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en sus du droit principal de transcription, sur la fin de non-recevoir qui lui est oppo- Celte stipulation, comprenant, au profit
le tribunal n'a méconnu aucun des articles sée :... (comme à l'arrêt qui précède); des apporleurs, un avantage immédiat, qui
visés au moyen;
Rejette, etc.
Rejette la fin de non-recevoir;

échappe aux risques sociaux, el qui rend la
Du 17 mai 1909. Ch. civ. MM. Bal- Au fond... (comme à l'arrêt qui pré- sociélé leur débitrice d'une somme d'argent,
lot-Beaupré, ler prés.; Maillet, rapp.; Mé- cède); - Rejette le pourvoi contre le ju- renferme une obligation de sommes, que
rillon, av. gen. (concl. conf.); Boivin- gement du tribunal civil de Montpeller l'art. 69, S 3, n. 3, de la loi du 22 frim.
Champeaux et Coche, av.
du 13 juill. 1903, etc.

an 7, soumet au droil proportionnel de

Du 14 déc. 1910. Ch. civ. MM. Bal- Ip. 100 (2) (Id.).
2e Espèce. (Consorts Brun C. Enregis- lot-Beaupré, ler prés.; Maillet, rapp.; Mé- Il s'ensuit que l'art. 22 de la loi du
trement). – ARRÈT.
rillon, av. gen. (concl. contr.

Il juin 1859, qui soumet provisoirement
Jer moyen); Coutard et Coche, av.

à un droit fixe les actes de commerce sous LA COUR; - Sur le premier moyen :

seing privé' donnant lieu au droit proporAttendu qu'il appert des constatations du

tionnel suivant l'art. 69, S3, n. 1, el S 5, jugement attaqué que Vincent-Victor-Léon

n. 1, de la loi du 22 frim. un 7, n'est pas Brun est décédé le 19 juin 1891, laissant CASS.-REQ. 30 novembre 1910. applicable en la causé (3) (L. 11 juin 1859, ses deux enfants, Albert et Madeleine, pour

art. 22). uniques héritiers, et sa veuve, qu'il avait, ENREGISTREMENT, SOCIÉTÉ, APPORTS, AVAN- Lorsqu'une concession de tramways. Faite par testament du 28 janv. 1890, instituée CES ET FRAIS, REMBOURSEMENT, OBLIGA- par un département, a été apportée par les légataire d'un quart en pleine propriété TION DE SOMMES, DROIT DE 1 P. 100, concessionnaires à une société, le jugement et d'un quart en usufruit des biens compo- ACTE DE COMMERCE, LOI DU 11 JUIN 1859, qui déclare que les apporteurs, ayant été sant sa succession; qu'un domaine dépen- TRAMWAYS, CONCESSION, RÉTROCESSION, les véritables rétrocessionnaires de la condant de cette succession, situé à Aimargues SOCIÉTÉ FUTURE, LOI DU 11 JUIN 1880, cession, ne sauraient élre considérés comme (Gard), fut, suivant acte notarié du 6 janv. DROIT FIXE, DROIT PROPORTIONNEL (Rép., des détenteurs provisoires, dont la mission 1900, licité entre les consorts Brun, et ad- vo Sociétés (en général], n. 722 et s.; n'aurait consiste qu'à constituer la société, jugé à la veuve, au prix de 240.000 fr.; Pand. Rép., vo Sociétés, n. 14257 et s.). ou comme des mandataires de la société, Attendu que les juges du fond ont décidé,

alors que celle-ci n'existait pas encore au à juste titre, que la dame Brun, ne conti- En présence de la disposition des statuts moment la concession a été accordée nuant pas, en sa qualité de légataire à titre d'une société de tramways, portant que les par le département, et que la rélrocession universel, la personne du testateur, avait associés faisant l'apport de la concession n'a pu reposer sur la tête de la société, fait droit et intérêt à faire transcrire ledit acte devront être remboursés par la société de une exacie appreciation, en fuit et eri droit, de licitation, afin de purger les hypothè- toutes les avances et des frais et debours de la situation des parties (4) (L. 11 juin ques pouvant grever les biens acquis par par eux effectués, notamment des frais des 1880, art. 24 et 39).

Attendu que l'art. 54 de la loi du études définitives, les juges du fond ont pu Par suite, ce jugement décide à bun droit 28 avril 1816 assujettit au droit de 1 fr. 50 décider, par une interprétation qui ne de- que la convention intervenue entre les par 100 fr. « les actes qui seront de nature nature pas les statuts, que, si les appor- apporteurs et la société a le caractère d'une à être transcrits au bureau des hypothè. teurs ont cédé à la société les droits qu'ils cession faite dans un intérêt privé, el, ques »; - D'où il suit qu'en déclarant cet lenaient du département, la somme prévue comme telle, ne peut bénéficier des disposiimpôt exigible sur l'acte du 6 janv. 1900, par ladite disposition, et déterminée pos- lions spéciales ei limitatives de l'art. 24 de la le tribunal, loin d'avoir violé les textes in- térieurement, ne leur a pas été attribuée en loi du 11 juin 1880, soumellant à un simple voqués par le pourvoi, en a fait une juste vertu de celle cession, mais à titre de rem- droit fixe les conventions relatives aux application;

boursement de leurs avances et frais (1) concessions et rétrocessions de chemins de Sur le deuxième moyen : Et d'abord (L. 22 frim, an 7, art. 69, S3, n. 3).

ser d'intérêt local el tramways (5) (Id.).

elle;

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(1 à 5) Lorsqu'un apport est fait à titre onereux, c'est-à-dire lorsque la rémunération consiste, non pas dans une part aléatoire de bénéfices, mais dans une valeur immédiatement et définitivement acquise à l'apporteur, cet apport n'a pas le caractère juridique d'un apport; il est soumis, non pas au droit d'apport de 20 cent. p. 100 (LL. 28 févr. 1872, art. 1 et 2; 28 avril 1893, art. 19), mais à un droit proportionnel variant suivant la nature même de l'opération. V. Cass. 16 juin 1902 (8. et P. 1903.1.364, et la note; Pand. pér., 1902.6.35); 3 déc. 1906 (S. et P. 1908.1.426; Pand. per., 1908.1.426), et la note; Wahl, Tr. du régime fiscal des soc. et des val. mob., t. jer, n. 143 et s. Ainsi, lorsque l'apport consiste dans un objet immobilier ou mobilier, aliéné définitivement au profit de la société, moyennant un prix, ou moyennant l'obligation pour la société de payer une dette incombant à l'apporteur, il y a vente, et le droit de vente est dû. V. la note sous Cass. 16 juin 1902, précité; Cass. 3 déc. 1906, précité, et la note; Wahl, op. cit., t. 1er, n. 144. Tel est le cas notamment où la société doit rembourser à l'ap. porteur les frais et dépenses effectués sur les biens apportés, comme les frais d'étude d'une concession ou ceux de mise en cuvre d'une exploitation. V. Cass. 28 févr. 1876 (S. 1876.1.229. - P. 1876.542), et le rapport de M. le conseiller Tardif; Wahl, op. cit., t. 1er, n. 165.

D'autre part, lorsqu'il y a véritablement apport pur et simple, assujetti au droit de 20 cent. p. 100, mais que la société, par une disposition indépen

dante de l'apport, s'engage à rembourser à l'ap-
porteur les frais dont il vient d'être question, il
n'y a pas apport à titre onéreux, en raison de
cette indépendance même; la société reconnaît
simplement qu'une avance a été faite pour son
compte, et s'oblige à la rembourser; en dehors du
droit de 20 cent. p. 100 sur l'apport, il est dû le
droit d'obligation de sommes à 1 p. 100 (L. 22 frim.
an 7, art. 69, § 3, n. 3). V. Cass. 23 mai 1859
(S. 1859.1.695. P. 1860.276); Wahl, op. cit.,
t. 1°r, n. 249.

En principe, quand l'apport consiste, soit en
immeubles, dont la vente est soumise au droit de
7 p. 100 (L. 22 avril 1905, art. 2), soit même en
meubles, dont la vente est soumise au droit de
2 p. 100 (L. 22 frim. an 7, art. 69, § 5, n. 1), les
parties ont intérêt à soutenir que la somme dont
la société prend la charge constitue le rembour-
sement de frais avancés pour elle, et non pas le
prix de l'apport. Elles ont, en d'autres termes, in-
térêt à ne pas lier l'apport de l'associé et l'enga-
gement de la société; de cette manière, elles payent
20 cent. p. 100 sur la valeur de l'apport, et 1 p. 100
sur l'obligation de la société, soit au total deux
droits inférieurs au droit de vente, soit d'immeu-
bles, soit de meubles.

Dans l'espèce, l'apport portait sur une concession de tramways. Les ventes de concessions accordées par un departement ou une ville sont des ventes de meubles, passibles du droit de 2 p. 100 (V. Cass. 19 janv. 1909, S. et P. 1911.1.337; Pand. pér., 1911.1.337, et la note de M. Wahl),

sauf la controverse qui, comme nous le verrons
plus loin, s'est engagée en ce qui concerne les
cessions de concessions, soit de chemins de fer
d'intérêt local, soit de tramways. Cependant, ce
sont les parties qui ont soutenu que l'engage-
ment pris par la société de rembourser les dépenses
antérieures se liait à l'apport de la concession, et
constituait, par suite, non pas une obligation pas-
sible du droit de 1 p. 100, mais un prix de vente.

C'est qu'elles y avaient intérêt. Suivant l'art. 22
de la loi du 11 juin 1859, « les marchés et traités
réputés actes de commerce par les art. 632, 633
et 634, n. 1, C. comm., faits ou passés sous signa-
ture privée, et donnant lieu au droit proportionnel,
suivant l'art. 69, $ 3, n. 1, et § 5, n. 1, de la loi
du 22 frim. an 7, seront enregistrés provisoire-
ment moyendant un droit fixe... ». L'acte de so-
ciété était sous seing privé. Une cession de mar-
ché ou de concession, quand elle a le caractère
commercial, bénéficie de cette faveur, puisque,
quant an tarif, elle tombe, ainsi que nous l'avons
dit plus haut, sous l'application de l'art. 69, $ 5,
n. 1, de la loi du 22 frim. an 7, relatif aux ventes
de meubles. Or, une concession de tramways est
une entreprise commerciale (V. Cass. 15 janv. 1900,
S. et P. 1900.1.317, et la note; Pand. pér., 1901.
1.339); donc, s'il y avait eu apport à titre oné.
reux, le droit fixe seul aurait été exigible. Au
contraire, les obligations de sommes, qui ne sont
pas tarifées par l'un des deux textes auxquels
renvoie la loi de 1859, mais par l'art. 69, § 3,
n. 3, de la loi de l'an 7, n'échappent pas au droit

(Planche frères et Giraud C.

Enregistrement).

MM. Etienne, Gilbert, Félix Planche et Giraud, entrepreneurs de travaux publics, auxquels le département de l'Ar. dèche avait concédé un réseau départemental de tramways, avec obligation de constituer, dans les six mois de la déclaration d'utilité publique, une société anonyme, qui se substituerait à eux, mais avec laquelle ils demeureraient solidairement responsables, ont, le 4 mai 1905, constitué, par acte sous seing privé, une société anonyme, dont les statuts spécifiaient que les frères Planche et Giraud apportaient les études préliminaires faites en vue de la concession des lignes, et les bénéfices et charges de la concession; en représentation de cet apport, il leur était attribué 40 actions entièrement libérées sur les 2000 composant le capital social. Il était, en outre, indiqué aux statuts qu'ils devaient ètre remboursés par la société de toutes les avances et des frais et débours de toute nature effectués à ce jour, notamment des frais pour études définitives qu'ils justifieraient avoir faits, et que leur cautionne

ment leur serait remboursé. Le commissaire chargé de vérifier ces frais et débours les a évalués à 227.290 fr. 05, y compris le cautionnement, et la deuxième asseinblée générale, tenue le 20 mai 1905, a adopté ces chiffres. Le receveur a perçı le droit de formation de société à 0 fr. 20 p. 100 en principal, sur la somme d'un million, montant du capital social. L'Administration, estimant que, d'une part, l'engagement, pris par la société, de rembourser aux fondateurs le montant des dépenses engagées et du cautionnement versé par eux antérieurement à la constitution de cette société, impliquait l'exigibilité du droit d'obligation de 1 p. 100 sur la somme de 227.290 fr. 05, et que, d'autre part, il y avait lieu, pour la liquidation du droit de 0 fr. 20 p. 100 sur le capital social, de déduire le passif ainsi mis à la charge de la société, en sorte que les apports nets, soumis à cet impot, devaient être réduits à 772.709 fr. 95, a liquidé ainsi l'impot à percevoir : 0 fr. 20 p. 100 sur 772.709 fr. 95,

p. 100 sur 227.290 fr.05, soit au total 3.818 fr. 44 à percevoir. Une contrainte en paiement de cette somme, sous déduction de celle de 2.273 fr. 05, déjà perçue, ayant

été signifiée, MM. Planche frères et Giraud y ont fait opposition.

12 août 1909, jugement du tribunal civil de Pontarlier, ainsi conçu :- -« Le Tribunal; — Attendu, en droit, qu'aux termes de l'art. 68, S 3, n. 4, de la loi du 22 frim. an 7, sont soumis au droit fixe de 3 fr., remplacé, depuis la loi du 28 avril 1893, art. 19, par le droit de 0 fr. 20 p. 100, les actes de société qui ne portent ni obligation ni libération, ni transmission de biens meubles ou immeubles entre les associés ou autres personnes; qu'il résulte de ce texte que l'exonération du droit proportionnel, généralement établi pour les obligations, libérations, transmissions de propriété, n'est accordée qu'au véritable apport social; qu'au contraire, si l'acte porte obligation, pour la portion de somme relative à cette obligation, on rentre dans le droit commun au point de vue de la perception de l'impôt; Attendu qu'en l'espèce, il y a évidemment lieu de distinguer le véritable apport social de la somme à rembourser aux fondateurs, suivant l'engagement pris par la société; qu'il n'est point douteux que seule la somme de 772.709 fr. 95, sur

а

proportionnel, alors même qu'elles se rencontrent dans un acte sous seing privé, et ont le caractère commercial. C'est ce qui justifie la solution, paradoxale en apparence, d'après laquelle l'obligation, contenue dans un acte sous seing privé, de payer le prix d'une vente commerciale de meubles, n'est soumise qu'au droit fixe, quand, le vendeur étant présent à l'acte et les objets étant indiqués, cette obligation forme le titre complet de la vente, et, au contraire, acquitte le droit proportionnel de 1 p. 100, quand, l'une de ces conditions faisant défaut, l'obligation ne forme pas le titre de la vente. V. Trib. de Blaye, 11 mars 1896 (Journ. de l'enreg., n. 24883; Rép. per. de Garnier, n. 8956); Trib. de Remiremont, 11 août 1898 (Rép. pér., n. 9511).

Le tribunal a estimé, dans l'espèce, que l'obligation de rembourser les frais était indépendante de l'apport et n'en constituait pas le prix; qu'en conséquence, le droit de 1 p. 100 était dû. Il n'y a rien à dire contre cette interprétation, sanctionnée par la Cour de cassation.

Subsidiairement, les parties cherchaient à échapper au droit de vente, en s'appuyant sur l'art. 24 de la loi du 11 juin 1880. Ce texte, étendu aux concessions de tramways par l'art. 39 de la loi, et aujourd'hui remplacé par l'art. 40 de la loi du 31 jnill. 1913 (J. off. du 8 sept), porte que « toutes les conventions relatives aux concessions et rétrocessions de chemins de fer d'intérêt local ne seront passibles que du droit d'enregistrement fixe de 1 fr. »

A vrai dire, on aurait pu se dispenser d'examiner cette prétention, puisqu'il était admis par la Cour de cassation, comme par le tribunal, que l'obligation assumée par la société n'était pas le prix d'une rétrocession de la concession. C'est seulement dans le cas où il y aurait eu apport à titre onéreux de la concession que la question du tarif aurait pu se poser; encore n'aurait-elle pas eu grand intérêt, puisque déja, conime acte de commerce, cette transmission n'aurait été soumise qu'à un droit fixe, à peine plus fort (3 fr.) que le droit fixe dù sur les rétrocessions de concessions,

Quoi qu'il en soit, le tribunal et la Cour ont reconnu qu'en fait, les apporteurs avaient obtenu

primitivement la concession, et que, par suite, l'apport titre onéreux (à supposer qu'il y eût apport à titre onéreux) était une vente de la concession à la société. Or, la Cour de cassation a déjà a imis que les rétrocessions, soumises à un simple droit fixe par la loi de 1880, ne sont pas les cessions ultérieures de la concession par le concessionnaire à un tiers, mais les rétrocessions par un département ou une commune, premier concessionnaire; ces dernières seules sont passibles du droit fixe; les premières acquittent le droit proportionnel. V. Cass. 24 avril 1893 (S. et P. 1894.1.195). Mais V. en sens contraire sur ce dernier point, la note de M. Wahl sous cet arrêt; et Wahl, Tr. de dr. fiscal, t. 1, n. 436. Par application de cette jurisprudence, l'arrêt ci-dessus recueilli applique le droit de mutation à l'apport à titre onéreux d'une concession obtenue d'un département par l'apporteur. V. également en ce sens, outre le jugement rendu dans la présente affaire, les décisions citées par M. Wahl, Tr, du régime fiscal des soc. et des val. mob., t. 1, n. 188.

Mais la concession avait-elle bien été donnée par le département aux apporteurs? Ne l'avait-elle pas été plutôt à la société qu'ils devaient constituer ? Les apporteurs, auxquels elle avait été accordée avant la constitution de la société, prétendaient l'avoir sollicitée et obtenue pour la société en formation. Si cela avait été exact, ils n'auraient pu être considérés comme l'ayant apportée à titre onéreux, ni même comme l'ayant apportée du tout à la société.

Seulement, nous ne voyons pas en quoi, au point de vue fiscal, les parties pouvaient avoir intérêt à se placer à ce point de vue. Car, à supposer qu'il n'y eût pas aliénation de la propriété au profit de la société, le remboursement que cette dernière s'obligeait à faire, étranger à toute aliénation, constituait une obligation de sommes, passible du droit de 1 p. 100. Or, c'était ce droit même que réclamait la Régie et que contestaient ses adversaires. Le motif même par lequel ils le contestaient prouvait ainsi l'exigibilité de l'impôt.

En droit, il n'y a rien d'antijuridique à ce que les acquéreurs d'un bien quelconque déclarent l'acquérir pour le compte d'une société future. Et,

dans ce cas, il est exact que, si l'objet acquis est mis dans la société, celle-ci n'est pas réputée le tenir des acquéreurs, lesquels n'ont pas entendu devenir propriétaires lors de leur acquisition. Le droit de vente qu'ils ont payé à l'occasion de cette acquisition a été payé pour le compte de la société, et celle-ci, qui reçoit l'apport, en s'engageant à rembourser le prix aux acquéreurs ou à le verser au vendeur, n'a pas à payer un second droit de mutation. La Cour de cassation a implicitement décidé en ce sens. V. Cass. 20 mars 1855 (S. 1855. 1.378. P. 1856.1.207). La Régie applique également cette solution. V. Wahl, op. cit., t. 1, n. 268 et 269, et les décisions citées.

En fait, le tribunal déclare avec raison que les apporteurs avaient acquis la concession pour leur propre compte. A la vérité, leur contrat les obligeait à se substituer une société pour la construction et l'exploitation. Mais c'est à eux-mêmes cependant que la concession était accordée; ils s'engageaient seulement à la rétrocéder à une société. La Cour de cassation estime que cette appréciation des faits était exacte.

Le tribunal ajoutait que « la propriété ne peut demeurer incertaine, et que la concession n'a pu reposer sur la tête de la société avant sa constitution », La Cour de cassation, reproduisant cette considération, dit que le tribunal a exactement déterminé en droit la situation respective des parties en cause. Effectivement, la société n'a pas pu devenir propriétaire. Mais il ne résulte pas de la que, si les apporteurs avaient déclaré dans l'acte de concession acquérir pour le compte de la société, ils auraient cependant dû être regardés comme étant devenus propriétaires de la concession jusqu'au moment de la formation de la société. La propriété n'aurait appartenu, ni à eux-mêmes, puisqu'ils n'entendaient pas devenir propriétaires, ni à la société, puisqu'elle n'existait pas ; et l'octroi de la concession aurait été reculé jusqu'à la constitution de la société.

Ni le jugement ni l'arrêt ne paraissent avoir voulu dire, contrairement à la jurisprudence antérieure, que, malgré eux, les concessionnaires, qui déclarent ne pas acquérir pour eux-mêmes, mais pour une société future, deviennent propriétaires. laquelle l'Administration propose de per- en l'espèce; Attendu qu'aux termes de cevoir le droit de 0 fr. 20 p. 100, constitue cet article, toutes les conventions relatives l'apport social bénéficiant de l'exonéra- aux concessions et rétrocessions de chetion, cette somme devant seule rester mins de fer d'intérêt local, ainsi que les soumise aux risques de l'entreprise; cahiers des charges annexés, ne seront Attendu, au contraire, en ce qui concerne passibles que du droit d'enregistrement les 227.290 fr. 05, liquidés par le commis- fixe de 1 fr. ; qu'il n'est point douteux que, saire rapporteur,

qu'ils constituent le dérogeant aux règles générales de per: montant des obligations vis-à-vis des fon- ception, cet article doit être interprété dateurs ; qu'aux termes mêmes de l'article limitativement, et qu'il apparaît immésusvisé, ils ne sauraient bénéficier du diatement que le traité intervenu entre droit de 0 fr. 20 p. 100, et que la raison les fondateurs et la société ne rentre pas en est que, ces sommes devant profiter dans la catégorie des actes qu'il prévoit; immédiatement à Planche et Giraud, elles qu'il ne constitue, en effet, ni une concesne sont plus assujetties aux chances de sion, celle-ci ayant été accordée

par

l'Etat bonne et de mauvaise fortune que la so- au département de l'Ardèche, ni une réciété peut courir, ce qui leur enlève le trocession, celle-ci ayant été faite par

ledit caractère de mise sociale; qu'ainsi, le droit département à Planche et Giraud, et qu'il perçu, en ce qui les concerne, est insuf- doit être considéré comme une cession fisant, la perception devant se faire con- faite à la société par les rétrocessionnaires, formément aux dispositions de l'art. 69, c'est-à-dire comme un acte non prévu par

3, n. 3, de la loi du 22 frim. an 7, qui la loi de 1880; Attendu, au surplus, que frappe du droit proportionnel de I p. 100 la Cour de cassation a décidé que la disles « contrats, transactions, etc., et tous position ci-dessus transcrite a pour but de autres actes ou écrits qui contiendront favoriser la création des chemins de fer obligation de sommes, sans libéralité, et d'intérêt local, et que le bénéfice en est sans que l'obligation soit le prix d'une exclusivement réservé à l'Etat, ainsi transmission de meubles ou immeubles qu'aux départements et aux communes non enregistrée »; Attendu, en effet, recevant de l'Etat une cession de chemin que l'on se trouve bien ici en présence de fer, avec faculté de rétrocession à un d'une obligation de sommes, et que c'est tiers, pour le cas où l'Etat, les départeseulement ainsi que l'on peut qualifier ments et les communes ne voudraient pas les engagements de remboursement pris ou ne pourraient pas remplir eux-mêmes par la société vis-à-vis de Planche et Gi- les conditions fixées par l'acte de concesraud, alors qu'il leur était attribué un sion; qu'on ne saurait confondre la rétrocertain nombre d'actions entièrement li- cession avec les cessions successives, bérées, et que, pour les frais et débours toutes d'intérêt privé, qui sont ensuite qu'ils justifieraient avoir faits, et pour les consenties par le rétrocessionnaire; que cautionnements versés, ils devaient être ces sortes de transmissions, n'émanant remboursés par la société, et que, de plus, pas

du concessionnaire primitif, sont d'ailles termes mèmes de l'engagement pris leurs prévues et désignées, non sous le excluent toute idée de liberalité, et qu'il nom de rétrocessions, mais sous le nom n'y a pas de transmission de meubles ou de cessions, par la loi de 1880 elle-même, immeubles; -- Attendu qu'à tort les oppo. dans son art. 10, et demeurent assujetsants soutiennent que l'art. 22 de la loi ties à tous droits afférents à la nature du 11 juin 1859 est applicable en l'espèce; des conventions qu'elles renferment; qu'il est nécessaire, pour que cet article Attendu que Planche et Giraud ont reçoive son application, que les marchés été les véritables rétrocessionnaires de et traités soient réputés des actes de com- la concession dont s'agit; qu'ils ne saumerce par les art. 632, 633, 634, n. 1, raient être considérés comme des détenC. comm., faits ou passés sous seing privé teurs provisoires, dont la mission ne conet donnant lieu au droit proportionnel, siste qu'à constituer la société qui doit suivant l'art. 69, S3, n. 1, et $5, n. 1, de devenir le concessionnaire réel et définitif, la loi du 22 frim. an 7; que, si les deux ou comme des mandataires, la société à premières conditions se trouvent ici réa- former devant ètre regardée comme le lisées, il résulte de ce qui vient d'être dit véritable concessionnaire sous condition que les conventions intervenues ne ren- in futurum, déjà au moment de la contrent pas dans la catégorie de celles dont cession, et ce parce qu'ils avaient fait des le tarif est réglé par les art. 69, S 3, n. 1, travaux en leur nom personnel, dont ils et : 5, n. 1, de la loi du 22 frim. an 7, ont fait l'apport à la société lors de sa mais bien par l'art. 69, 33, n. 3, de ladite constitution ; qu'au surplus, le tiers pour loi;

Attendu, en effet, à ce point de lequel ils auraient détenu, la société, en yue, que, si le S 5, n. 1, de l'art. 69 vise

l'espèce, n'existait pas avant le 6 mai les cessions et rétrocessions, et si les 1903; qu'entin, la propriété ne peut desieurs Planche et Giraud ont, en effet, cédé meurer incertaine, et que la rétrocession à la société les droits qu'ils tenaient du n'a pu reposer sur la tête de la société département, la portion de somme sur avant sa constitution;

Par ces laquelle l'Administration propose de per- tifs, etc. ). cevoir le droit proportionnel de l p. 100 ne leur a pas été attribuée en vertu de Pourvoi en cassation par MM. Plancette cession, mais en remboursement des che et Giraud. Jer Moyen, Violation des frais et débours avancés par eux;

At art. 69, S 3, n. I et 3, et S 5, n. 1, de la loi tendu qu'à tort également, les opposants du 22 frim. an 7, 22 de la loi du 11 juin soutiennent subsidiairement que l'art. 24 1859, 1134, C.civ., et 7 de la loi du 20 avril de la loi du 11 juin 1880 serait applicable 1810, en ce que le jugement attaqué a

refusé de faire application des dispositions de l'art. 22, susvisé, à une cession remplissant toutes les conditions fixées pour leur application, et qui, notamment, était, en principe, soumise au droit proportionnel fixé par l'art. 69, S 5, n. 1, de la loi du 22 frim. an 7, et dont, au surplus, le jugement a dénaturé les termes.

20 Moyen. Violation de l'art. 24 de la loi du 11 juin 1880, en ce que le jugement attaqué a refusé d'appliquer le tarif prévu par ce texte à la rétrocession d'une concession de chemin de fer d'intérêt local.

ARRÊT.
LA COUR; Sur le premier moyen :

Attendu que l'art. 6 des statuts de la Société des tramways de l'Ardèche, figurant au titre 2, relatif aux apports, porte que Planche et Giraud devront être remboursés par la sociéte de toutes les avances, des frais et débours effectués, notamment des frais pour études définitives; Attendu que le jugement attaqué déclare que, si Planche et Giraud ont cédé à la société les droits qu'ils tiennent du département, la somme prévue par l'art. 6, et déterminée postérieurement, ne leur a pas été attribuée en vertu de cette cession, mais à titre de remboursement de leurs avances et frais; -- Attendu que cette interprétation donnée à l'une des clauses du pacte social n'est pas contraire au texte invoqué des statuts; que la stipulation écrite en l'art. 6, comprenant, au profit de Planche et Giraud, un avantage immédiat, qui échappe aux risques sociaux, qui rend la société leur débitrice d'une somme d'argent, renferme une obligation de sommes, que l'art. 69, S3, n. 3, de la loi du 22 frim. an 7 soumet au droit proportionnel de 1 p. 100; qu'il s'ensuit que l'art. 22 de la loi du 11 juin 1859 ne saurait être invoqué en la cause;

Sur le second moyen : - Attendu que le jugement attaqué déclare notamment que Planche et Giraud ont été les véritables rétrocessionnaires de la concession, et ne sauraient être considérés comme des détenteurs provisoires, dont la mission n'aurait consisté qu'à constituer la société, ou comme des mandataires de la société, alors que celle-ci n'existait pas encore au moment où la concession a été accordée par le département; que la propriété ne peut demeurer incertaine, et que la rétrocession n'a pu reposer sur la tête de la société avant sa constitution; Attendu que le jugement a ainsi normalement déterminé en fait et en droit la situation respective des parties en cause; qu'il a, par suite, justement décidé que la convention intervenue entre Planche et Giraud et la société avait le caractère d'une cession faite dans un intérêt privé, et qui, comme telle, ne pouvait bénéficier des dispositions spéciales et limitatives de l'art. 24 de la loi du 11 juin 1880; Rejette, etc. Du 30 nov. 1910.

MM. Tanon, prés.; Malepeyre, rapp.; Blondel, av. gén. (concl. conf.); Raynal, av.

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Ch. req:

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CASS.-CRIM. 8 novembre 1912. VENTE PUBLIQUE DE MEUBLES, LOI DU 30 DÉC.

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L'intention frauduleuse, nécessaire pour caractériser le delit, prévu par l'art. Jer de la loi du 30 déc. 1906, de vente sans autorisation de marchandises en liquidation, ressort suffisamment de la constatation faite par les juges que l'autorisation de procéder à la vente avait été refusve par, le maire (1) (LL. 20 avril 1810, art. 7; 30 déc. 1906, art. Jer).

D'ailleurs, en infirmant la décision de relaxe des premiers juges et en affirmant la culpabilité du prévenu, l'arrêt à rejele implicitement le moyen de défense lire de la bonne foi, et ne saurait donc être cri: tique pour défaut de motifs (2) (Id.).

L'art. lor de la loi du 30 déc. 1906 vise sans exception toutes les ventes de marchandises neuves au détail, à cri public, de gré à gré, lorsqu'elles se font sous l'une des formes qui y sont énoncées (3) (L. 30 déc. 1906, art. Jer et 2).

Il s'applique notamment dans le cas un negociant sédentaire veut procéder à la vente, sous forme de liquidation, pour cause de cessation de son commerce, des marchandises restant dans ses magasins (4) (Id.).

Spécialement, rentre dans les previsions du texte précilé le fait d'un individu qui, après une large publicité, liquide à bas prir, en vue de la cessation du commerce d'un tiers, les marchandises de celui-ci (5) (Id.).

En ordonnant la confiscation des marchandises saisies, et énumérées dans un procès-verbal qui en constatail la mise en vente, un arrêt justifie légalement l'application de cette peine (6) (L. 30 déc. 1906, art. 2).

Aucune disposition de la loi du 30 déc. 1906 n’exige d'ailleurs que les marchandises confisquées aient été préalablement décrites et identifiées (7) (Id.).

(Terras-Lange). ARRÊT. LA COUR; Sur le premier moyen,

pris de la violation des art. 64, C. pen., 1er et s. de la loi du 30 déc. 1906, et 7 de la loi du 20 avril 1810, en ce que l'arrét attaqué a retenu Terras-Lange comme coupable d'un prétendu délit de vente, sans autorisation, de marchandises en liquidation, sans constater l'existence de l'intention frauduleuse, et en constatant même la bonne foi du prévenu, déjà reconnue par les juges du premier degré, qui en avaient tiré un motif de relaxe, formant pour l'intimé un moyen de défense, que la Cour d'appel ne pouvait, en tous cas, rejeter sans motif : Attendu que l'intention fruduleuse, nécessaire pour caractériser le délit prévu par l'art. ler de la loi du 30 déc. 1906, ressort des circonstances du fait incriminé, telles qu'elles sont relevées dans l'arrêt, et notamment de ce que l'autorisation prescrite par l'article de loi susvisé avait été refusée par le maire de la ville de Lyon; que, s'il est énoncé dans l'arrêt que « Terras a agi pour le compte d'Augusto, dans un but qui parait désintéressé, et qu'il s'est proposé moins de pratiquer une concurrence illicite que de liquider un fonds, dont Augusto, gravement malade, ne pouvait plus assurer la direction », ces considérations sont retenues par le juge, non point comme établissant la bonne foi du prévenu, mais comme atténuant largement sa culpabilité;

Attendu qu'en infirmant la décision de relaxe des premiers juges, et en affirmant la culpabilité de Terras, l'arrêt a rejeté implicitement le moyen de défense tiré de la bonne foi; d'où il suit qu'il ne saurait être critiqué pour défaut de motifs;

Sur le deuxième moyen, pris de la violation des art. er et s. de la loi du 30 déc. 1906, et 7 de la loi du 20 avril 1810, en ce que l'arrêt a déclaré Terras-Lange coupable du délit de mise en vente de marchandises en liquidation, alors que, s'agissant, d'après les constatations mêmes de l'arrêt attaqué, d'une vente ayant pour objet une liquidation n'ayant aucun caractère fictif, et d'ailleurs nécessitée par des circonstances toutes particulières, telle que la maladie grave du commerçant (décédé en cours d'instance), il n'était pas possible de retenir l'existence du prétendu délit : Attendu que l'art. 1er de la loi du 30 déc. 1906 ne fait aucune distinction; qu'il vise sans exception toutes les

ventes de marchandises neuves au détail, à cri public ou de gré à gré, lorsqu'elles se font sous une des formes qui y sont énoncées; que, dès lors, il s'applique notamment dans le cas où un négociant sédentaire veut procéder à la vente, sous forme de liquidation, pour cause de cessation de son commerce, des marchandises restant dans ses magasins;

Attendu qu'il résulte des constatations de l'arrêt attaqué qu'après une large publicité, Terras liquidait à bas prix, en vue de la cessation du commerce d'Augusto, les marchandises de celui-ci; que l'opération ainsi pratiquée rentre bien dans les prévisions de l'art. ler de la loi du 30 déc. 1906;

Sur le troisième moyen, pris de la violation de l'art. 2 de la loi du 30 déc. 1906, des règles de la preuve en matière de confiscation, et de l'art. 7 de la loi du: 20 avril 1810, pour défaut de base légale, en ce que l'arrèt attaqué a prononcé la confiscation des marchandises saisies, et énumérées dans le procès-verbal du commissaire de police du 5 févr. 1912, sans qu'il soit constaté que ces marchandises fussent identiquement les mêmes que celles qui avaient été visées au procès-verbal du 26 janv. 1912, relatif au prétendu délit de vente de marchandises en liquidation, et sans qu'il soit constaté davantage que les autres marchandises eussent été, à cette date du 5 févr. 1912, aftectées à de nouvelles ventes en liquidation : - Attendu que l'arrêt attaqué prononce la confiscation des marchandises saisies, et énumé. rées dans le procès-verbal du commissaire de police du 5 févr. 1912; que ce procèsverbal constate que ces marchandises étaient mises en vente; qu'en ordonnant ainsi la confiscation des marchandises mises en vente, l'arrêt a prononcé la condamnation dans les termes de la loi; qu'aucune disposition de la loi n'exige d'ailleurs que les marchandises confisquées aient été préalablement décrites et identifiées; - Rejette le pourvoi contre l'arrêt de la Cour d'appel de Lyon du 14 mai 1912, etc.

Du 8 nov. 1912. – Ch.crim. MM. Bard, prés.; Lecherbonnier, rapp.; Mallein, av. gén.; Raynal, av.

(1-2) La question de savoir si l'intention frauduleuse est nécessaire pour caractériser les infractions à la loi du 30 déc. 1906 est controver. sée. V, la note sous Lyon, 3 déc. 1907 (S. et P. 1908.2.93 ; Pand, pér., 1908.2.93). La solution affirmative, consacrée par la jurisprudence (V. Lyon, 3 déc. 1907, précité; Cass. 7 déc. 1912, sol. implic., supra, 1ro part., p. 111), paraît la plus sûre. Du moment, en effet, qu'il s'agit de délits frappés de peines correctionnelles, l'intention est en principe exigée pour faire naître la responsabilité pénale. Il n'en saurait être autrement que tout autant que le législateur aurait entendu ré. primer le simple fait matériel. Or, cette volonté ne résulte, ni de l'esprit de la loi. (V. la note 6, S. et P. Lois annotées de 1907, p. 477), ni du but poursuivi.

Dans l'espèce, la constatation de l'intention frauduleuse par les juges du fond avait été impli

cite. V. sur le principe que des motifs implicites suffisent pour justifier une décision, Cass. 26 mai 1913 (Supra, 1re part., p. 318), et les renvois.

(3-4-5) La Cour de cassation avait déjà décidé (V. Cass. 24 juill, 1909, S. et P. 1910.1.60; Pand. pér., 1910.1.60; 3 nov, 1910, 2 arrêts, supra, 1re part., p. 111, ad notam. Adde dans le même seng, Nancy, 27 juin 1912, infra, 2° part., p. 49) que la loi du 30 déc. 1906 s'applique aux marchands sédentaires comme aux marchands forains. Mais cette formule, dans sa généralité, paraît comporter des réserves. Vi la note de M. Bourcart sous Nancy, 27 juin 1912, précité; et la note sous Cass. 7 déc. 1912 (Supra, 1r part., p. 111).

(6-7) Dans l'espèce, un premier procès-verbal avait été dressé pour constater une vente faite en violation des dispositions de la loi du 30 déc. 1906. Ce premier procès-verbal n'avait pas comporté de saisie. Un second procès-verbal avait été dressé,

celui-ci avec saisie. Le pourvoi prétendait que la confiscation des marchandises ainsi saisies n'était pas régulière, parce qu'il n'était pas justifié que ces marchandises fussent les mêmes que celles dont le premier procès-verbal avait constaté la mise en vente. Mais le second procès-verbal avait lui-même constaté la mise en vente des marcbandises dont il avait réalisé la saisie. Par conséquent, ce second procès-verbal suffisait à lui seul pour servir de base à la confiscation. La loi du 30 déc. 1906 (art. 2) ordonne, en effet, la confiscation des marchandises mises en vente », sans rien dire de plus. Par conséquent, ainsi que le déclare dans l'espèce l'arrêt de la Cour de cassation, la confiscation avait été prononcée dans les termes de la loi, qui n'exige pas que les marchandises confisquées aient été préalablement décrites et identifiées. V. Cass. 27 mai 1909 (Bull. crim., n. 291).

en

CASS.-CRIM. 27 avril 1912.

du syndicat des ouvriers s'étant réunis pour En effet, il n'appert ni implicitement ni

discuter les réclamations des grévistes, l'un explicitement des énonciations de l'arrêt, COALITION, MENACES, LIBERTÉ DU TRAVAIL, des délégués a déclaré que, si les proprie- que le second délégué, en adressunt des

CESSATION CONCENTEE DU TRAVAIL, ME- laires n'acceptaient pas une des propo- menaces aux patrons, el non à des ouvriers, NACES CONTRE LES PERSONNES, CASSATION, silions faites par les ouvriers, les pour- ail eu pour but de maintenir la cessation PEINE JUSTIFIÉE (Rép., vo Coalitiop, n. 63 parlers seraient rompus, el que l'autre a du travail; il en resulte méme, au contraire et s., 115 et s.; Pand. Rép., eod. verb., dil, de son côté : « Si vous ne signe: pas, que les juges ont attribué ce maintien aux n. 48 et s., 63 et s.).

vous ne travaillerez pas; nous vous propositions inacceptables des grévistes (3)

empecherons », l'arrêt qui, après avoir (ld.). Le délit d'atteinte à la liberté du travail, constaté que ces paroles avaient produit D'autre part, dès lors que l'arrêt déclare prévu el réprimé par l'art. 414, C. pen., une profonde impression, ajoute que les que les menaces du second délégué étaient n'existe que lorsque les violences, voies de propositions inacceptables des grévistes, de nature à causer à ceux à qui elles étaient fail, menaces ou mancures frauduleuses, que le second délégué avait voulu impo- adressées de séricuses craintes, soit pour qui constiluent un des élémen's essentiels ser par la menace, devaient avoir et ont leur sécurité personnelle, soit pour la lide l'infraction, onl eu pour but d'amener eu nécessairement pour ell'et de maintenir berlé de leur travail, ii n'y a pas lieu, en ou de maintenir une cessation concertée du la cessation du travail ainsi concertée, ne présence de celle alternative, de rechercher travail (1) (C. pen., 414).

justifie pas la condamnation par lui pro- sila peine prononcée ne serait pus justifice Ainsi, lorsqu'au cours d'une grève agri- noncée, en vertu de l'art. 414, C. pen. (2) par application de l'art. 308, C. pen. (4) cole, les propriétaires et deux délégués (Id.).

(C. instr. crim., 411).

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(1 à 4) Les grèves sont malheureusement fréquentes à notre époque, et les art. 414 et 416, 0. pén., qui en répriment les abus, sont souvent cités devant les tribunaux. Il ne semble pas cependant, sans même parler de l'abrogation de l'art. 416, O. pén., par la loi du 21 mars 1884, que ces textes embrassent tous les faits qui légitimement comporteraient une répression pédale. L'arrêt de la Cour de cassation, que nous reproduisons, en fournit la preuve.

Il s'agissait d'une sérieuse grève agricole, qui avait éclaté dans le Midi. Au cours d'une réunion entre les propriétaires, au nombre d'une centaine environ, et les deux délégués du syndicat des ouvriers, l'un de ceux-ci, pour intimider les propriétaires, déclara d'un ton impérieux, et à deux reprises, que, a si les propriétaires ne signaient pas les propositions des ouvriers, ils ne travailleraient pas; les ouvriers les en empêcheraient ». La menace était caractérisée : c'était la sommation d'avoir à s'incliner devant les exigences ouvrières. On employait l'intimidation pour faire pression sur l'esprit des patrons. Ce n'était plus la grève licite, comportant, après la rupture du contrat de travail, l'examen de nouvelles conditions et la libre discussion d'un nouvel accord. Les grévistes étaient sortis de ces limites naturelles. Leur délégué avait vicié la discussion par un élément illicite, la menace. L'atteinte à la liberté du travail était certaine.

La Cour de Nimes crut donc apercevoir dans ces faits les éléments du délit de l'art. 414, O. pén. Les grèves des ouvriers agricoles échappaient autrefois à l'application des textes du Code pénal. Elles étaient régies par l'art. 20 du titre 2 du Code rural des. 28 sept.-6 oct. 1791, qui faisait défense aux moissonneurs, domestiques et ouvriers de la campagne de se liguer entre eux pour faire hausser et déterminer le prix des gages ou les salaires. Mais la loi du 25 mai 1864, en abrogeant ce texte, a mis fin à un régime particulier, dont les motifs n'apparaissaient guère. Elle y était d'ailleurs obligée pour ne pas laisser subsister une disposition qui refusait aux ouvriers de la campagne le droit de grève, qu'elle reconnaissait aux ouvriers de l'industrie. Le caractère agricole de la grève, dont il s'agissait dans l'espèce, importait donc peu. Seulement, les faite, qui s'étaient produits au cours de cette grève, rentraient-ils, comme l'avait pensé la Cour de Nîmes, sous les termes de l'art. 414?

Pour que le délit prévu par ce texte existe, trois conditions doivent se trouver réunies. 1° II faut en premier lieu l'emploi de violences, voies de fait, menaces ou maneuvres frauduleuses, que l'art. 414 ne spécitie que comme des modes possi

ANNÉE 1913. – go cah.

bles de perpetration du délit, et dont la notion, possibles à accepter, le délégué des grévistes
par conséquent, ne doit pas être demandée aux avait maintenu la lutte entre les deux partis,
autres dispositions du Code pénal qui répriment reposait sur une confusion entre le but, que le lé-
ces actes ou ces procédés illicites, mais être en- gislateur a retenu comme élément du délit, et le
tendue auesi largement que possible. V. Cass. résultat, dont il n'a pas tenu compte.
5 avril 1867 (s. 1867.1.228. — P. 1867.539), et la Le but est l'effet désiré et cherché, mais non
note. Adde, la note sous Trib. corr, de Marseille, pas toujours atteint, en vue duquel on applique
16 mars 1910 (In/ra, 2e part., p. 227); Chauveau et ses efforts. Le résultat est l'effet obtenu, mais
F. Hélie, Théor. du C. pén., 6e éd., par Villey, t. 5, qui n'est pas toujours ni çelui que l'on a cherché
n. 2379,

- 2° Il faut, en second lieu, que ces actes ni celui que l'on a désiré, et qui parfois même est
de violence ou de fraude aient amené ou maintenu, à l'opposé de celui que l'on poursuivait au moyen
ou tout au moins tenté d'amener ou de maintenir de ses efforts. Il est possible qu'en soutenant des
une cessation concertée du travail; en d'autres prétentions jugées excessives, le délégué ouvrier
termes, qu'ils se soient produits pour faire éclater ait contribué à la per pétuation de la grève. Mais
ou faire durer une grève, l'art. 414 étant destiné ce n'est pas là ce qu'il voulait et ce qu'il cher-
à en permettre l'exercice légitime, tout en en pré- chait; car il en compromettait singulièrement la
venant les excès et les abus. V. le rapport de réalisation par ses menaces, qui, en faisant impres-
M. Emile Ollivier (S. Lois annotées de 1864, p. 26, sion sur des propriétaires effrayés et sans cou-
ad notam, p. II. P. Lois, décr., ctc., de 1864, rage, pouvaient décider ceux-ci d renoncer à leur
p. 45 et 46, ad notam, n. II; la pote sous Trib. résistance. Si réellement le prévenu avait voulu
corr. de Marseille, 16 mars 1910, précité ; et Chan- faire continuer la grève, il ne devait donc pas
veau, F. Hélie et Villey, op. cit., t. 6, n. 2375. -- menacer. Or, c'est de l'intention du délinquant, et
3° Il faut enfin que le but poursuivi par l'auteur ou non du résultat obtenu par lui, que le légis) eur
les auteurs des faits incriminés soit de nature à s'est préoccupé, lorsque, dans l'art. 414, il a ré-
porter atteinte à la liberté du travail, en faussant primé les actes de violence ou de fraude commis
les lois économiques qui régissent le contrat de tra- à l'occasion d'une grève : l'intention, en effet, est
vail, et en substituant à leur libre jeu la contrainte une chose personnelle à l'auteur de l'acte, qu'à ce
exercée par les patrons ou par les ouvriers. V. titre, il peut être légitime d'incriminer, tandis que
Chauveau, F. Helie et Villey, op. cit., t. 5, n. 2376. les suites, dues à des contingences diverses, sont
Or, de ces trois conditions, la première et la der- plus difficilement et plus exceptionnellement im-
nière pouvaient s'apercevoir dans l'espèce; mais putables à l'individu.
l'existence de la seconde était plus douteuse. La Les éléments du délit de l'art. 414 ne se rin-
Cour de Nimes s'est bornée à dire à son sujet qu'en contraient donc pas. D'un autre côté, la Cour de
proposant aux propriétaires des conditions inac- cassation n'a pas cru pouvoir justifier la condam-
ceptables, les mandataires des ouvriers avaient, par pation que la Cour de Nîmes avait prononcée, en
leur fait, provoqué la continuation de la grève. changeant la qualification du délit, et en invo-

La Cour de cassation ne s'est point ralliée à quant l'art. 308, O. pén., qui punit les menaces cette argumentation un peu courte, et il lui était verbales sous condition. C'est que, des faits, te's difficile, en effet, de l'accepter. Elle a insisté avec que les indiquait l'arrêt de la Cour d'appel, il ne raison sur cette condition légale du délit, que les ressortait pas avec précision que les menaces proart. 414 et 415, C. pen., de répriment les menaces férées fussent dirigées contre la sécurité des proqu'autant qu'elles ont pour but, soit d'amener, soit priétaires plutôt que contre la liberté du travail. de maintenir une cessation concertée du travail. Or, si l'art. 308, C. pen., a été ajouté par la loi du Or, la première éventualité ne se rencontrait pas, 13 mai 1863 pour corriger l'insuffisance des prévipuisque la grève avait déjà éclaté, quand les pa- sions de l'art. 305, insuffisance qui pouvait conduire roles menaçantes furent proférées; et la se- à des abus (V. Chauveau, F. Hélie et Villey, op. conde ne pouvait pas non plus être relevée, puis- cit., t. 4, n. 1320), il est avéré que ce texte s'est qu'il n'était pas établi qu'en parlant ainsi qu'il l'avait fait, le prévenu avait eu pour objet placé au même point de vue que l'art. 305, et

qu'il réprime des menaces de même nature. Mais, faire continuer l'état de grève. Ce n'était pas le en rangeant celles-ci dans la catégorie des crimes résultat qu'il cherchait, mais bien plutôt, par une et des délits contre les particuliers, et en les plapression violente sur les propriétaires, la cessation çant, dans la suite des infractions, après l'homicide de la grève et de son cortège de misères pour les et avant les blessures volontaires, le législateur a ouvriers. Ce qu'alléguait la Cour de Nimes, qu'en nettement montré qu'il n'avait frappé que les formulant aux propriétaires des propositions im- menaces dirigées contre l'intégrité corporelle, celles

Tre Part.

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