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(Halléguen).

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A la date du 29 nov. 1907, le maire de Chateaulin a pris un arrêté, portant qu'aucun café, débit de boissons, ne pourra désormais être ouvert dans la commune, dans un rayon de 100 mètres autour des églises, cimetières et établissements d'enseignement publics et privés ». M. Halléguen, débitant de boissons à Chateaulin, a fait sommation par huissier, le 5 sept. 1908, au mare de la commune, « d'avoir à faire fermer » un débit de boissons, ouvert en 1908 par M. Yann, et qui serait installé à une distance de moins de 100 mètres d'une école privée. Le maire n'ayant pas obtempéré à cette sommation, M. Halléguen a saisi le Conseil d'Etat. LE CONSEIL D'ÉTAT; Vu les lois des 17 juill. 1880 et 24 mai 1872; Considérant qu'aux termes de l'art. 2 de la loi susvisée du 17 juill, 1880, le maire doit immédiatement donner récépissé de la déclaration qu'est tenue de lui faire toute personne qui veut ouvrir dans la commune un café, cabaret ou débit de boissons; que l'intervention du maire doit se borner à constater l'accomplissement de cette formalité, sans examen préalable de la capacité du requérant où de la situation du débit, et à transmettre dans les trois jours copie intégrale au procureur de la République, auquel il appartient de rechercher et de poursuivre les infractions qui pourraient être commises; qu'aucune disposition de loi ne permet au maire d'ordonner la fermeture des débits qui auraient été ouverts en violation de la loi susvisée ou des règlements de police; que, par suite, le refus du maire de Châteaulin de procéder à la fermeture du débit du sieur Yann, alors même que ce dernier aurait commis la contravention qui lui est re

Ainsi, pas plus qu'il n'a le droit de s'opposer à l'ouverture d'un débit de boissons, un maire ne peut en prescrire la fermeture, lorsqu'il a été ouvert.

(1-2) D'après l'art. 21 du règlement d'administration publique du 31 août 1881 (S. Lois annotées de 1882, p. 342. P. Lois, décr., etc. de 1882, p. 556), visé par la décision ci-dessus recueillie, lorsque le montant d'un livret doit être touché par un mandataire, le mandat doit être constaté par une procuration sous seing privé ou authentique, en minute ou en brevet. Or, la condition essentielle à l'existence d'un acte sous seing privé, c'est qu'il porte la signature des parties (C. civ., 1322), et la condition essentielle pour la validité d'un acte authentique, c'est qu'il soit reçu par un officier public ayant qualité à cet effet (C. civ., 1317 et 1318). Un illettré, titulaire d'un livret de la Caisse nationale d'épargne, qui veut opérer le retrait de ce livret par un mandataire, ne peut donc constituer mandataire par acte sous seing privé ; il doit constituer mandataire par acte authentique, et aucun texte n'a donné qualité au maire pour recevoir une procuration authentique. Dès lors, la procuration présentée au bureau de poste, dans l'espèce, était sans valeur par elle-même, au regard du décret du 31 août 1881, et l'Administration, en autorisant le remboursement du livret au mandataire désigné dans cette pièce, puis en payant le montant du livret entre ses mains, avait violé le règlement qui la régissait; elle avait commis une faute engageant sa responsabilité. V. en ce sens, sur la responsabi

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CONS. D'ÉTAT 18 novembre 1910. CAISSE D'ÉPARGNE, CAISSE D'ÉPARGNE POSTALE, LIVRET, VOL, PAIEMENT, TITULAIRE DU LIVRET, ILLETTRÉ, Mandat, MAIRE, DÉCLARATION, FORMALITÉS RÉGLEMENTAIRES, INOBSERVATION, RESPONSABILITÉ, CONSEIL D'ETAT, DÉCISION MINISTÉRIELLE, REMBOURSEMENT, REFUS, ANNULATION, DÉPENS, MISE A LA CHARGE DE LA CAISSE (Rép., vo Caisse d'épargne, n. 92 et s.; Pand. Rép., eod. verb., n. 358 et s.).

Lorsqu'un individu a obtenu dans un bureau de poste le paiement d'un livret de la Caisse nationale d'épargne, volé à son propriétaire, en se présentant, muni seulement d'une pièce constatant que le titulaire du livret, qui ne sait signer, a déclaré devant le maire de la commune donner pouvoir au porteur de cette pièce de retirer de la Caisse d'épargne la somme inscrite au livret, la Caisse d'épargne doit être déclarée responsable du remboursement effectué, la pièce produite, à titre de pouvoir, ne remplissant pas les conditions fixées par le décret du 31 août 1881 (1) (L. 9 avril 1881; Décr., 31 août 1881; Instr. génér., 1er juin 1892).

Il en est ainsi, bien que la pièce ait été établie conformément à un modèle annexé à l'instruction générale sur le service des postes el telég,aphes (2) (Id.).

Dans le cas où une décision du ministre des postes et télégraphes, refusant le remboursement d'un livret de la Caisse nationale

lité de l'Etat, à raison du paiement d'un mandatposte à un autre que le destinataire, par suite d'une faute des agents, Cons. d'Etat, 8 mai 1908, Lurgouët (S. et P. 1910.3.119; Pand. pér., 1910.3.119), et la note. Comp. dans une espèce voisine de celle de l'arrêt ci-dessus recueilli, mais dans laquelle le titulaire du livret, qui avait été remboursé à un autre que lui, avait lui-même commis une faute, Cons. d'Etat, 24 déc. 1909, Dule Coste (S. et P. 1912.3.81; Pand. pér., 1912.3.81), et la note.

Il est vrai que l'instruction générale sur le service des postes prévoit, en outre de la procuration sous seing privé (modèle n. 15), qu'elle écarte pour les illettrés, et de la procuration authentique pardevant notaire, une procuration (modèle n. 16), qui est spéciale aux titulaires de livrets ne sachant ou ne pouvant pas signer, procuration qui est reçue par le maire de la résidence du déposant, et qui était celle ayant servi en l'espèce. Mais l'instruction générale est illégale sur ce point, puisqu'elle modifie le décret du 31 août 1881, pris en vertu d'une délégation donnée par l'art. 18 de la loi du 9 avril 1881, lequel décret exige une procuration authentique ou sous seing privé. Au surplus, avec le système de l'instruction générale, on arriverait à cette conséquence que l'illettré serait protégé davantage, lorsqu'il opérerait lui-même le retrait de son livret, que lorsqu'il le ferait retirer par un mandataire. En effet, dans le premier cas, la demande de remboursement doit être signée par le receveur du bureau de poste de la résidence de

d'épargne, est annulée, les dépens exposés par le titulaire du livret doivent être mis à la charge de la Caisse, et non à la charge de l'Etat (3) (L. 24 mai 1872). Sol. implic.

(Biveau C. Caisse nationale d'épargne). M. Biveau était titulaire d'un livret de la Caisse nationale d'épargne, qui lui a été dérobé par M. H... Ce dernier, se faisant passer pour M. Biveau, a donné mandat à M. Leroy d'effectuer le retrait intégral du montant du livret. Ce mandat, ressortant d'une pièce dressée par un adjoint au maire de Saint-Nazaire, constatait que M. Biveau, ne sachant pas signer, avait donné mandat à M. Leroy. M. Leroy, en vertu du mandat qui lui était ainsi conféré, a adressé à l'Administration une demande de remboursement du livret, et en a touché le montant à un bureau de poste de Saint-Nazaire. Mais, à la suite d'une plainte de M. Biveau, qui s'était aperçu de la disparition de son livret et en avait fait la déclaration à l'Administration, il a été procédé à une enquête, qui a établi le vol du livret, et les conditions dans lesquelles le montant en avait été payé. M. Biveau a alors demandé au ministre des postes et télégraphes que le montant de son livret fût rétabli au crédit de son compte. Le ministre ayant rejeté sa demande, par le motif que le remboursement avait été fait régulièrement, M. Biveau s'est pourvu devant le Conseil d'Etat.

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l'illettré, et seulement quand l'identité de ce dernier est constante (Décr., 31 août 1881, art. 17; Instruction générale sur le service des postes, art. 224): quant au paiement, il doit être fait en présence de deux témoins et du receveur, qui signent, et senlement dans le cas où l'identité du déposant est constante (même décret, art. 21, § 2; même instruction, art. 225). Il est vrai que, lorsque la somme à payer excede 150 fr., l'instruction générale substitue aux témoins prévus à l'art. 21, § 2, du décret de 1881, la procuration authentique ou donnée devant le maire; mais, sur ce dernier point, elle est illégale pour les motifs ci-dessus donnés. Nous ajonterons que, dans l'espèce, aucune faute personnelle ne pouvait être reprochée aux agents de l'Administration, puisqu'ils avaient appliqué l'instruction générale sur le service des postes.

(3) Cette question avait été examinée par M. le commissaire du gouvernement Pichat dans ses conclusions. Par la décision recueillie, le Conseil d'Etat, en condamnant la Caisse d'épargne postale aux dépens, semble bien avoir admis que la Caisse nationale d'épargne constitue un établissement public, et non pas seulement un service de l'Etat, sans personnalité. V. dans le même sens, les autorités citées dans la note sous Aix, 18 juin 1908 (S. et P. 1908.2.316; Pand, pér.. 1908.2.316). Adde, Hauriou, Précis de dr. admin., 7° éd., p. 343. Mais V. en sens contraire, Aix, 18 juin 1908. précité, et les renvois de la note. Adde, Berthélemy. Tr. élem. de dr. admin., 7° éd., p. 285.

pas lui-même, le tiers qui le remplace doit produire une procuration sous seing privé, à moins qu'il ne soit porteur du brevet original ou d'une procuration authentique, générale ou spéciale, contenant pouvoir de toucher et de donner quittance; d'autre part, que quand le déposant ne sait ou ne peut signer, et que son identité est constante, la quittance peut être remplacée par un certificat signé de deux témoins;

Considérant que le sieur Leroy s'est présenté, le 25 avril 1901, au bureau de poste de Saint-Nazaire, pour toucher la totalité du livret du sieur Biveau, soit 1.524 fr. 70, qui a été payée; qu'il était muni seulement d'une pièce constatant que le sieur Biveau, qui ne sait signer, avait déclaré, devant le maire de SaintNazaire, donner pouvoir audit sieur Leroy de retirer de la Caisse d'épargne la somme totale portée sur le livret; que la circonstance que cette pièce avait été établie conformément au modèle 16, annexé à l'instruction générale du 1er juin 1892, laquelle d'ailleurs donne moins de garantie au déposant illettré non présent que n'en assure le décret à celui qui se présente lui-même, ne suffit pas, en l'absence de tout fait imputable au sieur Biveau, pour affranchir la Caisse d'épargne de la responsabilité qui lui incombe comme dépositaire; qu'ainsi, le requérant est fondé à demander le rétablissement à son compte de la somme de 1.524 fr. 70, valeur au 25 avril 1901, mais non des intérêts de cette somme, qui feraient double emploi avec ceux dudit compte;... Art. 1er. La décision attaquée est annulée. Art. 2. Sera rétablie au crédit du compte du sieur Biveau la somme de 1.524 fr. 70, montant de son livret à la Caisse nationale d'épargne, valeur au 25 avril 1901. Art. 3. La Caisse d'épargne postale est condamnée aux dépens.

Du 18 nov. 1910. Cons. d'Etat. MM. Guéret-Desnoyers, rapp.; Pichat, comm. du gouv.; Tétreau et Regray, av.

CONS. D'ÉTAT 18 novembre 1910. CONSEIL MUNICIPAL, DÉLIBÉRATION, NULLITÉ DE DROIT, VIOLATION D'UN CONTRAT ANTÉRIEUR, APPROBATION PAR UNE LOI (Rép., vo Commune, n. 1303 et s.; Pand. Rép., eod. verb., n. 4356 et s.).

Une délibération d'un conseil municipal, contraire aux stipulations d'un contrat consenti par la commune, ne peut être déclarée nulle de droit, par le motif que ce contrat aurait été approuvé par une loi, celle approbation n'ayant pas changé la nature du contrat, et n'ayant pas eu pour effet de donner valeur législative aux clauses

(1) Cette solution ne soulève pas d'objection. La loi qui avait approuvé le contrat ne constituait qu'un acte de tutelle, et n'avait pu donner le caractère d'un acte législatif au contrat lui-même. Et une délibération ne saurait être déclarée nulle de droit, par le seul motif qu'elle porterait atteinte à des droits antérieurement consentis à des tiers. V. Cons. d'Etat, 13 mai 1910, Soc. d'enseignement

qu'il contient (1) (L. 5 avril 1884, art. 63 et 65).

(Santini, Porte et Malfray).

LE CONSEIL D'ÉTAT; Vu la loi du 5 avril 1884; - Considérant qu'aux termes des dispositions de l'art. 63 de la loi du 5 avril 1884, peuvent seules étre déclarées nulles de droit les délibérations d'un conseil municipal portant sur un objet étranger à ses attributions ou prises en dehors de sa réunion légale, et celles qui sont prises en violation d'une loi ou d'un règlement d'administration publique; Considérant que les sieurs Santini et autres demandent au Conseil d'Etat de déclarer la nullité de la délibération du conseil municipal de Toulon du 29 mai 1906, relative au vote d'un nouvel emprunt, comme contraire aux dispositions du traité de concession passé entre la ville et le sieur Valabrègue, et approuvé par une loi, en date du 16 déc. 1902; que les délibérations d'un conseil municipal, qui seraient contraires aux stipulations d'un contrat consenti par une commune, ne sont pas au nombre des délibérations prévues par la disposition législative ci-dessus rappelée; que la circonstance que la convention passée entre la ville de Toulon et le sieur Valabrègue a été approuvée par une loi n'en change pas la nature, et n'a pas pour effet de donner valeur législative aux clauses qu'elle contient; qu'ainsi, les conclusions déposées par les sieurs Santini et autres devant le préfet d'abord, et ensuite devant le Conseil d'Etat, ne sont pas recevables;... Art. 1er. La requête est rejetée. Du 18 nov. 1910. Cons. d'État. MM. Dugas, rapp.; Pichat, comm. du gouv.

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CONS. D'ÉTAT 18 novembre 1910. CONSEIL MUNICIPAL, DÉLIBÉRATION, NULLITÉ DE DROIT, ACTION EN JUSTICE, JUGEMENT, APPEL, MANDAT DONNÉ AU MAIRE (Rép., Vo Commune, n. 263 et s.; Pand. Rép., eod. verb., n. 1267 et s.).

Un conseil municipal ne sort point de ses attributions, en donnant au maire mandat de faire appel d'un jugement qui avait condamné le maire, et de poursuivre ainsi devant la juridiction compétente, qui avait qualité pour apprécier la suite à y donner, une action que le conseil municipal estimait appartenir à la commune. — En conséquence, la délibération ne peut être déclarée nulle de droit (2) (LL. 5 avril 1884, art. 61, 63, 65 et 121; 8 janv. 1905).

(Comm. de Léoville).

Le juge de paix du canton de Jonzac ayant condamné solidairement le maire et

libre de Saint-Lô (S. et P. 1912.3.138; Pand. pér., 1912.3.138) et la note.

(2) La délibération d'un conseil municipal, qui autorise le maire à faire appel d'un jugement, au nom de la commune, ne porte pas sur un objet étranger à ses attributions. Il appartient, en effet, au conseil municipal de délibérer sur les actions intenter au nom de la commune. V. Cons. d'Etat,

le desservant de la commune de Léoville (Charente-Inférieure) à des dommagesintérêts envers un habitant, pour n'avoir pas mis à la disposition de ce dernier le brancard des morts, lors des obsèques d'un de ses parents, le conseil municipal de Léoville à décidé de faire appel de ce jugement, et a autorisé le maire à cet effet. Le préfet de la Charente-Inférieure a dé- . claré cette délibération nulle de droit, comme portant sur un objet étranger aux attributions du conseil municipal, par le motif que la commune n'avait pas été en cause à l'instance ci-dessus indiquée, et que le maire seul avait été condamné. Pourvoi.

LE CONSEIL D'ETAT; Vu les lois des 5 avril 1884; 7-14 oct. 1790 et 24 mai 1872;

Considérant qu'aux termes de l'art. 61 de la loi du 5 avril 1884, le conseil municipal règle par ses délibérations les affaires de la commune, et que, spécialement, aux termes de l'art. 121 de ladite loi, modifié par l'art. 1er de la loi du 8 janv. 1905, il délibère sur les actions à intenter ou à soutenir au nom de la commune; que, dès lors, en donnant au maire, par sa délibération du 3 mars 1909, mandat de faire appel du jugement intervenu à la date du 9 janv. 1908, et de poursuivre ainsi devant la juridiction compétente, qui avait qualité pour apprécier la suite à y donner, une action qu'il croyait appartenir à la commune, le conseil municipal de Léoville n'est pas sorti de ses attributions; que, dans ces conditions, le maire, au nom de ladite commune, est fondé à soutenir que c'est à tort que, par l'arrêté attaqué, le préfet a déclaré la délibération dont s'agit nulle de droit;... Art. 1er. L'arrêté est annulé...

Du 18 nov. 1910. Cons. d'Etat. MM. Imbart de la Tour, rapp.; Pichat, comm. du gouv.

CONS. D'ÉTAT 18 novembre 1910. 1o Hospices Et hôpitaux, CoMMISSION ADMINISTRATIVE, DÉLIBERATION, SERVICE HOS PITALIER, TRAITÉ AVEC UNE CONGREGATION RELIGIEUSE, RÉSILIATION, PRÉFET, APPROBATION (ABSENCE D'), NOUVELLE DÉLIBÉRATION, MESURE RAPPORTÉE, Refus d'apPROBATION, EXCES DE POUVOIR (Rép., v Assistance publique, n. 508 et s.; Pand. Rép., v Hôpitaux-Hospices, n. 311 et s.). 2o CONSEIL MUNICIPAL, HOSPICE, SERVICE HOSPITALIER, CONGREGATION RELIGIEUSE, TRAITÉ, AVIS, PRÉFET, REFUS D'APPROBATION, EXCES DE POUVOIR (Rép., v° Commune, n. 1303 et s.; Pand. Rép.,eod. verb., n. 4403 et s.).

1o Dans le cas où la commission administrative d'un hospice a rapporté une délibé

8 janv. 1909, Cons, municipal de Montmelas-SaintSorlin (S. et P. 1911.3.70; Pand. pér., 1911.3.70), et la note. Il était possible que l'appel formé par la commune ne fût pas recevable, parce que la condamnation avait été prononcée contre le maire personnellement. Mais c'était au juge d'appel à se prononcer sur ce point, et le préfet n'était pas compétent pour trancher pareille question.

ration antérieure, qui remplaçait le personnel congréganiste par un personnel laique, mais qui n'avait pu encore être suivie d'effet, les délais prévis, pour le cas de résiliation, par le traité passé avec la congrégation n'étant pas expirés, cette délibération, qui a pour unique objet le maintien pur et simple du traité, n'est pas de celles qui ne sont exécutoires qu'après avoir été approuvées par le préfet; par suite, le préfet excede ses pouvoirs, en refusant l'approbation de cette délibération, qui ne lui était pas demandée (1) (LL. 7 août 1851, art. 8; 24 mai 1872, art. 9).

20 Les avis donnés par les conseils municipaux, en vertu de l'art. 70 de la loi du 5 avril 1884, échappant, par leur nature même, et quel que soit l'objet sur lequel ils portent, à toute approbation de l'autorité supérieure, le préfet excède ses pouvoirs, en refusant d'approuver une délibération, par laquelle le conseil municipal a émis un avis favorable à la délibération précitée de la commission administrative de l'hospice (2) (LL. 24 mai 1872, art. 9; 5 avril 1884, art. 70).

(Commission administrative de l'hospice de Cosne et Ville de Cosne).

Par traité du 24 déc. 1841, intervenu entre la commission administrative de l'hôpital de Cosne (Nièvre) et la congrégation des Sœurs de la charité chrétienne de Nevers, et approuvé par le ministre de l'intérieur en 1842, des religieuses de cette congrégation ont été chargées du service intérieur à l'hôpital. Le traité, établi d'après le modèle-type annexé à la circulaire du ministre de l'intérieur du 26 sept. 1839, prévoyait qu'en cas de résiliation du contrat, la sortie des religieuses aurait lieu quatre mois au plus tard après la no tification faite par celle des parties qui voudrait résilier le traité ». A la date du 7 mars 1908, la commission administrative de l'hospice a pris une délibération,

(1) D'après l'art. 8 de la loi du 7 août 1851 (S. Lois annotées de 1851, p. 113. P. Lois, déer., etc. de 1851, p. 192), l'approbation du préfet est nécessaire pour la passation des contrats entre les commissions administratives d'hospices et les congrégations hospitalières. Elle est également nécessaire pour la résiliation de ces contrats. V. Cons. d'Etat, 5 déc. 1908, Dame Mas et Daure (S. et P. 1911.3.29; Pand. pér., 1911.3.29), et la note. Le préfet était compétent, dans l'espèce, pour approuver la résiliation, encore bien que le traité intervenu eût été approuvé par le ministre de l'intérieur. En effet, l'approbation du ministre était exigée, à l'époque de la passation du contrat, par une instruction ministérielle du 8 févr. 1823, qui pouvait avoir son fondement légal dans l'art. 5 du décret du 18 févr. 1809; mais le texte actuellement en vigueur est l'art. 8 de la loi du 7 août 1851, laquelle a, par son art. 19, abrogé toutes dispositions contraires. La délibération de la commission administrative de l'hospice, décidant la laïcisation du personnel hospitalier, et ayant ainsi pour objet la résiliation du traité passé avec la congrégation, n'avait pas été approuvée par le préfet, qui n'avait fait qu'autoriser l'ouverture d'un crédit; par suite, elle n'était pas exécutoire (V. sur le principe, Cons. d'Etat, 29 mars

par laquelle elle a décidé le remplacement du personnel congréganiste par un personnel laïque, fixé au 1er juillet la date de la laïcisation, et voté un crédit de 3.000 fr., pour assurer le service laïque en 1908. Le 29 avril 1908, le préfet de la Nièvre a approuvé cette délibération pour valoir ouverture d'un crédit de 3.000 fr. ». Par une nouvelle délibération du 27 mai 1908, la commission administrative de l'hospice a rapporté sa délibération du 7 mars 1908, et elle a décidé de maintenir le personnel actuel ». Le 6 juin 1908, le conseil municipal de Cosne a donné un avis favorable à la délibération de la commission administrative du 27 mai. Par décision du 25 juin 1908, le préfet de la Nièvre a refusé d'approuver la délibération de la commission administrative de l'hospice du 27 mai 1908 et celle du conseil municipal du 6 juin 1908. - La commission administrative de l'hospice et le conseil municipal de Cosne ont déféré cette décision au Conseil d'Etat pour excès de pouvoir.

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LE CONSEIL D'ÉTAT; Vu les lois des 7 août 1851, 5 avril 1884, 7-14 oct. 1790 et 24 mai 1872; - Considérant que, par sa délibération du 7 mars 1908, la commission administrative des hospices de Cosne a décidé le remplacement du personnel congréganiste par un personnel laïque, et a voté un crédit de 3.000 fr. à cet effet; Considérant, d'une part, qu'il résulte, tant de l'instruction et des documents versés au dossier que des termes mêmes de la décision du préfet de la Nièvre, en date du 29 avril 1908, que, par cette décision, le préfet n'a pas entendu approuver dans son ensemble la délibération ci-dessus rappelée du 7 mars 1908, mais qu'il s'est borné à autoriser l'ouverture du crédit de 3.000 fr.; Considérant, d'autre part, que, si le président de la commission administrative de l'hospice a, le 30 avril 1908, notifié à la supérieure de la congrégation

1901, Roumy, S. et P. 1904.3.4), et le traité inter. venu avec la congrégation subsistait. En rapportant cette délibération, la commission administrative n'avait point introduit à l'hospice un régime nouveau: elle s'était bornée à maintenir la situation existante; dès lors, l'approbation du préfet, qui n'est exigée par l'art. 8 de la loi de 1851 que pour la passation des contrats avec les congrégations et leur résiliation, n'avait point à intervenir, aucun traité nouveau n'étant passé.

La solution aurait été la même, si l'on avait considéré la décision du préfet comme ayant approuvé la délibération, par laquelle la commission administrative de l'hospice avait prononcé la résiliation du traité. En effet, un corps administratif, qui a pris une délibération soumise à approbation et qui a été approuvée, peut, sans nouvelle approbation, rapporter sa décision. V. Morgand, La loi municipale, 8 éd., t. 1o, n. 542. Adde, pour des délibérations de conseils municipaux supprimant des crédits inscrits au budget approuvé par le préfet, Cons. d'Etat, 23 mars 1900, Comm. du Vigan (S. et P. 1902.3.67); 17 mai 1901, Comm. des Herbiers (S. et P. 1904.3.30), et la note. En effet, si la loi exige l'approbation de l'autorité supérieure pour l'accomplissement d'un acte, elle ne l'exige pas, lors

chargée du service intérieur de l'hospice la délibération dont s'agit, et lui a proposé de fixer au 1er juillet suivant la cessation du service, aucune réponse n'a été faite à cette communication; qu'aucun accord n'est donc intervenu pour abréger le délai de quatre mois après lequel est nécessairement exécutoire, en vertu de l'art. 15 du traité du 24 déc. 1841, la résiliation prononcée par une des parties contractantes, et qu'ainsi ledit traité était encore en vigueur, lorsque, à la date du 27 mai 1908, la commission administrative a rapporté la délibération du 7 mars précédent; Considérant que, de tout ce qui précède, il résulte que rien ne faisait obstacle à ce que la commission administrative décidat, comme elle l'a fait alors, le maintien pur et simple du traité du 24 déc. 1841; que, tel étant le seul objet de la délibération du 27 mai 1908, cette délibération n'était pas de celles qui, aux termes du paragraphe dernier de l'art. 8 de la loi du 7 août 1851, ci-dessus rappelé, ne sont exécutoires qu'après avoir été approuvées par le préfet; qu'ainsi, en déclarant refuser une approbation qui ne lui était pas demandée, le préfet de la Nièvre a excédé ses pouvoirs; qu'il en est de même du refus du préfet d'approuver la délibération du 6 juin 1908, par laquelle le conseil municipal émet un avis favorable à la délibération de la commission administrative de l'hospice, en date du 27 mai précédent; qu'en effet, les avis donnés par les conseils municipaux, en vertu de l'art. 70 de la loi du 5 avril 1884, échappent, par leur nature même, et quel que soit l'objet sur lequel ils portent, à toute approbation de l'autorité supérieure;... - Ärt. 1er. La décision est annulée.

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que la délibération a pour but de maintenir simplement l'état antérieur.

Il n'en serait autrement que si la délibération rapportée avait créé des droits au profit de tiers, mais alors, ce serait une question de validité même de la délibération rapportant celle prise précédemment, et non une question d'approbation de cette délibération. Or, ce n'était point le cas dans l'espèce, puisque la première délibération, loin de créer des droits au profit de la congrégation, lui portait préjudice. Il résulte de tout cela que la nouvelle délibération de la commission administrative n'était point soumise à approbation. Par suite, en refusant une approbation que la loi ne l'appelait pas à donner, le préfet avait excédé sa compétence, et il avait fait grief à l'hospice en mettant obstacle à la délibération nouvelle de la commission administrative. V. Cons. d'Etat, 23 mars 1900, Comm. du Vigan, précité.

(2) Solution sans difficulté. Sur la question de savoir si les conseils municipaux sont appelés à donner un avis, au cas de résiliation du traité passe par une commission administrative d'hospice avec une congrégation hospitalière, V. Cons. d'Etat, 5 déc. 1908, Dame Mas et Daure (S. et P. 1911.3. 29; Pand. pér., 1911.3.29), et la note.

CONS. D'ÉTAT 8 avril 1911.

COMMUNE, BIENS COMMUNAUX, IMMEUBLES, BAIL, PRESBYTERE, MAIRE, CONDITIONS FINÉES PAR LE CONSEIL MUNICIPAL, INOBSERVATION, DEMANDE EN NULLITÉ (Rép., vo Commune, n. 396 et s., 520 et s.; Pand. Rép., eod. verb., n. 2211 et s.).

Le conseil municipal, ayant, en vertu de l'art. 61 de la loi du 5 avril 1884, le

(1-2) Cette affaire est d'espèce rare, et d'autant plus précieuse. Il s'agit d'une commune qui plaide en nullité d'un contrat par lequel un ancien maire l'a engagée au delà de ce qui avait été autorisé et décidé par la délibération du conseil municipal. C'est toute la question de l'incapacité civile des administrations publiques mal représentées, et c'est aussi, par suite des complications de compétence et de procédure, la question des recours en appréciation de validité des actes administratifs.

I. Voici d'abord l'exposé des faits, dont nous empruntons certains éléments aux conclusions de M. le commissaire du gouvernement Pichat:

Le conseil municipal de la commune d'OusseSuzan, dans le département des Landes, avait décidé, par délibération du 24 févr. 1907, de louer l'ancien presbytère, dont la commune avait recouvré la libre disposition, en vertu de l'art. 1o de la loi du 2 janv. 1907, aux conditions suivantes : 1° loyer de 200 fr.; 2o location annuelle. Le desservant n'ayant pas accepté ces conditions, le presbytère fut donné à bail, le 15 oct. 1907, suivant acte sous seing privé, dans les formes de l'art. 1325, C. civ., par le maire alors en fonctions, à M. R..., au prix de 200 fr., et pour une durée de trois, six ou neuf années, au gré du preneur, la commune étant liée pour neuf ans. On remarquera que, si le prix de location était le même que celui prévu dans la délibération du conseil municipal, en revanche, la durée du bail était plus longue; le conseil municipal avait décidé un bail annuel, le maire signait un bail de trois, six ou neuf ans, dans lequel la commune était engagée pour neuf ans. Ce bail fut approuvé par le préfet, le 9 nov. 1907. Il devait être soumis à l'approbation préfectorale, exceptionnellement, bien qu'il ne dépassât pas dix-huit ans (L. 5 avril 1884, art. 68), parce qu'il s'agissait d'un presbytère (L. 2 janv. 1907, art. 1). Le préfet aurait dû remarquer que le maire ne s'était pas conformé à la délibération du conseil municipal; mais on sait que, lorsqu'il y a un intérêt électoral, les préfets oublient subitement le droit administratif. Or, il y avait ici un intérêt électoral en jeu, ce qui fut bien démontré aux élections municipales de 1908. La composition du conseil municipal fut modifiée, la majorité déplacée, l'ancienne municipalité ren

versée.

Le 23 déc. 1908, la commune d'Ousse-Suzan, représentée par son nouveau conseil municipal et son nouveau maire, assignait l'ancien maire et le locataire du presbytère devant le tribunal civil de Mont-de-Marsan, à fin de déclaration de nullité du bail du 15 oct. 1907, comme ayant été consenti à des conditions de durée contraires à celles qu'avait fixées le conseil municipal.

Le tribunal de Mont-de-Marsan rendit, le 6 mars 1909, un jugement de sursis ainsi conçu : « Attendu que le sieur S... agissant en qualité de maire de la commune d'Ousse-Suzan, a actionné les sieurs J... et R... pour entendre prononcer la nullité du bail de l'ancien presbytere...; AtANNÉE 1913. 4° cah.

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pouvoir de régler les conditions des baux des propriétés communales, sous réserve de l'approbation de l'autorité supérieure, dans les cas prévus par l'art. 68 de la même loi, et par l'art. 1er de la loi du 2 janv. 1907, le maire, appelé, conformément à l'art. 90, § 6, de la loi du 5 avril 1884, à passer bail d'un immeuble communal (un ancien presbytère, dans l'espèce), est tenu de se conformer aux conditions déterminées par le conseil municipal |

tendu que la difficulté soumise au tribunal ne porte pas sur le sens et l'exécution de ce bail, points sur lesquels les tribunaux de droit commun sont compétents; qu'on lui demande d'annuler un acte passé par un maire avec approbation du préfet, pour excès de pouvoir, parce que, dans l'accomplissement de son mandat, ce maire ne se serait pas conformé à la volonté du conseil municipal, ainsi que le lui prescrit l'art. 90 de la loi du 5 avril 1884; qu'il s'agit, en l'espèce, d'un acte

essentiellement administratif; Attendu que le

tribunal commettrait, à son tour, un excès de pouvoir s'il annulait l'acte dont il s'agit; qu'il doit surseoir à statuer jusqu'à ce que l'autorité compétente se soit prononcée sur la validité de cet acte:- Par ces motifs; -Surseoit à se prononcer

sur l'action du sieur S... jusqu'à ce qu'il aura été statué par l'autorité compétente sur la valeur de l'acte de bail du 15 oct. 1907, etc. ».

En exécution de ce jugement de sursis, la commune d'Ousse-Suzan a formé un recours au Conseil d'Etat, et a conclu à ce qu'il plaise au Conseil prononcer la nullité du bail consenti le 15 oct. 1907.

Nous avons à examiner, d'abord, la nature du recours porté devant le Conseil d'Etat, ensuite la nature du procès qui s'engagera définitivement devant le tribunal civil, une fois que les parties y seront revenues.

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II. M. le commissaire du gouvernement s'est demandé si le Conseil d'Etat était compétent pour statuer sur la question qui lui était renvoyée par l'autorité judiciaire : Si l'on prend à la lettre, a-t-il dit, les termes du jugement du tribunal de Mont-de-Marsan, il faut répondre négativement. En effet, le tribunal surseoit à statuer jusqu'à ce que l'autorité compétente se soit prononcée sur la validité de l'acte de bail du 15 oct. 1907 ». Or, la juridiction administrative n'est pas compétente pour statuer sur la validité d'un contrat de droit civil, notamment d'un bail, passé par une commune, alors surtout que ce contrat n'intéresse pas le service public. V. Cons. d'Etat, 11 déc. 1903, Comm. de Gorre, et 29 avril 1904, Comm. de Messé (S. et P. 1906.3.49), et la note de M. Hauriou; 26 nov. 1909, Bouchez (S. et P. 1912.3.65 ; Pand. pér., 1912.3.65). Mais peut-être est-il possible de dégager, dans la question préjudicielle renvoyée par le tribunal, la matière d'une décision de la compétence du Conseil d'Etat. Les termes employés par le tribunal paraissent avoir mal exprimé sa pensée. On ne comprendrait pas qu'il eût renvoyé la question de validité du bail, car alors il ne lui serait rien resté à juger. Du reste, ses motifs montrent qu'il ne s'est préoccupé que du point de savoir si le maire avait outrepassé ses pouvoirs, réserve faite de l'influence de cet excès de pouvoir du maire (comme il l'appelle) sur la validité du contrat. La question réellement renvoyée au Conseil d'Etat est donc, non pas celle de la validité du bail, mais celle de savoir si un maire, passant un contrat pour la commune, est tenu de se con

(1) (L. 5 avril 1884, art. 61, 90, $ 6).

Spécialement, lorsque le conseil municipal'a décidé de donner à bail l'ancien presbytère, moyennant un prix par lui fixe, et pour une durée d'un an, le maire ne peut passer un bail dont le loyer est celui fixé par le conseil municipal, mais dont la durée est de trois, six ou neuf années, au gré du preneur, la commune étant live pour neuf ans (2) (LL. 5 avril 1884, art. 61, 90, § 6; 2 janv. 1907, art. 1er).

former aux décisions du conseil municipal sur cet objet. C'est bien une question administrative, de la compétence du Conseil d'Etat. Le Conseil d'Etat, en statuant sur cette question, ne statue pas sur la validité du contrat, qui reste de la compétence exclusive du tribunal civil, lequel appréciera l'influence que peut avoir la méconnaissance par le maire de ses pouvoirs sur le contrat luimême. V. en ce sens, Cons. d'Etat, 4 août 1905, Martin (S. et P. 1906.3.49), et la note de M. Hauriou. V. aussi, dans cette même affaire, les conclusions de M. Romieu, rapportées au Rec. des arrêts du Cons. d'Etat, 1905, p. 752. D'ailleurs, il n'est pas douteux que le maire avait, dans l'espèce, outrepassé ses pouvoirs. La loi du 5 avril 1884 dispose, art. 61 Le conseil municipal règle par ses délibérations les affaires de la commune... »; art. 90: Le maire est chargé, sous le contrôle du conseil municipal et la surveillance de l'Administration supérieure..., de passer les baux des biens...., et, d'une manière générale, d'exécuter les décisions du conseil municipal Ainsi, en matière de baux, le conseil municipal règle, décide, détermine les conditions; le maire n'est que son agent d'exécution, et il est manifestement tenu de se conformer aux décisions prises par le conseil municipal. Le conseil municipal d'Ousse-Suzan avait fixé à un an la durée de la location du presbytère. Le maire était tenu de se conformer à cette décision, et ne pouvait fixer la durée du bail qu'il consentait à trois, six ou neuf ans ».

M. le commissaire du gouvernement s'est borné à cette discussion sur la question de compétence et à ces conclusions au fond; il ne s'est pas demandé quelle était exactement la nature du recours dont se trouvait saisi le Conseil d'Etat, et il s'en est suivi, à ce qu'il nous semble, quelque imprécision dans la rédaction de l'arrêt.

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Cette formule ne correspond à aucun recours catalogué et classé. Le recours qui semblait indiqué ici est celui que Laferrière appelle « recours en appréciation de validité de l'acte », et qu'il étudie au tome 2 de son Tr. de la jurid, admin. et des rec. content., 2° éd., p. 604 et s. Ce recours existe lorsque la validité d'un acte d'administration est contestée, non pas d'une façon principale, mais d'une façon accessoire, à l'occasion d'un litige né et actuel pendant devant une juridiction, ou à l'occasion d'une instance administrative devant aboutir à une décision. Il est recevable pendant trente ans; il est, en principe, porté devant le Conseil d'Etat (V. Cons. d'Etat, 28 avril 1882, Ville de Cannes, S. 1884.3.27. P. chr,; & déc. 1899. Martinier, S. et P. 1902.3.25, la note et les renvois), III PART. - 7

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(Comm. de Ousse-Suzan).

Par délibération du 24 févr. 1907, le conseil municipal de la commune de

et n'est pas dispensé du ministère de l'avocat. V. Cons. d'Etat, 26 janv. 1906, Reynaud et Joyeuse, (S. et P. 1908.3.24: Pand. pér., 1908.3.24). Il n'aboutit qu'à une déclaration de l'illégalité de l'acte, et non pas à une véritable annulation, car l'anéantissement de l'acte ne produit ses effets qu'inter partes, et non pas d'une façon absolue, comme dans le recours pour excès de pouvoir.

On voit bien l'objection qui a arrêté le commissaire du gouvernement, et, à sa suite, le Conseil. Le recours en appréciation de validité exige un acte, c'est-à-dire une décision; il est « en appréciation de validité d'un acte : il aboutit à la déclaration d'illégalité d'un acte. Or, dans le fait du maire qui passe un contrat de bail, ils n'ont sans doute pas aperçu d'acte administratif du maire, qui fût séparable du consentement à l'acte civil du bail.

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Et pourtant, il en faut trouver un. Ce n'est pas seulement parce qu'il faut faire rentrer notre recours de la commune d'Ousse-Suzan dans le type du recours en appréciation de validité de l'acte. C'est encore et surtout parce qu'il n'y a pas, en principe, de recours contentieux administratif qui ne soit un recours contre un acte. Et M. le commissaire du gouvernement obéissait lui-même à cette logique supérieure du contentieux administratif, lorsqu'il déclarait, dans un passage que nous avons souligné plus haut: Peut-être est-il possible de dégager, dans la question préjudicielle renvoyée par le tribunal, la matière d'une décision de la compétence du Conseil d'Etat ». Nous ne supposons pas qu'il ait été dans sa pensée de parler ici de la décision à prendre par le Conseil d'Etat. En tout cas, nous pensons, quant à nous, qu'on peut extraire des faits.de la cause la matière d'une décision administrative implicite du maire, séparable de la conclusion du contrat, et susceptible de donner lieu à un véritable recours en appréciation de validité de l'acte.

Quand le maire conclut un contrat de droit civil, les choses se passent comme s'il prenait, au préalable, un arrêté par lequel il déclarerait publiquement qu'il va passer le contrat dans telles et telles conditions: cette décision administrative implicite précède le contrat, et est séparable du

contrat.

A la vérité, si nous entrons dans cette voie, il faut admettre que, dans les deux mois de la passation du contrat, un recours pour excès de pouvoir direct pourra être formé contre cette décision administrative implicite, qu'on pourra la faire annuler pour excès de pouvoir, et qu'en effet, cette décision implicite peut contenir de l'excès de pouvoir. Mais cette conséquence n'est pas pour nous faire reculer. D'une part, depuis la loi du 17 juill. 1900, nous sommes familiarisés avec cette idée qu'il y a des décisions administratives implicites, et que des recours pour excès de pouvoir sont recevables contre elles. D'autre part, il est incontestable que, dans le fait d'un maire qui conclut un contrat en exécution d'une délibération du conseil municipal, il y a quelque chose de complexe. Ce maire fait un acte civil, mais il fait aussi un acte administratif, en tant qu'il exécute la décision du conseil municipal, et il est naturel que le progrès de l'analyse juridique arrive à séparer l'acte administratif de l'acte civil, et à dénoncer l'excés de pouvoir que peut contenir l'acte administratif. Le tribunal de Mont-de-Marsan avait parfaitement senti que, dans

Ousse-Suzan avait décidé de louer l'ancien presbytère, dont la commune avait recouvré la libre disposition en vertu de l'art. 1er de la loi du 2 janv. 1907, aux con

le cas particulier, il y avait un acte administratif et un excés de pouvoir, qui était, dans l'espèce, l'incompétence.

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En conséquence, nous eussions formulé l'arrêt de la façon suivante : Est déclaré entaché d'excès de pouvoir l'acte par lequel le maire a décidé de procéder à la location du presbytere sans se conformer à la délibération du conseil municipal ».

III. Revenons maintenant devant la juridiction civile pour essayer de déterminer, non pas ce qui se passera, mais ce qui devrait se passer (nous ne pensons pas qu'elle se soit encore prononcée définitivement, du moins nous n'avons pas trouvé trace de la décision dans les Recueils).

L'action portée devant le tribunal civil est une action en nullité du bail. Mais quelle espèce d'action en nullité? Elle est intentée par la commune, représentée par son nouveau conseil municipal et son nouveau maire, pour demander la nullité d'un contrat passé au nom de la même commune par un ancien maire, que l'on prétend avoir mal représenté la commune. Il a mal représenté la commune, parce qu'il n'était compétent pour passer le bail que s'il se conformait à la délibération du conseil municipal, et qu'il ne s'y est pas conformé. Ils étaient deux représentants de la commune, dans cette affaire, qui devaient marcher d'accord, le conseil municipal et le maire; le maire n'ayant pas marché d'accord avec le conseil municipal, la commune prétend qu'en réalité, elle n'a pas été représentée, et que le consentement qui a été donné en son nom, et qui paraît être le sien, a été vicié.

Il s'agit donc d'un vice du consentement qui se rattache à la notion de l'incapacité. Il faut admettre que les communes, et, d'une façon générale, les administrations publiques, dont les droits sont exercés par des organes représentatifs, sont de perpétuelles incapables, et, comme on disait autrefois, de perpétuelles mineures. Ce sont de perpétuelles mineures, en ce sens que leurs droits sont exercés par des représentants, ne peuvent l'être autrement, et que les représentants, sorte de tuteurs, étant astreints à des procédures et à des formalités, ne sont eux-mêmes valablement dans leur rôle de représentants que lorsqu'ils se conforment aux formalités. Dès qu'ils ne se conforment plus aux formalités, des qu'ils commettent ce que le droit administratif appelle une incompétence, ils ne représentent plus valablement, et l'administration publique peut faire valoir plus tard qu'elle n'a pas été valablement engagée. Une administration publique, dont le représentant a négligé une formalité, par exemple, une commune dont le maire a négligé de se conformer à la délibération du conseil municipal, dans un cas où cela était nécessaire, est dans la même situation qu'un mineur dont le tuteur a négligé de se conformer à une délibération du conseil de famille qui lui était imposée.

Il y a simple vice du consentement, et non pas défaut de consentement. Le maire, alors même qu'il agit d'une façon irrégulière, représente la commune, tout comme le tuteur représente le pupille, alors même qu'il n'observe pas les formalités prescrites par la loi; la représentation subsiste, quoique irrégulière dans les deux cas, l'acte est simplement annulable. V. Trib. de Gray, 18 avril 1889 (sol. implic.) (S. 1891.2.69. P. 1891.1.346); Cass.

ditions suivantes: 1° loyer, 200 fr.; 2o location annuelle. Le desservant n'ayant pas accepté ces conditions, le presbytère a été donné à bail, par le maire alors en fonc

8 janv. 1895 (sol. implic.) (S. et P. 1895.1.278; Pand. per., 1896.1.189), les notes et les renvois. Adde, Aubry et Rau, 5 éd., t. 4, p. 451, § 339, texte et note 12; Laurent, Princ. de dr. civ., t. 19. n. 17; Huc, Comment. du C. civ., t. 8, n. 193, p. 246; Demolombe, Contr. ou oblig., t. 6, n. 82: BaudryLacantinerie et Barde, Des oblig., 3e éd., t. 3, n. 2030; Larombière, Theor. et prut. des oblig., t. 5, sur l'art. 1304, n. 49. V. cep. en sens contraire, Solon, Theor. sur la nullité, t. 2, n. 479.

Par conséquent, l'action est une action en nullité, basée sur l'art. 1304, C. civ., prescriptible par dix ans. V. Cass. 8 janv. 1895, précité. Et cela, non seulement parce que la commune est comparable à un mineur dont le représentant légal a agi en dehors des formalités requises, mais parce que l'art. 1304 est d'une portée générale, et que sa disposition s'applique à toutes les actions en nullité de conventions, du moins lorsque le vice qui affecte la convention est contemporain de la formation de celle-ci. V. Baudry-Lacantinerie et Barde, op. cit., t. 3, n. 2026 et s. D'ailleurs, la prescription décennale de cette action est opposable aussi bien aux administrations publiques qu'aux particuliers, par application de l'art. 2227, C. civ. V. Cons. d'Etat, 15 juin 1877, Ville de Chambéry (S. 1879. 2.155. P. chr.).

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Quant au point de départ de la prescription de dix ans pour ces actions en nullité des administrations publiques considérées comme des mineures, on se heurte à une difficulté. Les mineurs deviennent majeurs, et l'on comprend que le droit civil ne fasse courir le délai de dix ans que du jour de la majorité; mais les administrations publiques ne deviennent jamais majeures, en ce sens qu'elles ne peuvent jamais se passer d'un représentant. Cherchera-t-on une comparaison du côté des interdits? « Le temps ne court, à l'égard des actes faits par les interdits, que du jour où l'interdiction est levée (C. civ., 1304). Mais la levée de l'interdiction, cela ne veut pas dire seulement que le dément est revenu à la raison, cela veut dire, aussi et surtout, qu'officiellement, son représentant légal lui a été enlevé, et que, désormais, il peut agir par lui-même sans représentant; or, jamais une commune ne peut agir sans représentant. Il ne saurait donc être question de dire la prescription ne commencera à courir que lorsque la commune sera revenue à la raison, ou après de nouvelles élections qui auront renouvelé ses représentants. Il faudrait pouvoir dire: elle ne commencera à courir que lorsque la commune n'aura plus de représentant, ce qui n'est pas possible.

Il convient donc, ici, de renoncer aux analogies, et, comme il faut bien un point de départ à une prescription d'action, comme, en principe, une action commence à se prescrire du jour où elle est née, comme les dispositions de l'art. 1304, relatives à certains incapables, et à la suspension de la prescription à leur égard, sont exceptionnelles. comme, d'ailleurs, le commerce juridique est intéressé à ce que les contrats restent le moins longtemps possible exposés à l'annulation, il faut admettre que le délai de dix ans commence à courir des le jour de la conclusion du contrat. V. Cons. d'Etat, 15 juin 1877, Ville de Chambéry, précité; Dijon, 5 juin 1884 (sol. implic.) (S. 1886.2.196. P. 1886.1.1099); Cass. 18 mai 1886 (sol. implic.) (S 1890.1.514. - P. 1890.1.1246; Pand. pér., 1886.1.

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