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LA COUR (après délibéré en la chambre | conseil ) ; Attendu que dans l'acte de nation par Deswarte père à ses enfants, du sept. 1838, il est dit : « Comme condition ssentielle des présentes, et sans laquelle elles 'eussent pas eu lieu, les donataires vont proeder immédiatement au partage tant des iens donnés par leur père que de ceux proenant de la succession de leur mère. » ;

Attendu qu'il a été en effet procédé imméatement à un seul et même partage des biens ternels et maternels, partage dont les dissitions ne sont pas distinctes et indépen

ntes, mais dérivent nécessairement les unes s autres ;

Attendu que le droit a été perçu non seument sur les soultes stipulées, mais même à ison de l'inégalité réelle résultant du retranement que l'administration devait faire des ens de Belgique ; Qu'en déclarant ladite (ministration mal fondée à exiger un supément de droit sur un acte qui ne contient ipulation d'aucune soulte autre que celle qui donné lieu au droit perçu, acte qui n'imique et ne constate d'ailleurs aucune inégaté réelle devant motiver un droit supérieur; en annulant par suite la contrainte décerte par l'administration de l'enregistrement des domaines, le jugement attaqué n'a pas olé les art. 11, 12 et 69, § 7, no 5, de la loi u 22 frim. an VII, ni aucune autre loi; EJETTE, etc. »

COUR DE CASSATION.
(29 août 1843.)

Est nulle comme ne fixant pas d'une manière certaine l'indemnité accordée à l'exproprié la décision du jury qui iui accorde tant par are de terrain, si en même temps elle ne détermine pas le nombre d'ares expropriés (1). Si le montant de l'indemnité peut résulter suffisamment d'un chiffre monétaire multiplié par une mesure de terrain, au moins faut-il que ces deux bases soient également déterminées, et notamment que la contenance du terrain soil hors de toute incertitude (2).

(1-2) Décision conforme à un précédent arrêt du 10 août 1841

PRÉFET DE L'AISNE C. FRANÇOIS.`·

La décision du jury était ainsi conçue: Fixons l'indemnité due au sieur François à la somme de 60 fr. par chaque are tant pour le terrain porté sous le n° 97 du plan à 16 ares 60 centiares que pour le terrain dont l'étendue n'est pas déterminée, mais qui cependant est inférieure à 10 ares, et se trouve entre le chemin projeté et le chemin actuel, et sera en dehors de la propriété par

l'exécution dudit chemin. »

Sur le pourvoi dirigé contre cette décision pour violation de l'art. 38 de la loi du 3 mai 1841,

Du 29 AOUT 1843, arrêt C. cass., ch. civ., MM. Portalis 1er prés., Fabvier rapp., Pascalis av. gén. (concl. conf.).

« LA COUR; Vu l'art. 38 de la loi du 3 mai 1841 : « La décision du jury fixe le mon»tant de l'indemnité. »; Attendu que l'esprit comme le texte de la loi veut que cetle fixation soit certaine et définitive; que, si le montant de l'indemnité peut résulter suffisamment d'un chiffre monétaire multiplié par une deux bases soient également déterminées, et mesure de terrain, il faut du moins que ces

notamment que la contenance du terrain soit hors de toute incertitude;

El attendu que la décision attaquée porte le chiffre de 60 fr. d'indemnité par chaque are d'un terrain dont l'étendue n'est pas déterminée, mais qui cependant est inférieure à 10 ares: que cette déclaration laisse le montant de l'indemnité dans un état d'incertitude, et la subordonne à des calculs ultérieurs inconciliables avec le vœu de la loi ; d'où il suit que ladite décision contient une violation de l'art. 38 précité ; ·

CASSE. »

COUR ROYALE DE PARIS. (29 août 1843.) L'autorité de la chose jugée n'a lieu qu'au tant que la chose demandée est la même que celle sur laquelle est intervenue la décision judiciaire. En conséquence celle exception ne peut pas être opposée à la demande en restitution de sommes indument reçues dans un ordre, quand le debat objet de la nouvelle action ne s'est élevé ni lors du jugement, ni lors du règlement définitif C. civ. 1351. Quand un nolaire a payé de ses deniers personnels, non à litre d'avances, mais en l'acquit du débiteur, et sans se fuire subroger aux droits du créancier son client, les intérêts d'une obligation hypothécaire, la delle se trouve éleinte au regard des autres créanciers, en lelle sorte qu'ils peuvent, si ledil créancier a louché ces mêmes intérêts dans un ordre ultérieurement ouvert sur le dé

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C. DUBRENA ET VEUVE CAUMARTIN.

Le 29 nov. 1838 les sieurs Dubrena et Thie bault prêtèrent conjointement et par acte notarié une somme de 40,000 fr. au sieur Chauvet, avec affectation hypothécaire d'une maison, rue Pigale, no 21. Cet immeuble fut saisi et vendu en 1840 sur les poursuites d'un créancier de Chauvet.

Un ordre ayant été ouvert sur le prix, la dame Caumartin, qui avait vendu la maison à Chauvet, fut colloquée pour la somme de 80,000 fr, à elle restée due sur son prix, avec intérêts à compter du 18 mai 1838.

Les fonds manquèrent sur Dubrena et Thiebault, qui ne touchèrent qu'une partie de leur créance.

Cependant ces créanciers, ayant appris que dans un acte de liquidation passé avec ses enfants la dame Caumartin avait reconnu avoir touché avant la distribution du prix les intérêts de sa créance jusqu'au 18 mai 1839, en conclurent qu'elle avait été colloquée à tort pour ces intérêts à partir du 18 mai 1839, et qu'elle avait ainsi reçu deux fois la somme de 4,000 fr., montant d'une année d'intérêts.

La dame Caumartin répondit qu'ayant touché précédemment ces 4,000 fr. dans l'étude de Me Jamin, notaire, des deniers personnels de celui-ci, elle avait cru devoir lui remettre pareille somme de 4,000 fr. qui lui avait été attribuée dans l'ordre.

En conséquence assignation fut donnée à la dame Caumartin par Dubrena et Thiébault en restitution des 4,000 fr.

De son côté, la dame Caumartin appela en garantie Me Jamin.

Du 20 janv. 1843, jugement du tribunal civil de la Seine qui statue en ces termes sur la

contestation :

Le tribunal; mande principale:

En ce qui touche la de

Attendu qu'il est avoué et constant que dès le 1er fév. 1840 la veuve Caumartin a touché du notaire Jamin les 4,000 fr. d'intérêts d'une année échue le 18 mai 1839, résultant d'un acte notarié souscrit à son profit par Chauvet ;

>> Attendu que les documents de la cause, notamment les livres de Jamin, constatent que ledit paiement a été fait par lui pour Chauvet, avec lequel il était en compte courant ;

Que la veuve Caumartin n'a consenti aucune subrogation au profit de Jamin ; qu'ainsi

(1) V. anal. Amiens, 8 avril 1840. La décision actuelle est un avertis sement salutaire donné aux officiers ministériels, et doit les détourner de faire d'imprudentes avances dont ils ont plus tard à supporter personnellement les risques.

le paiement a eu lieu dans les termes de l'ar 1236 C. civ.; que Jamin, en acquittant dette de Chauvet, a pleinement libéré ceint s'est trouvé créancier de Chauvet de pare des 4,000 fr. envers la dame Caumartin, somme; que vainement Jamin soutient point avoir opéré le paiement desdits inters mais avoir fait une avance personnelle. 4,000 fr. à la veuve Caumartin; que l'a' tion de Jamin est repoussée par la liquid notariée du 3 juin 1840, dans laquel veuve Caumartin reconnait avoir touch dits intérêts de l'année échue le 18 mar qu'elle est encore positivement démentie za les livres de Jamin, puisque, d'une pari est expressément mentionné qu'à la dole, 1er fév. 1840 il a été payé à la vene (. martin 8,000 fr. pour deux années d'in', de son obligation échues le 18 mai 182, que, d'autre part, le même registre menu que ledit Jamin a reçu lesdits 8,09 ft. Chauvet :

» Que, dès lors, il est vrai de dire que, s que le paiement ait eu lieu par Jamin av deniers de Chauvet, soit avec les siens 20 pres, par suite du compte courant enst entre lui et Chauvet, la dette s'est tros éteinte, le paiement ayant été fait purem et simplement et sans subrogation; da.. conséquence que la veuve Caumartin s pius droit à se faire colloquer à la date de « inscription pour raison de l'année d'inca susénoncée;

» Attendu néanmoins qu'en exécution d ordre clos définitivement sur Chauvet, la v ve Caumartin a été colloquée et a touch 4,000 fr. pour l'année d'intérêts échue le mai 1839; qu'il est donc manifeste qu'e reçu au delà de ce qui lui était dû kigor ment;

» Attendu qu'il y a lieu à répétition de “ qui a été indûment payé, ce qui justifie ș-nement l'action des demandeurs :

» Allendu que vainement on soutient eaction irrecevable sous le prétexte qu?! chose jugée, et par le jugement du 20 1841, el par le règlement définitif; qu'en es fet, pour qu'il y ait chose jugée, il fa cessairement que la chose demandée même que celle sur laquelle est intervers décision judiciaire; qu'il est incontestable “la restitution des intérêts comme indûment çus ne s'est point élevée, et que ni le ment ni le règlement n'ont eu à s'occuper ↳ ce débat ;

En ce qui touche la demande en garandr » Attendu qu'il n'est point méconnu ex ? veuve Caumartin a versé à Jamin les 4,99 qui lui ont été attribués par l'ordre;

» Que, si elle a eu tort de produire et ✨ € faire colloquer pour cette somme, qui était pas due, il est sensible qu'elle agissaila dans l'intérêt de Jamin, afin de lui Gars tenir, sous le nom de ladite dame et i h veur de son inscription, un rang hypotherz auquel Jamin n'avait nul droit; qu'il este dent que cet acte de complaisance des nuisible aux créanciers sur lesquels le manquaient; mais qu'ayant eu lieu dans! térêt de Jamin, celui-ci doit en sabir les en

quences, conséquences dont il ne saurait se aindre, puisque c'est volontairement qu'il a it le paiement desdits intérêts, soit avec les nds reçus de Chauvet, soit avec ses propres eniers, en raison du compte ouvert avec bauvet, mais sans vouloir laisser la dette tister au regard ni de Chauvet ni des créaners de ce dernier, puisqu'il n'a sollicité ni tenu la subrogation nécessaire à la conserstion de l'obligation, et que par là il a mafesté l'intention d'agir comme negotiorum stor, sauf à compter avec Chauvet ;

» Sans s'arrêter aux fins et conclusions de la uve Caumartin et dont ils sont déboutés, ndamne la veuve Caumartin payer et reituer à la veuve Dubrena, à Lassis et à Thiéjult, la somme de 4,000 fr. pour les causes Isénoncées, à savoir: 3,000 fr. à la veuve ubrena et à Lassis, et 4,000 fr. à Thiébault, ce avec les intérêts du 13 avril dernier, jour è la réception des 4,000 fr. par ladite dame, squ'au paiement intégral; condamne Jamin garantir et indemniser la veuve Caumartin es condamnations contre elle prononcées..... Appel par Jamin.

1 re DU 29 AOUT 1843, arrêt C. roy. Paris, 1., MM. Moreau prés., Glandaz av. gén. ncl. conf.), Liouville, Desboudet et Da, av. a LA COUR ; En ce qui touche l'excepon de chose jugée : Considérant que le fait du paiement des itérêts dont s'agit n'a pas été l'objet de conestation dans le jugement d'ordre;

Au fond: - Considérant que, s'i, est étali que Jamin a payé à la veuve Caumartin, le ses deniers personnels, la somme de 4,000 r. pour les intérêts, courus de 1838 à 1839, de a somme de 80,000 fr. à elle due par Chauet, il résulte des livres et pièces produits qu'il a fait ce paiement. non à titre d'avance, mais en l'acquit du débiteur Chauvet, et sans se faire subroger aux droits de ladite veuve Caumartin; -CONFIRME. »

COUR ROYALE D'ORLÉANS.

(29 août 1843.)

Celui qui est créancier par titre non conleslé d'une somme fixe el déterminée porlant intérêts ne peut, en comprenant sa créance dans un comple non arrêté auquel elle est totalement étrangère, échapper à la prescription de cinq ans établie par l'art. 2277 C. civ.

CAILLARD C. LADUREAU.

MM. Caillard et Lebrun, tous deux entrepreneurs de travaux publics, s'étaient associés pour la confection de certaines portions de routes départementales.

Par suite de cette association, et des entreprises auxquelles ils se livraient personnellement chacun de leur côté, ils ont eu à se faire respectivement raison des avances qu'ils effectuaient et des sommes qu'ils recevaient soit

pour le compte de la société, soit pour leur compte personnel.

Deux de ces comptes ont été réglés le 6 germ. an XIII et le 8 mars 1808, et il est à remar quer qu'il n'y figure aucun intérêt de part ni d'autre.

Le 31 décembre de la même année 1808, M. Caillard a adressé à M. Lebrun un troisième’ compte composé, d'un côté, de la somme de 10,000 fr. qu'il lui avait prêtée particulièrement et en dehors de leur association, suivant deux reconnaissances sous seing privé, avec les intérêts alors échus de ladite somme de 10,000 fr., et, de l'autre, des sommes qu'il devait personnellement à M. Lebrun, soit par suite de leur association, soit par suite d'opérations particulières, avec les intérêts courus aussi jusqu'au 31 déc. 1808, quoique ces sommes ne fussent pas susceptibles d'en produire, et dont la balance en sa faveur s'élevait à 7,800 fr.

Le 29 janv. 1809, M. Lebrun a accusé réception de ce compte, qu'il a promis d'examiner, et, pour se libérer des 10,000 fr. qu'il devait à M. Caillard, il lui a en même temps envoyé diverses ordonnances délivrées à son profit et montant à 10,079 fr. 66 c., en l'engageant à passer dans leurs comptes les 79 fr. 66 c. qu'il se trouvait recevoir en plus, en ayant toutefois égard aux intérêts de ladite somme de 10,000 fr.

Les choses étaient en cet état lorsque, le 8 déc. 1838, M. Caillard a formé contre madame Ladureau, en sa qualité de fille et d'héritière de M. Lebrun, une demande en condamnation de la somme de 7,800 fr., montant du solde du compte du 31 déc. 1808, et, en outre, des intérêts courus depuis cette époque.

Après avoir opposé la prescription, et succombé sur cette exception, qui a été repoussée par un arrêt de la Cour d'Orléans du 24 janv. 1840, lequel a considéré l'accusé de réception de M. Lebrun et diverses déclarations faites dans l'inventaire qui a eu lieu après son décès comme interruptives de la prescription, madame Ladureau a soutenu qu'il y avait dans ce compte une somme d'intérêts qui, déduite du capital de 10,000 fr., réduisait ce capital à 7,784 fr. 48 c.; qu'elle ne devait donc que ce capital, sauf certaines autres déductions qu'elle avait encore à opposer; et que, quant aux intérêts, ils étaient prescrits aux termes de l'art. 2277 C. civ., qui ne permet de réclamer que les cinq années échues antérieurement à la demande.

Du 18 fév. 1843, jugement du tribunal d'Orléans, qui statue en ces termes :

• Considérant que le chiffre en principal des réclamations de Caillard reste définitivement fixé à la somme de 7,800 fr. ;

» En ce qui concerne les intérêts réclamés par Caillard:

» Considérant que c'est à tort que Caillard prétend avoir le droit de réclamer trente et quelques années d'intérêts, et qu'il y a lieu à cet égard de faire droit au moyen de prescription invoqué par la dame Ladureau ;

Que c'est en vain que Caillard prétend qu'il y avait compte courant entre lui et Lebrun; que les rapports qui existaient entre Caillard et Lebrun n'étaient point des rapports

de négociants; que, dans tous les cas, les rapports d'affaires ayant cessé entre eux depuis plus de trente ans, il n'est pas possible d admettre qu'un compte, par cela seul qu'il n'est pas arrêté, puisse se perpétuer à toujours, et même après la mort de l'une des parties;

Que d'ailleurs Caillard était porteur de reconnaissances portant stipulation d'intérêts en vertu desquelles il pouvait agir, et que, ne l'ayant pas fait, il doit supporter la peine que la loi inflige dans l'art. 2277 au créancier négligent ;

Considérant que d'après ces principes la dame Ladureau ne doit les intérêts des 7,784 fr. 48 c. que pour les cinq années qui ont précédé la demande originaire du 29 déc. 1838, et qu'il y a lieu d'ajouter à la somme totale de 7,784 fr. 48 c. celle de 1,046 fr. 10 c. pour les cinq années d'intérêts jusqu'au jour de la demande, ce qui la constitue au total débitrice de 8,830 fr. 58 c., et ce indépendamment des intérêts courus depuis la demande originaire ;

» Le tribunal, etc..... Appel par Caillard.

Il a soutenu que c'était à tort que le tribunal avait refusé de lui accorder les intérêts échus jusqu'au 31 déc. 1808, date du compte fourni par lui à M. Lebrun, et ensuite ceux courus depuis cette époque.

A l'appui de la première de ces deux propositions il a dit :

Sans doute la prescription de cinq ans prononcée par l'art. 2277 est absolue, n'exige pas la bonne foi, et n'astreint pas le débiteur à affirmer qu'il a payé. Saivant le langage de tous les jurisconsultes, cette prescription est une peine contre le créancier négligent pour n'avoir pas demandé en temps utile.

Mais aussi, lorsqu'il a demandé ces intérêts, lorsque son débiteur lui-même reconnaît qu'il les a demandés, la peine cesse d'être juste, et il y a dès lors une véritable aberration à le repousser par la prescription. Or qu'on lise le compte présenté par M. Caillard, et dont M. Lebrun lui a accusé réception le 20 janv. 1809, on trouvera que dans ce compte il a porté les intérêts jusqu'au 31 déc. 1808; donc il les a demandés. Bien plus, il est souverainement jugé entre les parties par l'arrêt du 24 janv. 1840 qu'en accusant, par sa lettre du 20 janv. 1809, réception du compte du 31 décembre précédent, et, en promettant de s'en occuper, Lebrun avait formellement reconnu qu'il y avait un compte à régler entre lui et Caillard, et s'était ainsi engagé à payer sinon une somme déterminée, au moins celle qui serait due par lui, si aucune il y avait. Donc M. Caillard a évidemment le droit de demander les intérêts dont il s'agit, et le tribunal n'a pu les lui refuser sans violer Part. 2248 C. civ., qui porte que la prescription est interrompue par la reconnaissance, faite par le débiteur, du droit de celui contre qui il prescrivait, et sans méconnaître en même temps l'autorité de la chose jugée résultant de l'arrêt précité.

Pour justifier la seconde proposition il a dit: Le tribunal d'Orléans a rejeté les intérêts courus depuis le 31 déc. 1808 pour deux motifs :

1° MM. Caillard et Lebrun n'étaient pas en compte courant parce que les rapports ont existé entre eux n'étaient point des rap ports de négociants;

. 20 Muni de reconnaissances portant int rêts, M. Caillard pouvait agir en vertu de c reconnaissances, et ne l'a point fait,

Voyons donc si ces deux motifs sont fonde Il n'y avait pas, dit-on, de compte caturat parce que les rapports qui ont existé entre e n'étaient point des rapports de négociants.

Il est difficile de croire que les premier juges aient lu avec l'attention convenable traités intervenus entre MM. Caillard et L brun. Si, en effet, ils les avaient bien esamnés, comment n'auraient-ils pas reconnu qu M. Lebrun faisait sa profession habituelle d'e trepreneur de travaux publics, tels que o structions, réparations et entretiens de re tes, ponts et levées; que c'était aussi la p fession de M. Caillard, et que ces deux entrepreneurs, avaient reciproquement sous-tra.. des travaux.

Or jamais, sous la jurisprudence antériers au Code de commerce, par laquelle la came doit être régie, il ne s'est élevé de doute sara question de savoir si une entreprise de tre vaux de routes ou autres semblables étaient des actes de commerce, parce que, ceas font ces entreprises ne pouvant les exéctr qu'au moyen de matériaux qu'ils achètest, qu'ils mettent ou font mettre en œuvre, e qu'ils revendent à l'état en vue d'y faire bénéfice, il ne pouvait y avoir la moindre incertitude.

Bien plus, on soutient qu'il peut exister un compte courant entre deux personnes dont aucune n'est commerçante.

Sans doute le plus souvent c'est entre commerçants que s'ouvrent et se forment les comp tes courants, parce qu'ils sont un élément dobituel de leurs négociations, et voilà pou quoi il n'est presque jamais traité de cett matière que dans des ouvrages relatifs au dret commercial. Mais prétendre qu'il ne peat ! avoir compte courant entre deux non-comme çants est une de ces erreurs dont l'éviden frappe les yeux les moins clairvoyants.

Qu'est-ce qu'être en compte courant? Cel être avec une autre personne dans une sit tion réciproque d'avances et de rembourse ments, par suite desquels, suivant que l'ana plus reçu de l'autre et lui a moins rendu, i s'établit une variation successive de position, de dettes pour l'un, de créances pour Fautre.

Et pourquoi cet état de choses ne pourrait il exister entre deux non-commerçants? [n propriétaire est souvent fixé dans la capitale cu dans une grande ville éloignée du siége de sa fortune; il a dans ce lieu un correspondant, notaire, régisseur, mandataire quelconque. ce correspondant reçoit les revenus et envo des fonds à son commettant. Si les besoins de celui-ci sont, ce qui arrive souvent, au des sus des sommes que le mandataire a entre les mains, il lui demande des avances. D'autre fois les besoins de la culture, des travaux et traordinaires, mettent le commettant dans la nécessité de faire des envois de fonds à son mandataire, et de tout cela il résulte par la

force des choses un état de compte courant.

Si par un purisme puéril on voulait réserver la qualification de compte courant pour les commerçants, il faudrait inventer un autre mot pour les non-commerçants; et cette dénomination, quelle qu'elle fût, exprimerait une situation identique.

Quant à la question de savoir si, dans un compte courant entre deux non-commerçants, les sommes avancées par l'un donnent le droit, sans stipulation, de demander les intérêts à Tautre, elle est résolue par l'art. 2001 C. civ., qui porte que les intérêts des avances faites par le mandataire Ini sont dus par le mandant dater du jour des avances constatées.

En fait, il résulte des comptes réglés entre MM. Caillard et Lebrun les 6 germ. an XIII et 8 mars 1808 qu'ils étaient en compte cou

rant.

E droit, on vient de démontrer qu'ils élaient commerçants, et qu'en tout cas un compte courant pouvait exister entre deux noncommerçants.

Donc c'est doublement à tort que les premiers juges ont rejeté les intérêts réclamés par M. Caillard.

Porteur de reconnaissances productives d'intérêts, dit encore le tribunal, M. Caillard pouvait agir en vertu de ces reconnaissances, et, s'il n'a pas demandé les intérêts, il doit l'imputer à sa négligence et en subir la peine. Sans doute un homme peut être créancier d'un autre en vertu de reconnaissances, et, dans cette situation, s'il ne demande pas le paiement de chacune de ces reconnaissances moins de trente ans à compter de leurs dates, la créance est prescrite, et, lors même que les trente ans n'ont pas encore éteint le capital, la prescription de cinq années éteindra successivement les intérêts.

Mais lorsque, en vertu de la liberté des transactions garantie à tous les citoyens, des personnes, au fur et à mesure que l'occasion s'en présentait ou qu'elles en sentaient le besoin, se sont mises en état de compte pour des avances ou des fournitures réciproques, lorsqu'elles ont eu l'habitude de s'envoyer et de régler ces comptes à certaines époques; lors que, dans cette situation, le dernier de ces comptes a été fourni par l'une à l'autre, qui en a accusé réception et a promis de l'examiner, celle qui a présenté le compte a perdu le droit d'agir directement en vertu des reconnaissances qui constataient les avances placées par elle au chapitre de son crédit. Ces reconnaissances ne sont plus que des pièces justificatives, importantes et utiles sans doute, mais qui ne peuvent plus être employées pour former des actions principales, car ces actions seraient un double emploi avec l'action en règlement.

En un mot, a-t-il ajouté en terminant et en s'appuyant de deux arrêts de la Cour de cassation des 30 avril 1835 (1) et 12 déc. 1838 (2), pour qu'il soit dû des intérêts, il faut qu'il y ait un capital. Donc, tant que le capital n'est pas fixé, et dans l'espèce il ne l'est pas, puisque le

(1) Héritiers Spitalier C. Héritiers de Bain. (2) Duquesne C. Delattre.

compte du 31 déc. 1808 n'est pas encore rê glé, on ne peut réclamer d'intérêts, et, par suite, on ne peut invoquer la prescription contre le créancier, car, dans ce cas, il n'est coupable d'aucune négligence.

En présence de l'arrêt de la Cour d'Orléans du 24 janv. 1840, qui a rejeté le moyen de prescription invoqué par la dame Lebrun, celle-ci a reconnu qu'elle ne pouvait, sans revenir sur l'autorité de la chose jugée, se refuser au paiement des intérêts échus jusqu'au 31 déc. 1808 et compris dans le compte de ce même jour.

Elle a également reconnu qu'elle devait les cinq années échues antérieurement à la demande de M. Caillard du 8 déc. 1838.

Quant à ceux intermédiaires, elle a soutenu que c'était avec juste raison qu'ils avaient été rejetés par les premiers juges :

En premier lieu, parce qu'il résultait des comples présentés par M. Caillard lui-même en l'an XIII et en 1808 qu'il n'avait jamais entendu être en compte courant avec M. Lebrun, puisque, contre l'usage ordinaire des négociants, il n'y avait fait figurer aucuns intérêts de part ni d'autre, et que, si dans le comple du 31 déc. 1808 il a fait produire des intérêts aux sommes dues par lui à M. Lebrun, quoiqu'il n'existat aucune convention à cet égard, c'est uniquement pour s'éviter de faire le décompte des intérêts de la somme de 10,000 fr. au fur et à mesure des paiements qui lui avaient été faits par M. Lebrun, ou des sommes qu'il avait reçues pour lui, en sorte que, par ce moyen, ces intérêts se sont compensés tout naturellement;

En second lieu, parce qu'en supposant que MM. Caillard et Lebrun fussent en compte courant à raison de leur association et de leurs entreprises personnelles, le prêt de 10,000 fr. étant tout à fait étranger à ces opérations, rien ne s'opposait à ce qu'il réclamât son paiement sans attendre le règlement de leurs comptes.

Elle a fait observer à cette occasion que, s'il était de jurisprudence que la prescription de cinq ans ne court pas contre celui qui est créancier d'un capital dont le montant ne peut être connu que par le résultat d'un compte, c'est par la raison qu'étant placé par cette circonstance dans l'impossibilité d'en réclamer les intérêts, on ne pouvait lui imputer aucune négligence, mais qu'il était évident que ce principe n'est nullement applica ble à celui qui est créancier en vertu d'un titre non contesté d'une somme fixe et déterminée, puisque, rien ne s'opposant dans ce cas à ce qu'il demande son paiement et actionne son débiteur en justice s'il refuse de satisfaire à ses engagements, il se rend coupable de négligence; s'il ne le fait pas, il mérite alors qu'on lui oppose une prescription, qui est la peine d'un créancier négligent;

Et enfin qu'il ne pouvait être permis à un créancier d'échapper à cette peine en comprenant des créances fondées en titre dans un compte totalement étranger à ces créances, attendu que par ce moyen il serait aussi facile que commode d'éluder les dispositions de l'art.

2277 C. civ.

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