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*sur ce que la notification impérativement prescrite par l'art. 692, et sous peine de nullité par l'art. 715, C. P. C., ne lui a point été faite. Jugement du tribunal de Jonzac qui annulle l'entière procédure. - Appel du saisissant.

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ARRÊT.

LA COUR ; Attendu que, d'après les dispositions de l'art. 692, C.P.C., le poursuivant est obligé, à peine de nullité, conformément à l'art. 715 du même Code, de faire sommation aux créanciers inscrits sur les biens saisis, de prendre communication du cahier des charges, de fournir leurs dires et observations, et d'assister à la lecture et publication qui en sera faite, ainsi qu'à la fixation du jour de l'adjudication;-Attendu que Garnier, saisissant, a obtenu le 2 mai 1845, après dépôt du cahier des charges, un état délivré par le conservateur de Jonzac; que cet état estintitulé: Etat de toutes les inscriptions subsistant au bureau des hypothèques de l'arrondissement de Jonzac, contre Jean Bouchet, cuitivateur, ayant demeuré autrefois au lieu de Chezbégonin, commune de Réaux, et actuellement au chef-lieu de la commune de Moings; qu'il faut remarquer, d'après les termes de ce certificat, que le sieur Garnier a eu le soin d'indiquer au conservateur les deux domiciles de Bouchet, pour qu'il fût à même de rechercher toutes les inscriptions qui pouvaient grever les biens saisis; - Attendu que cet état ne mentionne que deux inscriptions, qu'il ne relate pas celle prise par Geneuil, et que le conservateur certifie qu'il n'existe jusqu'à ce jour, deux mai 1845, que les deux insciptions dont les copies précèdent;-Attendu que Garnier n'étant pas instruit légalement de l'inscription prise par Geneuil, n'était pas obligé de lui faire sommation ; qu'il n'a aucune faute à se reprocher;-Qu'à l'impossible nul n'est tenu; Qu'il s'est strictement conformé aux dispositions de l'art. 692 précité, d'après l'état délivré; d'où il suit que la demande en nullité de la saisie immobilière n'est pas fondée ; Attendu dès lors qu'il devient inutile de s'occuper des conclusions subsidiaires prises par Garnier devant la Cour.-Par ces motifs : Sans s'arrêter ni avoir égard à la fin de non-recevoir élevée par Geneuil, laquelle est déclarée mal fondée, dit qu'il a été mal jugé, bien appelé; réformant et faisant ce que les premiers juges auraient dû faire, Déclare Geneuil mal fondé dans sa demande en nullité de la saisie immobilière, l'en déboute, etc.

Du 26 février 1846.-1re Ch. civ.-MM. Barbault de la Motte, Prés..-Béra, av. gén., Concl. conf. - Bouchard et Fey, av.

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OBSERVATIONS. En recueillant un arrêt de la Cour royale d'Amiens, rendu le 7 janvier 1813, dans le même sens que celui qui précède, J. Av. t. 20, p. 382, no 399, j'ai déjà donné et motivé mon assentiment à la doctrine que consacre la jurisprudence.

En effet, que le créancier poursuivant soit responsable des vices de procédure qu'il a été en son pouvoir d'éviter, rien de plus juste. Mais qu'il soit tenu de garantir les irrégularités qui sont le fait du conservateur, ce serait contraire à toute raison : car il ne doit, lui, que se conformer, pour les notifications à faire,

au relevé d'inscriptions qui est toujours présumé exact, et qu'il ne lui est pas possible de contrôler. Ne résulte-t-il pas, d'ailleurs, des art. 2197 et 2198, C. C., au titre de la responsabilité des conservateurs, que le créancier lésé par les erreurs échappées à ce fonctionnaire public, ou par sa négligence, ne peut recourir que contre lui par la voie d'une action principale ?..... Telle est aussi l'opinion de BERRIAT-SAINT-PRIX, p. 587, no 3. C'était donc contre le conservateur seul qu'aurait dû être dirigée la demande du créancier omis, s'il avait droit à obtenir des dommages. Dans tous les cas, le tribunal avait eu évidemment tort d'annuler toutes les poursuites. La nullité de la sommation, en effet, ne pouvait jamais vicier la procédure antérieurement faite. C'est ce qui s'évince des termes et de l'esprit de l'art. 728, nouvellement introduit par la loi du 2 juin 1841, dans le Code, ainsi que je l'ai établi, Lois de la Procédure civile, 3e édition, CARRÉ, t. v, p. 535, question 2331.

ARTICLE 11.

COUR ROYALE DE PARIS.

EXPLOIT.-RUE.-NUMÉRO.-PARQUET.-DOMicile.

Un exploit est valablement signifié au parquet du procureur du roi, sans perquisitions préalables dans la rue de Paris dans laquelle le defendeur s'est déclaré domicilié, lorsqu'il n'a pas indiqué le numéro de cette rue. (Art. 68 C.P.C.)

(Verdun C. Krantz.)

Le sieur Verdun avait habité Paris rue Sainte-Avoye, no 17. Un jugement par défaut est rendu contre lui; il forme une opposition dans laquelle il se dit domicilié rue Rambuteau, sans indication de numéro; jugement qui déboute Verdun de son opposition. Commandement lui est fait au parquet du procureur du roi. Verdun demande la nullité de cet exploit. 19 septembre 1846, jugement qui repousse cette demande en ces termes : «< Attendu «que la procédure est régulière; qu'il n'est point établi que «Krantz connût le prétendu domicile du débiteur, rue Ram« buteau, no 19; qu'il n'était point nécessaire de se présenter au « domicile de la rue Sainte-Avoie, no 17, puisque, par un acte « postérieur à la souscription du billet, c'est-à-dire dans son « opposition, le débiteur avait déclaré demeurer rue Rambuteau, «sans indication de numéro ;-Que c'est au débiteur à supporter « les conséquences de cette indication incomplète. »

Appel; mais, le 21 octobre 1846, arrêt qui adopte les motifs des premiers juges, sur les concl. conf. de M. Ternaux, av. gén. MM. Lamberterie et Charles Place, av.

OBSERVATIONS.-La Cour de Paris a eu raison de dire que l'huissier

n'était pas en faute de n'avoir pas fait de perquisitions à l'ancien domicile de la partie assignée, puisque cette partie elle-même avait indiqué un nouveau domicile. Mais était-il aussi exact de déclarer que c'était au débiteur à supporter les conséquences de son indication incomplète?— Si le sieur 'Verdun eût donné une indication légalement incomplète, l'exploit signifié en son nom eût dû être déclaré nul; il n'en était pas ainsi. Il est de jurisprudence constante que le requérant, même celui qui habite Paris, peut ne pas indiquer le numéro de sa rue; j'ai exposé l'état de cette jurisprudence et de la doctrine dans les Lois de la Procédure civile. CARRÉ, 3o édition, t. 1°r, p. 337, question 298. Légalement, il n'y avait donc pas d'indication incomplete. L'indication du domicile pouvait n'être pas suffisante, en ce sens qu'elle ne permettait pas à l'huissier de le découvrir; on conviendra qu'il y a là une grande différence, pour l'appréciation du mode suivi par l'huissier.

J'ai examiné dans le plus grand détail, t. 1er, p. 407 et suiv., no 355, toutes les questions qui se rattachent au domicile et à la résidence d'une partie assignée, à son changement de domicile, avant ou pendant une instance; j'ai pensé que si un changement de domicile était indiqué, ce devait être au nouveau domicile que seraient donnés les exploits. Quand un huissier doit-il suivre les dispositions exceptionnelles de l'article 69, 8? C'est lorsque la partie à laquelle s'adresse l'exploit n'a ni domicile ni résidence connus en France. Dans l'espèce soumise à la Cour de Paris, l'huissier pouvait-il prétendre que Verdun n'avait ni domicile ni résidence connus? Il avouait que Verdun avait habité fort longtemps rue Ste-Avoie n° 17; il savait que Verdun avait annoncé avoir transporté son domicile rue Rambuteau. Il était donc contraire à toute vraisemblance de soutenir que Verdun n'avait ni domicile ni résidence connus. L'huissier devait chercher celui contre lequel il était chargé d'agir, dans la rue Rambuteau; et si, dans cette rue nouvelle et bien longue, il n'eût pas pu le découvrir, il aurait dit alors que faute d'indication suffisante, n'ayant pu trouver Verdun à son nouveau domicile, ni parconséquent remettre la copie à un voisin, parce que la qualité de voisin est une qualité relative, il remettait l'exploit au maire de l'arrondissement, conformément à l'article 68, C. P. C. C'est à la mairie que Verdun devait naturellement chercher les significations que le défaut d'indication de numéro l'aurait empêché de recevoir à son domicile. L'article 69, 8, suppose que le procureur du roi devra s'adresser à tous les maires de France pour découvrir le domicile d'une partie assignée; et il serait dérisoire qu'un procureur du roi envoyât la copie à un maire en lui disant : La partie assignée s'est dite domiciliée dans votre commune, tâchez de la découvrir avec tous les moyens que vous donne l'exercice de vos fonctions. Evidemment, dans ce cas, la remise au maire de ce domicile indiqué est la voie la plus simple; disons que c'est la seule voie légale. Qu'on veuille bien y faire attention. Si l'arrêt de la Cour de Paris pouvait faire jurisprudence, les exploits pourraient être fort souvent remis au procureur du roi; car il serait aussi difficile à un huissier de Tours, de Toulouse, de Charleville, et même d'une localité moins importante, de découvrir un nouveau domicilié que de découvrir celui qui va habiter une rue de Paris. Ces compositions qui sont le résultat, je n'en doute pas, de la faveur accordée au fait particulier d'une cause, sont inadınissibles.

M. CARRÉ, question 371, 3e édition, t. 1er, p. 448, rapprochant les dispositions du Code de celles de l'ordonnance de 1667, titre, 2, art. 9,

déclare que l'huissier qui a un exploit à remettre à celui qui s'est donné un domicile, et dont les recherches par toute la commune (ici c'était par toute la rue Rambuteau) ont été infructueuses, ne peut mieux faire, dans le silence de la marche à suivre en pareil cas, que de remettre son exploit au maire, il cite à l'appui de sa doctrine un arrêt de la Cour de Bruxelles du 8 mai 1807 av., t. 13, p. 94).

Il n'est pas sans utilité de rapporter ici la loi ancienne dont parle M. Carré et les réflexions du plus célèbre de ses commentateurs.-L'ordonnance de 1667 disait : « Ceux qui n'ont ou n'ont eu aucun domi«cile connu, seront assignés par un seul cri public, au principal mar« ché du lieu de l'établissement du siége où l'assignation sera donnée, sans aucune perquisition, et sera l'exploit parafé, par le juge des lieux, « sans frais.»Rodier, p. 35, question 1, ajoute : « Quels sont ceux qu'on peut dire n'avoir ou n'avoir pas eu de domicile connu ? Ce ne sout pas seulement les vagabonds, les mendiants, ou autres gens « sans profession, sans métier, sans aveu, ou, ce qui est la même « chose, qui ne sauraient rapporter des certificats de leurs vie et mœurs a par des personnes dignes de foi (car c'est la définition que la « déclaration du roi du 5 janvier 1731 donne des vagabonds) mais « ces colporteurs ou petits merciers qui courent sans cesse d'un lieu à «un autre; les empiriques, les bateleurs, les comédiens et autres de ce « genre, qui n'ont aucun domicile fixe et qui peuvent se dire habi«tants du monde entier, etc. »

ARTICLE 12.

Bulletin de jurisprudence et de doctrine.

Lorsqu'en 1835 (1), M. Billequin dirigea la rédaction du Journal, il eut l'heureuse pensée de publier à la fin de chaque volume des bulletins semestriels; il motivait ainsi cette innovation: << jusqu'ici, on a été forcé, quoique bien à regret, de laisser de côté a et de renvoyer à la table générale un assez grand nombre d'arrêts << d'une importance secondaire, il est vrai, mais dont la connaissance pouvait avoir cependant son utilité; désormais il n'en « sera plus ainsi. Pour ne laisser aucune lacune dans la jurispru«dence, nous publierons, à la fin de chaque volume, un bulletin. « semestriel résumant avec le plus d'exactitude possible les dé«< cisions d'un moindre intérêt que l'abondance des matières ne <<nous aura pas permis d'insérer textuellement. » Non seulement, je continuerai l'insertion de bulletins de cette nature, mais j'y joindrailerésumé des questions de doctrine qui m'auront été soumises ou qui auront été traitées par des auteurs. Je donnerai mon opinion (2), sur chacune des solutions de la jurisprudence et de la doc

(1) J.Av., t.48, p.376.

(2) C'est ainsi que dans l'édition que j'ai publiée des Lois de la Procédure civile de M. CARRE, j'ai indiqué mon sentiment même sur les arrêts placés en note sous la rubrique jurisprudence.

trine; au lieu de rejeter ces bulletins à la fin des semestres, j'en insérerai dans le cahier de chaque mois, de telle sorte que la connaissance des décisions plus ou moins importantes puisse arriver promptement à mes lecteurs.

I. Le 10 juin 1846, 4 ch. (DUTEIL C. OUIN), la Cour de Caen a jugé que l'exploit d'appel est nul en matière de saisie immobilière, s'il n'a pas été notifié au greffier du tribunal civil. Cet arrêt se fonde uniquement sur le texte de l'art. 732, et consacre l'opinion que j'ai développée dans les Lois de la Procédure civile, CARRÉ, 3e édit. t. 5, p. 774, Question 2425, quinquies.

II.

Le tribunal de première instance de Toulouse a jugé, le 5 juillet 1844 (BONNESERRE C. CABANETTES), MM. Fayard et Touraton, av., qu'une citation remise à un lieu où le défendeur résidait la plus grande partie de l'année était nulle, attendu que son domicile legal était là où il payait la contribution personnelle et mobilière, quoiqu'il n'y eût qu'une chambre à cette résidence. Le tribunal ne s'est pas arrêté à cette circonstance qu'il était prouvé que le jour de la citation, le défendeur était au lieu où la citation avait été remise. Cette solu tion est fort rigoureuse. Voy. les distinctions que j'ai établies, avec la jurisprudence, Question 350, t. 1er, p. 402, des Lois de la Procédure civile, CARRÉ, 3e édit.

III. Le 2 février 1838, la Cour de Poitiers, première chambre (TITON C. CACCIA), MM. Boncenne et Pontois, av., a décidé que, pour recevoir un partage déclaré l'année précédente, la chambre devait se recomposer comme elle l'était au moment du partage et appeler trois des autres conseillers les plus anciens pour vider le partage. La Cour s'est fondée sur l'analogie du cas prévu par l'art. 16 du décret du 6 juillet 1810. J'ai adopté cette opinion conforme à la jurisprudence de la Cour de cassation, dans les Lois de la Procédure civile, CARRÉ, 3° édit., t. 1er,p. 560, Question 479.

IV. Le tribunal de Toulouse, le 1er mars 1844 (DEsquerre C. LAHILLE.) av. MM. Lafont et Olivier, a décidé que les tribunaux de commerce sont seuls compétents pour connaître des contestations qui s'élèvent entre un négociant et son commis préposé ou gérant, surtout lorsque le commis élève la prétention d'obtenir tant pour cent à titre de gratifications ou d'appointements. Cette solution ne peut être contestée.

V.-M. DALLOz, Nouv. Répert., t. 4, p. 87, v° Appel civil, no 567, semble croire que j'ai décidé, Lois de la Procédure civile, CARRÉ, 3e édition, t. 4, p. 3, Question 1581 quater, que le garant qui a pris le fait et cause du garanti, et a été condamné en cette qualité, n'a pas lé droit d'interjeter appel vis-à-vis du demandeur principal. Il critique une semblable solution en se fondant, avec raison, sur ce que le jugement fait tomber en ce cas tout le poids de la condamnation sur le garant. Cet estimable auteur rapporte quelques lignes du no 1er, p. 4; mais à cet endroit de ma discussion, je raisonne constamment dans la supposition qu'aucune condamnation n'aurait été prononcée directement contre le garant pour avoir pris le fait et cause du garanti, car

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