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à-dire, comme droit de coutume qui n'est point une servitude, ainsi que le déclare la loi romaine (1) et de là il résulte que quand une commune, traitant avec une autre sur le bouchoyage ou la vaine pâture, y a reconnu ou concédé une participation au profit de sa voisine, aucune des parties n'a pu agir en esprit de maître, l'une pour céder, l'autre pour acquérir un droit de servitude véritable sur les fonds des particuliers, puisque c'est sciemment qu'elles traitent l'une et l'autre sur leur concours à un simple avantage territorial dont l'usage, fondé sur la coutume, ne peut jamais dégénérer en droit de servitude, que par suite des actes de contradiction qui auraient eu lieu directement avec les propriétaires eux-mêmes.

(1) L. 13, S. I, ff. communio prædiorum, lib. 8, tit. 4.

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CHAPITRE LXXXVIII.

De IAmenagement des droits d'usages dans les forêts.

3531. L'AMÉNAGEMENT dont nous entendons traiter ici, est l'effet d'un jugement prononcé sur la demande du propriétaire, par lequel on assigne aux usagers un canton dans la forêt usagère, non en toute propriété, comme dans le cantonnement, mais en jouissance exclusive et entière, pour y faire la coupe de leur bois, à condition qu'ils n'en pourront plus couper ni exiger à l'avenir dans le surplus de la forêt.

Nous avons un exemple frappant des aménagemens d'usages, dans ce qui se pratique, en vertu de l'ordonnance de 1669, à l'égard des bois communaux.

Suivant cette ordonnance, un quart des bois des communes doit être, dans chaque localité, séparé du surplus et mis en réserve pour y laisser croître des futaies, qui seront, en cas de besoin, et quand il y aura lieu, vendues pour en employer le prix dans l'intérêt du corps de la commune seulement; et les trois autres quarts, dont la commune ne cesse pas d'avoir la propriété foncière, doivent être distribués par assiettes en usance, qui sont annuellement délivrées aux habitans pour les remplir de leur droit d'usage dans la forêt communale au moyen

de quoi il ne leur est rien dû dans le produit du quart en réserve.

Cet aménagement des usages dans les bois communaux est tout à la fois légal et administratif. Il est légal, en ce qu'il est prescrit par l'ordonnance; il est administratif, en ce que c'est sous la direction et par les ordres de l'autorité administrative que la division des quarts en réserve et des assiettes en usance doit être faite. (1)

5532. Il n'en est pas de même des aménagemens d'usage dans les bois de particuliers: ils n'ont jamais été ordonnés par aucune loi; et à moins qu'ils ne soient le résultat d'une convention faite de gré à gré entre le proprié taire et les usagers, ils ne peuvent être que l'effet d'un jugement émané de la justice ordinaire, parce que leur établissement exige une appréciation de droits de propriété, sur lesquels il n'appartient qu'aux tribunaux ordinaires de

statuer.

Quoique les appositions d'aménagentens dans les forêts usagères appartenant à des particuliers, ne soient plus de mode aujourd'hui, néanmoins comme il n'y a aucune disposition dans nos lois qui résiste à l'adoption de cette mesure qui avait été introduite par la jurisprudence des temps plus anciens, l'on doit dire que le propriétaire d'une forêt serait encore actuellement recevable à la provoquer contre

(1) Voy. ce que nous avons dit à cet égard, sous les 1.° 3002 et suivans.

ses usagers, et que ceux-ci seraient forcés d'y souscrire, à moins qu'ils ne voulussent euxmêmes demander le cantonnement, comme ils y sont autorisés.

Il y a cette différence entre l'aménagement dont nous parlons ici et le cantonnement dont nous traiterons dans un autre chapitre, que, par l'aménagement, les usagers ne deviennent point propriétaires de la portion de forêt qui leur est assignée pour y couper leur bois, en sorte qu'ils n'exercent toujours sur cette contrée, qu'une servitude d'usage, sans qu'il se soit opéré de novation dans leur titre; tandis qu'au contraire, les usagers avec lesquels il est procédé à un cantonnement, deviennent exclusivement propriétaires de la portion de forêt qui leur est adjugée en rachat de leur droit d'usage.

Une seconde différence qui résulte de la première et qui a trait à l'exécution de l'une et l'autre mesure, c'est que, dans le cas de l'aménagement, les usagers ne devenant pas propriétaires du fonds, mais restant toujours dans leur condition d'usagers sur la portion de forêt qui leur est attribuée en jouissance, pour que l'opération soit juste à leur égard, il faut nécessairement que cette portion soit telle, par son étendue ou sa fertilité, qu'elle puisse fournir entièrement la quantité de bois qui leur est due sur toute la forêt, autrement ils seraient lésés. Il n'en est pas de même dans le cas du cantonnement. Ici les usagers devenant propriétaires de la portion de forêt qui leur

est adjugée, il faut au contraire que la jouissance de cette portion ne soit pas tout-à-fait équivalente à la jouissance qu'ils exerçaient sur l'ensemble de la forêt, autrement c'est le propriétaire qui se trouverait lésé mais c'est là un point sur lequel nous reviendrons encore en traitant du cantonnement.

L'aménagement des usages, tel que nous venons de le définir, ne fut jamais une institution directe de la loi, mais une mesure introduite dans le régime forestier par la jurisprudence des anciens parlemens. Néanmoins la pratique en paraît reconnue par l'article 23 du titre 3 de l'ordonnance de 1669, qui semble en attribuer la connaissance de l'exécution aux grands-maîtres, lorsqu'il dit généralement que ces officiers règleront les partages des eaux, bois, prés et pâtis communs, tant pour le triage prétendu par les seigneurs, que pour l'usage et la division entre eux et les habi

tans.

3353. On voit dans les auteurs qui ont traité cette matière, que les demandes en aménagement formées par les seigneurs ont d'abord éprouvé beaucoup de difficulté, parce que les usagers se plaignaient de ce qu'on voulait dénaturer leurs titres, en limitant sur une portion de forêt l'exercice d'un droit qui leur appartenait sur le tout. Ils opposaient que, d'après le texte de la loi romaine, qui était regardée comme constitutive du droit commun sur cette matière, il est de la nature de toute servitude foncière d'être indivisible; qu'il est de son es

sence

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