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les administrateurs fondateurs du projet de société ci-dessus mentionné, ont stipulé dans l'art. 7 des statuts, que le versement des deux premiers dixièmes aurait lieu en souscrivant et sur récépissé signé de trois administrateurs;

Qu'en effet, c'est seulement par la souscription effectuée dans les termes des statuts que se forme entre les fondateurs et les souscripteurs, non le lien social, mais l'engagement réciproque dont l'autorité exige la justification pour apprécier la solvabilité des compagnies et les admettre à con courir;

Attendu, dès-lors, qu'il ne saurait y avoir de souscription et, par conséquent, d'engagement réciproque sans le versement préalable de deux dixièmes; que jusque-là, l'accomplissement de cette condition essentielle, les publications et circulaires de toute sorte, les demandes d'actions, les admissions à souscrire, et autres correspondances invoquées dans la cause, ne sont que des préliminaires de négocia tions, des échanges d'intentions manifestées qui ne sauraient former un lien sérieux entre les parties, et qu'elles sont toujours libres de modifier ou d'abandonner jusqu'au moment de la réalisation de l'engagement en la forme voulue;

Attendu que la loi du 15 juillet a consacré ces principes dans l'intérêt des sociétés et des véritables souscripteurs, dans celui de la morale publique et de l'autorité responsable vis-à-vis de tous de la sincérité des adjudications, refusant toute valeur comme tout caractère négociable aux promesses d'actions, et même aux récépissés provisoires, jusqu'après la constitution définitive de la société ;

Attendu, en fait, que des débats et des pièces produites, il ressort que les demandeurs, après avoir été, conformément à leur intention, admis à souscrire pour un nombre déterminé d'actions et invités à régulariser leurs souscriptions dans les termes des statuts, et dans les délais volontairement accordés, n'avaient pas encore réalisé cette souscription au moment où les défendeurs ont adopté d'autres combinaisons;

Qu'après avoir ainsi, par leur retard, paralysé la réalisation du capital et rendu douteux le concours à l'adjudication, et, par suite, la formation de la société projetée, ils sont sans droit pour forcer aujourd'hui les défendeurs à recevoir leurs capitaux, dont ces derniers déclarent ne pouvoir ni ne vouloir faire l'emploi annoncé ;

Attendu qu'il résulte de ce qui précède qu'aucune mise en demeure n'était nécessaire, de la part des défendeurs, pour déterminer la réalisation d'un contrat qui n'existait pas encore; qu'elle serait, d'ailleurs, sans intérêt comme sans résultat utile, en présence des conditions et du terme de rigueur imposé par la loi aux compagnies soumissionnaires du chemin de fer;

Attendu que les principes posés ci-dessus s'appliquent également à tous les demandeurs d'actions qui n'ont pas ré gularisé leurs souscriptions par le versement préalable, quelle que soit, d'ailleurs, l'époque réelle ou apparente de leur admission à souscrire;

Sur l'appel émis envers ce jugement par les sieurs Lagondeix et autres :

ARRÊT.

Sur les conclusions conformes de M. TERNAUX, avocatgénéral;

Adoptant les motifs des premiers juges;

LA COUR confirme.

Du 1er octobre 1845; Cour royale de Paris; chambre des vacations; Prés. M. MOREAU; Plaid. MM. Da, MOULIN et CHAIX-D'ESTANGE.

DEUXIÈME ESPÈCE.

(Pourcelt contre Leboeuf et Comp.)

Cette seconde espèce s'est présentée devant le Tribunal de commerce de Paris, dans des circonstances semblables à celles de la précédente.

Des souscripteurs de la Compagnie Leboeuf, formée pour soumissionner le chemin de fer du Nord, étaient en retard d'opérer leurs premiers versemeus et prétendaient, néanmoins, avoir droit au partage des actions dévolues à la compagnie dans la fusion opérée entre elle et d'autres compagnies.

JUGEMENT.

Attendu que la loi du 15 juillet 1845, qui autorise la concession du chemin de fer du Nord, impose aux compaguies soumissionnaires, entre autres conditions de rigueur, le versement préalable d'une partie du prix d'adjudication et

le dépôt des registres à souche ou états, constatant les engagemens réciproques des administrateurs et des souscrip

leurs;

Attendu que ce n'est que par l'accomplissement de ces formalités indispensables, que l'autorité peut apprécier les garanties que doivent offrir les soumissionnaires et leur donner son agrément pour concourir à l'adjudication;

Attendu que, pour satisfaire aux conditions que la loi exige, les fondateurs de sociétés pour l'exploitation des chemins de fer, doivent rester juges du mérite des souscripteurs et libres de les admettre ou de les refuser, jusqu'au moment où la souscription se trouve réalisée et l'engagement réciproquement contracté dans les formes prescrites par les

statuts:

Attendu que les pièces produites et les correspondances in voquées par les demandeurs comme formant un contrat sérieux et réciproque, ne sont et ne peuvent être dans l'esprit de la loi, dans l'intérêt des sociétés et dans celui des véritables souscripteurs, que des préliminaires de négociation et des échanges d'intentions qui ne sauraient lier les parties entre elles d'une manière définitive;

Attendu, en fait, que les demandeurs avaient connaissance de l'obligation qui leur était imposée de verser un dixième en souscrivant;

Qu'après avoir été, sur leur demande, admis à venir souscrire pour un nombre déterminé d'actions, ils n'ont pas régularisé leur souscription, malgré les avis qu'ils en ont reçus ;

Qu'ils ont, par leur retard, contribué à empêcher la réalisation du projet de soumission et de société, formé par les défendeurs;

Qu'ils sont aujourd'hui sans droit pour les contraindre à recevoir le versement tardif des fonds dont ces derniers dé clarent n'avoir plus à faire l'emploi annoncé :

LE TRIBUNAL déclare les demandeurs mal fondés et les condamne aux dépens.

Du 8 septembre 1845; Tribunal de commerce de Paris; Prés. M. BERTRAND ; Plaid, MM. SCHAYE, MartinLEROI et DURMONT.

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Sonscription.
Nullité. Ordre

- Pro

messe d'action. - Négociation. public.

La négociation des promesses d'actions dans les compagnies de chemins de fer, est-elle interdite comme contraire à l'ordre public? (Rés. aff.)

Par suite, toute action en justice doit-elle être refusée aucessionnaire de pareils titres, soit vis-à-vis de la compagnie, soit vis-à-vis du cédant ou de tout autre intéressé? (Rés, aff.) (Peuget contre Burillon, Dumoulinet Comp., Lapinsonnière.)

LE sieur Burillon était porteur d'une promesse de 200 actions de la compagnie Lapinsonnière, sur le chemin de fer de Paris à Lyon.

Hors d'état de pouvoir effectuer le versement du premier dixième, il cède sa promesse au sieur Pouget. Celui se présente à la caisse de la compagnie pour verser 10,000 fr., montant du dixième imposé,

Mais il est arrêté par une opposition du sieur Dumontlin, cessionnaire et porteur du duplicata du titre de l'action, obtenu de la compagnie par Barillon, sur la déclaration faite par celui-ci que le titre originaire était perdu.

En l'état des droits réclamés par les deux compétiteurs, un procès s'engage devant le Tribunal de commerce de Paris entre Pouget, Dumoulin, Burillon et la compagnie Lapinsonnière.

JUGEMENT.

Attendu qu'il s'agit de ventes de promesses d'actions du chemin de fer de Paris à Lyon,

Que toute négociation de titres pareils a été interdite par la loi ;

Que cette stipulation est d'ordre public;

Qu'en conséquence, la vente dont il s'agit ne peut donner ouverture à aucune action en justice.

LE TRIBUNAL déclare le demandeur non-recevable en sa demande et le condamne aux dépens.

Du 31 octobre 1845, Tribunal de commerce de Paris: Prés. M. MOINERY, Plaid. MM. Eugène LEFEBVRE, PruNIER-QUATREMERE et LAN.

FIN DE LA DEUXIÈME PARTIE.

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