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propre mouvement, pour indemniser les enfans Klinglin de la perte qu'ils ont faite par la vente de leurs biens; mais cil paraît que, dans la réalité, cet engagement était le prix d'un ratification secrète.

Quoiqu'il en soit, la demoiselle Roi, n'ayant point acquitté les intérêts aux échéances convenues, est assignée en reconnaissance de son écriture et en paiement de deux annuités montant à 409 fr.

Alors elle soutient que son engagement est nul comme. étant sans cause, ou plutôt comme ayant une cause illicite; elle ajoute que l'acte dont il s'agit peut tout au plus être envisagé comme une donation, et qu'à ce titre il serait encore sans effet, puisqu'il est dénué des formalités requises pour les contrats de cette nature.

Le 19 février 1807, jugement du tribunal civil de Belfort, qui, sans s'arrêter aux moyens de nullité, adjuge à la dame Klinglin les fins de sa demande, et condamne en conséquence la demoiselle Roi à lui payer 400 fr. pour deux années d'intérêts lors échues.

Appel de la part de la demoiselle Roi; et comme on lui opposait une fin de non recevoir, fondée sur ce que l'objet de la demande originaire n'excédait pas 400 fr., et qu'alors le jugement devait être réputé en dernier ressort, elle répond d'abord que, la condamnation étant subordonnée au mérite d'un titre qui s'élève à 4,000 fr., le jugement qui l'a prononcée n'est point un jugement souverain.

Ensuite, et au fond, l'appelante soutient que la promesse du 10 floréal an 11 est une obligation sans cause; qu'elle ne devait rien aux intimés; que la reconnaissance de 4,000 f. souscrite en leur faveur n'était le prix d'aucun sacrifice, d'aucune concession de leur part; que, quand on voudrait lui attribuer une cause, cette cause, qui n'aurait d'autre objet que la garantie de biens nationaux, serait illicite, contraire à l'ordre public, et même injurieuse au gouver nement, et que sous ce rapport l'obligation serait encore Tome IX.

43.

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nulle,

aux termes de la loi 7, ff., de pactis, et des ar ticles 1131 et 1153 du Code civil.

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Il n'est pas vrai, répondaient les intimés, que l'écrit d 10 floréal soit sans cause, ni qu'il ait une cause illicite Et d'abord il n'a point été souscrit de la part de l'adver saire , pour avoir une garantie, une ratification des vente faites par le gouvernement, puisque le titre n'en parle pas que d'ailleurs la loi garantit suffisamment ces aliénations, et que toute autre précaution devenait surabondante et inutile. L'obligation a sa véritable cause dans la conscience de la demoiselle Roi; elle a voulu associer aux bénéfices que lui avaient procurés les ventes dont il s'agit les enfans de l'ancien propriétaire, victimes innocentes d'un événement qui leur était étranger; c'est en quelque sorte un supplément de prix, que dans le for intérieur elle a cru juste de leur offrir: elle était bien maîtresse à cet égard. Mais son engagement; pour être purement naturel et une simple inspiration de la conscience, n'en est pas moins valable; et il n'y a point de loi qui annulle les obligations, par cela seul qu'elles ont pour mobile et pour cause un sentiment généreux.

Du 3 décembre 1808, ARRÊT de la Cour d'appel de Colmar, MM. Gallet et Beaumlin avocats, par lequel:

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« LA COUR, Attendu, sur la fin de non recevoir que la demande originaire, qui n'avait pour objet qu'une somme de 400 fr. d'intérêts, était fondée sur une promesse de 4,000 fr.: ainsi, dès que l'appelante a impugne ce titre de nullité, les juges dont est appel n'ont pu adjuger les 400 fr. qu'en véri•fiant la validité du titre de 4,000 fr., dont les 400 fr. në sont qu'un accessoire; Or le principal dont les juges ont été obligés de connaître excède de beaucoup leur attribution: dès lors l'appel était recevable; Attendu, au fond, objet de l'appel, que l'écrit du 10 floréal an 11 est sans cause réellé, puisque l'appelante ne devait rien aux intimés, et que, la nation ayant déjà garanti la vente des domaines nationaux, la garantie de la dame Klinglin et de ses fils, qui

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"

paraît avoir donné lieu audit écrit, était illusoire : cet écrit est donc nul d'après les anciens principes, comme il le serait suivant l'article 1131 du Code civil; Attendu qu'il serait encore nul d'après ledit article, comme contenant une cause illicite; les lois fondamentales de la constitution garantissant déjà les acquisitions faites des domaines nationaux, il était contre l'ordre public de stipuler et d'accepter la promesse d'une indemnité pour assurer une autre garantie; et lors même qu'on pourrait regarder l'acte en question, comme purement gratuit, il ne pourrait produire ancun effet, puisqu'il n'est pas de la nature ni dans les formes d'une donation : il y a donc lieu, sous tous les rapports, en émendant, d'annuler cet écrit, et de débouter les intimés de leur demande formée en première instance; par ces motifs, sans s'arrêter à la fin de non recevoir, pronon çant sur l'appel; MET l'appellation et ce dont est appel an néant; émendant, sans s'arrêter à l'acte du 19 floréal de l'an 11, lequel la Cour déclare nul et comme non avenu déboute les intimés de leur demande formée en première instance, etc. »

COUR DE CASSATION.

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L'action civile pour injures verbales est-elle de la compétence du juge de paix ? (Rés. aff.)"

DUHEM, C. Vandeville.

Duhem fait citer Vandeville devant le juge de paix du canton de Doniai, pour réparation d'injures verbales. Le 21 novembre 1807, jugement qui condamne Vandeville à faire à Duhem réparation d'honneur, etc.

Sur l'appel, le tribunal civil de Valenciennes déclare le jugement nul et incompétemment rendu, par le motif « que l'art. 605 du Code des délits et des peines met hors de la compétence des juges de paix, comme juges civils, la connaissance des demandes en réparation d'injures verbales; qu'ainsi les règles de leur compétence, établies par la loi du 24 août

1790, sont ici étrangères; que le juge dont est appel a prononcé comme juge civil, et non comme tribunal de simple police.

M. Merlin, procureur-général, a requis d'office la cassation de ce jugement.

Quoi! a dit ce magistrat, de ce que les injures verbales sont punies des peines de simple police; de ce qu'aux termes de l'art. 600 du Code du 3 brumaire an 4, les peines de police simple se prononcent par des tribunaux de police, s'ensuit-il que celui contre lequel des injures verbales ont été proférées ne peut pas en poursuivre la réparation par la voie civile?

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Soutenir l'affirmative, c'est vouloir que celui au préjudice duquel a été commis un simple larcin ne puisse pas en poursuivre civilement l'auteur:car le simple larcin doit, suivant l'art. 32 du titre 2 de la loi du 22 juillet 1791, être puni de peines correctionnelles; et l'art. 601 du Code du 3 brumaire an 4 veut que les peines de cette nature soient prononcées par les tribunaux correctionnels. C'est vouloir encore que celui au préjudice duquel a été commis un vol accompagné des circonstances les plus graves ne puisse pas en faire citer l'auteur devant les tribunaux civils : car le Code pénal du 25 septembre 1791 inflige à ce genre de vol des peines afflictives; et l'art. 606 du Code du 3 brumaire an 4 déclare que les peines afflictives ne peuvent être prononcées que par les tribunaux criminels.

Mais alors que devient l'art. 8 du même Code, aux termes duquel l'action civile (qui, suivant les expressions de l'art. 6, a pour objet la réparation des dommages que le délit a causes) peut, à la vérité, être poursuivie en même temps et devant les mêmes juges que l'action publique, mais aussi l'être séparément 2 Il est clair, plus clair que le jour, que cet article permet à toute personne lésée par un délit de poursuivre le délinquant devant les juges civils; et comment d'après cela refuser à celui contre lequel ont été tenus

des propos injurieux la faculté de poursuivre civilement les auteurs de ces propos?

Ce n'est pas tout: les juges de paix sont investis par une: loi expresse du soin de connaître, comme tels, des demandes en réparation d'injures verbales. L'art. 10 du titre 3 de la loi du 24 août 1790 range parmi les objets dont il attribue la connaissance aux juges de paix, sans appel, jusqu'à la valeur de 50 fr., et à la charge d'appel, à quelque valeur que la demande puisse monter, les actions pour injures verbales, rixes et voies de fait, pour lesquelles les parties ne se seront pas pourvues par la voie criminelle.

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Et quelle est la loi qui ôte cette attribution aux justices dé paix ?

Ce n'est certainement pas l'art. 8 du Code du 3 brumaire an 4. On vient de voir au contraire que cet article la leur conserve de la manière la moins équivoque. Ce n'est pas non plus l'art. 605 du même Code: car dire que le tribunal de police connaîtra des injures verbales, lorsque la punition en sera poursuivie par l'action publique, ce n'est pas dire que la justice de paix ne pourra pas en connaître, lorsque la réparation en sera poursuivie civilement,

Aussi la Cour a-t-elle jugé, le 13 thermidor an 13, au rapport de M. Minier, que la voie civile est ouverte devant les juges de paix pour injures verbales, comme elle l'est, soit devant eux, soit devant les tribunaux civils d'arondisse→ ment, pour toutes les autres espèces de délits.

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Du 6 décembre 1808, ARRÊT de la Cour de cassation, section civile, au rapport de M. Rousseau, par lequel:

« LA COUR,— Vu l'art. 10 du titre 3 de la loi du 24 août 1790, et les articles 8 et 605 du Code du 3 brumaire an 4; - Et attendu qu'il résulte clairement du texte de la loi du 24 août 1790 que l'action civile pour injures verbales est de la compétence du juge de paix; qu'aucune loi n'y a dérogé; que l'art. 8 de celle du 3 brumaire an 4 suppose bien l'exercice de l'action civile indépendamment de l'action criminelle, et que cette action conséquemment peut être portée de

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