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prentis (art. 6 de la loi du 18 mars). Le législateur a voulu créer une sorte de justice de paix, de jury commercial, pour vider les petits différends des manufacturiers avec les agents qu'ils emploient, avec ces ouvriers de fabrique dont les produits entrent immédiatement dans le commerce.

Mais nous ne pensons pas que ce tribunal subexceptionnel compte parmi ses justiciables les ouvriers et les apprentis qui exercent ou qui apprennent un métier sans rapport direct avec le commerce, tel, par exemple, que celui de maçon ou de serrurrier. Là, point de fabricant, point de chef d'atelier, et par conséqueut plus de prud'hommes. M. Pardessus semble admettre cette distinction, lorsqu'il dit, dans son Cours de Droit commercial, t. 1, n° 34: « Les rapports immédiats des conventions d'apprentissage avec le commerce, lorsqu'elles ont pour objet l'exercice de professions commerciales, doivent naturellement les faire considérer comme actes de commerce, de la part de celui qui s'oblige à instruire un apprenti...... De quelque manière que procèdent les prud'hommes, ajoute-t-il, t. 5, n° 1421, leur juridiction ne s'étend, d'après l'acte du gouvernement du 11 juin 1809, que sur les marchands-fabricants, chefs d'atelier, contre-maîtres, teinturiers, ouvriers, compagnons ou apprentis travaillant pour des fabriques situées dans le territoire pour lequel ils sont institués. »>

Au moyen de cette distinction, il est facile de savoir à quelle juridiction appartient la connaissance d'une contestation relative à un contrat d'apprentissage. S'agit-il d'une profession commerciale? on ira devant les prud'hommes. L'apprenti se destine-t-il à un métier, à une profession purement industrielle ? l'affaire rentre dans le domaine des tribunaux civils, de la justice de paix, si la valeur de la demande n'excède pas cent francs.

VII. Telle est la règle que l'on doit suivre, à notre avis, dans les villes où il existe un conseil de prud'hommes. Mais, dans les lieux où ces conseils ne sont point organisés, quelle sera la juridiction compétente pour les remplacer ?

Il est de principe qu'il faut rentrer dans le droit commun toutes les fois qu'il n'y a pas, légalement parlant, nécessité d'un droit exceptionnel. Ainsi, là où les prud'hommes n'existent point, il semble que les contestations dont la connaissance leur est attribuée devraient appartenir, non point à la justice commerciale, mais à la justice civile, qui embrasse tout ce qui n'est pas spécialement dévolu à une autre juridiction. Cependant un grand nombre d'arrêts émanés de différentes cours, se sont prononcés dans le sens contraire, et c'est avec raison. Les conseils de prud'hommes sont le vestibule des tri

bunaux consulaires. Si le vestibule manque, on entre de plano dans le temple. Nous ne citerons que l'arrêt de la cour royale de Paris, du 2 juillet 1832, inséré dans le Juge de Paix, t. 2, p. 255. La doctrine que nous venons d'émettre prouve que nous ne partageons nullement, sur le mérite de cet arrêt, l'opinion professée par M. Ménestrier, avocat, dans la note critique qui le précède. En effet, et cette observation nous paraît tranchante, l'appel des jugements de prud'hommes doit être porté devant les tribunaux de commerce. Si les prud'hommes étaient remplacés par les tribunaux civils pour juger en première instance les contestations dont la valeur excède cent francs, ou il faudrait violer cette disposition législative, ou bien il faudrait adopter cette monstruosité de soumettre à un tribunal exceptionnel de première instance la décision rendue par des juges civils du même degré. En portant, au contraire, la contestation au tribunal de commerce, on arrive directement devant les mêmes juges qui devaient y statuer sur l'appel, ce qui nous semble plus conforme à l'ordre ordinaire des juridictions et à la volonté du législateur.

Mais, nous le répétons, les tribunaux consulaires ne sont compétents que dans les cas où les prud'hommes le seraient eux-mêmes, c'est-à-dire, lorsque les contestations s'agitent entre des fabricants ou chefs d'atelier et leurs ouvriers, compagnons ou apprentis. Encore faut-il, ainsi que l'observe judicieusement M. Pardessus, loco citato, que la contestation porte sur des affaires relatives à la branche d'industrie qu'ils exploitent, et aux conventions dont cette industrie a été l'objet. Dans les autres cas, il faut s'adresser aux juges ordinaires, c'est-à-dire, au tribunal de paix, si l'objet du litige n'excède pas le taux de sa compétence. (Voy. Papeterie.)

VIII. La compétence des juges de paix relativement aux contrats d'apprentissage, dont les résultats ont, en général, une valeur indéterminée, n'a lieu que dans quelques cas fort rares, comme, par exemple, si, le temps de l'apprentissage étant expiré, le maître réclamait le prix convenu, et que ce prix fût inférieur à cent francs. Cette action étant purement personnelle et mobilière, ressortirait évidemment de la justice de paix. Il en serait de même de toutes celles dont la valeur, déterminée dans la citation, ne dépasserait pas la même

somme.

IX. Une observation importante, c'est que les contestations relatives à la remise du livret dont chaque ouvrier doit être muni, ou à la délivrance du congé qui doit être inscrit sur ce livret, sont du ressort de l'autorité administrative, et

non point de l'autorité judiciaire. (Voy. Ouvrier, no 7 et suivants; voyez aussi Responsabilité civile.)

MAJORAT. Voy. Acte de notoriété, sect. IV.

MAJORITÉ. C'est l'âge où l'on devient légalement habile à faire tous les actes de la vie civile, sauf la restriction portée au titre du Mariage.

I. La majorité est fixée à vingt-un ans accomplis (Code civ., art. 488). Elle l'était à vingt-cinq ans avant la révolution.

II. La capacité dont le Code investit le majeur, ne se rapporte qu'aux actes civils. Quant aux actes politiques, la majorité est fixée par d'autres lois qui sont étrangères à notre sujet.

III. Les droits attribués à la majorité sont quelquefois modifiés, suspendus ou détruits par des causes qui tiennent à la personne du majeur, comme la prodigalité, la démence, la fureur, certaines condamnations criminelles, etc. (Voy. Interdiction.)

MANDAT. La compétence des juges de paix en matière purement personnelle et mobilière est beaucoup trop limitée pour qu'ils aient souvent à statuer sur des questions de mandat. Aussi nous bornerons-nous à présenter sommairement les principes généraux et les conséquences qui en dérivent le plus directement.

Nos observations sur la nature et l'étendue des obligations du mandataire seront, pour les juges de paix, d'une utilité plus pratique, en ce qu'elles s'appliqueront également au cas d'une gestion volontaire et sans mandat, qui se présente plus fréquemment devant eux.

Pour suivre l'ordre adopté par le Code civil, nous traiterons 1o de la nature et de la forme du mandat; 2° des obligations du mandataire; 3° des obligations du mandant; 4o des différentes manières dont le mandat finit.

SECTION I".

Nature et forme du mandat.

I. Le mandat est défini, dans l'art. 1984, un acte par lequel une personne donne à une autre le pouvoir de faire quelque chose pour le mandant et en son nom. L'article ajoute : Le contrat ne se forme que par l'acceptation du mandataire.

Deux observations sont à faire sur cette définition. La première, c'est que le mot pouvoir ne doit pas être pris dans le sens de simple autorisation, mais dans le sens d'ordre. Le mandataire, dès qu'il a accepté, n'est pas seulement autorisé à

agir, il est obligé d'agir; et s'il n'accomplit pas le mandat, il engage sa responsabilité.

La seconde observation est celle-ci. Il n'est pas de l'essence du mandat que le mandataire agisse au nom du mandant. C'est là une condition qui convient seulement à la nature de ce contrat. Or, comme chacun sait, les conditions essentielles sont seules constitutives d'un acte. Celles qui tiennent à sa nature peuvent fort bien être modifiées sans que son caractère distinctif en reçoive aucune altération. Ainsi, le mandat peut exister alors même que le mandataire aurait reçu le pouvoir d'agir en son nom propre, pourvu que ce soit toujours dans l'intérêt du mandant. Cette dernière condition seulement est essentielle au contrat.

II. Le mandat étant un contrat de bienfaisance, doit être gratuit; mais c'est là encore une condition qui ne tient pas à son essence. Aussi la disposition de l'art. 1988 porte-t-elle : «Le mandat est gratuit, s'il n'y a convention contraire. » Dans les principes purs du droit romain, le mandat était essentiellement gratuit. Dès qu'un salaire était stipulé, il y avait, non plus mandat, mais louage de services.

La disposition de notre Code est plus rationnelle et plus vraie, en ce qu'elle ne place pas dans la même catégorie des services d'une nature différente. L'ouvrier qui confectionne un travail manuel dont il reçoit le salaire ou l'équivalent, loue ses services; l'homme expérimenté qui donne ses soins à l'affaire d'autrui, moyennant un honoraire, une récompense, accomplit un mandat.

III. La condition d'agir pour un autre, et par son autorisation, est essentielle au mandat, et non plus seulement de sa nature, comme la condition d'agir au nom d'autrui.

Il suit de là que le mandataire ne peut, en conservant cette qualité, rien faire au-delà de ce qui est porté dans son mandat (art. 1989). S'il dépassait les termes de son autorisation, ni lui, ni les tiers avec lesquels il aurait contracté, n'auraient d'action contre le mandant, ou, s'ils en avaient une, ce ne serait plus l'action de mandat. Il y avait donc nécessité de déterminer l'étendue du mandat pour le cas où les parties ne se seraient pas assez clairement expliquées à cet égard. Tel est l'objet des dispositions des art. 1987, 1988, 1989.

Art. 1987. «Il (le mandat) est ou spécial, et pour une affaire ou certaines affaires seulement, ou général et pour toutes les affaires du mandant. >>

Art. 1988. « Le mandat conçu en termes généraux, n'embrasse que les actes d'administration. S'il s'agit d'aliéner ou

hypothéquer, ou de quelque autre acte de propriété, le mandat doit être exprès. »

Art. 1989. « Le pouvoir de transiger ne renferme pas celui de compromettre. »

IV. Sur la disposition de l'art. 1988, nous pensons que mandataire général pourrait, en cas d'urgence, faire tous actes conservatoires dans l'intérêt du mandant, et que, par conséquent, toujours en cas d'urgence et à titre de mesure conservatoire, il puiserait dans les termes généraux du mandat le droit d'intenter au nom de son mandant une action possessoire et de défendre à une action de même nature. L'action possessoire est sans doute immobilière, mais son importance est telle, elle est circonscrite dans un délai si court, qu'à nos yeux et dans les circonstances par nous indiquées, elle revêt avant tout le caractère d'acte conservatoire.

V. Nous avons dit qu'il était de la nature du mandat que le mandataire agît au nom du mandant. De là cette conséquence, que si les mineurs et les femmes mariées non autorisées ne peuvent, à raison de leur incapacité de contracter, intervenir comme mandants dans un contrat de mandat, rien n'empêche qu'ils y figurent en qualité de mandataires. Aussi, la disposition de l'art. 1990 les autorise-t-elle à le faire, en ajoutant toutefois cette réserve conforme aux principes: « Le mandant n'a d'action contre le mandataire mineur que d'après les règles générales relatives aux obligations des mineurs, et contre la femme mariée, et qui a accepté le mandat sans l'autorisation de son mari, que d'après les règles établies au titre du Contrat de Mariage et des devoirs respectifs des époux. » Cette disposition paraît, d'après son contexte, ne devoir s'appliquer qu'aux mineurs qui sont émancipés, mais cette restriction n'est, suivant nous, qu'apparente. Prise dans un sens absolu, elle serait contraire au véritable esprit de la loi, dont les motifs s'appliquent à tous les mineurs indistinctement. Le législateur ne statue que pour les cas les plus ordinaires, de eo quod plerumque fit.

VI. Nous venons de parcourir les règles générales qui concernent le mandat considéré en lui-même, dans sa nature; voyons maintenant celles qui s'appliquent à la forme de ce

contrat.

Le mandat, aux termes de l'art. 1985, peut être donné ou par acte public, ou par écrit sous seing privé, même par lettre. Il peut aussi être donné verbalement; mais la preuve testimoniale n'en est reçue que conformément au titre des contrats ou des obligations conventionnelles en général.

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