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tombe exclusivement sur l'un des commission naires intermédiaires qu'autant qu'il est prouvé que l'avarie a eu lieu par son fait ou par celui des agents ou voituriers qu'il a directement employés. C. comm. 99.

doit voyager avec célérité, et alors surtout que les avaries ne pourraient être reconnues qu'en ouvrant les caisses et les balles qui la contiennent; - Attendu qu'en pareil cas, d'après la jurisprudence adoptée par tous les tribunaux de commerce, la responsabilité de l'indemnité due au propriétaire d'une marchandise avariée peut remonter à l'expéditeur de cette marchandise, et

Ce commissionnaire intermédiaire peut être en outre admis à prouver par toutes sortes de preuves, et notamment par témoins, qu'il n'a pas dépendu de lui d'éviter les causes d'avariene retombe sur l'un des commissionnaires interde la marchandise.

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« Attendu, en fait, qu'à la date du 14 déc. 1850, Trinquier, représentant d'Auzilly et Frainet, livra aux sieurs Reynard, Lespinasse et Sauvan, 266 caisses d'oranges à lui adressées par Bacle, pour être expédiées à Lyon; que lesdits Reynard, Lespinasse et Sauvan, ayant reçu les marchandises, les ont en effet acheminées sur les lieux de leur destination, et qu'en vertu de cette livraison Trinquier réclame la remise de la lettre de voiture restée entre les mains de Reynard, Lespinasse et Sauvan, avec une déclaration de ces derniers constatant que les 266 caisses d'oranges leur ont été livrées dans un bon état de conditionnement; Attendu que, de leur côté, Reynard, Lespinasse et Sauvan, tout en reconnaissant qu'ils ont reçu et expédié à Lyon les marchandises mentionnées ci-dessus, déclarent que l'un d'eux, le sieur Sauvan, ayant été prévenu de l'arrivée des caisses d'oranges à la gare du chemin de fer, se rendit au bureau de Trinquier pour l'inviter à ne pas les faire transporter de suite dans ses magasins, parce qu'il n'était pas arrivé de bateau à vapeur de Lyon qui put les recevoir, et que, d'ailleurs, le temps annonçait de la pluie; que, nonobstant cette démarche et cette invitation de Sauvan, le sieur Trinquier n'en fit pas moins opérer le chargement desdites caisses sur des camions, sans prendre aucune précaution pour les couvrir, et que le transport s'opéra, le même jour, avec une pluie battante; que le sieur Bacle, expéditeur de la marchandise, ayant rencontré les camions marchant avec la pluie, se rendit immédiatement chez lesdits Reynard, Lespinasse et Sauvan, pour y formuler des protestations contre l'avarie qui pourrait résulter de la mouillure des caisses d'oranges, et qu'à leur tour les sieurs Reynard, Lespinasse et Sauvan ne veulent délivrer la lettre de voiture, stipulée franco, qu'en relatant les faits mentionnés cidessus et faisant leurs réserves en cas d'avarie; -Attendu, en droit, que, si, d'après l'art. 106 E. comm., en cas de refus ou de contestation pour la réception des objets transportés, leur état doit être vérifié et constaté par des experts nommés par le président du tribunal de commerce ou par le juge de paix, cette formalité, qui devient obligatoire lorsque la marchandise, étant rendue à sa destination, peut être examinée avec soin, et au besoin déballée, n'est pas applicable lors de la remise que les commissionmaires se font entre eux d'une marchandise qui

médiaires qu'autant qu'il est prouvé que l'avarie a eu lieu par son fait ou par celui des agents ou voituriers qu'il a directement employés; Considérant que, les 266 caisses d'oranges étant arrivées à Paris complétement avariées, un procès est pendant devant le tribunal de commerce de la Seine pour faire supporter à qui de droit les conséquences de cette avarie; que, bien qu'il soit peu probable qu'elle ait été occasionnée par la mouillure de ces marchandises à Avignon, les sieurs Reynard, Lespinasse et Sauvan, qui peuvent être appelés en cause, ont intérêt à faire constater les faits mentionnés cidessus, et dont ils demandent à faire la preuve;

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Par ces motifs, le tribunal, avant dire droit sur le fond, admet Reynard, Lespinasse et Sauvan à prouver par toute sorte et manière de preuve, et même par témoins : 1° que......... (suit l'énumération des diverses circonstances exposées plus haut, et dont le jugement autorise la preuve). »

Appel par les sieurs Auzilly et Frainet.

Du 19 NOVEMBRE 1851, arrêt C. Nîmes, 1 ch., MM. Teulon 1er prés., Liquier av. gén., Michel et Boyer av.

« LA COUR, miers juges,-CONFIRME, etc. » Adoptant les motifs des pre

GRENOBLE (17 novembre 1851).

TOULOUSE (11 mars 1852). DEGRÉS DE JURIDICTION, qualité d'héritier, CONTESTATION INCIDENTE, Chose jugée. Bien que la qualité d'héritier se trouve contestée incidemment à la demande, le jugement n'en est pas moins en dernier ressort si l'objet de cette demande n'excède pas 1,500 fr. (1). Le jugement qui, dans ce cas, prononce sur la qualité d'héritier, n'a l'autorité de la chose jugée qu'entre les parties en cause, et relativement à l'objet du litige (2). C. Nap.800, 1351. (2 espèce.)

Première espèce. ARNOUX C. Pellat.

Do 17 NOVEMBRE 1851, arrêt C. Grenoble, 1re ch., MM. Royer 1er prés., Alméras-Latour av. gén., Michal et Desgranges av.

<< LA COUR; des consorts Arnoux tendant à faire déclarer Attendu que la conclusion

(1-2) V. conf. Bordeaux, 22 nov. 1844 (t. 2 1845, p. 322), et le renvoi. V. aussi conf., sur la première question seulement, Douai, 27 fév. 1847 (t. 1 1847, p. 460).-V., au surplus, sur les deux queslues dans le sens de l'arrêt que nous rapportons, tions, controversées, mais plus généralement résoRép. gén. Journ. Pal., vo Degrés de juridict., nos 428 et suiv.

les consorts Pellat héritiers purs et simples de leur père ne peut s'isoler de leur demande en paiement d'une somme de deniers; qu'elle en est l'accessoire obligé et doit nécessairement en suivre le sort; qu'ainsi l'appel des consorts Arnoux ne saurait être admis, si la somme qu'ils réclament n'excède pas le chiffre fixé pour attribuer aux juges du premier degré la mission de prononcer en dernier ressort; · Attendu que le capital porté par la sentence arbitrale du 29 nov. 1817 est de 1,318 fr., et que, fallût-il l'additionner de tous les intérêts courus depuis cette époque, la dette se divisant de plein droit entre cinq cohéritiers, chaque part restera toujours inférieure à 1,500 fr., Par ces motifs, DECLARE non recevable l'appel des consorts Arnoux du jugement rendu le 28 mai 1850 par le tribunal d'Embrun. »

Deuxième espèce.

BRUEL C. VALERY.

Du 11 MARS 1852, arrêt C. Toulouse, 2 ch., MM. Martin prés., Bonafous av. gén., Fourtanier et Serville av.

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cipe général pour l'appliquer aux cas qui rentrent dans la matière qu'il a eu pour objet de régler;-Que, parmi les conditions exigées pour qu'une décision judiciaire acquière l'autorité de la chose jugée, aucune n'est plus essentielle que celle qui veut qu'il ait été statué entre les mêmes parties; qu'il en doit être ainsi, parce que le fait d'un autre ne peut engendrer pour personne une obligation ou devenir la source d'un droit; Que, donner à l'art. 800 le sens que prétend Bruel, ce serait vouloir que, si, par l'effet du jugement qui serait intervenu entre lui et Valery, il était décidé qu'il n'est pas héritier, les tiers ne pussent pas, quelle que fût plus tard la puissance de leurs moyens et de leurs preuves, faire juger qu'il a cette qualité; qu'un pareil résultat suffit pour prouver la signification abusive que l'on donnerait à l'art. 800; que son interprétation doit être la même en ce qui est relatif à l'héritier, et qu'il a, aussi bien que les tiers, le droit de concentrer l'effet du jugement entre lui et celui en faveur de qui il a été prononcé, parce que ce n'est qu'entre eux qu'il a, pour tout ce qui a été jugé, statué « LA COUR; — Attendu que, pour échapper irrévocablement; Que, si l'on entendait se à la demande en rejet de l'appel, Bruel oppose prévaloir de ce que la qualité d'héritier ne se que, si la somme réclamée était inférieure à peut point diviser, et qu'on ne pourrait le de1,500 fr., la contestation a pour objet sa qualité venir à l'égard des uns sans l'être vis-à-vis des d'héritier; qu'ainsi le litige a pris un caractère autres, il faudrait dire que l'intelligence peut indéterminé;- Qu'il n'est pas fondé à soutenir bien, dans l'abstraction de la théorie pure, comque le débat a porté principalement sur la vali- prendre cette indivisibilité, mais qu'elle dispadité de sa répudiation; que Valery a conclu à ce raît dans la pratique; que chacun exerce des que le tribunal n'y eût pas égard; mais que c'é- droits ou est tenu de devoirs divers, selon la tait pour écarter l'obstacle qui lui était opposé; différence des situations où il se trouve et des que, si c'était là le moyen qu'il employait pour individus avec lesquels il traite; que, quelle répondre à l'objection, la condamnation au paie- que soit la variété des jugements, ils subsistent ment de la somme dont il se prétendait créan- et produisent leurs effets, tandis qu'à moins de cier était l'objet principal de sa demande, à la-violer tous les principes les plus certains et les quelle se joignait, comme exception, la renonciation dont entendait se prévaloir Valery; que le juge en dernier ressort du principal était donc appelé à statuer souverainement sur l'incident; »Attendu, d'ailleurs, que c'est par une fausse interprétation de l'art. 800 C. civ. qu'on soutient que la décision qui prononce sur la qualité d'héritier a un caractère d'irrévocabilité si absolu, que ce titre, dès qu'il a été donné à un individu, a fait une telle impression sur sa tête, qu'il l'oblige même à l'égard de ceux avec qui la chose n'a pas été jugée; Que cet article dispose, il est vrai, que l'héritier perd la faculté de faire inventaire et d'accepter la succession bénéficiairement, quand il a été condamné, en qualité d'héritier pur et simple, par un jugement passé en force de chose jugée; que ces derniers mots devront recevoir une acception différente, selon que cette disposition sera considérée comme introduisant une modification à l'art. 1351, ou faisant seulement application de la règle qu'il pose; que rien, dans un de ces articles, n'indique que celui qui est écrit au titre Des successions contienne une dérogation à celui qui a été inséré au titre Des obligations; qu'une exception ne se présume pas; que, lorsqu'elle n'est ni expressément ni implicitement énoncée dans la disposition d'où on entend l'induire, il faut s'en tenir à celle qui pose le prin

plus élémentaires, il faut décider que, pour que l'autorité de la chose jugée ait lieu, il faut que la chose demandée soit la même, que la demande soit fondée sur la même cause, qu'elle soit entre les mêmes parties; Que l'art. 800 ne permet donc pas d'appliquer à d'autres qu'aux parties entre lesquelles le débat s'est engagé, et a été vidé, le jugement qui a été prononcé sur leur différend, puisque ce n'est qu'entre elles qu'il est passé en force de chose jugée; - Que toute interprétation est inutile pour une disposition législative dont le sens est exempt d'ambiguïté; que, si l'on voulait éclairer celui de l'art. 800 par la discussion qui a eu lieu au Conseil d'état, elle ne ferait que confirmer les déductions qui précèdent; Que, dans son sein, une lutte s'engagea entre les partisans d'une jurisprudence déjà ancienne, qui avait voulu que la qualité d'héritier jugée avec un créancier fût fixée à l'égard de tous, et ceux d'une pratique plus généralement admise dans les derniers temps, qui ne donnait d'effet à la décision qu'en faveur de celui qui l'avait obtenue; - Que les premiers l'avaient emporté dans le travail préparatoire, duquel était née une proposition qui attribuait l'autorité de la chose jugée à tout jugement contradictoire qui avait prononcé sur la qualité d'héritier ; - Que la section de législation avait donné raison aux seconds, en modi

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fiant l'article en ce sens que celui qui était condamné comme héritier par un jugement même contradictoire et inattaquable n'était réputé héritier qu'à l'égard du créancier en faveur duquel la décision avait été rendue; - Que cette dernière disposition fut mise en délibération; qu'au moment où la discussion était le plus vivement engagée, on fit observer qu'elle deviendrait sans objeet par l'adoption ultérieure de l'article qui est aujourd'hui le 1351; que le procès-verbal qui rapporte ce débat se termine en disant que la proposition de la section de législation fut retranchée; -Que cette mention indique assez que son inutilité avait été reconnue; que, si, plus tard, l'art. 800 fut adopté, sans soulever de discussion, la généralité de ses termes tend à prouver qu'au lieu d'introduire une innovation, il n'a fait que se conformer au droit commun; qu'on peut bien le considérer comme une superfétation en présence de l'art. 1351; mais qu'on n'y saurait voir une contradiction du principe général posé dans ce dernier;

>>Que l'exception opposée par Bruel à la demande de Valery n'en avait donc changé ni la nature ni l'objet; qu'elle était d'une somme bien inférieure à 1,500 fr.; que le tribunal était dès lors appelé à exercer la plénitude de juridiction; que sa décision est en dernier ressort; Par ces motifs, Rejette l'appel, etc. »

HÉRITIERS LE NORMANT

C. HÉRITIERS NOEL ET DELAPLACE.

Par acte du 15 brum, an XI (6 nov. 1802), les sieurs Noël et Delaplace ont cédé aux sieurs Nicolle et Le Normant, libraires, la moitié de leur droit de propriété sur un recueil connu sous le nom de Leçons françaises de littérature et de morale.-Le dernier survivant des auteurs, le sieur Noël, est décédé en 1841. Ils laissaient tous deux des enfants ou autres héritiers. C'est donc en 1851 que, suivant la législation existante lors de la cession (c'est-à-dire la loi de 1793), les droits exclusifs de propriété eussent dû cesser de produire effet tant au profit des héritiers des auteurs qu'au profit des cessionnaires. Mais, depuis cette cession, la législation s'était modifiée, et le privilége des héritiers, limité à dix ans par la loi de 1793, avait été prorogé a vingt ans au profit des enfants des auteurs par le décret du 5 fév. 1810.

Question de savoir si cette prolongation devait profiter aux cessionnaires aussi bien qu'aux enfants des auteurs, ou si, au contraire, à l'égard des cessionnaires, le droit avait dû cesser d'exister en 1851, époque de l'expiration du délai des dix années, seul accordé aux héritiers par la législation sous l'empire de laquelle la

cession avait été faite.

Le 17 mai 1851, sentence arbitrale qui repousse la prétention des cessionnaires en ces

termes :

PARIS (12 juillet 1852). PROPRIÉTÉ LITTéraire, cession, durée, « Considérant que la cession et la participation PROLONGATION, HÉRITIERS. relatives à l'ouvrage de Noël et Delaplace ont eu La durée du droit qui appartient au cession- lieu sous l'empire de la loi du 19 juill. 1793, qui naire de la propriété d'un ouvrage littéraire ne reconnaissait aux auteurs d'un ouvrage le droit est restreinte dans les limites apposées à la de propriété littéraire que pendant leur vie, et durée du droit des auteurs ou de leurs héri-à leurs héritiers que pendent dix ans après la tiers par la législation existant lors de la cession (1). Dès lors, la prolongation de durée du droit des héritiers accordée par une loi nouvelle intervenue pendant la jouissance du cessionnaire profite aux héritiers de l'auteur, à l'exclusion du cessionnaire (2). L. 19 juil. 1793; Décr. 5 fév. 1810.

mort des auteurs;-Considérant que c'est donc le droit de propriété littéraire, tel qu'il était défini par cette loi, qui a pu seul faire la matière du contrat; que, par suite, les cédants n'ont pu vouloir céder, leurs cessionnaires acquérir, et les coparticipants mettre en société, un droit plus étendu que celui consacré par la de la loi de 1793 pour prétendre que son privilége devait se prolonger encore pendant dix ans après la mort de l'auteur: Cass. 27 prair. an XI; 16 brum, an XIV. - V. conf. Gastambide, Tr. de la contref., no 133; Lesenne, Tr. des dr. d'aut., no 215.

(1-2) V. conf. Gastambide, Tr. de la contrefaç., no 134, et, en note, un jugement du tribunal civil de la Seine du 5 janv. 1831 rendu en faveur des héritiers du sieur de Wailly, auteur du Nouveau vocabulaire français. MM. Renouard (Tr. des dr. d'aut., t. 2, nos 210 et suiv.) et Gouget et Merger (Dict. de dr. comm., On avait, dans le principe, agité la question de To Propriété littéraire, no 209) pensent également que savoir si l'auteur d'un ouvrage peut en céder la proles prolongations légales résultant du décret de 1810|priété non seulement pendant sa vie, mais aussi pour n'ont pas profité aux cessionnaires dont le titre d'acquisition n'avait pas prévu cette éventualité.

La Cour de cassation a eu, après la promulgation de la loi du 19 juil. 1793, à juger une question qui présente de l'analogie avec celle résolue par l'arrêt que nous rapportons. On sait que sous l'empire de l'arrêt du Conseil du 30 août 1777 (art. 5), dont l'esprit fut développé et expliqué par un autre arrêt du Conseil du 30 juil. 1778 (V. Gastambide, Tr. de la contref., no 1, en note), la cession faite par l'auteur de son privilége à un libraire avait pour effet de réduire la durée de ce privilége à celle de la vie de l'auteur. Or il a été décidé que le cessionnaire d'un ouvrage tombé, d'après cette législation sous l'empire de laquelle la cession avait été contractée, dans le domaine public, n'a pu se prévaloir

|

la période pendant laquelle la loi réserve, après sa mort, la jouissance de cette propriété à sa veuve et à ses héritiers. Mais les auteurs se sont prononcés pour l'affirmative. La propriété littéraire n'est, en effet, dans les mains de l'auteur, qu'un droit de la même nature que tout autre droit de propriété. L'au teur peut donc en disposer d'une manière absofue pendant sa vie; aucune loi ne le lui défend, et celle qui a garanti à sa veuve et à ses héritiers, pendant un temps déterminé, le privilége littéraire, a supposé évidemment que l'auteur le laissait dans sa succession. V. Gastambide, Tr. de la contref., no 134; Nion, Dr. cin. des auteurs, p. 285; Lesenne Tr. des dr. d'auteur, no 144.

V., sur ces divers points, Rep. gen. Journ. Pal., vo Propriété littéraire, nos 123 et suiv., 140 et suiv.

JURISPRUDENCE FRANÇAISE.

-

loi;
Considérant que le décret du 5 février | droit privilégié des auteurs et de leurs héritiers
et cessionnaires à la durée de la vie des au-
1810, en portant à vingt ans, pour la veuve
et les héritiers des auteurs, le droit de pro-teurs, et aux dix ans suivant leur décès; - Que
Noël et Delaplace n'ont entendu céder et trans-
priété littéraire, a introduit un droit nouveau,
qui n'a eu son existence qu'à partir du dé-porter que les droits conférés à eux et leurs
Que la société
cret, et qui, par conséquent, ne peut profi- héritiers par ledit décret ;
ter qu'à ceux au profit desquels il a été établi; fondée pour exploiter le privilége mis en com-
Considérant que, pour que le bienfait spé-mun, société où Noël et Delaplace et leurs ayant-
cause n'auraient plus rien apporté, ledit privilé
ge expiré, n'a été établie que pour la durée du
privilége dont elle avait en vue d'organiser et
assurer l'exploitation; - Que le décret du 5 fév.
1810, accordant à la veuve et aux enfants sur-
vivants une jouissance de vingt années après le
décès des auteurs, a créé des droits nouveaux
subordonnés à l'existence de la veuve et des en-
Adoptant,
fants, et devant profiter à eux seuls, hors le
cas de conventions contraires;....
au surplus, les motifs des premiers juges;
CONFIRME, etc. »

-

cial et personnel de la loi pût être attribué aux
cessionnaires antérieurs ou à la société formée
avant qu'il ait été accordé, il faudrait que l'é-
ventualité d'une prolongation de privilege eût
été expressément stipulée; que cette stipulation
ne peut s'induire des termes généraux dans les
quels une cession a été faite et une société con-
tractée; · Considérant que rien dans le traité
du 15 brum. an XI ne prouve que les auteurs
Noël et Delaplace aient entendu étendre la ces-
sion et la société à une éventualité de prolonga-
tion qu'aucune circonstance ne devait leur faire
prévoir; que, dès lors, ils doivent être consi-
dérés comme n'ayant disposé que de ce dont la
Considérant que
loi les autorisait à disposer;
les veuve et héritiers Le Normant ne sont pas fon-
dés à prétendre que le droit de jouir de la prolon
gation résulte de ce que la propriété de l'ouvrage
a été mise en société pour une durée indétermi-
née, et que, par conséquent, la chose étant deve
nue commune, tous ses accroissements doivent
profiter à la société;— Qu'en effet, la propriété
littéraire, étant un droit incorporel, n'a pu être
mise en commun que dans les conditions qui la
constituaient légalement; que le droit était dé-
fini et circonscrit au moment où le contrat a eu
lieu, et que les parties ne s'en sont dessaisies
que dans l'état où il existait; qu'enfin, dans l'es-
prit du législateur, la prolongation de la durée
n'est pas un accroissement issu de la chose elle-
même, mais une faveur nouvelle accordée aux
Considérant qu'il est re-
veuves et héritiers;
connu que les délais consacrés par là loi du 19
juil. 1793 ont pris fin le 29 janv. 1851; qu'ain-
si, à partir de ce jour, les veuve et héritiers
Le Normant ont cessé d'avoirdroit à la propriété
littéraire des Leçons de littérature et de morale;
-Disons que les droits des veuve et héritiers Le
Normant sur la propriété littéraire des Leçons de
morale et de littérature, par Noël et Delaplace,
ont cessé d'exister à partir du 29 janv. 1851. »
Appel.

DU 12 JUILLET 1852, arrêt C. Paris, 1r ch., MM.Troplong 1er prés., Duvergier et Liouville av.

« LA COUR;-Considérant que, quelque généraux que soient les termes d'une convention, elle ne comprend que les choses sur lesquelles il paraît que les parties se sont proposé de contracter (C. Nap. 1163); que les contrats doivent être interprétés et réglés eu égard aux lois en vigueur au moment où ils ont été formés; - Que, dans le traité du 15 brum. an XI, il ne s'agissait pas de la cession et de la mise en société d'une propriété ordinaire, mais d'un droit particulier et restreint de publication ou reproduction; Que, lors de ce traité, le décret du 19 juil. 1793, dont la modification n'était pas prévue par les parties, limitait formellement le

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METZ (15 mars 1853).

TESTAMENT, RÉVOCATION TACITE, BATURE AU
CRAYON SUBSTITUTION prohibée, dis-

POSITION IMPLICITE.

S'il est généralement admis qu'un testament peut
être révoqué par des moyens autres que ceux
autorisés par les art. 1035 et suiv. Č. Nap.,
notamment par la lacération de l'acte maté-
riel ou la rature totale ou partielle des dispo-
sitions qu'il contient, du moins faut-il que ces
moyens ne laissent subsister aucune incerti-
tude sur l'intention du testateur de leur faire
produire cet effet (1).

Ainsi on ne peut considérer comme révoquée la
disposition d'un testament sur laquelle a été
passé un trait au crayon, si la légèreté et le
peu de précision de ce trait ne lui donnent pas
les caractères d'une véritable rature pouvant
l'en-
équivaloir à une révocation, et alors que
semble de l'acte résiste à la supposition d'un
changement de volonté de la part du testa-
teur (2).

La libéralité contenant charge de conserver et
de rendre à un tiers constitue une substitution
prohibée, soit que cette charge soit exprimée
en termes formels dans l'acte, soit qu'elle ré-
sulte de l'ensemble de ses dispositions (3). C.
Nap. 896.

Il y a fideicommis graduel ou linéal et charge de
conserver et de rendre, par conséquent sub-
stitution prohibée, dans les dispositions par
lesquelles le testateur, après avoir exprimé
son intention que ses biens ne soient pas ven-
dus et dispersés, et qu'ils restent toujours in-
tacts tels qu'il les abandonne, institue un lé-
gataire universel, et, en cas de prédécès, ses
enfants, puis appelle, dans plusieurs passa-
ges du testament, à sa succession, les héri-
tiers et descendants dudit légataire universel,
soit que celui-ci prédécède, soit qu'il survive
au testateur (4).

(1-2) V. Rép. gen. Journ. Pal., v° Testament, nos 1477 et suiv.

(3-4) Jurisprudence constante. V. notamment Poi

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HÉRITIERS MEr et héritiers PRISCAL.

ne peut disparaître devant une présomption faible, douteuse, équivoque, d'autant moins siDU 15 MARS 1853, arrêt C. Metz, 1re ch.,gnificative, que l'emploi du crayon s'est borné MM. Charpentier 1er prés., Serot 1er av. gén. aux deux traits matériels dont il s'agit, le tes(concl.conf.), Boulanger et de Faultrier av. tateur s'étant toujours servi de la plume lorsqu'il « LA COUR ; Sur la première question, a voulu retoucher quelques unes de ses disposicelle de savoir si la disposition testamentaire tions; - Attendu que l'annulation de la disporelative aux biens mobiliers a été révoquée sition du mobilier détruirait toute l'économic par les traits au crayon placés sur les mots mo- de l'acte; - Attendu enfin que, si elle était biliers, et: Attendu qu'il est incontestable admise, elle aurait pour effet de replacer les que Pierre-Jacques Priscal, mû par des senti- biens mobiliers dans la succession ab intestat ments de reconnaissance envers la famille Mer, de Pierre-Jacques Priscal, et, par conséquent, a institué pour ses seuls et uniques héritiers de les attribuer en grande partie précisément à Mer père et les deux fils de celui-ci, et qu'à deux de ses proches qui sont frappés d'exhéré– cette première disposition, si nettement formu- dation, et dont le nom ne se trouve pas une lée, il a ajouté ces expressions : « Auquel je seule fois dans son acte de dernière volonté : » donne les biens mobiliers et immobiliers qui certes, il suffit de peser cette conséquence pour >> composeront ma succession au jour de mon être convaincu que telle ne peut pas avoir été » décès, pour en jouir en toute propriété, à la l'intention du testateur; et, dès lors, il faut charge d'exécuter mes volontés que je vais maintenir la disposition relative aux biens mo>> annoncer et ordonner article par article »; biliers et infirmer en ce point le jugement attaAttendu que, par une clause subséquente, le tes- qué; tateur a chargé les deux fils Mer, à défaut de >> Sur la question de savoir s'il y a substituleur père, de faire exécuter les dispositions fai- tion prohibée : -Attendu que le caractère contes en faveur de légataires particuliers auxquels stitutif de la substitution prohibée est, aux terdes sommes d'argent ont été léguées; - Atten- mes de l'art. 896 C. Nap., Îa charge de conserver du que, si la doctrine et la jurisprudence ont gé- et de rendre à un tiers, imposée à un donataire, néralement admis qu'un testament peut être à l'héritier institué ou au légataire; que la disrévoqué par des moyens autres que ceux auto-position qui renferme cette charge, soit qu'elle risés par les art. 1035 et suiv. du Code Napo- soit exprimée en termes formels dans l'acte ou léon, tels que la lacération de l'acte matériel, qu'elle résulte nécessairement de l'ensemble de la rature ou effaçure de tout ou partie des dis- ses dispositions, est frappée par la loi de nullité, positions qu'il contient, il est généralement re- même à l'égard du donataire, de l'héritier ou du connu aussi que ces moyens non prévus par la légataire; - Attendu que, d'après les principes loi ne peuvent entraîner révocation qu'autant en vigueur à l'époque où les substitutions étaient qu'il n'existe aucun doute, aucune incertitude, permises (et elles l'étaient au moment où Prissur l'intention du testateur de leur faire pro- cal a fait son testament), on tenait pour certain duire cet effet; Attendu que les deux traits qu'il y avait fidéicommis quand le testateur horizontaux desquels on veut faire résulter l'an- avait exprimé sa volonté que ses biens restasnulation de la disposition relative aux biens mo- sent dans sa famille à perpétuité, vu qu'il avait biliers ont été tracés au crayon, mais qu'il est défendu d'aliéner hors de son agnation ou de sa à remarquer que le premier trait placé en tra- famille, ou hors de l'agnation ou de la famille vers du mot mobiliers ne barre pas la totalité de l'héritier institué, parce qu'alors il y avait déde ce mot et ne dépasse pas l'i de la dernièresignation suffisante de la personne en faveur de syllabe, et que le second trait n'est pas placé sur la conjonction et, mais en avant et presque en dessous; qu'en outre, ce trait matériel a si peu d'intensité et est dû à un mouvement de main si léger qu'à peine l'aperçoit-on à la première vue, et qu'il n'empêche aucunement de sés et qu'ils restent toujours intacts et au mêlire couramment les mots dont il s'agit; d'où il >>me état qu'il les abandonne »; que, mû par faut inférer que ces traits au crayon sont dé- cette pensée, il institue pour son seul et unique pourvus de la force, de l'énergie, de l'autorité, héritier son cousin Mer, mais à la charge touen un mot des caractères d'une véritable ra- tefois « d'exécuter les volontés qu'il va annonture pouvant équivaloir à une révocation ex- >> et ordonner article par article »; que, plus presse et devant entraîner de la part du testa-loin, il ajoute : « que, en cas de décès de Mer teur un changement de volonté;-Attendu que la volonté de Priscal d'investir la famille Mer de la propriété de ses biens mobiliers a été exprimée en termes si formels que cette volonté

tiers, 6 mai 1847 (t. 2 1847, p. 289), et la note. Adde Caen, 7 janv. 1848 (t. 1 1850, p. 97); Limoges, 6 juin 1848 (t. 1 1849, p. 379); Rennes, 19 mai 1849 (t. 11850, p. 151); Cass. 25 juil. 1849 (t. 1 1850, p. 451); 5 mars 1851 (t. 1 1851, p. 591); 9 juil. 1851 (t. 21851, p. 478).-V., au surplus, Rép. gen. Journ. Bal., v Substitution, nos 123 et suiv., 379 et suiv.

qui cette défense était faite; — Attendu, en fait, que, dans le préambule du testament olographe de Pierre-Jacques Priscal en date du 6 mai 1834 le testateur « exprime son intention >> que ses biens ne soient pas vendus et disper

» avant lui, il charge ses fils de les faire exé» cuter »; qu'enfin, dans plusieurs passages dudit acte, il appelle à sa succession « les héri» tiers et descendants dudit Mer, soit que celui» ci prédécède, soit qu'il survive au testateur »>;

Attendu que du rapprochement de ces dispositions il résulte 1 la prohibition d'aliéner les immeubles légués et leur mise hors du commerce, et 2 que ces immeubles restent affectés à Mer père, d'abord, et ensuite à ses héritiers et descendants; que, par conséquent, la dis

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