraud, sul stitut du procureur - général; — Vu l'art. 456, nos 1 et de la loi du 3 brumaire an 4, et l'art. 35 du titre 2 de loi du 22 juillet 1791;-Et attendu que l'application de cet loi pénale doit avoir pour base une escroquerie consomm par des actes qui aient véritablement opéré l'abus de la cr dulité du plaignant; que cet abus de crédulité doit résult du dol de celui qui est prévenu d'en être l'auteur, ou faux noms, de fausses entreprises, d'un crédit imaginair ou d'espérances et de craintes chimériques, et qu'il peut s'opérer que par des faits capables d'égarer la pr dence ordinaire, de déconcerter les mesures de prévoyan et de sûreté qui, dans l'usage, accompagnent ou do vent accompagner toutes les transactions civiles et co merciales; qu'on ne saurait considérer des actes volonta res d'une confiance inconsidérée comme l'abus de cr dulité de celui qui se plaint d'une escroquerie dans les a tes qu'il aura imprudemment consentis; que, dans l'espèc les faits déclarés constans contre Bapts, et tels qu'ils sont a ticulés, ne présentent que des promesses et des assurances remboursement dont la fausseté même n'aurait pu abus le sieur Pontet sur ses intérêts, s'il eût pris, pour s'en gara

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tir, les précautions que la prudence la plus commune devait lui inspirer, lors surtout qu'il s'agissait de confier des sommes considérables à un particulier dont la détresse était connue et assez alarmante, et dont la solvabilité réelle devait, nonobstant ses allégations, paraître au moins douteuse; qu'en considérant aussi ces faits comme des infidélités, elles ne sauraient être qualifiées d'abus de crédulité, et que, même en assimilant ces faits à des tentatives de stellionnat, on ne pourrait leur appliquer la disposition des lois criminelles, ni par la nature de l'action, ni par la forme des poursuites, dans la détermination des condamnations pénales; que dès lors, les faits déclarés constans n'ayant pas les véritables caractères du délit prévu par l'art. 35 de la loi du 22 juillet 1791, la Cour de justice criminelle du département de la Gironde a fait une fausse application de cet article en prononçant contre Bapst des peines qui ne pouvaient l'atteindre à raison de ces mêmes faits; CASSE, etc.»

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Nota. Cette question a été jugée dans le même sens par un arrêt de la Cour suprême,, du 24 brumaire an 8 (voy. tom. 1, pag. 354 de ce recueil), et par deux autres des 13 fructidor an 13 et 24 avril 1807, que nous avons cru inutile de rapporter, tant la jurisprudence est uniforme sur ce point. Sans doute la solution serait la même sous l'empire du Code pénal actuel, qui ne range point le simple abus de confiance au nombre des moyens dont l'emploi caractérise le délit d'escroquerie.

COUR D'APPEL DE PARIS.

La femme qui refuse d'habiter avec son mari peut-elle y étre contrainte par la saisie de sa personne? (Rés. aff.) C. civ., art. 214.

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La jurisprudence des Cours n'est point uniforme sur cette question vraiment importante. Celle de Pau et celle de Col

mar l'ont résolue dans le même sens que la Cour de Paris, la première par arrêt du 12 avril 1810, et la seconde par ar rêt du 4 janvier 1817. Mais la Cour de Paris avait elle-même jugé, le 22 prairial an 15 (1), et la Cour de Toulouse a décidé, par arrêt du 24 août 1818, rendu après partage, que le mari ne peut employer d'autre moyen coërcitif pour obliger sa femme à remplir l'obligation qui lui est imposée par l'art. 214 du Code civil que celui de la saisie de ses revenus.

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S'il nous était permis d'émettre notre opinion dans cette controverse, nous dirions que la nature des liens qui unissent deux époux répugnent essentiellement à l'emploi d'un moyen acerbe, plus propre à aigrir davantage celui contre lequel il est dirigé qu'à le ramener au devoir qu'il a pu méconnaître. Ce moyen nous paraît d'ailleurs réprouvé par l'art. 126 du Code de procédure civile, qui défend aux tribunaux de prononcer la contrainte par corps hors des cas prévus par la loi, par l'art. 2063 du Code civil, qui leur fait la même défense, et par l'art. 2066, qui ne l'autorise contre les femmes que dans le cas de stellionnat. La sainteté du mariage, une espèce de pudeur publique, et la loi, s'accordent donc, à notre avis, pour ne pas permettre au mari d'user de la contrainte personnelle contre sa femme pour la ramener auprès de lui, lorsqu'elle s'en est éloignée.

Cependant les décrets de la justice ne doivent pas rester inexécutés, et le jugé doit avoir le moyen de vaincre la résistance de ceux qui refusent de s'y soumettre. Le silence ou l'insuffisance de la loi ne peuvent être un motif de tolérer une désobéissance dont les conséquences sont toujours funestès. (Art. 4 du Code civil.) - Cette vérité est, incontestable; mais il n'est pas moins certain que ce silence ou cette insuffisance de la loi ne peuvent être un prétexte légitime d'employer des moyens qui paraissent contrarier son vœu, surtout lorsqu'elle en offre d'autres qui concilient tous les intérêts par la moralité de leurs résultats. Ceux qui ont été mis

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(1) Voy. le tom. 6 de ce recueil, pag. 252,

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en usage par la Cour de Toulouse et par celle de Paris ellemême dans des circonstances semblables atteignent infailliblement ce but, et nous pensons que la préférence doit leur être accordée..

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La dame Ampère avait quitté son mari, et s'était retirée chez ses parens. L'époux fit sommer sa femme de rentrer sous vingt-quatre heures dans le domicile marital. Cette sommation et plusieurs autres démarches ayant été infructueuses, Ampère, par exploit du 29 mars 1808, cita sa femme devant le président du tribunal civil de la Seine, tenant l'audience des référés, pour voir ordonner qu'elle serait tenue de rejoindre son mari, et qu'elle y serait contrainte par toutes voies de droit, méme par corps. Ce magistrat rendit une ordonnance en ces termes : « Faute par la dame Ampère d'avoir satisfait à la sommation de son mari, et attendu que, d'après l'article 214 du Code civil, la femme est obligée d'habiter avec son mari et de le suivre partout où il juge à propos de résider; disons que, dans le jour de la signification de la présente ordonnance, la dame Ampère sera tenue de se rendre au domicile du sieur Ampère; sinon, le délai passé, en vertu de notre présente ordonnance, autorisons ledit sieur Ampère à faire arrêter par l'huissier porteur d'icelle ladite dame Ampère partout où elle sera trouvée, et à la faire conduire et amener à son domicile. »

Sur l'appel, la dame Ampère soutenait que le premier juge avait commis un excès de pouvoir en créant une disposition pénale qui n'est pas prononcée par la loi, que nos mœurs dés-, avouent, et dont l'exécution est d'ailleurs impraticable par la facilité que la femme aurait de s'évader, à moins de convertir le domicile commun en une prison, ce qui serait le comble de la tyrannie. Elle invoquait l'arrêt rendu par la Cour elle-même, le 22 prairial an 13, et elle en concluait que la saisie des revenus de la femme avait été regardée comme le nec plus ultra de la rigueur qu'on pourrait exercer contre elle.

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Le 29 mai 1808, ARRÊT de la Cour d'appel de Paris, pré

mière chambre, MM. Gueroult et Tripier avocats, par lequel:

-

«LA COUR, Adoptant les motifs du premier juge, A Mis et MET l'appellation au néant, et cependant surseoit pendant huitaine à l'exécution du présent arrêt, dépens compensés. »

COUR D'APPEL DE PARIS.

L'étranger non domicilié en France, qui contracte des engagemens avec une maison de commerce française tenue par un étranger, est-il, quant à ces engagemens, justicia; ble des tribunaux français? (Rés. aff.) Cod. civ., art. 14. LE SIEUR STURT, C. LE SIEUR MESSAL.

L'étranger est incontestablement justiciable des tribunaux français, 1o lorsque le contrat passé en France a pour objet la construction, l'équipement, l'approvisionnement, la vente des navires (art. 17, tit. 2, liv. 1er, de l'ordonnance de la marine, de 1681);- 2o Lorsque le marché a été fait dans une foire françaisé : cette vérité, universellement reconnue, est consignée dans le procès verbal de la discussion du Code civil, séance du 6 thermidor an 9; -3° Lorsqu'il s'agit d'un acte de commerce fait dans un lieu quelconque de la France: Boullenois remarque, dans son traité des Statuts réels et personnels, tom. 1, p. 608, que « les étrangers commerçans ont parmi nous, comme les négocians nationaux, le choix accordé par l'art. 17, tit. 2, de l'ordonnance de 1673, d'assigner leurs débiteurs, ou au lieu du domicile de ceux-ci, ou au lieu dans lequel la promesse a été faite et la marchandise fournie, ou au lieu convenu pour le paiement »; — 4° Lorsque le contrat, quelle que soit sa nature, a été fait en France ou dans l'étranger avec un Français (art. 14 du Code civ.);

5. Lorsqu'il y a élection de domicile en France (art. 111 du même Code).

On pourrait ajouter qu'il suffit qu'un engagement ait été contracté en France, pour que les contractans étrangers soient, quant à son exécution, justiciables des tribunaux

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