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mandé qu'il fût sursis à statuer sur l'action en rapport jusqu'à ce que la Cour de Paris eut vidé l'appel du jugement de débouté d'opposition; qu'il a, en outre, très subsidiairement, soutenu au fond que ni les liquidés ni leur liquidateur n'étaient recevables à attaquer, en vertu des art. 446 et 447, C. comm., des paiements faits sans fraude ou des compensations existant de plein droit ou des arrêtés de compte résultant de décisions judiciaires rendues dans l'intervalle qui a séparé le jour où la liquidation a été ultérieurement reportée et le jour du dépôt du bilan »; - Attendu que la Cour d'appel d'Aix a repoussé le sursis comme non justifié en l'état de la cause, déclaré que la contestation nécessitait une expertise, et confirmé la nomination que le tribunal avait faite d'un arbitre-rapporteur, avec mission d'éclairer la justice sur les faits articulés à retenir, sur leur date, sur leur caractère, et sur leurs conséquences au regard de la liquidation judiciaire »; Attendu qu'au moment où l'arrêt attaqué a statué sur les mesures d'instruction réclamées, la Cour de Paris ne s'était pas encore prononcée sur le mérite de l'opposition au jugement du 12 déc. 1902; qu'il en résulte que, ce jugement étant comme inexistant à raison de l'opposition, le compte qu'il avait arrêté et les condamnations qu'il avait prononcées n'étaient pas protégés par l'auto rité de la chose jugée; qu'ainsi, la Cour d'appel d'Aix, saisie d'une contestation au sujet d'une créance figurant dans ce compte, a pu, sans violer l'art. 1351, C. civ., ordonner des mesures d'instruction propres à l'éclairer sur l'application éventuelle de l'art. 446, C. comm., à des paiements opérés par compensation dans la période suspecte; qu'en statuant ainsi, ladite Cour n'a violé aucun principe de droit ni aucun des textes de loi visés par le pourvoi; qu'il n'y a pas lieu, dès lors, d'examiner la valeur des motifs émis par l'arrêt en vue de l'hypothèse où le jugement de défaut serait ultérieurement maintenu; Rejette, etc.

Du 1er févr. 1911. — Ch. civ. - MM. Ballot-Beaupré, ler prés.; Ruben de Couder, rapp.; Mérillon, av. gén. (concl. conf.); Defert et Hannotin, av.

CASS.-CIV. 23 décembre 1912. GARANTIE, ACTION RÉCURSOIRE, Compétence, CONNEXITÉ, CHARGE D'AGRÉÉ, CESSIONS SUCCESSIVES, SAISIE-ARRÊT, DEMANDE EN VALIDITÉ, PAIEMENT DU PRIX, PRÈT, EFFETS DE COMMERCE, RECOURS CONTRE LE PRÊTEUR (Rép., v Garantie, n. 61 et s.; Pand. Rép., eod. verb., n. 49 et s., 90 et s., 146 et s.).

Si, aux termes de l'art. 181, C. proc., celui qui est assigné en garantie est tenu de procéder devant le tribunal où la demande originaire est pendante, il n'en est ainsi qu'autant que l'action récursoire se rattache à l'action principale par un lien

(1-2-3) Le principe est certain. V. Cass. 1er août 1892 (S. et P. 1892.1.584; Pand. pér., 1893.1.

de dépendance et de subordination (1) (C. proc., 59, 181).

Spécialement, il n'y a aucune connexité entre la demande en validité d'une saisiearrêt pratiquée par le cédant d'une charge d'agréé sur le prix dù au cessionnaire par celui auquel il a retrocédé cette charge, et l'action portée devant le même tribunal par ce dernier contre le prêteur auquel son cédant a remis, en représentation de la somme empruntée, des billets par lui souscrits en paiement de son prix, en garantie des condamnations qui pourraient être prononcées contre lui en qualité de tiers saisi, et en dommages-intérêts, à raison de la mise en circulation des billets, au mépris des conventions intervenues (2) (Id.).

En effet, l'action principale a sa base dans la dette du second cessionnaire au regard de son cédant, tandis que l'action récursoire du second cessionnaire a pour cause la faute que le bénéficiaire des billets aurait commise en les mettant en circulation (3) (Id.).

(Desprez et Dufumiez C. Hoguet). - ARRÈT.

LA COUR; Sur la fin de non-recevoir:... (sans intérêt); — Rejette, etc. Au fond - Vu l'art. 181, C. proc.; Attendu qu'aux termes de cet article, ceux qui sont assignés en garantie seront tenus de procéder devant le tribunal où la demande originaire est pendante »; mais qu'il n'en est ainsi qu'autant que l'action récursoire se rattache à l'action principale par un lien de dépendance et de subordination; Attendu que, des qualités et des constatations de l'arrêt attaqué, il résulte que Blaquart a, par acte notarié du 9 janv. 1902, cédé à Hoguet la charge d'agréé au tribunal de commerce d'Amiens, dont il était lui-même devenu cessionnaire, le 13 juillet précédent, de la succession Détape; que, le 30 septembre suivant, il a emprunté à Desprez une somme de 25.000 fr., et qu'il lui a remis, en représentation de cette somme, deux billets souscrits à son profit par Hoguet; que, Blaquart étant resté débiteur, envers la succession Détape, de 5.419 fr. 10 sur son prix de cession du 13 juill. 1902, les époux Planque-Détape ont, par exploit du 2 avril 1903, fait pratiquer une saisie-arrêt entre les mains d'Hoguet, jusqu'à concurrence de cette somme; que, Desprez ayant fait signifier aux saisissants l'acte de prêt du 30 sept. 1902, les époux Planque l'ont assigné, ainsi que Hoguet, devant le tribunal civil d'Amiens, en validité de la saisie-arrêt; — Attendu qu'Hoguet, qui avait été condamné, par jugement du tribunal de commerce de Boulogne-sur Mer, en date du 7 mars 1905, à payer à Noël, endosseur d'un des billets, le montant de ce billet, a, par conclusions du 3 févr. 1905, formé contre Desprez une action en garantie des condamnations qui pourraient être prononcées contre lui au profit des époux Planque, en qualité de tiers saisi, et en paiement de 1.000 fr. de dommages-intérêts, à raison de la mise

254), et les renvois. V. égal., comme application, Cass. 2 déc. 1912 (Supra, 1re part., p. 254), et

At

en circulation du billet, au mépris des con ventions passées entre les parties; tendu que Dufumiez, se présentant comme le bénéficiaire du billet passé par Hoguet au profit de Desprez, est intervenu à l'instance par conclusions du 7 févr. 1906, et que, le 7 mars suivant, dans ses conclusions de ce jour, Hoguet a formé contre ledit Dufumiez la même demande en garantie et en paiement de dommages intérêts que celle qu'il avait précédemment formée contre Desprez; qu'en cet état des faits, c'est à tort que la Cour d'Amiens, après avoir validé la saisie-arrêt des époux Planque-Détape, et condamné Hoguet, en tant que tiers saisi, à consigner la somme de 5.419 fr. 50, a, par infirmation de la décision des premiers juges, déclaré recevables les demandes en garantie formées par Hoguet contre Desprez et Dufumiez, et les a condamnés, tous deux, à rembourser à Hoguet toutes les sommes dont il pourrait être tenu envers les consorts Planque, et Dufumiez à lui payer 100 fr. à titre de dommages-intérêts; qu'il n'existe, en effet, aucune connexité entre l'action des époux Planque-Détape contre Hoguet, laquelle a sa base dans la dette de Hoguet envers Blaquart, et l'action intentée par Hoguet contre Desprez et Dufumiez, qui a pour cause la faute que Dufumiez a pu commettre, en mettant en circulation le billet souscrit par Hoguet; que, dès lors, en statuant comme elle l'a fait, la Cour d'Amiens a violé l'article ci-dessus visé;

Casse l'arrêt rendu par la Cour d'Amiens, le 28 déc. 1905, mais seulement sur les chefs déclarant recevables et bien fondées les demandes en garantie formées par Hoguet contre Desprez et Dufumiez, et condamnant, en conséquence, Desprez et Dufumiez, solidairement, à garantir et indemniser Hoguet de toutes les condamnations dont celui-ci pourrait être tenu envers les consorts Planque, et condamnant, en outre, Dufumiez en 100 fr. de dommages-intérêts envers Hoguet, etc. Du 23 déc. 1912. — Ch. civ. MM. Baudouin, 1er prés.; Cottignies, rapp.; Mérillon, av. gén. (concl. conf.); Defert et Raynal, av.

CASS.-REQ. 10 mars 1913. FRANÇAIS, PERTE DE LA QUALITÉ DE FRANÇAIS, ANNEXION, ALSACE-LORRAINE, TRAITÉ DE FRANCFORT, FRANÇAIS NON ORIGINAIRE, ETABLISSEMENT A L'ÉTRANGER, ESPRIT DE RETOUR, SERVICE MILITAIRE A L'ÉTRANGER, MINORITÉ, MAJORITÉ, PÉRIODE D'INSTRUCTION (Rép., v° Nationalité-Naturalisation, n. 1224 et s., 1294 et s.; Pand. Rép., v Droits civils, n. 783 et s.).

L'individu né en Alsace-Lorraine, après l'annexion, d'un père originaire d'un departement resté français, qui, plusieurs années avant la guerre franco-allemande, s'était fixé dans les territoires ultérieurement annexes, et avait continué d'y demeurer après l'annexion, est Français, comme né

les renvois.

d'un Français à l'étranger (1) (C. civ., 10, ancien; Tr., 10 mai 1871, art. 2).

Et il ne saurait invoquer l'ancien art. 17, $3, pour soutenir que son père est devenu Allemand par son établissement en pays étranger sans esprit de retour; on ne saurail, en effet, assimiler à la situation du Français qui transporte son domicile à l'étranger celle du Français, originaire d'un département resté français, qui avait fixé son domicile, avant l'annexion, dans les pays annexes (2) (C. civ., 17, § 3, ancien).

Il en est ainsi surtout, alors que les juges du fond constatent que rien n'établit que le père eût, à l'époque de la naissance de son fils, perdu tout esprit de retour en France (3) (Id.).

Ne saurait être considéré comme ayant perdu la nationalité française, pour avoir pris du service militaire à l'étranger sans autorisation du gouvernement, le Français qui, incorporé dans une armée étrangère, au cours de sa minorité, a, une fois devenu majeur, accompli dans cette armée une période d'instruction, s'il est constaté par les juges du fond que cet acte n'a pas constitué de sa part la manifestation d'une volonté libre et réfléchie (4) (C. civ., 17, § 4). (Lacour C. Préfet de Meurthe-et-Moselle).

Le tribunal civil de Nancy a rendu, le 3 juill. 1911, le jugement suivant: " Le Tribunal; Attendu que Lacour est né à Mulhouse, le 25 févr. 1883, d'un père né

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(1) L'art. 2 du traité de paix entre la France et l'Allemagne, du 10 mai 1871, n'ayant imposé la déclaration d'option qu'aux sujets français originaires des territoires cédés, domiciliés actuellement sur ces territoires », a toujours été interprété en France, par la jurisprudence et par la doctrine, en ce sens, conforme à sa lettre, que les individus domiciliés dans les territoires cédés, et non originaires de ces territoires, ont conservé leur qualité de Français, sans avoir à faire aucune déclaration à ce sujet. V. Paris, 24 juill. 1874 (S. 1875.2.225. P. 1875.940). C'est la thèse qui a été défendue dans ce Recueil par MM. Cauwès et Louis Renault. V. la note n. II de M. Cauwès, avec les renvois, sous Paris, 24 juill. 1874, précité, et la note 4-5 de M. Renault sous Cass. 6 mars 1877 (S. 1879.1.305. P. 1879.763). Adde, Aubry et Rau, 5o éd., t. 1, p. 463, § 75 bis, texte et note 35; Weiss, Tr. de dr. intern. privé, 2e éd., t. 1, p. 633 et s.; Cogordan, Nationalité, 2o éd., p. 361 et s.; et notre Rép. gén. du dr. fr., v° Nationalité-Naturalisation, n. 1364 ; Pand. Rép., v° Naturalisation, n. 242 et s. Mais l'Allemagne a donné de cette disposition du traité une interprétation absolument divergente; elle considère comme devenus Allemands, à défaut d'option pour la nationalité française, suivie d'émigration, non seu. lement tous les sujets français originaires des pays annexés, mais aussi tous ceux qui y étaient domiciliés, sans distinction entre ceux qui en étaient originaires ou non. V. sur ce conflit d'interprétation, les notes de M. Cauwès et de M. Renault, précitées; Aubry et Rau, Weiss et Cogordan, uli supra. De cette divergence d'interprétation est née, pour cette catégorie d'individus, une double nationalité considérés comme Allemands en Allemagne, ils sont tenus pour Français en France (V. Weiss, op. et loc. cit.); et cette situation se perpétue pour leurs enfants nés en Alsace-Lorraine depuis l'annexion; ceux-ci, tenus pour Alle

à Giromagny, mais domicilié en AlsaceLorraine au moment de l'annexion; Attendu que Lacour fut inscrit sur les tableaux de recrutement, puis incorporé dans un régiment allemand, et enfin réformé pour faiblesse de vue; que, par la suite, au cours d'un séjour en France, il fut appelé au service militaire, et incorporé successivement au 69° d'infanterie et au 20 bataillon de chasseurs; - Attendu que Lacour, dont la bonne foi est d'ailleurs évidente, s'adresse au tribunal pour faire fixer sa nationalité; - Attendu que le père de Lacour, domicilié dans les pays annexés au moment du traité de Francfort, n'en était pas originaire; que les autorités allemandes considèrent comme Allemands les domiciliés non originaires qui n'ont pas rempli les formalités d'option et de transfert de domicile pour conserver la nationalité française; Mais attendu que le gouvernement et les tribunaux français se sont toujours refusés à admettre cette interprétation du traité de paix, et ont toujours considéré comme Français, en dehors de toute option, les domiciliés non originaires des pays annexés; - Attendu qu'au regard de la loi française, Lacour père est incontestablement resté Français, et a transmis à son fils la nationalité française;

Attendu que Lacour dit avoir perdu cette nationalité par application de l'art. 17, $4, C. civ., comme ayant pris du service dans une armée étrangère; Mais at

mands par l'autorité allemande, sont, aux yeux de l'autorité française, Français, en vertu de l'ancien art. 10, § 1er, C. civ., et de l'art. 8-1°, C. civ., depuis la loi du 26 juin 1889, comme étant nés d'un Français à l'étranger. Tel était le cas dans l'espèce; le demandeur, après avoir satisfait à la loi militaire en Allemagne, avait été ensuite, en qualité de Français, incorporé dans l'armée française, à son arrivée en France.

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(2-3) L'art. 17, § 3, C. civ., qui faisait résulter la perte de la qualité de Français de tout établissement fait en pays étranger sans esprit de retour, a été abrogé par la loi du 26 juin 1889; mais, pendant longtemps encore, la nationalité des Français, qui, antérieurement à la promulgation de la loi nouvelle, s'étaient établis sur un territoire étranger, pourra faire l'objet de contestations et de difficultés reposant sur l'interprétation du texte abrogé (V. Weiss, Tr. de dr. intern. privé, 2o éd., t. 1o, p. 568; et notre Rép. gén, du dr. fr., v Nationalité-Naturalisation, n. 1280), car la loi de 1889, n'ayant pas d'effet rétroactif (V. Cass. 12 juill. 1893, S. et P. 1895.1.357; 12 avril 1902, S. et P. 1902.1.360; Alger, 23 mars 1900, S. et P. 1903.2.297, les notes et renvois), n'a pu avoir pour effet de modifier une nationalité fixée antérieurement à sa promulgation. V. Alger, 23 mars 1900, précité, et la note. C'est là un principe dont il a été fait déjà application à l'hypothèse visée par l'ancien art. 17, § 3. V. Rennes, 7 avril 1891 (Journ, du dr. intern. privé, 1892, p. 720); Trib. de la Seine, 13 janv. 1898 (Id., 1898, p. 549); Chambéry, 9 févr. 1898 (Id., 1901, p. 793); Weiss, op. cit., t. 1, p. 568, note 1; Baudry-Lacantinerie et Houques-Fourcade, Des pers., 3° éd., t. ler, n. 546; et notre Rép. gén. du dr. fr., verb. cit., n. 1290; Pand. Rep., v° Droits civils, n. 694.

L'application de cette disposition exigeait le concours de deux conditions d'une part, l'établissement à l'étranger, et, d'autre part, l'inten

tendu que la prise de service doit être volontaire; qu'aux termes de la jurisprudence, la perte de la qualité de Français ne résulte que d'une incorporation volontaire, et non d'un enrôlement imposé et subi; qu'elle ne s'applique pas à l'individu qui, pendant sa minorité, a été porté, soit d'office, soit sur la demande de son père, sur les contrôles d'une armée étrangère, encore bien que, devenu majeur, il ait accompli une période d'instruction; qu'il est impossible, dit la Cour de cassation, de voir dans son acte la manifestation d'une volonté libre et réfléchie; Attendu que tel est incontestablement le cas de Lacour, qui doit être maintenu dans la nationalité française ;

Attendu que Lacour a fait, d'autre part, soutenir devant le tribunal une théorie nouvelle et ingénieuse, dont l'admission le ferait considérer, non comme Français d'origine, mais comme réintégré, ce qui, au point de vue militaire, lui assurerait certains avantages; qu'il reconnaît que son père est demeuré Français après l'annexion, mais prétend qu'il a ensuite perdu cette qualité comme s'étant établi ́à l'étranger sans esprit de retour, et ce, par application de l'art. 17, § 3, C. civ., article abrogé en 1889, mais encore en vigueur au moment de la naissance de Lacour; Attendu qu'il ajoute que, par son service militaire accompli en France, il a obtenu sa réintégration dans sa qualité de Frantion de rendre cet établissement définitif (V. Weiss, op. cit., t. 1er, p. 569; Baudry-Lacantinerie et Houques-Fourcade, op. cit., t. 1er, n. 547); et l'appréciation de cette intention, qui ne saurait se présumer (V. Bordeaux, 27 août 1877, S. 1879. 2.105. P. 1879.464; Cass. Florence, 25 avril 1881, S. 1884.4.21. - P. 1884.2.34, et les renvois; adde, notre Rép. gén. du dr. fr., verb. cit., n. 1283; Pand. Rep., verb. cit., n. 684), rentre dans l'appréciation des juges du fond. V. Cass. 15 nov. 1836 (S. 1836.1.937. P. chr.); adde, les renvois de la note sous Bordeaux, 27 août 1877, précité; et Weiss, op. et loc. cit.

-

Dans l'espèce, deux raisons s'opposaient à ce qu'il fût fait application de l'ancien art. 17, § 3. D'une part, on ne peut, comme le fait justement observer l'arrêt ci-dessus, assimiler à la situation d'un Français qui va s'établir à l'étranger sans esprit de retour, celle du Français qui est allé fonder un établissement en France dans une région qui, après son établissement, cesse d'être française par suite d'une annexion; il n'y a pas, en ce cas, l'établissement à l'étranger, visé par l'ancien art. 17, § 3.

D'autre part, il était constaté par les juges du fond qu'il n'était pas démontré que le père du demandeur eût abdiqué tout esprit de retour, soit en s'établissant en Alsace avant l'annexion, soit même au moment où, après l'annexion, lui était né le fils dont la nationalité était en jeu.

(4) Solution rentrant dans la jurisprudence, d'après laquelle la continuation du service militaire dans une armée étrangère, après la majorité, entraîne la perte de la qualité de Français (C. civ., 17, § 4), lorsqu'elle est l'effet d'une volonté libre et réfléchie (V. Cass. 15 janv. 1912, S. et P. 1912. 1.317; Pand. pér., 1912.1.317, et la note), mais n'emporte pas cette déchéance dans le cas contraire. V. Cass. 1 juin 1904 (S. et P. 1905.1.817; Pand. pér., 1905.4.37).

çais; Mais attendu que les tribunaux, sous l'empire de la loi ancienne, s'étaient toujours montrés très sévères dans l'application de l'art. 17, 3, C. civ.; qu'ils exigeaient à bon droit des faits et circonstances établissant nettement une volonté ferme et indiscutable de renoncer à sa

nationalité d'origine; Attendu que ces

faits et circonstances ne se rencontrent pas dans l'espèce; qu'on ne peut prétendre, en effet, que les habitants de l'AlsaceLorraine, annexés malgré eux après la guerre de 1870, ont sanctionné le traité de Francfort, en abandonnant sans esprit de retour la nationalité française; Attendu qu'une théorie aussi contraire au droit qu'à l'histoire ne saurait être sanctionnée par le tribunal; - Par ces motifs; - Déclare Lacour en possession de la nationalité française; Dit qu'il n'a pas perdu cette nationalité en prenant du service dans l'armée allemande, etc. ».

Sur appel de M. Lacour, la Cour de Nancy a rendu, le 27 déc. 1911, l'arrêt confirmatif suivant : « La Cour; Sur le moyen tiré de ce que Lacour aurait perdu la qualité de Français par application de l'art. 17, 4, C. civ., comme ayant pris du service dans une armée étrangère : Adoptant les motifs des premiers juges;

-

Sur le moyen tiré de ce que Lacour serait fils d'étranger, son père ayant perdu la qualité de Français pour s'ètre établi en pays étranger sans esprit de retour (C. civ., art. 17, 3, ancien): - Attendu qu'on ne saurait considérer comme s'étant établi en pays étranger un Français venu en Alsace avant la guerre de 1870, et qui a continué à Y résider après l'annexion; que le fait de s'établir à l'étranger, visé par la loi, concerne exclusivement le Français qui, fixé en France, transporte son domicile à l'étranger par l'effet d'un choix libre et réfléchi; que tel n'est pas le cas d'un habitant des pays annexés, qui, s'étant établi sur le sol français, a continué, après la guerre, à demeurer dans la ville même où il était précédemment domicilié; que la perte de la qualité de Français constitue une déchéance, et que les dispositions de loi qui l'édictent doivent être strictement interprétées dans leurs termes; Attendu, en fait, que le père de l'appelant, venu à Mulhouse plusieurs années avant la guerre, est resté dans cette ville après l'annexion; qu'ainsi, il ne s'est pas volontairement établi à l'étranger, et n'a fait qu'y conserver un établissement préexistant; qu'il n'a donc pas perdu la qualité de Français; Par ces motifs, et ceux non contraires des premiers juges; Confirme, etc. ».

POURVOf en cassation par M. Lacour. 1er Moyen. Violation de l'art. 17, § 3, C. civ., tel qu'il était rédigé avant la loi du 26 juin 1889, et de l'art. 7 de la loi du

(12) Le principe est généralement admis. V. Cass. 12 nov. 1890 (S. 1891.1.55. P. 1891.1. 124; Pand. pér., 1891.1.214), et les renvois; Poitiers, 6 mai 1891 (S. et P. 1892.2.111). Adde, notre Rép. gén. du dr. fr., v° Cautionnement, n. 680 et s.; Pand. Rep., ° Caution-Cautionnement, n. 915 et s. La caution du redevable n'aurait pu, dans

20 avril 1810, en ce que l'arrêt attaqué a décidé à tort qu'un individu, fixé en AlsaceLorraine avant la guerre de 1870, et resté dans ce pays après l'annexion, n'avait pas perdu la nationalité française comme établi à l'étranger sans esprit de retour, sous le prétexte que cet individu n'aurait pas volontairement transporté son domicile à l'étranger, mais y aurait seulement conservé un établissement préexistant, alors que la perte de l'esprit de retour devait suffire, dans ces conditions, sous l'empire de l'art. 17, § 3, ancien, à entraîner la perte de la qualité de Français.

2e Moyen. Violation de l'art. 17, § 4, C. civ., de l'art. 7 de la loi du 20 avril 1810, en ce que, après avoir décidé, par interprétation de l'art. 2 du traité du 10 mai 1871, que les Français non originaires, mais domiciliés dans les pays annexés au moment du traité de Francfort, ont conservé la qualité de Français, qu'ils ont, en conséquence, transmis cette nationalité aux enfants issus d'eux, l'arrêt attaqué s'est refusé à admettre que l'exposant ait pu perdre cette qualité, à raison de ce que, étant majeur, il avait accepté (sans protestation, et sans essayer de s'y soustraire) du service dans l'armée allemande, sous le prétexte que la perte de la qualité de Français ne résulte que d'une incorporation volontaire, qu'elle ne s'applique pas au mineur qui, pendant sa minorité, est porté sur les contrôles d'une armée étrangère, et cela, encore bien que, devenu majeur, il ait accompli une période d'instruction, alors qu'il est de principe que le Français, qui accomplit son service militaire dans une armée étrangère, perd la qualité de Français, s'il n'y a pas été contraint, alors que l'arrêt ne conteste pas que l'exposant ait spontanément consenti à son incorporation, et alors que, d'après la doctrine et la jurisprudence, même dans le cas où il aurait été engagé en minorité, le sujet français perd cette qualité, s'il continue, une fois majeur, à faire son service sans l'autorisation du gouvernement.

ARRÊT.

LA COUR; Sur le premier moyen : Attendu qu'Arthur Lacour, étant né à Mulhouse, le 25 févr. 1883, d'un père originaire de Giromagny, qui, plusieurs années avant la guerre franco-allemande, s'était fixé dans les territoires annexés, et continuait d'y demeurer à cette date, est Français, comme né d'un Français à l'étranger; Attendu que vainement il soutient qu'à ce moment, son père avait perdu la qualité de Français par son établissement fait en pays étranger sans esprit de retour, en vertu des dispositions de l'ancien art. 17, $ 3, C. civ.; qu'en effet, l'arrêt attaqué déclare, à bon droit, qu'on ne saurait assimiler le cas de Lacour père à celui du Français qui, sous l'empire de

l'espèce, échapper à l'application du principe que s'il avait été admis, comme le soutenait le pourvoi, que la dette cautionnée constituait une dette distincte dans le compte du redevable, car, dans l'hypothèse où il existe deux dettes, dont l'une seulement est cautionnée, c'est sur celle-ci

cette législation, transportait spontanément son domicile à l'étranger, et constate que rien n'établit d'ailleurs que le sieur Lacour père eût, à l'époque de la naissance de son fils, perdu tout esprit de retour en France; Attendu qu'il suit de là qu'en repoussant ce moyen, l'arrêt, qui est motivé, n'a nullement violé les articles de loi susvisés;

Sur le deuxième moyen : Attendu qu'il résulte des constatations des juges du fond que, si Lacour, alors mineur, ayant été incorporé dans l'armée allemande, a, une fois devenu majeur, accompli dans cette armée une période d'instruction, cet acte n'a pas constitué de sa part la manifestation d'une volonté libre et réfléchie; que, dès lors, il ne saurait être considéré comme ayant perdu la nationalité française pour avoir pris du service militaire à l'étranger sans autorisation du gouverment; Attendu que cette appréciation d'intention échappe au contrôle de la Cour de cassation, et justifie légalement le refus d'application par la Cour d'appel de Nancy de l'art. 17, § 4, C. civ.; Rejette, etc. Du 10 mars 1913. Ch. req. MM. Tanon, prés.; Michel-Jaffard, rapp.; Blondel, av. gen. (concl. conf.); de Lapanouse, av.

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CASS.-CIV. 31 octobre 1910. CAUTION-CAUTIONNEMENT, PAIEMENT PARTIEL, IMPUTATION, ALGÉRIE, CONTRIBUTIONS DIVERSES, REDEVABLE, LIQUIDATION JUDICIAIRE, COMPTE UNIQUE (Rép., v° Cau- ́ tionnement, n. 680 et s.; Pand. Rép., vo Caution-Cautionnement, n. 915 et s.).

Dans le cas où une dette n'est cautionnée

que pour partie, les paiements faits par le débiteur principal doivent s'imputer d'abord sur la partie non cautionnée de la dette (1) (C. civ., 1256, 2011).

En conséquence, celui qui s'est porté caution à concurrence d'une somme déterminée du crédit des droits consenti par l'Administration des contributions diverses, en Algérie, à un redevable, est tenu, dans cette limite, au paiement de ce que cette Administration n'a pu toucher dans la liquidation judiciaire du redevable, alors que ce solde est le reliquat de la dette unique résultant du crédit accordé (2) (C. civ., 1256, 2011; LL. 21 avril 1832, art. 38; 2 août 1872, art. 6).

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de la dette, les paiements faits par le débiteur doivent s'imputer d'abord sur la partie non cautionnée de la dette; Attendu, en fait, qu'il résulte du jugement attaqué et des documents qui y sont visés qu'à la date du 5 janv. 1897, Ben Dahan, Gabay et Amor se sont présentés à l'Administration des contributions diverses d'Algérie comme cautions solidaires de Carmona, distillateur liquoriste, et se sont engagés avec celui-ci au paiement des droits de toute nature, tant sur les alcools qui seraient actuellement en sa possession que sur ceux qu'il introduirait jusqu'au 1er janv. 1898; qu'il fut indiqué que le cautionnement était donné pour la somme de 12.000 fr.; qu'à la date du 1er mars suivant, il fut convenu que le cautionnement de 12.000 fr. garantissait tout aussi bien les droits de fabrication de l'année courante que ceux d'un stock inventorié le 1er janv. 1897, et qui étaient évalués à 9.697 fr.; que, Camona ayant été déclaré en état de liquidation judiciaire dans le courant de cette même année, la créance de l'Administration fut fixée à la somme de 57.216 fr. 93; qu'après avoir touché du liquidateur une somme de 49.406 fr. 76, elle a réclamé des cautions le solde, s'élevant à 7.850 fr. 76;

Attendu que le crédit accordé par l'Administration des contributions diverses à un redevable a pour effet de faire ouvrir à celui-ci un compte, dont le solde constitue une dette unique à la charge du débiteur; que, par suite de l'incorporation dans le compte de Carmona de la somme de 9.697 fr., due au 1er janv. 1897, incorporation acceptée par les cautions, cette somme constituait, non une dette distincte, mais un des éléments du compte cautionné pour une somme de 12.000 fr.; Attendu, cependant, que, tout en reconnaissant que le cautionnement de 12.000 fr. garantissait l'intégralité des crédits que l'Administration pourrait consentir à Carmona », le jugement attaqué a rejeté la demande de l'Administration, par le motif que celle-ci avait déjà touché du liquidateur une somme supérieure à 12.000 fr., et que les défendeurs à la cassation n'ont pas pu accepter le

(1) V. conf., Cass. 16 nov. 1885 (S. 1888.1.259. P. 1888.1.624), et le renvoi. Adde, Crépon, Pourvoi en cass., t. 2, n. 494 et s.; notre C. proc. annoté, par Tissier, Darras et Louiche-Desfontaines, sur l'art. 69, n. 222; et notre Rép. gen. du dr. fr., vo Cassation (mat. civ.), n. 1624 et s.; land. Rép., vo Arrêt d'admission, n. 120. Il a été jugé également qu'au cas où le domicile et la résidence de l'intimé sont inconnus, c'est au parquet du procureur général près la Cour qui doit connaître de l'appel que doit être remise la copie de l'acte d'appel. V. Toulouse, 4 août 1881 (motifs) (S. 1882.2.242. P. 1882.1.1216), et les renvois. Adde, notre C. proc. annoté, sur l'art. 69, n. 220 et s.

(2-3) Il est certain que, pour que l'incapacité prévue par l'art. 909, C. civ., à l'encontre des ministres du culte, puisse être encourue, il faut que le ministre du culte légataire ait donné des secours spirituels au testateur pendant la maladie dont il est mort. V. Cass. 13 avril 1880 (S. 1880.1.361. P. 1880.872), le rapport de M. le conseiller

risque de garantir, à concurrence de 12.000 fr., pour les crédits illimités de l'impôt que l'Administration pourrait consentir à Carmona »; qu'en statuant ainsi, sans relever dans les termes du cautionnement aucune stipulation particulière, ni indiquer aucune circonstance de nature à établir l'intention des parties de limiter le cautionnement aux premiers 12.000 fr. qui seraient dus par Carmona, le jugement attaqué a violé l'article de loi susvisé; Casse, etc.

Du 31 oct. 1910. Ch. civ. MM. Ballot-Beaupré, 1er prés.; Faye, rapp.; Mérillon, av. gén. (concl. conf.); Regray et de Ramel, av.

CASS.-CIV. 16 avril 1913.

CASSATION, ARRÊT D'ADMISSION, SIGNIFICATION, EXPLOIT, DOMICILE INCONNU, AFFICHAGE, REMISE DE LA COPIE (Rép., vo Cassation [mat. civ.], n. 1624 et s.; Pand. Rép., v Arrêt d'admission; n. 120).

La signification de l'arrêt d'admission d'un pourvoi en cassation à un défendeur qui n'a ni domicile ni résidence connus en France doit, à peine de nullité, être faite par exploit affiché à la principale porte de l'auditoire de la Cour de cassation, et par copie délivrée au procureur général près cette Cour (1) (C. proc., 69, § 8, 70).

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Alméras-Latour, la note et les renvois. Adde, Planiol, Tr. élém. de dr. civ., 5o éd., t. 3, n. 2967; Baudry-Lacantinerie et Colin, Don. et test., 3o éd., t. 1er, n. 483, 490 et 493. V. aussi, Cass. 18 oct. 1887 (S. 1888,1,377. P. 1888.1.921; Pand. pér., 1887.1.349), et la note. De même, l'incapacité prévue par le même article à l'encontre du médecin n'est encourue que si le médecin a donné des soins au testateur pendant la maladie dont il est mort. V. Cass. 14 avril 1908 (S. et P. 1908.1.456; Pand. pér., 1908.1.456), et la note. C'est d'ailleurs aux juges du fait qu'il appartient d'apprécier souverainement si les soins ont été donnés par le médecin, - et les secours spirituels par le ministre du culte, pendant la maladie dont est mort le testateur. V. Cass. 14 avril 1908, précité, et les renvois. Adde, le rapport de M. le conseiller Alméras-Latour sous Cass. 13 avril 1880, précité; Baudry-Lacantinerie et Colin, op. cit., t. 1er, n. 495 et s.; et notre C. civ. annoté, par Fuzier-Herman et Darras, sur l'art. 909, n. 33 et s. Dans l'espèce, le testateur était atteint d'une

l'art. 70 du même Code, être régulièrement faite audit Ciron que par exploit affiché à la principale porte de l'auditoire de la Cour de cassation, et qu'une copie devait être donnée au procureur général près cette Cour, ce qui n'a pas eu lieu; d'où il suit que la notification, nulle en la forme, doit être réputée non avenue; Déclare le pourvoi non recevable, etc.

Du 16 avril 1913. Ch. civ. - MM. Baudouin, 1er prés.; Lénard, rapp.; Lombard, av. gén. (concl. conf.).

CASS.-REQ. 21 avril 1913. LEGS-LÉGATAIRE (EN GÉNÉRAL), MINISTRE DU CULTE, INCAPACITÉ DE RECEVOIR, SECOURS SPIRITUELS, DERNIÈRE MALADIE, JUGEMENT INTERLOCUTOIRE, ENQUÊTE, CHOSE JUGÉE (Rép., v° Donations entre vifs, n. 1239 et s.; Pand. Rép., vo Donations et testaments, n. 1622 et s.).

L'incapacité de recevoir, résultant pour les ministres du culte de l'art. 909, C. civ., ne s'applique qu'à ceux qui ont administré au testateur des secours spirituels dans les conditions déterminées par le § 1er de cet article, c'est-à-dire pendant la maladie dont il est mort (2) (C. civ., 909).

Spécialement, le legs fait par une testatrice, deux ans avant sa mort, au cours d'une maladie (une bronchite chronique), dont elle était atteinte depuis dix ans au moins, au profit d'un ministre du culte qui était son directeur de conscience depuis longtemps, ne saurait être annulé, si les juges constatent qu'il ne résulte d'aucun document ni d'aucun témoignage que la testatrice ait succombé à la maladie au cours de laquelle les secours spirituels lui avaient été donnés par le légataire (3) (Id.).

Et les juges du fond ont pu, sans violer la chose jugée, le décider ainsi, après l'enquele qu'ils avaient ordonnée, encore bien que, par la décision ordonnant celle enquête, ils eussent autorisé le demandeur en nullité à prouver que, trois ans avant son décès, la de cujus était atteinte de bronchite chronique, et qu'elle était morte de cette maladie (4) (C. civ., 1351).

maladie chronique, et c'est une question délicate et discutée que celle de savoir si l'art. 909 doit recevoir application dans cette hypothèse. V. Cass. 12 janv. 1833 (S. 1833.1.339. P. chr.); Paris, 8 mars 1867 (S. 1867.2.169. P. 1867. 680), et la note (§ 2) de M. Labbé. Adde, la note et les renvois sous Toulouse, 12 janv. 1861 (S. 1864.2.114. P. 1864.724), et les renvois; Baudry-Lacantinerie et Colin, op. cit., t. 1er, n. 495; notre C. civ. annoté, par Fuzier-Herman et Darras, sur l'art. 909, n. 34 et s.; et notre Rép. gen. du dr. fr., v Legs, n. 338 et 357; Pand. Rép.,

Donations et testaments, n. 1659 et s. V. aussi Grenoble, 16 janv. 1834, sous Cass. 9 avril 1835 (S. 1835.1.450. P. chr.); Cass. 29 juill. 1891 (S. et P. 1892.1.518). Mais encore faut-il, pour que la question se pose, que la maladie chronique ait déterminé la mort, ce qui n'était pas le cas dans l'espèce, d'après les constatations des juges du fond. (4) Application du principe que l'interlocutoire ne lie pas le juge, lequel, après avoir admis la preuve des faits déclarés pertinents, reste libre

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LA COUR; Sur le moyen pris de la violation des art. 909, 1350, 1351, C. civ., 7 de la loi du 20 avril 1810 (en ce que l'arrêt attaqué, dont les motifs sont con-tradictoires, a refusé d'annuler une disposition testamentaire, par application de l'art. 909, C. civ., alors qu'il était constant et qu'il résulte de l'arrêt que, lorsqu'elle disposait en faveur d'un ministre du culte lui ayant donné ses soins spirituels, la testatrice se trouvait atteinte de la maladie à laquelle elle a succombé, alors d'ailleurs que la Cour avait jugé, par un arrêt définitif, que, si la réalité de la maladie, à l'époque de la rédaction du testament, et son rapport avec le décès de la testatrice étaient établis, la nullité de la disposition litigieuse devait être prononcée, et que, par l'arrêt attaqué, elle a, en violation de la chose jugée, subordonné l'annulation à une condition complémentaire) : Attendu que l'incapacité de recevoir, résultant, pour les ministres du culte, de l'art. 909, C. civ., ne s'applique qu'à ceux qui ont administré au testateur les secours spirituels, dans les conditions déterminées par le 1er dudit article; Attendu que, d'une part, si di Vizza, en religion père Sylvius, de l'ordre dissous des Passionnistes, a été le directeur de conscience de la demoiselle de Chaussenque pendant de longues années avant le décès de celle-ci, survenu le 29 mars 1905, vers l'âge de 80 ans, et si, à la date du 15 août 1903, la de cujus, atteinte, depuis dix ans au moins, d'une bronchite, a fait un legs en faveur du défendeur éventuel, il ne résulte pas, d'après l'arrêt attaqué, ni d'un document, ni d'un témoignage, que la défunte ait succombé aux atteintes de ladite maladie, à tort qualifiée par le demandeur dé « dernière maladie »;

-

Attendu que,

d'autre part, si la Cour, par un arrêt d'avant faire droit du 30 mai 1911, a autorisé Goulinat à prouver par voie d'enquête que, dès la fin de 1902, la de cujus

quant à la décision sur le fond, quel que soit le résultat de l'enquête. V. Cass. 10 juill. 1900 (S. et P. 1901.1.79; Pand. pér., 1901.1.516), et les renvois. V. aussi, Cass. 12 juill. 1904 (S. et P. 1905. 1.258), et les renvois.

(1-2) La loi du 27 nov. 1909 (S. et P. Lois annotées de 1910, p. 997; Pand. pér., Lois annotées de 1910, p. 997), dont l'article unique est devenu l'art. 29, liv. 1or, C. trav. (S. et P. Lois annotées de 1911, p. 108; Pand. pér., Lois annotées de 1911, p. 108), dispose: La suspension du travail par la femme, pendant huit semaines consécutives, dans la période qui précède et suit l'accouchement, ne peut être une cause de rupture, par l'employeur, du contrat de louage de services, et ce, à peine de dommages-intérêts au profit de la femme. Celle-ci devra avertir l'employeur du motif de son absence... ». Il ne peut être sérieusement contesté que cette disposition s'applique, non seulement aux femmes mariées, mais aussi aux filles-mères. Sans doute, la rubrique de la loi : Loi garantissant leur emploi aux femmes en couches de même que son contexte, parle exclusivement des femmes; mais on ne saurait pré

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était atteinte de bronchite chronique et qu'elle était morte de cette maladie, elle a pu dire, après l'enquête, sans violer les art. 1350, 1351, C. civ., qu'il n'était pas établi que la demoiselle de Chaussenque avait succombé aux suites de cette bronchite; que, dans ces circonstances, la Cour, dans l'arrêt attaqué, qui est suffisamment motivé, a pu statuer ainsi sans violer aucun des textes visés au moyen;

Rejette le pourvoi formé contre l'arrêt rendu le 18 mars 1912 par la Cour d'Agen, etc.

Du 21 avril 1913. · Ch. req. - MM. Tanon, prés.; Bonnet, rapp.; Blondel, av. gén. (concl. conf.); Jouarre, av.

CASS.-CIV. 27 mai 1913.. LOUAGE DE SERVICES, FEMMES EN COUCHES, SUSPENSION DU TRAVAIL, BRUSQUE RENVOI, INDEMNITÉ, FILLES-MÈRES (Rép.., v° Louage d'ouvrage, de services et d'industrie, n. 780 et s.; Pand. Rép., v Louage d'ouvrage et d'industrie, n. 852).

L'art. 29, liv. 1er, C. trav., en disposant que la suspension du travail par la femme, pendant huit semaines consécutives, dans la période qui précède et suit l'accouchement, ne peut être une cause de rupture, par l'employeur, du contrat de louage de services, édicte une règle générale, qui ne comporte aucune distinction, et dont le bénéfice s'étend aux filles-mères comme aux femmes mariées (1) (C. trav., liv. 1er, art. 29; L. 27 nov. 1909).

Par suite, c'est à bon droit qu'une condamnation à des dommages-intérêts est prononcée contre le patron qui, une ouvrière non mariée ayant quitté l'atelier pour entrer dans un hospice où elle devait faire ses couches, a refusé, bien qu'il connût son état de grossesse, de la reprendre, lorsqu'elle s'est présentée aussitôt après son rétablissement, sans qu'il fût relevé contre elle aucune cause légitime de rupture du louage de services (2) (C. civ., 1780; C. trav., liv. ler, art. 23, 29; L. 27 nov. 1909).

tendre que cette expression est synonyme de femme mariée », et que le bénéfice de la loi ne peut être réclamé par des filles-mères. Il est bien certain que la loi, qui a eu en vue d'apporter un palliatif à la crise de la natalité, en sauvegardant la santé de la mère, et par là même celle de l'enfant (V. l'exposé des motifs de la proposition de M. Engerand, S. et P. Lois annotées de 1910, p. 997-998, note 1 bis; Pand. pér., Lois annotées de 1910, p. 997-998, note 1 bis), a entendu que seg dispositions bénéficieraient sans distinction à toutes les mères. Cette intention du législateur ressort, de la manière la plus nette, des travaux préparatoires de la loi. Bien loin de réserver aux femmes mariées les mesures protectrices qu'il proposait d'édicter, M. Engerand, dans l'exposé des motifs de la proposition, appelait l'attention sur les périls que présentait, pour les filles-mères et leurs enfants, la nécessité de reprendre le travail à une date trop rapprochée de l'accouchement (V. S. et P. Lois annotées de 1910, p. 998, 1re col., note 1 bis, et p. 1000, 1re col., note 5; Pand. pér., Lois annotées de 1910, p. 998, 1 col., note 1 bis, et p. 1000, 1re col., note 5). D'autre

(Dile Cotte C. Dlle Bauer).

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LA COUR; Sur le moyen unique : Attendu qu'il appert des constatations du jugement attaqué que la demoiselle Anne Bauer, ouvrière corsetière au service de la demoiselle Cotte, après avoir travaillé pendant trois jours du mois de mars 1913 », a dû entrer à l'hospice de la Charité pour y faire ses couches »; que la demoiselle Cotte connaissait l'état de grossesse de son ouvrière, et que celle-ci, aussitôt rétablie et en état de reprendre son travail, s'est présentée à l'atelier. mais qu'il lui a été déclaré « qu'on n'avait plus besoin de ses services, sans qu'il fût relevé contre elle aucune cause légitime de rupture du contrat de louage de services qui liait les parties; que, dans ces circonstances, le conseil des prud'hommes a condamné la demoiselle Cotte à payer à son ouvrière, « conformément à l'usage, le montant de la quinzaine commencée, et, en plus, une quinzaine à titre d'indemnité de brusque renvoi, soit au total 100 fr. »; - Attendu que la demoiselle Cotte allègue qu'Anne Bauer est mal fondée à invoquer le bénéfice de l'art. 29, C. trav., qui dispose que la suspension du travail par la femme pendant huit semaines consécutives, dans la période qui précède et suit l'accouchement, ne peut être une cause de rupture par l'employeur du contrat de louage de services; qu'elle soutient que ce texte s'applique aux seules femmes mariées, à l'exclusion des filles-mères; Mais attendu que cette disposition est générale, et ne comporte aucune distinction; D'où il suit qu'en statuant comme il l'a fait, le jugement attaqué n'a violé aucun texte de loi; Rejette le pourvoi formé contre le jugement rendu le 19 mars 1913 par le conseil des prud'hommes de Lyon, etc. Du 27 mai 1913. Ch. civ. MM. Falcimaigne, prés.; Maillet, rapp.; Mérillon, av. gén. (concl. conf.).

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part, lors de la discussion au Sénat, en réponse à des observations de M. Julien Goujon, qui, à diverses reprises, avait très expressément mentionné les filles-mères parmi les bénéficiaires de la loi (V. S. et P. Lois annotées de 1910, p. 998, 3 col., note 3, et p. 1000, 1re et 2e col., notes 5 et 9, Pand. pér., Lois annotées de 1910, p. 998, 3 col., note 3, et p. 1000, 1re et 2e col., notes 5 et 9), M. Strauss, rapporteur, sans faire la moindre réserve, a très nettement affirmé que toutes les mères bénéficieraient de la loi (8. et P. Lois annotées de 1910, p. 998, 3° col., note 3; Pand. pér., Lois annotées de 1910, p. 998, 8e col., note 3). Cette réponse de M. Strauss n'avait pas pour objet de viser la situation des filles-mères, mais bien de préciser à quelles catégories d'ouvrières s'appliquerait la loi; toutefois, il en ressort qu'il n'a en aucune manière protesté contre l'interprétation que donnait à la loi l'orateur auquel il répondait. Il paraît donc bien certain que tout le monde, aussi bien l'auteur de la proposition que les orateurs qui ont pris la parole et le rapporteur, entendait que la protection de la loi fût assurée à toutes les mères, mariées ou non.

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