payer au vendeur le prix dans le terme porté par la convention. Le vendeur a alors une action contre l'acheteur pour se faire payer le prix convenu et les dommages et intérêts, s'il est en demeure; et si l'acheteur étoit tenu d'enlever, dans un certain temps, la chose vendue, et qu'il ne l'eût pas fait, il est obligé d'indemniser le vendeur, si, pour conserver la chose, il a fait des dépenses dont il n'étoit pas tenu. Quoique le contrat de vente soit accompli par le seul consentement des parties, en sorte que l'acheteur puisse contraindre le vendeur à lui délivrer la chose vendue, néanmoins la vente n'est censée consommée que par la tradition réelle ou délivrar.ce de la chose vendue. Dans ce royaume, l'acheteur ne devient propriétaire incommutable de la chose vendue, que quand elle lui a été délivrée et qu'il la possède réellement. Le contrat de vente, accompli par le seul consentement, ne produit qu'une action personnelle pour obtenir la propriété de la chose vendue; de sorte que, si la même chose est vendue à deux différentes personnes, celui qui en aura la possession réelle et actuelle, quoiqu'il soit le dernier acheteur, sera préféré au premier, et il en demeurera le propriétaire. Le premier acheteur n'aura, contre son vendeur, qu'une action en dommages et intérêts2. DES CHOSES QUI PEUVENT SE VENDRE. TOUT ce qui entre dans le commerce des hommes et peut être apprécié, est susceptible de vente, soit meubles, soit immeubles; choses corporelles ou incorporelles, comme les servitudes, soit qu'elles existent dans la nature, ou qu'elles ne consistent que dans l'espérance, pourvu que les lois n'en aient point interdit le commerce car il y a certaines choses dont la vente est défendue. les Personne ne doit ignorer qu'il n'est pas permis de vendre ni d'acheter les choses sacrées; comme sont les sacrements, saintes huiles, les reliques des saints, le droit de patronage. La vente en seroit non-seulement nulle, mais même très-criminelle. Il est défendu, par le droit divin et par le droit naturel, de vendre et d'acheter les choses qui sont mauvaises d'elles-mêmes, Voyez la note ci-contre, p. 86. 1 Voir l'art. 1583 du Cod. civ. -2 qui ne peuvent servir qu'à causer quelque préjudice spirituel'ou corporel au prochain; comme sont certains poisons qui ne servent qu'à tuer les hommes; les livres lascifs, qui provoquent à l'impureté et corrompent le cœur de ceux qui les lisent; les tableaux déshonnêtes, les libelles diffamatoires, les chansons et tout ce qui est contre l'honneur et la réputation du prochain. Quant aux choses qui, quoique mauvaises d'elles-mêmes peuvent servir à de bons usages, comme sont certains poisons qui entrent dans la composition des remèdes ou qui sont employés dans les arts, on ne doit les vendre qu'aux personnes que l'on croit probablement n'en devoir pas abuser. On ne doit pas même vendre les choses indifférentes d'elles-mêmes, si l'on prévoit que ceux qui les achètent veuillent s'en servir pour faire du mal. Il n'est pas permis de vendre les livres hérétiques ou de magie, qu'aux personnes qui ont permission de les lire et qu'on croit vraisemblablement n'en devoir pas faire mauvais usage. Le vendeur ne doit pas présumer sans fondement et sans cause ce mauvais usage. Il n'est pas permis de vendre de la viande et d'en donner à manger en carême et aux jours d'abstinence, aux catholiques qui n'ont pas permission d'en user, ni aux hérétiques qui ne sont pas malades et qui ne peuvent être excusables de violer les lois de l'Église, parce qu'ils y ont été assujetis par le baptême. On ne peut vendre une succession à échoir : cette vente seroit contre les bonnes mœurs, elle induiroit à souhaiter la mort à autrui. Nul particulier ne peut vendre les choses qui appartiennent au public, comme sont les places, les fontaines publiques, les grands chemins. Si un homme, ignorant que ces choses fussent publiques, les avoit achetées d'un autre, le vendeur seroit obligé aux dommages et intérêts envers l'acheteur qu'il auroit trompé. Nous avons dit ci-dessus, qu'on peut vendre des choses qui_ ne consistent que dans l'espérance, et dont l'événement est douteux et incertain, comme l'espérance d'une pèche, d'un eoup de filet, d'une chasse, d'une navigation'; et quoiqu'il n'en provienne rien, l'acheteur est néanmoins obligé de payer le prix promis. Mais, dans ces cas, si le vendeur étoit la cause que l'acheteur n'a eu aucun profit, il seroit tenu de le dédommager. Il est défendu de vendre aux ennemis de l'état, des armes des munitions de guerre et de bouche, comme poudre, plomb, boulets, bombes, blé, vin et autres provisions. par Il est défendu aux cabaretiers, par les lois de l'état1 comme les lois de l'Église, de vendre du vin et de donner à boire et à manger aux habitants du lieu, les jours de dimanches et fêtes fêtées, pendant les heures du service divin. On ne peut vendre, les jours de dimanche et de fète, que les/ choses nécessaires à la vie, qui se consomment dans le jour; mais il n'est pas permis de les étaler et exposer en vente, pour les vendre publiquement. On doit tenir les boutiques fermées, tout au plus n'en laisser qu'une partie entr'ouverte; cela suffit pour indiquer ces sortes de marchandises à ceux que la nécessité engage à en acheter ces jours-la. Pour les choses qui ne sont pas nécessaires à la vie, il n'est pas permis de les vendre les jours de dimanche et de fête, même en tenant les boutiques fermées: car c'est faire le trafic; et le trafic est défendu dans ces saints jours. Aucune raison ne peut excuser ceux qui agissent autrement et qui osent mépriser ouvertement la loi de Dieu et celle de l'Église sur ce sujet. Les curés doivent sans cesse instruire leurs paroissiens sur cette matière, comme sur la vente de vin, pendant les heures du service divin, et s'opposer selon leur pouvoir aux abus contraires. Les confesseurs doivent pareillement interroger là-dessus leurs pénitents, et différer l'absolution à ceux qui refuseront d'obeir au précepte de l'Église sur cet article. Dans ce diocèse où cet abus est si commun, cela leur est enjoint à tous. Il y a des choses dont la vente n'est pas absolument illicite, et n'est vicieuse et prohibée que quand on n'observe pas les formalités et solennités requises par les lois. Telles sont la vente des biens dépendants des bénéfices, des biens des mineurs, et celle des biens patrimoniaux des villes. Celui qui a vendu une chose qu'il savoit être hors du commerce, à un autre qui, en l'achetant, ignoroit de bonne foi qu'elle pût être vendue, n'est pas obligé de livrer cette chose : il est seulement tenu aux dommages et intérêts envers l'acheteur, qui a une action contre lui pour répéter son argent. On ne peut vendre le bien d'autrui sans son consentement, parce qu'on ne peut donner à personne plus de droit sur un bien, que l'on n'en a soi-même. Les personnes qui n'ont pas la libre administration de leurs biens, ne peuvent vendre; comme sont les insensés, les fous, les furieux, les interdits. Ceux qui sont condamnés pour avoir commis des crimes capitaux, ne peuvent vendre ni aliéner leurs biens au préjudice de la confiscation. Un héritier chargé d'une substitution ne peut pas vendre le bien qu'il ne possède qu'avec l'obligation de le laisser à celui qui lui est substitué 2. DU PRIX DES CHOSES VENDUES OU ACHETÉES. Les lois de la justice veulent qu'il y ait de l'égalité dans le contrat de vente, c'est-à-dire, qu'il y ait une juste proportion entre le prix et la valeur de la chose qu'on vend ou qu'on achète. L'égalité ne s'y trouvera point, si le prix excède la valeur de la chose, ou la chose la valeur du prix; et le contrat ne sera ni légitime, ni selon la conscience: la vente et l'achat étant faits pour l'utilité commune, ne doivent pas être plus au profit de l'un que de l'autre. Si les lois civiles ôtent la liberté de se pourvoir en justice contre un contrat où il n'y a pas lésion d'outre moitié du juste prix, c'est pour éviter une infinité de procès, de chicanes qui arriveroient s'il y avoit ouverture à demander la résolution d'un contrat pour toutes sortes de lésions, et non pour donner le droit d'acheter ou de vendre les choses plus ou moins qu'elles ne valent. Cette règle est pour le barreau, non quia approbat, dit saint Augustin, sed quia non punit; mais elle ne peut servir pour la conscience. Par rapport au for de la conscience, il faut vendre au juste prix, comme aussi donner le juste prix de la chose qu'on achète. Pour juger du prix des choses qui se vendent, il faut observer La confiscation est abolie. 2 Aujourd'hui, suivant l'article 896 du Code civil, les substitutions sont prohibres. Toute disposition par laquelle le donataire, l'héritier institué ou le légataire, sera chargé de conserver et de rendre à un tiers, séra nulle, même à l'égard du donataire, de l'héritier institué ou du légataire. — Néanmoins les biens libres formant la donation d'un titre héréditaire que le roi auroit érigé en faveur d'un prince ou d'un chef de famille, pourront être transmis héréditairement, ainsi qu'il est réglé par l'acte du 30 mars 1806 et par celui du 14 août suivant. que le prix naturel ou commun ne consiste pas dans un point indivisible, comme le prix qu'on appelle légitime, qui a été fixé par le prince ou par les magistrats; mais il a une certaine étendue, parce qu'il dépend du jugement de plusieurs. C'est de là qu'on distingue trois sortes de prix naturels. Le premier est le prix rigoureux, qu'on nomme le plus haut prix, parce que le vendeur ne peut pas l'excéder sans injustice. Le second est le prix vil et le plus bas, parce que l'acheteur ne peut pas le diminuer sans injustice. Le troisième est le prix médiocre, moyen, modéré, qui tient le milieu entre le plus haut et le plus bas. On a été obligé d'admettre cette distinction des trois différents prix des denrées et des marchandises, pour suppléer à la difficulté qu'il y auroit d'en fixer le prix, dès-là qu'il ne l'est pas par le prince, et que l'estimation en varie suivant qu'elles sont rares ou communes. Mais aussi pour le régler au juste et empêcher que l'on ne le porte trop loin au-delà des bornes de son étendue, la différence de ces trois degrés doit étre de peu de conséquence, et elle doit seulement consister dans une petite addition du moyen au plus haut prix, ou dans une petite diminution du moyen au plus bas prix; de sorte que cette addition ou diminution ne soit pas capable d'òter l'égalité qui doit se trouver entre la valeur de la chose et le prix qu'on en donne. Plusieurs auteurs donnent, dans un exemple sensible, une règle pour discerner la différence de ces trois degrés de prix d'une même chose. Le moyen prix d'une chose, disent-ils, est de cent écus, et le plus haut sera de cent cinq écus, et le plus bas de quatre-vingt-quinze écus; c'est-à-dire que, si le prix modéré d'une chose est de vingt livres ou vingt écus, etc., le plus h-nt prix sera plus fort du vingtième, et le plus bas, plus petit ou moins fort du vingtième. Le prix modéré d'une étoffe est-il de vingt sous? le plus haut sera ordinairement de vingt-un sous, et le plus bas, de dix-neuf sous ou environ. Il s'ensuit de ces maximes, que le plus haut et le plus bas prix d'une chose se règlent par rapport au moyen prix; et ce moyen prix se règle suivant l'estimation qu'en font les personnes éclairées et intelligentes dans le commerce. On doit suivre ces règles si justes, non-seulement dans la vente des marchandises qui sont nécessaires dans le cours ordinaire de la vie, mais aussi dans la vente des pierreries, des tableaux, |