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» M. le ministre de la justice dénonce à la Cour suprême cette décision. Il y trouve une contravention expresse aux règles de la compétence et un excès de pouvoir.

dience, s'y refusa par le motif que le ser- >> fonctionnaire sera admis à prêter serment à ment étant un acte civil relevant de la juri- » l'audience tenue cejourd'hui par le tribunal diction civile, il ne pouvait en requérir la » de première instance, audience présidée par prestation devant la chambre correctionnelle. >> le vice-président de ce siége, le président éLe tribunal, après délibération, a pronon- » tant empêché. » — Sur l'ordre de M. le précé sur l'incident en ces termes : « Attendu sident, le greffier a donné lecture de la com» que le serment est la solennité essentielle qui mission susvisée; et immédiatement le sieur » achève d'imprimer la qualité d'homme pu- Fauvel s'étant présenté devant le bureau de M. »blic au fonctionnaire; Attendu qu'aux ter- le président, ce magistrat lui a lu la formule » mes de l'art 65 du décret du 30 mars 1808, du serment en ces termes : « Vous jurez obéis>> les prestations de serment doivent se faire de- »sance à la constitution et fidélité au prési>> vant le tribunal de première instance, sans >> dent; vous jurez aussi d'obéir à vos chefs en >> distinction entre la chambre civile et la cham- >> tout ce qui concerne le service auquel vous »bre correctionnelle quand le tribunal est sec- » ètes appelé; et, dans l'exercice de vos fone>>tionné en deux chambres; que là où la loi ne >>tions, de ne faire usage de la force qui vous >> distingue pas, il n'est pas permis de distin- >> est confiée que pour le maintien de l'ordre guer; que le serment n'est pas, d'ailleurs, un >> et l'exécution des lois. » Et ledit Fauvel, >> acte de juridiction civile; que c'est plutôt l'in- debout, et la main droite levée, a répondu : >> vestiture donnée, le sceau solennel imprimé « Je le jure, » de laquelle prestation de ser» par l'autorité judiciaire, à la fonction publiquement le président lui a donné acte. » conférée par les pouvoirs politiques; que, » pour mieux assurer cette solennité, le même > art. 65 a prescrit que les serments dont la >> prestation est ainsi déférée aux tribunaux de » première instance seraient reçus à l'audience » de la chambre tenue par le président, c'est» à-dire en présence de la plus haute person»nification de l'autorité judiciaire de l'arrondis» sement; qu'il n'est pas douteux cependant que, » si le président, qui a le droit, aux termes de >> l'art. 46 du même décret, de présider celle >> des deux chambres à laquelle il veut s'atta» cher, et même l'autre chambre quand il le ju»ge convenable, était ou attaché à la chambre >> correctionnelle, ou présidait momentanément >> cette chambre, ce serait devant elle que les >> serments devraient être prêtés; qu'il y a donc >> attribution spéciale de fonction pour le prési» dent d'un tribunal dans tous les cas où doit » se produire l'acte solennel du serment; at>> tendu qu'aux termes de l'art. 47 du même dé»cret, lorsque le président est dans le cas d'è. >tre suppléé pour des fonctions qui lui sont spécialement attribuées, il doit être remplacé » par le vice-président qui est, après lui, la >> personnification la plus haute de l'ordre ju» diciaire dans l'arrondissement: Et atten» du en fait, que le président titulaire du tri>>bunal de première instance de Lille est, et » sera empêché pendant quelque temps encore, >> et ne siegera pas avant le jour 22 de ce mois; » qu'il se trouve maintenant de droit et de fait remplacé dans les fonctions inhérentes » spécialement à sa qualité par le vice-prési» dent, lequel préside le tribunal de première >> instance à l'audience de ce jour; attendu,» ront tenus, avant d'entrer en fonctions, de » d'ailleurs, que la prestation de serment de la >> part d'un fonctionnaire institué par le gou» vernement porte en soi le caractère de l'ur>gence; qu'on ne saurait faire dépendre son >> entrée en fonctions de l'absence ou de l'em» pêchement plus ou moins prolongé du prési» dent du tribunal;-Le tribunal, sans s'arrê»ter à l'exception d'incompétence proposée » par le ministère public, se déclare légalement » constitué pour recevoir le serment du gendar> me Fauvel Dit, en conséquence, que ce

» Voici, sur le premier point, les explications que renferme sa lettre : Le serment est un acte essentiellement civil, qui ne se rattache, en aucune façon, à la justice répressive; il n'a d'autre but que de compléter le caractère de l'homme public. Il doit donc être prêté devant le tribunal civil. La loi et la jurisprudence de la Cour de cassation sont formelles à cet égard. L'art. 32 de l'ordonnance du 29 oct. 1820 porte que le serment des gendarmes est reçu par le président des tribunaux de première instance, étant en séance. L'art. 1 de l'ordonnance du 26 oct. 1835 relative au serment des militaires de la gendarmerie est ainsi conçu: « Tout officier, >>sous-officier ou militaire du corps de la gen» darmerie prêtera devant le tribunal civil de >> première instance dans le ressort duquel il » sera employé le serment dont la teneur >> suit ... La loi du 21 juin 1836, qui a modifié les termes du serment à prêter par les militaires du corps de la gendarmerie, dispose que ce serment sera prêté devant le tribunal de première instance. Le mot civil, qui est écrit dans l'ordonnance du 26 oct. 1835, n'est pas reproduit dans la loi de 1836; mais il résulte évidemment du rapprochement des textes que c'est la même juridiction, la juridiction civile, qui seule doit recevoir le serment. L'art. 20 du décret du 1er germ. an XIII concernant les droits réunis, contient une disposition analogue; il est ainsi conçu : « Les préposés de la régie se

» prêter serment devant le juge de paix ou le >> tribunal civil de l'arrondissement dans lequel >> ils exercent. » Enfin, la Cour de cassation a reconnu, le 16 nov. 1844 (Bull. off., n. 373, Journ. Pal., t. 1er 1845, p. 776), que la juridiction compétente pour recevoir le double serment que doivent prêter les gardes champêtres est le tribunal civil de première instance. L'art. 5 du décret du 5 avril 1852 veut qu'à l'avenir le double serment des gardes champêtres soit reçu par les juges de paix. Mais ce changement

de législation laisse toute sa valeur à l'argument tiré de l'arrêt de la Cour de cassation. D'ailleurs la justice de paix est une juridiction civile. Tous ces textes démontrent suffisamment que, sous aucun rapport, le tribunal correctionnel de Lille n'était compétent pour recevoir le serment d'un gendarme. Quant au motif tiré de ce que, en l'absence du président, il était nécessaire que ce serment fût prêté à la chambre où siégeait le vice-président, c'est un motif sans valeur, puisque le président n'aurait pas eu, plus que le vice-président, le droit de recevoir un serment en audience de police correctionnelle, et que d'ailleurs le vice-président ne remplace le président que pour affaires de service, et non dans les prérogatives attachées à sa dignité. Il y a donc lieu d'annuler pour incompétence l'acte dont il s'agit.

» Quant à l'excès de pouvoir, le ministre s'exprime ainsi Les gendarmes sont investis par de nombreuses dispositions d'attributions très importantes. L'art. 179 de l'ordonnance du 29 oct. 1820 sur la gendarmerie les charge notam- | ment de recueillir et de prendre des renseignements sur les crimes et délits de toute nature, sur leurs auteurs et complices, de rechercher et de poursuivre les malfaiteurs, de dresser des procès-verbaux des incendies, effractions, assassinats, etc. Ils exercent donc des fonctions publiques. Dès lors, ils ne peuvent être admis à la prestation du serment que sur les réquisitions du ministère public, qui, au préalable, doit s'assurer qu'ils remplissaient les conditions exigées par la loi. Ces principes ont, du reste, été consacrés par trois arrêts de la Cour de cassation des 20 sept. 1823, 15 juil. 1836 et 22 mars 1843 (Journ. Pal., t. 1er 1837, p. 575 et t. 2 1843, p. 215).

>> Des deux moyens ainsi résumés, il en est un, le second, qui ne peut, à notre avis, être l'objet de la controverse. Il est de principe, en effet, qu'aucune juridiction ne peut, hors des cas réservés expressément, se saisir directement des affaires ou actes dont la loi lui attribue la connaissance. L'initiative appartient aux agents investis de cette mission. Ainsi, sans insister sur la doctrine, s'agit-il de prestation de serment, c'est au ministère public qu'il appartient exclusivement de la requérir. Toutes les fois que la question s'est élevée, les arrêts ont consacré la prérogative du ministère public. La Cour de cassation a jugé constamment que la prétention émise par les avoués de présenter au serment des gardes forestiers commissionnés par les particuliers était inadmissible. La prestation de serment est subordonnée à l'accomplissement de certaines conditions. La loi conlie au ministère public le soin d'en vérifier l'existence il la proclame en requérant le serment. Telle est la règle pour tous les cas. A fortiori la faut-il suivre quand il s'agit de gendarmes dont les fonctions s'exercent sous la surveillance des officiers du parquet. Lors donc que le tribunal de Lille a reçu un serment non requis par le ministère public, il a empiété sur des attributions qui ne lui ont pas été conférées, et commis un excès de pouvoir.

T. Ile de 1833.

>>> Mais le premier moyen est-il aussi fondé? Est-il exact de dire que les règles de compétence ont été violées parce que le serment a été prêté dans une audience de police correctionnelle? La doctrine exprimée dans la lettre ministérielle nous paraît susceptible de graves objections. —Que le serment, qui, selon l'expression de Loyseau, donne au fonctionnaire le caractère de son office, soit un acte civil, et que la prestation doive en avoir lieu devant le tribunal civil, la jurisprudence et la loi sont d'accord à cet égard. Mais faut-il nécessairement conclure de ces prémisses que, dans le cas où la prestation s'accomplit devant le tribunal siégeant en police correctionnelle, les règles de compétence sont méconnues? Personne ne conteste que la plénitude de juridiction réside dans les tribunaux de première instance. Leur compétence embrasse toute espèce d'affaires, civiles ou correctionnelles, et c'est ainsi que, dans les lieux où trois juges suffisent aux besoins de la justice, toutes les affaires, quelle qu'en soit la nature, sont appréciées et jugées par eux. Ce n'est que dans les centres de population où la multiplicité des affaires a forcé d'augmenter le nombre des magistrats et de créer deux ou plusieurs chambres, que, pour la plus prompte et la plus sûre expédition des affaires, on les a divisées, et attribué spécialement à l'une des chambres les affaires correctionnelles. Mais on comprend sans peine qu'un tel arrangement ne modifie pas les pouvoirs attachés au titre de juge. La spécialité de l'application ne détruit pas le droit. Or comment douter que, dans le cas où le tribunal n'est composé que de trois juges, le serment soit légalement reçu par le président, quelle que soit l'audience qu'il préside au moment de la prestation; qu'il prononce sur des affaires civiles ou des affaires correctionnelles? La loi ne subordonne la régularité du serment qu'à la présence du président : « Les prestations de serment qui doivent se faire devant le tribunal de première instance seront reçues à l'audience de la chambre que tient le président, ou à l'audience de la chambre des vacations, si on se présente pour ces prestations de serment pendant les vacances » (art. 65 du décr. du 30 mars 1808). Puis, comment soutenir que l'exercice des attributions que la loi confère au président du tribunal dépend, non de sa qualité même et de son titre, mais de la nature des affaires qu'il juge? Que, compétent pour recevoir un serment, si les affaires débattues à l'audience sont des affaires civiles, il est incompétent dès qu'il s'agit de causes correctionnelles? Le président, quelle que soit l'application de son pouvoir, est le président, et quand, siégeant en police correctionnelle, il reçoit un serment, il fait un acte aussi régulier que s'il siégeait en audience civile. La loi, pour la régularité de l'acte, n'exige qu'une condition, la présence du président. On ne peut ajouter à son texte. Mais si la chose ainsi faite est légale dans un tribunal de trois juges, pourquoi ne le serait-elle pas si le tribunal, plus nombreux, se divise en deux chambres? Le président peut, à son gré, siéger à la chambre

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civile ou à la chambre correctionnelle. La loi lui confère cette prérogative. Or, ou il faut soutenir qu'en choisissant le service correctionnel, il se dépouille des attributions inhérentes à son titre, ce qui est impossible; ou il faut reconnaitre qu'en recevant un serment à l'audience qu'il préside, il ne fait qu'user de son droit.

» Cette considération tranche la difficulté.En fait, il est constant que le président du tribunal de première iustance de Lille était empêché, et que le vice-président siégeait à la police correctionnelle. En droit, les attributions du président empêché étaient provisoirement déférées au vice-président. On admet que, si, dans ces circonstances, il avait reçu le serment en audience civile, la loi aurait été respectée. Il n'en peut être autrement, parce que la distribution des travaux l'avait appelé à la police correctionnelle.-L'argument tiré des arrêts de la Cour de cassation n'a pas l'importance qu'on lui donne. La question agitée lors de ces arrêts n'était pas, en effet, de savoir si la prestation de serment par un agent de la force publique pouvait se faire régulièrement, légalement, devant le tribunal siégant en police correctionnelle; mais si, en raison de la fonction (il s'agissait de gardes champêtres), il fallait s'adresser aux tribunaux de première intance plutôt qu'aux juges de paix. La Cour de cassation a tranché en faveur des tribunaux de première instance une controverse qu'avait engendrée l'obscurité ou plutôt la multiplicité des textes. Mais qu'induire de la solution donnée sur un débat d'attributions entre deux juridictions différentes? - Nous comprenons que le magistrat attaché au service correctionnel ne peut y mêler, sans troubler les règles de la compétence, des affaires civiles. Mais pour tout ce qui est acte de juridiction spéciale, pour les prérogatives que la loi attache au titre, la limitation accidentelle des pouvoirs de juger n'y peut apporter de changement. - Par ces considérations, etc. Signė: DELANGLE.» Du 17 aout 1852, arrêt C. cass., ch. req., MM. Mesnard prés., Silvestre rapp., Sevin av. gén.

<< LA COUR; Vu l'art. 80 de la loi du 27 vent. an VIII; Attendu qu'aux termes de l'art. 65 du décret du 30 mars 1808, les prestations de serment qui doivent se faire devant le tribunal de première instance doivent être reçues à la chambre que tient le président; Attendu, en fait, que la chambre que tenait le président du tribunal de première instance de Lille, au moment où le sieur Fauvel s'est présenté pour prêter son serment, était la chambre civile du tribunal de Lille; d'où il suit que cette chambre était seule compétente pour recevoir ledit serment; que, si le président du tribunal était momentanément empêché de remplir ces fonctions, cette circonstance n'a pu enlever à la chambre civile sa compétence dans l'état où elle restait composée, c'est-à-dire présidée par le plus ancien juge; que la chambre correctionnelle du tribunal, en recevant un serment qu'elle n'avait droit de recevoir à aucun titre, à commis un excès de pouvoir;

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CASSATION (3 décembre 1852). DÉLITS DE PRESSE, DÉLITS DE LA PAROLE, APPEL, COURS IMPÉRIALES.

L'art. 26 du décret du 17 février 1852, d'après lequel l'appel des jugements correctionnels rendus en matière de délits de presse doit étre porté directement, sans distinction' de situation locale, devant la chambre des appels de police correctionnelle de la Cour impériale, est limité aux délits de la presse seulement, et ne s'applique pas aux délits de la parole. Cette disposition constitue une dérogation unique en cette matière à l'art. 200 C. inst. crim. (1).

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LAVEDAN.

Du 3 DÉCEMBRE 1852, arrêt C. cass., ch. crim., MM. Laplagne-Barris prés., Dehaussy de Robécourt rapp., Raynal av. gén.

<< LA COUR; Vu la demande en règlement de juges, formée par le procureur général près la Cour d'appel de Paris, dans le procès instruit contre Jean Lavedan, âgé de trente-deux ans, ouvrier charpentier, et Louise Château, âgée de trente-sept ans, sa femme, prévenus de complicité de vol par recel, et de propagation de fausses nouvelles par la parole; — Attendu que, par ordonnance de la chambre du conseil du tribunal de première instance de Fontainebleau, du 21 juil. 1852, ledit Lavedan et ladite Louise Château ont été renvoyés devant le

tribunal de police correctionnelle comme prévenus d'avoir, en juillet 1851, soustrait frauduleusement une montre au préjudice du sieur Pequignot, et, en outre, Lavedan comme préret du sieur Picard, à Montereau, propagé une venu d'avoir, le 15 juin 1852, dans le cabanouvelle fausse de nature à troubler la paix publique, en disant qu'il arrivait de Paris, qu'on avait cassé le buste de Napoléon, que la troupe avait repoussé les insurgés sur les hauteurs de Belleville, que la fusillade marchait fort, que le canon grondait dur, qu'il avait vu cet événement, mais qu'il n'avait pas voulu rester et était parti; et, enfin, la femme Lavedan, d'avoir, dans le cours du mois de juin 1852, soustrait frauduleusement une brosse, de la cire, des clefs et différents autres objets mobiliers au préjudice de l'administration du chemin de fer de Paris, délits prévus par les art. 401 C. pén., et 25 de la loi du 17 fév. 1852; - Auendu que, par jugement du 30 juil. 1852, le tribu

(1) V. conf. Orléans, 10 mai 1852 (t. 2 1852, p. 72), et la note.

nal de police correctionnelle de Fontainebleau a renvoyé la femme Lavedan du chef de la prévention relatif à la soustraction fraudu leuse de brosse, cire, clefs et autres objets mobiliers, au préjudice de l'administration du chemin de fer de Paris, mais a déclaré ladite femme coupable du vol d'une montre d'or par elle commise au préjudice du sieur Péquignot, et Jean Lavedan coupable de complicité de ce vol pour avoir sciemment recelé ladite montre volée; que ce jugement a, de plus, déclaré Lavedan coupable du délit de propagation de fausses nouvelles, par application de l'art. 4 de la loi du 27 juil. 1849, de l'art. 1er de la loi du 17 mai 1819 et de l'art. 25 de la loi du 17 fév. 1852; qu'en conséquence, ledit jugement a condamné les époux Lavedan, savoir, Lavedan à quinze mois d'emprisonnement et 50 fr. d'amende, et la femme Lavedan à trois mois d'emprisonnement et 16 fr. d'amende;

>> Attendu que, sur l'appel interjeté par les époux Lavedan de ce jugement, le tribunal de police correctionnelle de Melun, jugeant en ap- | pel de police correctionnelle, par jugement du 10 sept. 1852, a donné acte à la femme Lavedan du désistement de son appel, et, en ce qui touche l'appel de Lavedan, s'est déclaré incompétent et à renvoyé l'affaire devant les juges qui en doivent connaître, par le motif que la pénalité portée au jugement du 30 juil. 1852, rendu par le tribunal de police correctionnelle de Fontainebleau, s'applique à deux délits, dont un puni par les lois des 17 mai 1819, 27 juil. 1849 et 17 fév. 1852 et qu'aux termes de l'art. 26 de la loi du 17 fév. 1852, les appels des jugements rendus par les tribunaux correctionnels sur les délits commis par la voie de la presse doivent être portés directement, sans distinction de la situation locale de ces tribunaux, devant la chambre correctionnelle de la Cour d'appel, et que, dans l'espèce, Lavedan a été poursuivi pour un délit de cette nature; Attendu qu'en exécution de ce jugement d'incompétence, l'affaire a été portée devant la chambre des appels de police correctionnelle de la Cour d'appel de Paris, et que cette Cour s'est déclarée incompétente par arrêt du 21 oct. 1852, pour connaître des délits imputés à Lavedan, par le motifque, si, d'après l'art. 26 du décret du 17 fév. 1852, les appels des jugements correctionnels rendus en matière de délits de presse doivent être portés directement et sans distinction de situation locale devant la chambre correctionnelle de la Cour d'appel, il résulte des termes dudit article que les appels dont il s'agit sont limités aux délits de la presse seulement, et ne s'appliquent point aux délits de la parole; qu'en effet, cet article ne reproduit pas, comme l'art. 25, les expressions relatives aux délits commis par tout autre moyen de publication que la voie de la presse; que, dès lors, cette disposition constitue une dérogation unique en cette matière à l'art. 200 C. inst. crim., d'où il suit que Lavedan, prévenu de complicité de vol et de publication de nouvelles fausses par des discours tenus publiquement dans une auberge, a été avec raison

renvoyé devant le tribunal de police correctionnelle de Fontainebleau pour être jugé sur ces deux délits, mais que l'appel interjeté par Lavedan devait être porté, par les motifs ci-dessus énoncés, devant le tribunal supérieur de Melun; qu'en conséquence, l'arrêt précité a renvoyé l'affaire devant qui de droit;

» Attendu que cet arrêt n'a été l'objet d'aucun pourvoi, qu'il n'est pas susceptible d'être réformé par les voies ordinaires; · Attendu qu'il en est de même du jugement du tribunal supérieur de Melun, jugeant en appel de police correctionnelle, du 10 sept. 1852; Attendu qu'il résulte de la contrariété de ces décisions un conflit négatif qui interrompt le cours de la justice qu'il importe de rétablir; Vu les art. 526 et suiv. C. inst. crim. sur les règlements de juges, statuant sur la demande dont il s'agit et y faisant droit;

» Attendu que, d'après les dispositions de l'art. 26 du décret du 17 fév. 1852, les appels des jugements correctionnels rendus en matière de délits de presse doivent être portés directement, sans distinction de situation locale, devant la chambre des appels de police correctionnelle de la Cour d'appel; mais qu'il résulte des termes de cet article que les appels dont il s'agit sont limités aux délits de la presse seulement, et ne s'appliquent pas aux délits de la parole; qu'en effet, ledit article ne reproduit pas, comme l'art. 25 de ce décret, les expressions relatives aux délits commis par tout autre moyen de publication que par la voie de la presse; que, dès lors, cette disposition constitue une dérogation unique en cette matière à l'art. 200 C. inst. crim.; Attendu qu'il résulte de ces principes que la connaissance des faits imputés à Jean Lavedan, sur lesquels il avait été compétemment statué par le jugement du tribunal de police correctionnelle de Fontainebleau du 30 juil. 1852, appartenait, sur l'appel interjeté par Lavedan, au tribunal supérieur de Melun, jugeant en appel de police correctionnelle; que c'est donc à tort que, par jugement du 10 sept. 1852, ce tribunal s'est déclaré incompétent pour en connaître; Par ces motifs, sans s'arrêter audit jugement qui sera considéré comme non avenu, réglant de juges, - RENVOIE Jean Lavedan en l'état où il se trouve, et les pièces du procès, devant le tribunal supérieur de Versailles, jugeant en appel de police correctionnelle, pour être statué conformément à la loi, sur l'appel interjeté par ledit Lavedan du jugement du tribunal de police correctionnelle de Fontainebleau du 30 juil. 1852. »

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CASSATION (29 mars 1853). FEMME MARIÉE, SÉPARATION DE BIENS, SURENCHÈRE, AUTORISATION. La loi faisant un devoir à la femme de poursuivre les effets du jugement de séparation de biens qu'elle a obtenu contre son mari, il en résulte qu'elle est implicitement relevée de son incapacité, et doit être réputée autorisée par ce jugement même, pour tous les actes qui

tendent au recouvrement de ses reprises, no- a fait, par déclaration au greffe du même tritamment pour l'exercice, motivé par la né-bunal, sous la date du 27 avril 1850, une surcessité de poursuivre la restitution de sa dot, enchère du sixième du prix d'une adjudication du droit de surenchère sur les immeubles de prononcée, le 22 du même mois, en faveur des son mari, vendus à la requête des créanciers défenderesses, dans l'instance en saisie-immode celui-ci (1). bilière poursuivie contre son mari par un des créDAME COGNE anciers de celui-ci; que la surenchère, ainsi déclarée dans le délai de la loi, avait pour objet, et pouvait avoir pour résultat, de réaliser ou d'assurer le recouvrement de ses reprises; Attendu, en droit, qu'aux termes de l'art. 1444 C. Nap., la séparation, quoique prononcée en justice, est nulle si elle n'a point été exécutée par le paiement réel des droits et reprises de la femme, jusqu'à concurrence des biens du mari, ou au moins par des poursuites commencées dans la quinzaine qui a suivi le jugement, et non interrompues depuis; que la loi elle-même faisant ainsi à la femme un devoir de poursuivre les effets du jugement de séparation, elle se trouve, implicitement à la vérité, mais nécessairement, relevée de son incapacité, et doit être réputée autorisée par ce jugement même pour tous les actes qui tendent au recouvrement de ces reprises, et notamment pour l'exercice du droit de surenchère motivé, comme dans l'espèce, par la nécessité de poursuivre la restitution de sa dot; - D'où il suit qu'en jugeant le contraire, l'arrêt dénoncé a fait une fausse ap

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C. VEUVE BERTRAND ET DEMOISELLE LONG. En 1841, la dame Virginie Cogne épousait en secondes noces le sieur François Long, et se constituait en dot la totalité de ses biens présents et à venir. Le 27 août 1849, après plusieurs demandes en séparation de biens infructueuses, la séparation de corps fut prononcée par le tribunal de Valence. Les biens immeubles du mari, vendus par expropriation, furent adjugés à la dame Bertrand et à la demoiselle Elisa Long. Mais par acte au greffe du 27 avril 1850, la dame Cogne, épouse Long, a formé la surenchère du sixième et a porté le prix des immeubles adjugés à la somme de 19,207 fr.; puis, en dénonçant la surenchère, elle a assigné les adjudicataires pour l'entendre valider. Celles-ci en ont au contraire demandé l'annulation, qui a été prononcée par le tribunal de Valence le 21 mai 1850, et, sur l'appel, par la Cour de Grenoble le 30 août suivant (V. cet arrêt que nous avons rapporté au t. 2 1852, p. 324).

CASSATION (25 avril 1853). HUISSIER, RESTITUTIONS, JUGE DE PAIX, INCOMPÉTENce.

Pourvoi en cassation, pour 1° fausse applica-plication des art. 215 et 217 C. Nap., et exprestion des art. 215 et 217 C. Nap., et violation sément violé les dispositions ci-dessus visées; de l'art. 1444 du même Code, en ce que l'arrêt Sans qu'il soit besoin d'examiner le deuxièattaqué a décidé que la femme séparée de biens me moyen; CASSE, etc, »> ne peut surenchérir les immeubles de son mari, sur lesquels repose son hypothèque, sans une autorisation spéciale et formelle de ce dernier ou de justice, et a refusé ainsi de reconnaître que l'autorisation résulte virtuellement du jugement de séparation; 2o violation de l'art. 225 C. Nap., en ce qu'en supposant même qu'une autorisation spéciale fut nécessaire, l'arrêt attaqué aurait à tort admis à se prévaloir du défaut d'autorisation les adjudicataires surenchéris, alors qu'aux termes de l'article précité le défaut d'autorisation ne peut être opposé que par la femme, par le mari, ou par leurs héritiers.

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(1) Plusieurs arrêts ont reconnu que le jugement de séparation de biens a pour effet de conférer virtuellement à la femme le droit d'en poursuivre l'exécution: Nîmes, 12 juill. 1831; Cass. 11 avril 1842(t. 11843, p. 630). L'arrêt que nous rapportons ajoute à cette solution en disant que ce jugement va jusqu'à autoriser virtuellement la femme à surenchérir. C'est aussi ce qu'avaient décidé les Cours d'Orléans, le 25 mars 1831, et de Bourges, les 25 fév. et 25 août 1840 (t. 2 1840, p. 65

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La disposition de l'art. 73 décr. 14 juin 1813, aux termes de laquelle toute condamnation contre les huissiers à l'amende, à la restitution et aux dommages-intérêts, pour faits relatifs à leurs fonctions, doit être prononcée par le tribunal de première instance du lieu de leur résidence, est générale, et applicable même au cas où la demande aurait pour objet une somme inférieure au taux ordinaire de la compétence des tribunaux de paix.

En conséquence, le juge de paix est incompétent pour connaitre de la demande formée contre un huissier en restitution de sommes reçues par lui à l'occasion de ses fonctions, quelque modiques que soient ces sommes (2).

MAUPIN C. Letulle.

Du 25 AVRIL 1853, arrêt C. cass., ch. civ., MM. Bérenger prés., Delapalme rapp., Vaïsse av. gén. (concl. conf.), Costa av.

p. 324). C'est l'arrêt cassé par celui que nous rapV., cependant, Grenoble, 30 août 1850 (t. 2 1852, portons.

V. notre annotation sous Cass. 14 juin 1843 (t. 2 1843, p. 213); tion de biens, no 413. Rép. gen. Journ. Pal., vo Sépara

(2) V., dans le même sens, Cass. 29 juin 1840 (t. 2 1840, p. 766). — V., au surplus, Rép, gén. Journ. Pal., vo Huissiers, nos 386 et suiv.

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